Les Aventures de Mic Mac Adam sont un des rares classiques de la BD franco-belge des années 1980 que je n'avais pas lus. L'occasion s'est présentée un peu par hasard, en tombant sur le cinquième tome (Les 5 Miroirs) dans une librairie d'occasion, et j'ai pu constater que c'était un album d'excellente facture. Le dessin de Benn y est particulièrement soigné, détaillé et efficace aussi bien dans les ambiances brumeuses du Royaume-Uni que dans les décors plus exotiques. Son trait m'a rappelé celui de Wasterlain, ce qui n'a rien d'étonnant quand on sait qu'ils ont tous deux travaillé au sein du Studio Peyo.
Le récit, quant à lui, adopte un ton relativement mature : on y trouve une dose de fantastique, des antagonistes sans scrupules, et de vrais meurtres. On reconnaît bien là certaines marques du scénario de Desberg, comme dans ses autres séries de l'époque (Tif et Tondu, 421...). Cela dit, l'intrigue n'est pas exempte de facilités ni d'incohérences (on peut notamment s'interroger sur l'attitude des méchants, qui attendent le réveil de Mac Adam pour s'en débarrasser alors qu'ils l'avaient sous la main toute la nuit... Et pourquoi toute cette machination alors que le but recherché était nettement plus simple à atteindre ?). L'histoire souffre également de quelques déséquilibres rythmiques, visibles notamment dans cette seconde partie qui semble un peu plaquée sur la première. Malgré tout, j'ai trouvé l'album suffisamment enthousiasmant pour partir aussitôt à la recherche de l'intégrale.
Et c'est là que j'ai compris que Les 5 Miroirs était, en réalité, l'album le plus abouti de la série.
Les autres tomes restent sympathiques, mais ils sont moins convaincants. Les débuts de la série prennent la forme d'histoires courtes où l'on suit Mic Mac Adam, Écossais arborant fièrement le kilt, plongé dans des enquêtes teintées de surnaturel. On ne sait jamais trop pourquoi il est chargé de ces affaires ni comment il se retrouve à collaborer d'aussi près avec la police, mais on accepte facilement cette part d'ellipse. Certaines histoires restent assez réalistes avec juste une touche de fantastique, d'autres versent carrément dans l'horreur satanique. Pour ma part, j'ai préféré les récits les plus ancrés dans le réel : ceux plus fantastiques tombent parfois dans la facilité ou les clichés.
La série se déroule pour la plupart dans une Angleterre brumeuse, avec ses ruelles humides et ses vieux quartiers londoniens : une atmosphère très réussie, particulièrement bien rendue par le trait de Benn. Ce dernier évolue d'ailleurs de manière visible au fil des tomes : dans les premiers, le dessin est plus caricatural, le personnage de Mic Mac Adam lui-même a un style plus enfantin avec son gros nez typique de la ligne claire franco-belge. Mais il gagne en maturité au fil des albums, tout comme les décors, qui deviennent plus fouillés, plus évocateurs, passant des marais et châteaux stéréotypés à des paysages bien plus immersifs et crédibles.
Malgré toutes ces qualités, certains éléments m'ont empêché d'adhérer pleinement. D'abord, Mic Mac Adam lui-même : je ne l'ai jamais trouvé attachant. Son comportement est parfois agaçant, et il reste assez distant, ce qui empêche l'identification. Ensuite, le rythme narratif pose régulièrement problème. Dans les histoires courtes, tout semble précipité, avec des ellipses abruptes et des résolutions trop rapides. À l'inverse, dans les albums complets, les intrigues donnent parfois l'impression d'être étirées artificiellement pour remplir les 48 pages réglementaires, sans réel crescendo dramatique.
Au final, c'est une série qui regorge d'idées, d'ambiances réussies, d'un dessin qui progresse nettement, et de récits qui ont du charme. Mais le personnage principal et les soucis de rythme m'ont laissé à distance. Cela reste une lecture agréable, ponctuée de très bons moments, mais un peu inégale et pas aussi marquante que je l'espérais.
Mouais. Je suis sorti avec un avis très mitigé de cette lecture, pas vraiment désagréable, mais qui force quand même le lecteur à avaler quelques couleuvres.
Le récit est dynamique, c’est rythmé, on ne s’ennuie pas. Autre point intéressant, les quelques présentations d’ancêtres d’animaux préhistoriques. Le point le plus intéressant dans cet album est surtout la mise en avant – très contemporaine hélas ! – de l’intolérance face à ce qui est considéré comme une menace invasive, le rôle des « réseaux sociaux » dans l’exacerbation des tensions et la mise en avant des idées les plus primaires.
Si le roman ici adapté (que je ne connais pas) a été publié avant le covid, cet album, écrit lui après a sans doute joué davantage sur ce que nous avons connu ces dernières années. Mais après tout il peut aussi y avoir des résonances avec d’autres « virus » : voir le rejet des premiers malades du SIDA – et des homosexuels en particulier dans les années 1980…
Mais cela dit, plusieurs choses m’ont dérangé dans cette histoire, par leur manque de crédibilité, ou du fait d’incohérences.
Le virus – transmis par un animal et échappé d’un laboratoire, comme on l’a supposé de celui du covid – entraine ici une régression génétique et se transmet d’espèces à espèces (hommes y compris). L’animal ou l’homme contaminé « mute » quasiment instantanément. Bizarrement, certaines espèces animales régressent sur des centaines de milliers, voire des millions d’années, tandis que pour l’homme c’est beaucoup moins (l’homme contaminé devient un Homo Erectus). Pourquoi cette différence ? Pourquoi la régression s’arrête-t-elle à une époque précise ? Mais surtout, on est très loin ici des travaux de gens comme Evelyne Heyer, et j’ai eu du mal à accepter cette mutation génétique instantanée, et non sur des milliers d’années sur plusieurs générations…
Autre problème, les animaux sont rapidement « oubliés », pour se concentrer sur les Erectus. Mais du coup la solution trouvée (je ne spoile pas) laisse totalement de côté les animaux qui, par milliards sur la Terre pourraient constituer une menace pérenne (on nous parle d’éliminer les rats, mais après le sujet est effacé).
Les atermoiements et changements d’information sur la stérilité ou non des « infectés » ayant muté manque de cohérence (en ce sens je n’ai pas saisi la chute – ouverte, mais qui contredit une partie du déroulement de l’intrigue).
L’attaque du musée de l’homme, puis son abandon est improbable (pourquoi s’arrêter sans avoir atteint l’objectif ?). comme sont improbables les faibles précautions prises par les scientifiques, voire les soldats de garde face aux éventuelles morsures contaminantes des Erectus ou autres animaux (j’ai un temps pensé à l’album « Le Schtroumpf noir » !)
Enfin, Anna Meunier, la scientifique héroïne est vraiment too much dans ce rôle, placée au centre de tout ce qui se passe sur la planète, bombasse jamais décoiffée, devenant aventurière intrépide déjouant les forces spéciales, arrivant miraculeusement à se faire comprendre des erectus (d’ailleurs l’un d’entre eux s’adapte lui aussi très bien, puisqu’il utilise un Talkie-Walkie pour tendre un piège à un militaire !). Les élans amoureux d’Anna Meunier sont aussi parfois risibles.
Le dessin est classique – il fait un peu plus que son âge – et fluide. Par contre sur certaines pages, le grand nombre de cases fait un peu regretter un format intermédiaire : du 240 x320 mm aurait sans doute été plus adapté (du coup le format aussi fait années 1980/1990…).
Bref, de l’aventure jouant sur des questionnements contemporains, mais qui le fait parfois de façon trop facile ou lourdingue. Ça se laisse lire, mais j’en suis sorti déçu.
Note réelle 2,5/5.
Pierre Christin était à l'aise dans les utopies, les récits d'anticipation qui sont simplement dérivés des tendances actuelles. Au milieu des années 1970 il a livré dans le journal Pilote des dizaines de récits de ce genre. Cette fois-ci, avec l'aide de Patrick Lesueur, il a écrit cinq récits (qu'il signait Linus à l'époque) qui dépeignent un futur sans aucune végétation, ou presque, où les milliardaires ont étouffé toute culture, où les dirigeants sont déchus de leurs états... Un futur noir, mais raconté avec humour et cynisme. Il y a peu de personnages "fil rouge" dans ces récits, ce sont plutôt des tableaux d'une situation à un moment donné. Si les idées sont bonnes, le format court ne permet pas de bien développer les idées. Christin y réussissait mieux dans ses récits complets.
Le dessinateur était Patrick Lesueur, dont le style se rapprochait un peu de celui de Bilal, mais avec une mise en couleurs qui fait saigner des yeux à présent. Il y a cependant de la recherche dans ses "gueules", ses décors, ses designs de vaisseaux spatiaux.
Au final, des récits qui raviront peut-être les inconditionnels de Christin ou d'anticipation, mais qui manquent d'épaisseur.
2.5
Une jeune fille vit dans son monde imaginaire et les gens autour d'elle ne la comprennent pas. C'est un postulat que j'ai vu une bonne centaine de fois et c'est le principal problème de cet album.
Si vous avez déjà lu ou vu une histoire avec un enfant qui ne comprend pas toujours le monde des grands et qui a beaucoup d'imagination, je pense que vous aurez une bonne idée du contenu de l'album. C'est pas franchement mauvais, mais le scénario est trop fade pour être passionnant et j'ai eu un peu de difficulté à trouver l'héroïne attachante. Un truc qui m'a frappé est que cela se passe dans le Québec des années 50, mais en enlevant juste un ou deux détails le récit aurait pu se passer n'importe où en occident dans n'importe quelle décennie entre la fin de la seconde guerre mondiale et l'arrivée massive de la technologie genre l'internet.
Le point fort est le dessin enfantin qui va très bien pour ce type de récit qui montre le monde au travers les yeux d'un enfant.
Avec cet album, Matthieu Chiara a le mérite de surprendre ceux qui connaissent ses autres productions, mais aussi de présenter quelque chose de relativement original.
Certes, rien d’extraordinaire ou de très développé (format oblige), et quelque chose d’un peu déconcertant. Mais les rebondissements dans les deux dernières pages donnent du coffre à ce petit récit qui sort des sentiers battus, qui traine une certaine nonchalance, pour finir relativement brutalement.
A découvrir à l’occasion.
Fanny Vella parvient assez bien à s’accommoder des contraintes importantes du support (très petit format, faible pagination), pour développer un petit récit intéressant. Certes pas très dense, mais qui finit par faire réfléchir, avec la chute – attendue il est vrai – autour de ce que peut ressentir un gamin lorsqu’il est trimbalé par ses parents et vécu ou présenté comme une contrainte.
Rien d’extraordinaire, mais c’est le type de récit qui convient à ce genre de collection (comme les Patte de Mouche aussi).
A découvrir à l’occasion.
Bouzard aime la musique, Rouquemoute aime le rock et Bouzard (qui a d'ailleurs déjà publié plusieurs albums chez eux – dont un dans la même collection), et j’aime a priori beaucoup Bouzard. Voilà donc une rencontre attendue.
Mais qui hélas m’a laissé sur ma faim. En effet, si la chute, pleine de loufoquerie, permet de finir sur une note amusante, le reste est assez creux. Certes, peu de place ici pour développer ambiance et personnages. Mais Bouzard a fait le service minimum je trouve. Je l’ai connu – et je l’attendais plus mordant dans son humour décalé.
A réserver aux complétistes de l’auteur je pense.
Note réelle 2,5/5.
Je serai plus enthousiaste que mes confrères, en grande partie parce que le sujet me fascine : l'exercice du pouvoir au quotidien.
Une suite ininterrompue de corvées protocolaires qui n'ont rien à voir avec les ambitions politiques affichées lors des campagnes électorales. La place de président est finalement plus proche de celle de la reine d’Angleterre, qui incarne la continuité de l’État mais ne se mêle pas de construire une politique cohérente. C'est à la fois frustrant est rassurant. Si la constitution était respectée ce serait bien le premier ministre qui se chargerait de la mise en oeuvre de la politique. Mais pourtant ce n'est pas le premier ministre qui est élu...c'est là le Hic.
Bref cette BD montre une sorte de vanité du pouvoir, très coûteuse en ressources humaines, et proche de la cour de récré. Mais c'est dans les détails que la spécificité française apparait et je ne vous les dévoilerai pas parce que cela enlèverait tout le sel de la lecture. C'est très roboratif, beaucoup de dialogues, beaucoup de détails à observer... J'ai été absorbée plusieurs heures sans lâcher l'album. La mise en scène , habituelle chez Sapin, où il se représente dans un coin avec les pensées qui le traversent sur le moment, nous rendent la chose proche, mais pas pour autant désirable. C'est pour ça que certains trouvent cela froid. En effet dans ce monde politico-médiatique il est difficile de se lier vraiment, cela pourrait vous être reproché. Chacun reste autant que possible sur ses gardes en la présence du dessinateur et cela transparait, mais cela peut aussi échapper, sur 6 mois... C'est le jeu.
On ne sait pas finalement si ce livre parle de nos institutions politiques ou s'il observe un périmètre socio-temporel comme un autre : cela m'a fait pensé à "la maison ronde" de Charlie Zanello qui observe Radio-France, mais honnêtement c'est plus intéressant ici , et c'est le savoir-faire de l'auteur qui fait la différence, par son dessin et par sa capacité d'observation, le choix des dialogues, la manière dont les personnages sont campés.
Mais attention ! c'est comme pour Catel et son dispositif documentaire du portrait de personnage féminin, cela a beau être très bien fichu et efficace, au bout de trois fois, on s'en fatigue...
Pour le comparer au Quai d'Orsay de Blain, c'est différent. Blain a ce mouvement du dessin qui fait corps avec les personnages et fictionnalise déjà par le dessin le cours des évènements. Son ministre des affaires étrangère est présenté comme un surdoué virevoltant, et tout le monde doit se comporter en réaction à ses désidérata. Ici Hollande, et tous les personnages représentés sont particulièrement normaux et "au boulot", presque à égalité, si ce n'était les horaires de travail...
Un bon moment pas compliqué !
De très belles couleurs sur un dessin sympathique mettent en scène l'histoire d'une adolescente nord américaine, Almudena qui va passer deux mois de vacances chez son père guatémaltèque, qu'elle n'a jamais rencontré jusque-là, pendant que sa mère, danseuse, fait une tournée.
Ce n'est pas profond, ce n'est pas subtile, mais c'est agréable à regarder, c'est plein de bons sentiments. Son père habite un quartier pauvre, plein de violence mais aussi de liens sociaux variés et interdépendants. Il ne parle pas anglais : le père et la fille passent deux mois à faire des travaux dans la maison et à s'apprivoiser.
Les seconds rôles nous distraient et font avancer la jeune fille vers une meilleure compréhension de sa culture : Parfait cadeau pour un.e pré-ado ! (parents divorcés, ou à la recherche de ses origines culturelles, ou en quête de dépaysement ...)
Juste après avoir relu Cet été-là de Jillian et Mariko Tamaki qui traite un peu du même sujet de l'adolescence qui pointe son nez pendant des vacances en bord de mer, c'est intéressant de lire une sœur, de Bastien Vivès.
L'un présente deux filles qui s'ennuient pendant les vacances et la plus grande commence à s'intéresser aux garçons, c'est long, c'est pleins de détails psycho familiaux, alors que l'autre album présente deux frères tout sages (toujours à dessiner sur la table de la cuisine) qui doivent accueillir pendant une semaine de leurs vacances une très belle adolescente dans leur chambre. Une approche de long bain tiède entre la légèreté et la tristesse d'un coté et de l'autre un court récit d'intrusion de la sexualité dans la vie d'un jeune homme qui n'était pas demandeur.
Chez Vivès, c'est la jeune fille qui se sert un peu du garçon (Antoine) comme d'une doublure, pour essayer et avoir moins peur de "le faire" avec un garçon de son âge. Et ce coup d'essai pour elle est un viol pour lui. N'est-il qu'un objet sexuel ou pas ? Tout ceci est présenté dans une fluidité effrayante, seuls les regards sidérés et enfantins d'Antoine laissent entrevoir une cassure qui n'est pas développée. Tout est très rapide et silencieux. comme d'habitude avec Vivès, les traits économes et les dialogues très justes nous rappellent tellement de situations vécues...
Évidemment cet enfant dessinateur et la subtilité des observations (les paroles du petit frère, celles des grands ados inconscients...) tendent à nous faire penser qu'il s'agit d'une situation réellement vécue par l'auteur... Je comprends que les femmes victimes de viol puissent craindre devant toute cette subtilité que le viol fait par une femme ne puisse effacer celui réalisé par les hommes. Mais cela doit être dit. Aussi.
Et cela semble expliquer en partie la fascination de Vivès pour ces situations de beauté dans la violence.
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Mic Mac Adam
Les Aventures de Mic Mac Adam sont un des rares classiques de la BD franco-belge des années 1980 que je n'avais pas lus. L'occasion s'est présentée un peu par hasard, en tombant sur le cinquième tome (Les 5 Miroirs) dans une librairie d'occasion, et j'ai pu constater que c'était un album d'excellente facture. Le dessin de Benn y est particulièrement soigné, détaillé et efficace aussi bien dans les ambiances brumeuses du Royaume-Uni que dans les décors plus exotiques. Son trait m'a rappelé celui de Wasterlain, ce qui n'a rien d'étonnant quand on sait qu'ils ont tous deux travaillé au sein du Studio Peyo. Le récit, quant à lui, adopte un ton relativement mature : on y trouve une dose de fantastique, des antagonistes sans scrupules, et de vrais meurtres. On reconnaît bien là certaines marques du scénario de Desberg, comme dans ses autres séries de l'époque (Tif et Tondu, 421...). Cela dit, l'intrigue n'est pas exempte de facilités ni d'incohérences (on peut notamment s'interroger sur l'attitude des méchants, qui attendent le réveil de Mac Adam pour s'en débarrasser alors qu'ils l'avaient sous la main toute la nuit... Et pourquoi toute cette machination alors que le but recherché était nettement plus simple à atteindre ?). L'histoire souffre également de quelques déséquilibres rythmiques, visibles notamment dans cette seconde partie qui semble un peu plaquée sur la première. Malgré tout, j'ai trouvé l'album suffisamment enthousiasmant pour partir aussitôt à la recherche de l'intégrale. Et c'est là que j'ai compris que Les 5 Miroirs était, en réalité, l'album le plus abouti de la série. Les autres tomes restent sympathiques, mais ils sont moins convaincants. Les débuts de la série prennent la forme d'histoires courtes où l'on suit Mic Mac Adam, Écossais arborant fièrement le kilt, plongé dans des enquêtes teintées de surnaturel. On ne sait jamais trop pourquoi il est chargé de ces affaires ni comment il se retrouve à collaborer d'aussi près avec la police, mais on accepte facilement cette part d'ellipse. Certaines histoires restent assez réalistes avec juste une touche de fantastique, d'autres versent carrément dans l'horreur satanique. Pour ma part, j'ai préféré les récits les plus ancrés dans le réel : ceux plus fantastiques tombent parfois dans la facilité ou les clichés. La série se déroule pour la plupart dans une Angleterre brumeuse, avec ses ruelles humides et ses vieux quartiers londoniens : une atmosphère très réussie, particulièrement bien rendue par le trait de Benn. Ce dernier évolue d'ailleurs de manière visible au fil des tomes : dans les premiers, le dessin est plus caricatural, le personnage de Mic Mac Adam lui-même a un style plus enfantin avec son gros nez typique de la ligne claire franco-belge. Mais il gagne en maturité au fil des albums, tout comme les décors, qui deviennent plus fouillés, plus évocateurs, passant des marais et châteaux stéréotypés à des paysages bien plus immersifs et crédibles. Malgré toutes ces qualités, certains éléments m'ont empêché d'adhérer pleinement. D'abord, Mic Mac Adam lui-même : je ne l'ai jamais trouvé attachant. Son comportement est parfois agaçant, et il reste assez distant, ce qui empêche l'identification. Ensuite, le rythme narratif pose régulièrement problème. Dans les histoires courtes, tout semble précipité, avec des ellipses abruptes et des résolutions trop rapides. À l'inverse, dans les albums complets, les intrigues donnent parfois l'impression d'être étirées artificiellement pour remplir les 48 pages réglementaires, sans réel crescendo dramatique. Au final, c'est une série qui regorge d'idées, d'ambiances réussies, d'un dessin qui progresse nettement, et de récits qui ont du charme. Mais le personnage principal et les soucis de rythme m'ont laissé à distance. Cela reste une lecture agréable, ponctuée de très bons moments, mais un peu inégale et pas aussi marquante que je l'espérais.
Erectus
Mouais. Je suis sorti avec un avis très mitigé de cette lecture, pas vraiment désagréable, mais qui force quand même le lecteur à avaler quelques couleuvres. Le récit est dynamique, c’est rythmé, on ne s’ennuie pas. Autre point intéressant, les quelques présentations d’ancêtres d’animaux préhistoriques. Le point le plus intéressant dans cet album est surtout la mise en avant – très contemporaine hélas ! – de l’intolérance face à ce qui est considéré comme une menace invasive, le rôle des « réseaux sociaux » dans l’exacerbation des tensions et la mise en avant des idées les plus primaires. Si le roman ici adapté (que je ne connais pas) a été publié avant le covid, cet album, écrit lui après a sans doute joué davantage sur ce que nous avons connu ces dernières années. Mais après tout il peut aussi y avoir des résonances avec d’autres « virus » : voir le rejet des premiers malades du SIDA – et des homosexuels en particulier dans les années 1980… Mais cela dit, plusieurs choses m’ont dérangé dans cette histoire, par leur manque de crédibilité, ou du fait d’incohérences. Le virus – transmis par un animal et échappé d’un laboratoire, comme on l’a supposé de celui du covid – entraine ici une régression génétique et se transmet d’espèces à espèces (hommes y compris). L’animal ou l’homme contaminé « mute » quasiment instantanément. Bizarrement, certaines espèces animales régressent sur des centaines de milliers, voire des millions d’années, tandis que pour l’homme c’est beaucoup moins (l’homme contaminé devient un Homo Erectus). Pourquoi cette différence ? Pourquoi la régression s’arrête-t-elle à une époque précise ? Mais surtout, on est très loin ici des travaux de gens comme Evelyne Heyer, et j’ai eu du mal à accepter cette mutation génétique instantanée, et non sur des milliers d’années sur plusieurs générations… Autre problème, les animaux sont rapidement « oubliés », pour se concentrer sur les Erectus. Mais du coup la solution trouvée (je ne spoile pas) laisse totalement de côté les animaux qui, par milliards sur la Terre pourraient constituer une menace pérenne (on nous parle d’éliminer les rats, mais après le sujet est effacé). Les atermoiements et changements d’information sur la stérilité ou non des « infectés » ayant muté manque de cohérence (en ce sens je n’ai pas saisi la chute – ouverte, mais qui contredit une partie du déroulement de l’intrigue). L’attaque du musée de l’homme, puis son abandon est improbable (pourquoi s’arrêter sans avoir atteint l’objectif ?). comme sont improbables les faibles précautions prises par les scientifiques, voire les soldats de garde face aux éventuelles morsures contaminantes des Erectus ou autres animaux (j’ai un temps pensé à l’album « Le Schtroumpf noir » !) Enfin, Anna Meunier, la scientifique héroïne est vraiment too much dans ce rôle, placée au centre de tout ce qui se passe sur la planète, bombasse jamais décoiffée, devenant aventurière intrépide déjouant les forces spéciales, arrivant miraculeusement à se faire comprendre des erectus (d’ailleurs l’un d’entre eux s’adapte lui aussi très bien, puisqu’il utilise un Talkie-Walkie pour tendre un piège à un militaire !). Les élans amoureux d’Anna Meunier sont aussi parfois risibles. Le dessin est classique – il fait un peu plus que son âge – et fluide. Par contre sur certaines pages, le grand nombre de cases fait un peu regretter un format intermédiaire : du 240 x320 mm aurait sans doute été plus adapté (du coup le format aussi fait années 1980/1990…). Bref, de l’aventure jouant sur des questionnements contemporains, mais qui le fait parfois de façon trop facile ou lourdingue. Ça se laisse lire, mais j’en suis sorti déçu. Note réelle 2,5/5.
En attendant le printemps
Pierre Christin était à l'aise dans les utopies, les récits d'anticipation qui sont simplement dérivés des tendances actuelles. Au milieu des années 1970 il a livré dans le journal Pilote des dizaines de récits de ce genre. Cette fois-ci, avec l'aide de Patrick Lesueur, il a écrit cinq récits (qu'il signait Linus à l'époque) qui dépeignent un futur sans aucune végétation, ou presque, où les milliardaires ont étouffé toute culture, où les dirigeants sont déchus de leurs états... Un futur noir, mais raconté avec humour et cynisme. Il y a peu de personnages "fil rouge" dans ces récits, ce sont plutôt des tableaux d'une situation à un moment donné. Si les idées sont bonnes, le format court ne permet pas de bien développer les idées. Christin y réussissait mieux dans ses récits complets. Le dessinateur était Patrick Lesueur, dont le style se rapprochait un peu de celui de Bilal, mais avec une mise en couleurs qui fait saigner des yeux à présent. Il y a cependant de la recherche dans ses "gueules", ses décors, ses designs de vaisseaux spatiaux. Au final, des récits qui raviront peut-être les inconditionnels de Christin ou d'anticipation, mais qui manquent d'épaisseur.
La Petite Fille qui parlait en dessinant
2.5 Une jeune fille vit dans son monde imaginaire et les gens autour d'elle ne la comprennent pas. C'est un postulat que j'ai vu une bonne centaine de fois et c'est le principal problème de cet album. Si vous avez déjà lu ou vu une histoire avec un enfant qui ne comprend pas toujours le monde des grands et qui a beaucoup d'imagination, je pense que vous aurez une bonne idée du contenu de l'album. C'est pas franchement mauvais, mais le scénario est trop fade pour être passionnant et j'ai eu un peu de difficulté à trouver l'héroïne attachante. Un truc qui m'a frappé est que cela se passe dans le Québec des années 50, mais en enlevant juste un ou deux détails le récit aurait pu se passer n'importe où en occident dans n'importe quelle décennie entre la fin de la seconde guerre mondiale et l'arrivée massive de la technologie genre l'internet. Le point fort est le dessin enfantin qui va très bien pour ce type de récit qui montre le monde au travers les yeux d'un enfant.
Voyage
Avec cet album, Matthieu Chiara a le mérite de surprendre ceux qui connaissent ses autres productions, mais aussi de présenter quelque chose de relativement original. Certes, rien d’extraordinaire ou de très développé (format oblige), et quelque chose d’un peu déconcertant. Mais les rebondissements dans les deux dernières pages donnent du coffre à ce petit récit qui sort des sentiers battus, qui traine une certaine nonchalance, pour finir relativement brutalement. A découvrir à l’occasion.
De trop
Fanny Vella parvient assez bien à s’accommoder des contraintes importantes du support (très petit format, faible pagination), pour développer un petit récit intéressant. Certes pas très dense, mais qui finit par faire réfléchir, avec la chute – attendue il est vrai – autour de ce que peut ressentir un gamin lorsqu’il est trimbalé par ses parents et vécu ou présenté comme une contrainte. Rien d’extraordinaire, mais c’est le type de récit qui convient à ce genre de collection (comme les Patte de Mouche aussi). A découvrir à l’occasion.
Hard Cow
Bouzard aime la musique, Rouquemoute aime le rock et Bouzard (qui a d'ailleurs déjà publié plusieurs albums chez eux – dont un dans la même collection), et j’aime a priori beaucoup Bouzard. Voilà donc une rencontre attendue. Mais qui hélas m’a laissé sur ma faim. En effet, si la chute, pleine de loufoquerie, permet de finir sur une note amusante, le reste est assez creux. Certes, peu de place ici pour développer ambiance et personnages. Mais Bouzard a fait le service minimum je trouve. Je l’ai connu – et je l’attendais plus mordant dans son humour décalé. A réserver aux complétistes de l’auteur je pense. Note réelle 2,5/5.
Le Château - Une année dans les coulisses de l'Elysée
Je serai plus enthousiaste que mes confrères, en grande partie parce que le sujet me fascine : l'exercice du pouvoir au quotidien. Une suite ininterrompue de corvées protocolaires qui n'ont rien à voir avec les ambitions politiques affichées lors des campagnes électorales. La place de président est finalement plus proche de celle de la reine d’Angleterre, qui incarne la continuité de l’État mais ne se mêle pas de construire une politique cohérente. C'est à la fois frustrant est rassurant. Si la constitution était respectée ce serait bien le premier ministre qui se chargerait de la mise en oeuvre de la politique. Mais pourtant ce n'est pas le premier ministre qui est élu...c'est là le Hic. Bref cette BD montre une sorte de vanité du pouvoir, très coûteuse en ressources humaines, et proche de la cour de récré. Mais c'est dans les détails que la spécificité française apparait et je ne vous les dévoilerai pas parce que cela enlèverait tout le sel de la lecture. C'est très roboratif, beaucoup de dialogues, beaucoup de détails à observer... J'ai été absorbée plusieurs heures sans lâcher l'album. La mise en scène , habituelle chez Sapin, où il se représente dans un coin avec les pensées qui le traversent sur le moment, nous rendent la chose proche, mais pas pour autant désirable. C'est pour ça que certains trouvent cela froid. En effet dans ce monde politico-médiatique il est difficile de se lier vraiment, cela pourrait vous être reproché. Chacun reste autant que possible sur ses gardes en la présence du dessinateur et cela transparait, mais cela peut aussi échapper, sur 6 mois... C'est le jeu. On ne sait pas finalement si ce livre parle de nos institutions politiques ou s'il observe un périmètre socio-temporel comme un autre : cela m'a fait pensé à "la maison ronde" de Charlie Zanello qui observe Radio-France, mais honnêtement c'est plus intéressant ici , et c'est le savoir-faire de l'auteur qui fait la différence, par son dessin et par sa capacité d'observation, le choix des dialogues, la manière dont les personnages sont campés. Mais attention ! c'est comme pour Catel et son dispositif documentaire du portrait de personnage féminin, cela a beau être très bien fichu et efficace, au bout de trois fois, on s'en fatigue... Pour le comparer au Quai d'Orsay de Blain, c'est différent. Blain a ce mouvement du dessin qui fait corps avec les personnages et fictionnalise déjà par le dessin le cours des évènements. Son ministre des affaires étrangère est présenté comme un surdoué virevoltant, et tout le monde doit se comporter en réaction à ses désidérata. Ici Hollande, et tous les personnages représentés sont particulièrement normaux et "au boulot", presque à égalité, si ce n'était les horaires de travail...
Almudena - Le Temps d'un été
Un bon moment pas compliqué ! De très belles couleurs sur un dessin sympathique mettent en scène l'histoire d'une adolescente nord américaine, Almudena qui va passer deux mois de vacances chez son père guatémaltèque, qu'elle n'a jamais rencontré jusque-là, pendant que sa mère, danseuse, fait une tournée. Ce n'est pas profond, ce n'est pas subtile, mais c'est agréable à regarder, c'est plein de bons sentiments. Son père habite un quartier pauvre, plein de violence mais aussi de liens sociaux variés et interdépendants. Il ne parle pas anglais : le père et la fille passent deux mois à faire des travaux dans la maison et à s'apprivoiser. Les seconds rôles nous distraient et font avancer la jeune fille vers une meilleure compréhension de sa culture : Parfait cadeau pour un.e pré-ado ! (parents divorcés, ou à la recherche de ses origines culturelles, ou en quête de dépaysement ...)
Une Soeur
Juste après avoir relu Cet été-là de Jillian et Mariko Tamaki qui traite un peu du même sujet de l'adolescence qui pointe son nez pendant des vacances en bord de mer, c'est intéressant de lire une sœur, de Bastien Vivès. L'un présente deux filles qui s'ennuient pendant les vacances et la plus grande commence à s'intéresser aux garçons, c'est long, c'est pleins de détails psycho familiaux, alors que l'autre album présente deux frères tout sages (toujours à dessiner sur la table de la cuisine) qui doivent accueillir pendant une semaine de leurs vacances une très belle adolescente dans leur chambre. Une approche de long bain tiède entre la légèreté et la tristesse d'un coté et de l'autre un court récit d'intrusion de la sexualité dans la vie d'un jeune homme qui n'était pas demandeur. Chez Vivès, c'est la jeune fille qui se sert un peu du garçon (Antoine) comme d'une doublure, pour essayer et avoir moins peur de "le faire" avec un garçon de son âge. Et ce coup d'essai pour elle est un viol pour lui. N'est-il qu'un objet sexuel ou pas ? Tout ceci est présenté dans une fluidité effrayante, seuls les regards sidérés et enfantins d'Antoine laissent entrevoir une cassure qui n'est pas développée. Tout est très rapide et silencieux. comme d'habitude avec Vivès, les traits économes et les dialogues très justes nous rappellent tellement de situations vécues... Évidemment cet enfant dessinateur et la subtilité des observations (les paroles du petit frère, celles des grands ados inconscients...) tendent à nous faire penser qu'il s'agit d'une situation réellement vécue par l'auteur... Je comprends que les femmes victimes de viol puissent craindre devant toute cette subtilité que le viol fait par une femme ne puisse effacer celui réalisé par les hommes. Mais cela doit être dit. Aussi. Et cela semble expliquer en partie la fascination de Vivès pour ces situations de beauté dans la violence.