Tu sais ce qu’on raconte …
C’est ça, le charme d’Angoulême, cette possibilité offerte de dénicher un album auquel je n’aurai pas même jeté un regard s’il n’avait été mis en avant par un petit éditeur sur son stand. Bon ! Le petit éditeur en question n’en est pas à son coup d’essai et j’ai déjà pu vérifier par ailleurs que Warum avait une ligne éditoriale apte à me séduire.
Donc, voilà, Warum, Casanave (dont j’aime le trait frais, dépouillé et expressif), un titre en forme d’invitation (de quoi titiller ma curiosité), la possibilité de faire dédicacer l’album par les deux auteurs : tout était réuni pour que je me saisisse dudit objet.
Il m’aura fallu 4 cases pour être totalement convaincu. 4 cases, pas une de plus et peut-être bien une de moins après réflexion ! 4 cases et je ne savais plus abandonner ma lecture ! Car la force de cet album réside dans sa construction narrative. Pensez ! Un secret de village dont on ne verra JAMAIS le principal protagoniste, à se demander s’il était bien là ! Un secret partagé par tous, chacun ayant sa propre vision des choses. Une narration qui ne cesse de rebondir d’un endroit à un autre sans jamais perdre son fil conducteur. Le résultat est extrêmement prenant, garde sa cohérence tout en m’offrant un récit raconté d’une manière totalement novatrice à mes yeux. Ce n’est absolument pas prise de tête, au contraire, c’est d’une simplicité enfantine… mais proche du génie ! De lecteur, je deviens voyeur, me délectant des bribes des secrets qui s’échappent de conversations de village. Qui croire, que prendre pour argent comptant, que remettre en doute ? Gilles Rochier réussit le tour de force de créer un récit inattendu en partant d’un fait divers quelconque.
A force, le procédé aurait pu lasser mais ce récit a juste la bonne longueur et les cases épurées de Daniel Casanave (tout comme sa colorisation monochrome) aident au rythme de lecture en aérant le récit, en le centrant sur la narration tout en occupant l’espace.
Une très belle surprise. Un objet de curiosité qui prouve qu’il y a encore moyen de faire preuve d’originalité dans le monde de la bande dessinée tout en restant accessible au plus grand nombre. Je recommande vivement ! Lisez-le, c’est le minimum.
Voilà une série très bien fichue ! Pour un lectorat adolescent au départ je pense, mais elle passe assez bien la barrière de l’âge.
Si le premier album n’utilise la guerre que comme arrière-plan, décor plus ou moins lointain, dès le deuxième, avec l’arrivée de Hans, la tension monte, et l’innocence des gamins en prend un coup. La guerre a rattrapé les Lulus, ou plutôt c’est eux qui vont à sa rencontre, traversant les régions en guerre dans les troisième et quatrième albums.
Les quatre garçons et Luce forment une équipe joyeuse et débrouillarde, et on oublie volontiers les facilités, les quelques invraisemblances, pour suivre ces enfants dans leur errance. Une sorte de « club des cinq » dont la seule énigme à résoudre serait de survivre au milieu de la tuerie des adultes.
Le dessin de Hardoc est pour beaucoup dans la fluidité de la lecture.
Une série pour tous les âges, vraiment bien fichue.
Monsieur Oliver est un jeune aristocrate gâté par la vie, sa fortune en fait un des plus beaux partis de tout le royaume. Mais au lieu de faire un beau mariage, chaque nuit il préfère se vautrer dans la luxure dans les bas quartiers de Londres. Lisbeth est une servante parmi d'autres, elle n'est pas très belle et très différente de toutes celles que Monsieur a engrossées au retour d'une soirée trop arrosée. Lord Oliver fait d'elle, non une conquête de plus mais la confidente de sa vie de débauche. A mesure que Lisbeth découvre le vide existentiel de la vie de son maitre, elle commence à craindre pour son sort car cette "promotion" attise la colère de la hiérarchie du personnel de maison et l'expose aux pires mesquineries.
Exquise peinture des mœurs et de l'hypocrisie des rapports sociaux dans la société victorienne, "Monsieur désire?" est un solide récit psychologique aux savoureux dialogues.
Un beau récit d'aventure et de "terroir". L'histoire est émouvante et le récit très rythmé. Je pense que ce récit pourrait plaire aux amateurs de Servais. Et ce serait du Servais du meilleur tonneau! Etrangement le dessin ne m'attirait pas au premier abord, et à la lecture, j'éprouve un sentiment inverse : il est magnifique, il rend de manière très forte les éléments naturels, les matières.
J'ai vraiment adoré cette bande dessinée. Tout d'abord le dessin est magnifique, il possède une élégance, un côté pictural extrêmement plaisant. Il donne dans un charme rétro un peu suranné qui pourrait évoquer l'univers des peintures d'Hopper.
Par ailleurs, l'intrigue est très romanesque, on est réellement plongé dans la psychologie du personne principal, on partage ses obsessions et ses interrogations. Je ne peux rien dire sur la chute de l'intrigue sans spoiler. Je peux juste vous dire qu'il s'agit d'une enquête passionnante et d'une expérience de lecture déroutante, moderne et délicieuse.
Je ne sais pas ce qui se passe avec cet auteur mais à chaque fois que je lis une de ses œuvres, je tombe sous le charme. Généralement, quand la narration prend le dessus, je suis très vite ennuyé par le sens des phrases qui se succèdent inlassablement. Là, c'est tout le contraire qui se produit comme par magie. Il trouve les mots justes pour décrire par exemple l'héroïne Nathalie qui perd l'amour de sa vie et qui doit reconstruire sa vie malgré tout. C'est drôle, émouvant et terriblement humain à la fois.
Bien entendu, étant un grand amateur de film de lover, je possède bien entendu "La délicatesse" avec Audrey Tautou dans le rôle principal. J'avais beaucoup aimé la sensibilité de ce film où tout partait d'un baiser volé. Là, Cyril Bonin semble aller plus loin sur des pans entiers non évoqués dans le film. Bref, j'ai l'impression que c'est un sérieux complément. L'auteur s'approprie en effet le roman et le film mais livre une version toute personnelle qui n'en demeure pas moins très intéressante. Le personnage de Markus est par exemple totalement différent dans son approche. La délicatesse porte bien son nom. Cela parle de cœur et de gens bien attentionnés. Que cela manque au monde qui nous entoure !
Bref, l'émotion sera véritablement au rendez-vous. Il y a un équilibre parfait entre la gravité et la fantaisie au milieu de ces élans sentimentaux. La délicatesse peut être qualifiée comme la bd la plus romantique de l'année. Il y a toute une poésie de l'âme qui ne peut que nous toucher à moins d'être insensible. Avis par conséquent à tout les lovers car c'est une belle invitation à l'Amour. Cela tombe bien car la Saint-Valentin approche !
Devenu un artiste contemporain de renommée mondiale, Cristobal quitte New York et revient sur sa petite île natale. S 'apercevant avec horreur que ce havre de paix sauvage est sur le point d'être transformé en paradis bétonné pour touristes, il décide d'user de son argent et de son influence pour transformer l'île en œuvre d'art afin de la sanctuariser. Mais le monde de l'art échappe-t-il à celui de l'argent et l'artiste à l’orgueil ?
Duhamel nous propose un récit à la psychologie riche en complexe servi par un dessin à la mise en scène efficace et soignée. Son personnage tour à tour détestable et attachant impose tout au long de l’album son troublant charisme. J'ai vraiment apprécié cette histoire dans laquelle Duhamel a pris de vrais risques. C'est une bande dessinée au sujet réellement original. La forme est certes plus classique, mais très plaisante, j'aime beaucoup ce dessin semi-réaliste.
Gertrude, six ans, a été projetée dans un monde imaginaire exubérant appelé "Fairy land". La reine lui a promis de pouvoir retourner dans le monde réel si elle trouve la clef (magique) qui ouvre la porte (magique, elle aussi). Vingt-sept ans plus tard, elle ne l'a toujours pas trouvée, et si elle est restée en apparence une petite fille de six ans, elle est devenue une redoutable guerrière au langage fleuri. La reine, effrayée par les carnages que « cette gourde incapable de trouver une clé » perpétue dans Fairy Land, décide de l'éliminer ; ça va gicler...
Servi par un dessin cartoonesque à souhait, "Fairy land" marie le trash et la guimauve avec un mauvais goût assumé pour le plus grand bonheur de nos zygomatiques. L'ensemble est assez barré mais tient aussi la route en terme de scénario dans sa trame générale, ce qui est parfois plus difficile avec ce genre de titre.
Rose, fragile héroïne paranormale entre fantômes et meurtres picturaux
Des histoires d'humains qui parlent au fantôme, de Casper à Ghostbusters en passant par Harry Potter ou Ghost Whisperer, c'est clair, il n'en manque pas, baignant dans l'horreur, la comédie ou d'autres genres. Pourtant, avec Rose (trilogie dont la première partie est parue dans Spirou et désormais en album), Denis Lapière, Émilie Alibert et la fascinante Valérie Vernay conjuguent de manière originale le paranormal, le polar féminin et les secrets de famille.
En voilà une jolie surprise pour commencer 2017 ! Ne vous fiez pas aux clichés que pourrait véhiculer la couleur souvent girly qu'est le rose. Rose, ce n'est pas Seccotine, pas Natacha, pas même Laureline, c'est une héroïne qui ne doit rien à personne... même pas à elle. Car Rose, elle ne rivalise pas d'atouts sexy et elle ne s'aide pas : si elle n'était pas l'héroïne de cette trilogie, c'est bien simple, on ne remarquerait pas cette adolescente (ou peut-être est-ce une adulte, déjà ? Elle est si petite, comme son nom, Klein) si discrète, si peu confiante, si renfermée...
Pourtant, Rose sait s'ouvrir au monde, mais si on vous raconte pourquoi, vous ne nous croirez pas... Bon, d'accord, Rose a le don de s'émanciper de sa carcasse terrestre et de se faire passe-muraille... ce qui lui vaut, dans le monde des vivants, quelques moments d'absence, forcément... et un mal-être encore plus pesant. Pourquoi n'est-elle pas comme les autres ? Est-ce une maladie.
Mais ce n'est pas tout car toute une série d'éléments étranges vont se mettre en branle pour chahuter un peu plus sa vie : son père qui meurt dans des circonstances d'autant plus troublantes que sa dépouille est retrouvée dans la même position qu'un homme sur un tableau vu à un vernissage, des fantômes se révèlent à Rose dans la maison de son paternel et une sordide histoire de chasse sorcière revient à la charge.
Loin de prendre peur, notre héroïne va prendre du galon et du courage pour prendre à bras-le-corps cette étrange affaire. L'affaire de sa vie ? Elle y est intimement liée, en tout cas, le lecteur en a le sentiment certain. Ce début d'histoire est d'ailleurs un régal. Aussi nombreux soient les éléments imaginés par les auteurs, là où ils auraient pu se transformer en récit foutraque et mal dosé, ils s'assemblent ici comme dans un rêve. La présence de l'actrice et comédienne Émilie Alibert aux-côtés de Denis Lapière, y est-elle pour quelque chose ? Toujours est-il que dans ce petit théâtre de vie où le sépia fait bon ménage avec les superbes couleurs de Valérie Vernay, on se sent bien tout en y prenant faits et causes.
Notre héroïne sans artifice, on l'aime déjà et on aurait envie de l'aider par tous les moyens. Inspiré autant dans son scénario que dans son graphisme (quelques superbes paysages qui ne gâchent rien), ce premier tome prouve qu'il faut toujours laisser de la place à l'inattendu. Cela donne souvent de jolis moments. Tout en beauté.
Un voyage en Suède, ça vous dit ? Après avoir joué les fins limiers du suspense avec Zidrou, Berthet, qui a roulé sa bosse et son trait dans pas mal de contrées, a trouvé en Sylvain Runberg (que nous interviewons, il y a peu), le meilleur guide qui soit pour découvrir la Suède. Un scénariste affûté qui a trouvé un thème en or pour le concepteur de la collection Série Noire: une culture alternative calquée sur le rock et la passion des belles voitures qui rutilent sur la Route 66. Un milieu de gros bras tatoués comme il faut, de pin-up, de mécaniques bien huilées et de cheveux gominés, qui possède aussi ses secrets. Et quand, à l'approche de l'événement Motorcity que tous les raggare attendent avec impatience, une étrange disparition est signalée, la tâche de la police ne risque pas d'être facilitée.
Dans le sillon de leur héroïne tatouée et forte en caractère (celle qui crève l'écran ou est-ce la couverture?), Sylvain Runberg, Philippe Berthet et Dominique David nous emmène sous le soleil de la Suède, à l'heure où les blés dorés sont récoltés. Un véritable petit paradis sacrément bien rendu par le trait toujours aussi élégant et vintage (l'histoire se déroule de nos jours mais est suspendue dans le temps) de Berthet mais aussi par les couleurs de Dominique. Et si l'herbe, comme les feuilles de cannabis, est bien verte aux roues des caisses d'enfer des raggare, le sang aura tôt fait de la ternir. Et tout va déraper. Deux planches glauques à en faire détourner le regard du lecteur à l'appui!
Maniant soigneusement son intrigue dans les virages, Sylvain s'appuie sur le style Berthet pour en faire sa locomotive vers l'enfer sur terre et... sous terre (vous comprendrez). Et si le fin mot arrive au bout d'une quarantaine de planches, il est plus épais qu'il n'y parait mais tout aussi crédible et glaçant. Glaçant à laisser raide mort certains de nos héros. Les auteurs n'ont pas peur des sacrifices et ça leur réussit formidablement!
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Tu sais ce qu'on raconte...
Tu sais ce qu’on raconte … C’est ça, le charme d’Angoulême, cette possibilité offerte de dénicher un album auquel je n’aurai pas même jeté un regard s’il n’avait été mis en avant par un petit éditeur sur son stand. Bon ! Le petit éditeur en question n’en est pas à son coup d’essai et j’ai déjà pu vérifier par ailleurs que Warum avait une ligne éditoriale apte à me séduire. Donc, voilà, Warum, Casanave (dont j’aime le trait frais, dépouillé et expressif), un titre en forme d’invitation (de quoi titiller ma curiosité), la possibilité de faire dédicacer l’album par les deux auteurs : tout était réuni pour que je me saisisse dudit objet. Il m’aura fallu 4 cases pour être totalement convaincu. 4 cases, pas une de plus et peut-être bien une de moins après réflexion ! 4 cases et je ne savais plus abandonner ma lecture ! Car la force de cet album réside dans sa construction narrative. Pensez ! Un secret de village dont on ne verra JAMAIS le principal protagoniste, à se demander s’il était bien là ! Un secret partagé par tous, chacun ayant sa propre vision des choses. Une narration qui ne cesse de rebondir d’un endroit à un autre sans jamais perdre son fil conducteur. Le résultat est extrêmement prenant, garde sa cohérence tout en m’offrant un récit raconté d’une manière totalement novatrice à mes yeux. Ce n’est absolument pas prise de tête, au contraire, c’est d’une simplicité enfantine… mais proche du génie ! De lecteur, je deviens voyeur, me délectant des bribes des secrets qui s’échappent de conversations de village. Qui croire, que prendre pour argent comptant, que remettre en doute ? Gilles Rochier réussit le tour de force de créer un récit inattendu en partant d’un fait divers quelconque. A force, le procédé aurait pu lasser mais ce récit a juste la bonne longueur et les cases épurées de Daniel Casanave (tout comme sa colorisation monochrome) aident au rythme de lecture en aérant le récit, en le centrant sur la narration tout en occupant l’espace. Une très belle surprise. Un objet de curiosité qui prouve qu’il y a encore moyen de faire preuve d’originalité dans le monde de la bande dessinée tout en restant accessible au plus grand nombre. Je recommande vivement ! Lisez-le, c’est le minimum.
La Guerre des Lulus
Voilà une série très bien fichue ! Pour un lectorat adolescent au départ je pense, mais elle passe assez bien la barrière de l’âge. Si le premier album n’utilise la guerre que comme arrière-plan, décor plus ou moins lointain, dès le deuxième, avec l’arrivée de Hans, la tension monte, et l’innocence des gamins en prend un coup. La guerre a rattrapé les Lulus, ou plutôt c’est eux qui vont à sa rencontre, traversant les régions en guerre dans les troisième et quatrième albums. Les quatre garçons et Luce forment une équipe joyeuse et débrouillarde, et on oublie volontiers les facilités, les quelques invraisemblances, pour suivre ces enfants dans leur errance. Une sorte de « club des cinq » dont la seule énigme à résoudre serait de survivre au milieu de la tuerie des adultes. Le dessin de Hardoc est pour beaucoup dans la fluidité de la lecture. Une série pour tous les âges, vraiment bien fichue.
Monsieur désire ?
Monsieur Oliver est un jeune aristocrate gâté par la vie, sa fortune en fait un des plus beaux partis de tout le royaume. Mais au lieu de faire un beau mariage, chaque nuit il préfère se vautrer dans la luxure dans les bas quartiers de Londres. Lisbeth est une servante parmi d'autres, elle n'est pas très belle et très différente de toutes celles que Monsieur a engrossées au retour d'une soirée trop arrosée. Lord Oliver fait d'elle, non une conquête de plus mais la confidente de sa vie de débauche. A mesure que Lisbeth découvre le vide existentiel de la vie de son maitre, elle commence à craindre pour son sort car cette "promotion" attise la colère de la hiérarchie du personnel de maison et l'expose aux pires mesquineries. Exquise peinture des mœurs et de l'hypocrisie des rapports sociaux dans la société victorienne, "Monsieur désire?" est un solide récit psychologique aux savoureux dialogues.
Le Sentier des Reines
Un beau récit d'aventure et de "terroir". L'histoire est émouvante et le récit très rythmé. Je pense que ce récit pourrait plaire aux amateurs de Servais. Et ce serait du Servais du meilleur tonneau! Etrangement le dessin ne m'attirait pas au premier abord, et à la lecture, j'éprouve un sentiment inverse : il est magnifique, il rend de manière très forte les éléments naturels, les matières.
Watertown
J'ai vraiment adoré cette bande dessinée. Tout d'abord le dessin est magnifique, il possède une élégance, un côté pictural extrêmement plaisant. Il donne dans un charme rétro un peu suranné qui pourrait évoquer l'univers des peintures d'Hopper. Par ailleurs, l'intrigue est très romanesque, on est réellement plongé dans la psychologie du personne principal, on partage ses obsessions et ses interrogations. Je ne peux rien dire sur la chute de l'intrigue sans spoiler. Je peux juste vous dire qu'il s'agit d'une enquête passionnante et d'une expérience de lecture déroutante, moderne et délicieuse.
La Délicatesse
Je ne sais pas ce qui se passe avec cet auteur mais à chaque fois que je lis une de ses œuvres, je tombe sous le charme. Généralement, quand la narration prend le dessus, je suis très vite ennuyé par le sens des phrases qui se succèdent inlassablement. Là, c'est tout le contraire qui se produit comme par magie. Il trouve les mots justes pour décrire par exemple l'héroïne Nathalie qui perd l'amour de sa vie et qui doit reconstruire sa vie malgré tout. C'est drôle, émouvant et terriblement humain à la fois. Bien entendu, étant un grand amateur de film de lover, je possède bien entendu "La délicatesse" avec Audrey Tautou dans le rôle principal. J'avais beaucoup aimé la sensibilité de ce film où tout partait d'un baiser volé. Là, Cyril Bonin semble aller plus loin sur des pans entiers non évoqués dans le film. Bref, j'ai l'impression que c'est un sérieux complément. L'auteur s'approprie en effet le roman et le film mais livre une version toute personnelle qui n'en demeure pas moins très intéressante. Le personnage de Markus est par exemple totalement différent dans son approche. La délicatesse porte bien son nom. Cela parle de cœur et de gens bien attentionnés. Que cela manque au monde qui nous entoure ! Bref, l'émotion sera véritablement au rendez-vous. Il y a un équilibre parfait entre la gravité et la fantaisie au milieu de ces élans sentimentaux. La délicatesse peut être qualifiée comme la bd la plus romantique de l'année. Il y a toute une poésie de l'âme qui ne peut que nous toucher à moins d'être insensible. Avis par conséquent à tout les lovers car c'est une belle invitation à l'Amour. Cela tombe bien car la Saint-Valentin approche !
Le Retour
Devenu un artiste contemporain de renommée mondiale, Cristobal quitte New York et revient sur sa petite île natale. S 'apercevant avec horreur que ce havre de paix sauvage est sur le point d'être transformé en paradis bétonné pour touristes, il décide d'user de son argent et de son influence pour transformer l'île en œuvre d'art afin de la sanctuariser. Mais le monde de l'art échappe-t-il à celui de l'argent et l'artiste à l’orgueil ? Duhamel nous propose un récit à la psychologie riche en complexe servi par un dessin à la mise en scène efficace et soignée. Son personnage tour à tour détestable et attachant impose tout au long de l’album son troublant charisme. J'ai vraiment apprécié cette histoire dans laquelle Duhamel a pris de vrais risques. C'est une bande dessinée au sujet réellement original. La forme est certes plus classique, mais très plaisante, j'aime beaucoup ce dessin semi-réaliste.
I hate fairyland
Gertrude, six ans, a été projetée dans un monde imaginaire exubérant appelé "Fairy land". La reine lui a promis de pouvoir retourner dans le monde réel si elle trouve la clef (magique) qui ouvre la porte (magique, elle aussi). Vingt-sept ans plus tard, elle ne l'a toujours pas trouvée, et si elle est restée en apparence une petite fille de six ans, elle est devenue une redoutable guerrière au langage fleuri. La reine, effrayée par les carnages que « cette gourde incapable de trouver une clé » perpétue dans Fairy Land, décide de l'éliminer ; ça va gicler... Servi par un dessin cartoonesque à souhait, "Fairy land" marie le trash et la guimauve avec un mauvais goût assumé pour le plus grand bonheur de nos zygomatiques. L'ensemble est assez barré mais tient aussi la route en terme de scénario dans sa trame générale, ce qui est parfois plus difficile avec ce genre de titre.
Rose
Rose, fragile héroïne paranormale entre fantômes et meurtres picturaux Des histoires d'humains qui parlent au fantôme, de Casper à Ghostbusters en passant par Harry Potter ou Ghost Whisperer, c'est clair, il n'en manque pas, baignant dans l'horreur, la comédie ou d'autres genres. Pourtant, avec Rose (trilogie dont la première partie est parue dans Spirou et désormais en album), Denis Lapière, Émilie Alibert et la fascinante Valérie Vernay conjuguent de manière originale le paranormal, le polar féminin et les secrets de famille. En voilà une jolie surprise pour commencer 2017 ! Ne vous fiez pas aux clichés que pourrait véhiculer la couleur souvent girly qu'est le rose. Rose, ce n'est pas Seccotine, pas Natacha, pas même Laureline, c'est une héroïne qui ne doit rien à personne... même pas à elle. Car Rose, elle ne rivalise pas d'atouts sexy et elle ne s'aide pas : si elle n'était pas l'héroïne de cette trilogie, c'est bien simple, on ne remarquerait pas cette adolescente (ou peut-être est-ce une adulte, déjà ? Elle est si petite, comme son nom, Klein) si discrète, si peu confiante, si renfermée... Pourtant, Rose sait s'ouvrir au monde, mais si on vous raconte pourquoi, vous ne nous croirez pas... Bon, d'accord, Rose a le don de s'émanciper de sa carcasse terrestre et de se faire passe-muraille... ce qui lui vaut, dans le monde des vivants, quelques moments d'absence, forcément... et un mal-être encore plus pesant. Pourquoi n'est-elle pas comme les autres ? Est-ce une maladie. Mais ce n'est pas tout car toute une série d'éléments étranges vont se mettre en branle pour chahuter un peu plus sa vie : son père qui meurt dans des circonstances d'autant plus troublantes que sa dépouille est retrouvée dans la même position qu'un homme sur un tableau vu à un vernissage, des fantômes se révèlent à Rose dans la maison de son paternel et une sordide histoire de chasse sorcière revient à la charge. Loin de prendre peur, notre héroïne va prendre du galon et du courage pour prendre à bras-le-corps cette étrange affaire. L'affaire de sa vie ? Elle y est intimement liée, en tout cas, le lecteur en a le sentiment certain. Ce début d'histoire est d'ailleurs un régal. Aussi nombreux soient les éléments imaginés par les auteurs, là où ils auraient pu se transformer en récit foutraque et mal dosé, ils s'assemblent ici comme dans un rêve. La présence de l'actrice et comédienne Émilie Alibert aux-côtés de Denis Lapière, y est-elle pour quelque chose ? Toujours est-il que dans ce petit théâtre de vie où le sépia fait bon ménage avec les superbes couleurs de Valérie Vernay, on se sent bien tout en y prenant faits et causes. Notre héroïne sans artifice, on l'aime déjà et on aurait envie de l'aider par tous les moyens. Inspiré autant dans son scénario que dans son graphisme (quelques superbes paysages qui ne gâchent rien), ce premier tome prouve qu'il faut toujours laisser de la place à l'inattendu. Cela donne souvent de jolis moments. Tout en beauté.
Motorcity
Un voyage en Suède, ça vous dit ? Après avoir joué les fins limiers du suspense avec Zidrou, Berthet, qui a roulé sa bosse et son trait dans pas mal de contrées, a trouvé en Sylvain Runberg (que nous interviewons, il y a peu), le meilleur guide qui soit pour découvrir la Suède. Un scénariste affûté qui a trouvé un thème en or pour le concepteur de la collection Série Noire: une culture alternative calquée sur le rock et la passion des belles voitures qui rutilent sur la Route 66. Un milieu de gros bras tatoués comme il faut, de pin-up, de mécaniques bien huilées et de cheveux gominés, qui possède aussi ses secrets. Et quand, à l'approche de l'événement Motorcity que tous les raggare attendent avec impatience, une étrange disparition est signalée, la tâche de la police ne risque pas d'être facilitée. Dans le sillon de leur héroïne tatouée et forte en caractère (celle qui crève l'écran ou est-ce la couverture?), Sylvain Runberg, Philippe Berthet et Dominique David nous emmène sous le soleil de la Suède, à l'heure où les blés dorés sont récoltés. Un véritable petit paradis sacrément bien rendu par le trait toujours aussi élégant et vintage (l'histoire se déroule de nos jours mais est suspendue dans le temps) de Berthet mais aussi par les couleurs de Dominique. Et si l'herbe, comme les feuilles de cannabis, est bien verte aux roues des caisses d'enfer des raggare, le sang aura tôt fait de la ternir. Et tout va déraper. Deux planches glauques à en faire détourner le regard du lecteur à l'appui! Maniant soigneusement son intrigue dans les virages, Sylvain s'appuie sur le style Berthet pour en faire sa locomotive vers l'enfer sur terre et... sous terre (vous comprendrez). Et si le fin mot arrive au bout d'une quarantaine de planches, il est plus épais qu'il n'y parait mais tout aussi crédible et glaçant. Glaçant à laisser raide mort certains de nos héros. Les auteurs n'ont pas peur des sacrifices et ça leur réussit formidablement!