Jean imagine déjà le journal, les moqueries, les pastiches, la zwanze.
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Ce tome contient une histoire complète, de nature historique. Son édition originale date de 2021. Il a été réalisé par Daniel Couvreur et Denis Lapière pour le scénario, et par Christian Durieux pour les dessins et les couleurs. Il comprend quatre-vingts pages de bande dessinée. Il comporte une postface de deux pages, écrite par Couvreur, et une autre d’une page écrite par Durieux évoquant quelques petits choix à réaliser par rapport à la réalité historique.
À l’époque contemporaine, les trois auteurs se trouvent dans les bureaux du Soir à Bruxelles. Daniel évoque la situation du journal à l’époque : Ils l’appelaient Le Soir emboché. Il a pu retrouver dans les archives une sorte de journal tenu par Marc Aubrion, c’est là qu’il a lu pour la première fois ce terme Emboché. Denis demande si c’est Aubrion qui est l’origine du Soir Volé. Le journaliste clarifie : Pas Le Soir Volé, mais le Faux Soir. Le Soir Volé, c’est le journal aux mains des Allemands, c’est Le Soir emboché justement. En réponse à une question de Christian, il précise qu’il a lu de larges extraits du journal d’Aubrion, et il en a préparé une copie pour son coscénariste. Denis parcourt en vitesse le récit : c’est formidable, un récit complètement exalté. Daniel confirme : Oui, quelque part, René Noël écrit qu’Aubrion était un grand échalas nerveux et enthousiaste. En réponse à un question, il détaille : Un canular, oui, et plusieurs en sont morts par la suite… Ils n’ont tué personne, ils n’ont détruit aucun bâtiment, aucune violence, et pourtant ce fait de résistance est remonté à la fois jusqu’à Hitler et jusqu’à Churchill ! Enfin, il indique qu’il a trouvé une offre de vente d’un exemplaire du Faux Soir et qu’il a fait une offre que le vendeur ne peut pas refuser.
Le 10 septembre 1943 à Bruxelles, il fait encore chaud, l’été tarde à se retirer. René Noël, dit Jean, marche dans la rue, croisant une patrouille de soldats allemands. Il est le responsable du Front de l’Indépendance (F.I.) pour le Brabant et le Hainaut. Jean se rend ainsi, en cette fin d’après-midi un peu étouffante, chez son ami le peintre Léon Navez. Mais il ne s’agit pas d’amitié cette fois. Ils ont rendez-vous. Léon le fait rentrer chez lui et il lui présente Marc Aubrion qui déclare qu’il se sent si inutile avec ses petites actions sporadiques, il est prêt à se mettre au service du F.I., il n’a pas d’attaches et il est déterminé. Jean sait que si Léon lui recommande quelqu’un, il peut lui faire confiance. Il boit donc une petite gorgée de mauvaise chicorée, sans rien laisser paraître de sa grimace, avant de se tourner vers Marc Aubrion et de lui annoncer qu’ils cherchent un responsable de presse, est-ce que cela lui conviendrait ? Quelques jours plus tard, Jean a convoqué Aubrion pour 19h30 place du Grand Sablon. Il lui annonce que son interlocuteur va devoir disparaître officiellement, quitter son emploi actuel et sa famille, sans donner d’explications à personne. Il se cachera dans une famille d’accueil qui ne connaîtra rien de Marc, M. et Mme Hellas, ils résident rue Cyriel-Verschaeren, à l’Evere. Et désormais, il portera le sobriquet d’Yvon.
Le lecteur prend l’ouvrage en main, et il découvre qu’il contient un encart inséré à l’intérieur : une reproduction intégrale du Faux Soir, une feuille indépendante qui se déplie et qui permet de lire l’édition de Le Soir du neuf novembre 1943.il y découvre les différents articles, les deux photographies, et les différentes rubriques : Nouvelles du pays, Un fait entre 1000, Les sports, Cinémas, Théâtres, Faits divers, Petites annonces, Nécrologie. Les auteurs ont fait le choix de construire leur récit sur la base de deux fils chronologiques différents : celui au temps présent dans lequel les auteurs se mettent en scène dans leur démarche de réaliser cette bande dessinée, et celui qui suit la conception, la fabrication et la distribution du Faux Soir par les différents acteurs. Ainsi les auteurs rendent hommage à la démarche de Marc Aubrion (nom de code Yvon), René Noël (Jean), Louis Müller (Jacques), Fernand Demany, Andrée Grandjean (1910-1999, avocate et journaliste), Ferdinand Wellens, Théo Mullier, Léon Navez (1900-1967, peintre). Au cours du récit, les auteurs font en sorte d’apporter les éléments d’information historique nécessaires à la compréhension des faits. À l’époque contemporaine, la conservatrice d’un musée explique à Lapière le fonctionnement du Front de l’Indépendance, et ses liens avec l’Armée des Partisans. Puis ils montrent comment René Noël entre en clandestinité, la manière dont il est hébergé, il est également question de la rétribution correspondante pour pouvoir vivre.
Dans un premier temps, le lecteur s’intéresse au récit de l’idée du Faux Soir et au reportage sur sa création. Il attend une reconstitution historique. Les dessins passent de personnages en train de se parler, représentés en plan taille ou en plan poitrine, à des cases présentant une plus forte densité d’informations visuelles. Lors de ces dialogues, il apprécie de pouvoir voir les tenues vestimentaires des uns et des autres, assez formelles. Majoritairement pantalon, chemise et veste pour les hommes, avec régulièrement une cravate, sans oublier les uniformes militaires pour les soldats de l’armée d’occupation. Le récit comporte quelques femmes, en nombre moins importants, avec en particulier l’avocate Andrée Grandjean, habillée d’un tailleur strict, visiblement sous le charme de Léon Navez et de son beau pull jacquart, avec qui elle partage une cigarette. Le dessinateur effectue également un gros travail de représentation de la ville : les rues pavées, les tramways, les façades des bâtiments et leur architecture, les bâtiments célèbres tel le palais de Justice, la place de la Bourse, la résidence Belvédère au 453 de l'avenue Louise, etc. Il montre également des éléments techniques essentiels pour le récit comme les machines d’imprimerie (en particulier une de marque Mariononi), les machines à écrire, les dentelures de journaux, un énorme massicot, les véhicules de distribution des journaux, et bien sûr les kiosques de la ville.
L’artiste reconstitue également les faits et gestes des résistants. Il sait bien capturer le besoin de vigilance pour eux : petits coups d’œil en arrière dans la rue, tension lorsqu’ils se déplacent après l’heure du couvre-feu, mines déterminées pour accomplir leurs missions, enthousiasme pour rédiger les articles à base de moqueries, pastiches et zwanze, action d’éclat pour endommager les véhicules de distribution des journaux, sourire en coin en voyant la réaction des lecteurs du Faux Soir. Le lecteur se retrouve pris par l’ambiance qu’il s’agisse d’une discussion en pleine rue entre Jean et Yvon pour évoquer l’entrée en clandestinité de ce dernier, des discussions discrètes dans les cafés entre conspirateurs, de la connivence née de la satisfaction de voir le projet progressivement devenir réalité, des échanges très professionnels devant la machine d’imprimerie pour arriver au résultat souhaité, c’est-à-dire des exemplaires qui pourront faire illusion quand ils seront remis aux kiosquiers, afin que ceux-ci les vendent sans soupçonner la supercherie. La quinzaine de pages consacrées au temps présent semblent faire écho à cette complicité : les trois auteurs travaillant de concert lors de réunions (qui n’ont rien de clandestines) pour rendre hommage à ces résistants utilisant une méthode totalement pacifiste.
Il s’agit pour les auteurs de raconter un haut fait de la Résistance belge pendant la seconde guerre mondiale. Dans la postface, Daniel Couvreur l’exprime ainsi : […] un exploit accompli dans un temps où les idéaux de fraternité, de démocratie étaient sous la botte de penseurs et de dirigeants prêts à toutes les extrémités pour fracturer les solidarités humaines et le vivre-ensemble. […] Le récit d’un petit groupe de citoyens courageux, animés par le formidable espoir de bâtir un monde meilleur. À la seule force de l’esprit et de l’humour, ils ont tenté pacifiquement de triompher de l’obscurantisme aveugle. Dans un moment où la population était ébranlée, désorientée, et offrait une proie facile à la propagande, ils ont tourné les faux prophètes et leurs collaborateurs en ridicule. En creux le lecteur retrouve ou découvre toutes ces qualités dans le mode opératoire qui est décrit, et dans le passage vers la fin qui informe sur ce qu’il est advenu des différentes personnes ayant participé à cette opération, une fois qu’ils ont été identifiés par les Nazis.
Le récit présente un autre intérêt, très factuel et pédagogique : comment s’y sont-ils pris ? Après tout, cela n’a pas l’air bien compliqué d’écrire de faux articles et de faire distribuer le journal correspondant dans les kiosques. Les auteurs savent bien mettre en place et montrer que l’occupation allemande implique une répression bien réelle, une atmosphère de suspicion (À qui se fier ?) et une résignation pour pouvoir survivre. Les artisans du Faux Soir ont bien l’intention de réussir leur projet, et d’y survivre. Le récit raconte et explique la réalité matérielle d’une telle entreprise : trouver une imprimerie et un propriétaire prêt à courir le risque quand bien même il est rétribué, trouver assez de rédacteurs pour remplir un journal, substituer le Faux Soir au vrai lors de la distribution, trouver le financement d’une telle opération. À la lecture apparaissent aussi bien la fragilité d’une telle entreprise qui peut être découverte à tout moment, que l’ingéniosité et l’entraide des participants.
Réaliser un faux numéro d’un quotidien, à base d’articles fonctionnant sur les moqueries, les pastiches, la zwanze, au nez et à la barbe de l’occupant allemand. Une entreprise de résistance totalement pacifique et belge, une ode au pouvoir de la presse et de l’humour. Les auteurs racontent cette aventure avec respect et réalisme, permettant au lecteur de comprendre et d’admirer le courage de ces résistants. Formidable.
Les gens se plaignent de trop d'explications, mais quand on les laisse cogiter, dériver dans les songes, il n'y a plus personne ! Des êtres capables d'en rêver d'autres, les arbres, se rebellent contre les humains. Lesquels ne sont pas diabolisés, leur charge pèse trop sur les arbres, c'est tout, ils nous rejettent. Réaction vitale de la vie, bien évidemment de l'ordre du mythe ! Les arbres rêvant ne sont pas plus sympas que le commun des humains dont on peut penser qu'il vaut mieux qu'ils se purgent de leur agressivité dans la chasse qu'entre eux, et c'est bien vu, la vie n'est pas gentille, souffrance et mort existant bien avant l'espèce humaine et trouvant des développements inédits avec elle.
Ce sont souvent les innocents qui paient pour les autres, ça aussi, c'est bien vu. Il y a une fin ouverte terrifiante : et si tout ce qui vient des arbres nous rejetait ? Les amateurs de BD savent qu'ils serait difficile de s'en passer, ne fut-ce que parce que les BD et autres livres se lisent surtout sur du papier tiré de leur coupe.. La petite fille, personnage principal, est la plus intelligente, sorte d'Alice au pays des merveilles d'un monde à peine esquissé opportunément recouvert de brume. Les animaux de rêve sont marrants, exemple l'enfant a peur de dormir à cause du monstre qu'elle craint qu'il y ait sous le lit ? L'animal dit qu'il y en a toujours un sur un ton normal, et comme si rien de mal ne pouvait en advenir. Pour une fois, Comes fait quelques références sur la BD, et en plus, elles ne tombent pas comme un cheveu sur la soupe. Chapeau l'artiste !
Comes est vraiment très inégal, et par là, je vise surtout ses albums en couleur, dispensables que je noterais à 2 si je m'en donnais la peine. Son talent pour le noir et blanc égale les créateurs de Mort Cinder et Corto Maltese, ce n'est pas rien. Mais ses visages sont peu variés, oscillant souvent entre dégénérés de la campagne et visages à la Giacometti de partout. Encore que la vieille très ridée au visage de masque de La maison où rêvent les arbres, et l'ingénuité de sa petite fille amorcent une diversification passée incroyablement inaperçue !
J'aime l'exploration d'une ruralité non idéalisée mais défendue contre le mépris de trop d'urbains. Il y a des éclats de magie, offrant une évasion à certains mal intégrés par la société en raison d'un psychisme particulier comme le héros éponyme Silence, ou bien parce que femmes insoumises. L'appétence vers l'esthétique nazie me met mal à l'aise, me semblant présentée comme morbide, certes, mais aussi le privilège de certains êtres raffinés. Cependant, tout cela me semble non une complaisance idéologique, mais des résurgences historiques dans le psychisme des personnages et la prolongation perverse du romantisme allemand. Pour alléger un peu l'atmosphère, un humour bienvenue apparaît parfois.
Mais à son meilleur comme ici, Comes mérite toutes nos étoiles.
Un graphisme emballant et des couleurs parfaites qui m’emmènent à l’intérieur. Des personnages un tout petit peu en dessous des canons dans les dialogues, dans la mesure de leur ego. Il manque quelques planches pour mieux comprendre les passages de déduction de l’un et l’autre. MAIS je retrouve mes deux héros préférés avec un grand bonheur. Et une pointe d’acidité digne de La Ligue des Gentlemen Extraordinaires. Une très très bonne bd découverte par hasard sur un rayon.
Pas grand chose à ajouter à mes prédécesseurs, je fais partie des très satisfaits avec cette série.
Depuis le début, la partie graphique est d’une solidité à toute épreuve. Ralph Meyer régale tout simplement, on savait qu’il avait du talent mais dans ce genre ça explose. Franchement rien à redire.
Niveau histoire, on aura ses préférences en fonction des diptyques (4 à ce jour) mais ça ne faiblit pas (peut-être même l’inverse), c’est d’une belle constance. J’aime toujours autant le cynisme du héros, Jonas Crow est encore loin de m’avoir saoulé. Je suis même bien plus impatient (qu’avec les précédents tomes) de connaître la suite de ses aventures.
Du très bon western avec juste ce qu’il faut de classique et différent. Une série qui monte tout doucement les marches des véritables poids lourds dans la catégorie.
Tehem es un auteur que j'apprécie, surtout quand il nous parle de son île d'adoption, La Réunion. La série propose un très sympathique récit choral autour de la boutique du "Chinois" amateur de photographie. En ce 22 septembre 1976, Titi, Gérard, Céline, Angelo, Turpin et ses fantômes vont être entrainer dans une folle sarabande où se mêlent zamal, rhum trafiqué, alcool à brûler, #dénoncemonporc et punition divine. La construction en quatre chapitres qui se recoupent parfaitement pour fournir de multiples rebondissements dans une progression qui ne dévoile rien du final. C'est aussi un prétexte pour nous décrire le ressenti d'un petit "Zoreille" qui vit au milieu de ce quartier cosmopolite dans un langage mi français mi créole très chantant et facile à lire. L'auteur utilise un univers animalier qui rend bien le cosmopolitisme de la situation dans un graphisme précis et dynamique. Ma seule réserve tient au choix d'un N&B qui nous prive des couleurs de l'île.
Une belle découverte.
J'ai dégusté avec délectation ce premier essai de la jeune anglaise de vingt ans ( à l'époque), Zoé Thorogood. Comme quoi le talent... . J'ai immédiatement été séduit par son talent graphique qui peint à merveille cette ambiance un peu poisseuse des rues désertes et plus ou moins mal famées de Middlesborough ou de Londres. C'est à la fois dynamique et moderne avec un formidable sentiment de vitalité qui rend son héroïne Billie si attachante dans cette lutte entre fragilité et volonté. La mise en couleur est parfaite avec ce N&B dominateur dans un environnement peuplé de laissés pour compte mais où percent les couleurs du printemps final comme des perce-neiges obstinément optimistes à combattre l'obscurité hivernale. Combattre l'obscurité c'est bien ce que doit faire Billie dans un scénario compte à rebours digne d'un très bon thriller. L'idée initiale est originale et l'auteure en extrait un récit fluide, tonique et d'une grande humanité. Les rencontres et les lieux que Zoé/Billie explore ont fortement résonné avec mon vécu associatif. Je suis même impressionné comment une artiste aussi jeune arrive à mettre autant de profondeur et de justesse dans la personnalité de ses personnages. Toutefois le récit reste résolument optimiste sans jamais tomber dans la mièvrerie sentimentale.
J'ai eu l'impression que Zoé jetait tout ce qu'elle avait dans cette œuvre comme si ensuite la lumière pouvait s'éteindre. Cela dégage une envie de création très forte.
Je me suis retenu pour ne pas mettre la note max mais cette œuvre m'a beaucoup parlé par sa thématique et son exécution. Un vrai coup de cœur.
Une série bien poétique ! Le trait, beau, n'est pas son seul attrait. Assez d'action pour chasser l'ennui, assez de contemplation pour être plongé dans une atmosphère étrange autant qu'esthétique. Et les deux ne me semblent faire qu'un, de même que l'auteur parlant de sa vie ne parvient pas à casser le rythme. Je l'attribue au fait que la dame est talentueuse, mais pas que. Il n'y a pas opposition entre la nature, et la culture, le réel et l'imaginaire, mais des glissements très subtils, au Japon.
Sinon, j'aime que le héros protège les humains des yokais agressifs, mais aussi qu'il délivre "ses" yokais et protège aussi les créatures magiques quand c'est possible. Commenter me donne envie de le relire, ce qui va influencer ma note.
Vraiment très bon ... Je lis et relis cette aventure,tous les 4,ou 5 ans depuis sa sortie complète. Depuis 1998 je suis un admirateur du travail de Damour, Pécau, mais aussi de l'équipe d'origine des 1ers albums ... Scénario, encrage, dialogues, mise en pages et dessins ... Tout est beau, et très bien ficelé... J'adore, ainsi que la 15aine de personnes à qui j'ai passé la série.. 17/20, (les 3 derniers un peu moins 14/20).
J'avais découvert l'extraordinaire parcours d'Helen Keller dans un roman pour la jeunesse que m'avait conseillé ma fille. J'avais été vraiment touché par ce récit qui développait une émotion bien plus forte que dans le série de Joseph Lambert. Je pense que l'œuvre de Lambert s'adresse avant tout à un public US qui connait déjà bien l'histoire d'Helen. Cela explique probablement pourquoi le centre de gravité du récit est déplacé vers Annie Sullivan et sa personnalité très complexe. C'est bien la personnalité de la jeune immigrée irlandaise qui est mise en avant par l'auteur d'une façon très travaillée. Les séquences alternent empathie ( les flashback dans le terrible asile de Tewksbury à Boston) et antipathie avec une méthode éducative violente et une absence de compromis. Cette complexité du caractère de Sullivan est bien mise en avant par son rapport à l'autorité qu''elle ne supporte pas pour elle-même mais qu'elle impose avec brutalité à la jeune Helen. En outre j'ai apprécié que Lambert développe deux autres points. Le premier point va de soi en montrant la formidable richesse du cerveau humain à travers les apprentissages d'Helen. Le second point est moins évident pour un public non américain. L'auteur souligne souvent l'appartenance sociale et culturelle opposées d'Helen et d'Annie. Vingt ans à peine après la guerre de Sécession les Keller sont Sudistes, le papa fut capitaine des Gris et reprend souvent Annie sur l'inconvenance de ses actes dans la culture locale. Annnie est Nordiste, immigrée et orpheline. La rencontre improbable de ces deux êtres exceptionnels a eu un avenir d'une richesse insoupçonnée . C'est comme si l'auteur voulait montrer que l'union de ces deux parties pouvait conduire au dépassement de soi comme une sorte de "miracle".
On peut faire la fine bouche sur un graphisme minimaliste , parfois assez repoussant et qui ne met pas en valeur les personnages. J'ai lu cet excès de froideur comme une volonté de laisser l'émotion naturelle du récit seulement en arrière plan d'une lecture plus réflective.
Je comprends que certains lecteurs ou lectrices aient pu être déroutés voire rebutés mais perso j'y ai trouvé une réelle richesse humaine.
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Le Faux Soir
Jean imagine déjà le journal, les moqueries, les pastiches, la zwanze. - Ce tome contient une histoire complète, de nature historique. Son édition originale date de 2021. Il a été réalisé par Daniel Couvreur et Denis Lapière pour le scénario, et par Christian Durieux pour les dessins et les couleurs. Il comprend quatre-vingts pages de bande dessinée. Il comporte une postface de deux pages, écrite par Couvreur, et une autre d’une page écrite par Durieux évoquant quelques petits choix à réaliser par rapport à la réalité historique. À l’époque contemporaine, les trois auteurs se trouvent dans les bureaux du Soir à Bruxelles. Daniel évoque la situation du journal à l’époque : Ils l’appelaient Le Soir emboché. Il a pu retrouver dans les archives une sorte de journal tenu par Marc Aubrion, c’est là qu’il a lu pour la première fois ce terme Emboché. Denis demande si c’est Aubrion qui est l’origine du Soir Volé. Le journaliste clarifie : Pas Le Soir Volé, mais le Faux Soir. Le Soir Volé, c’est le journal aux mains des Allemands, c’est Le Soir emboché justement. En réponse à une question de Christian, il précise qu’il a lu de larges extraits du journal d’Aubrion, et il en a préparé une copie pour son coscénariste. Denis parcourt en vitesse le récit : c’est formidable, un récit complètement exalté. Daniel confirme : Oui, quelque part, René Noël écrit qu’Aubrion était un grand échalas nerveux et enthousiaste. En réponse à un question, il détaille : Un canular, oui, et plusieurs en sont morts par la suite… Ils n’ont tué personne, ils n’ont détruit aucun bâtiment, aucune violence, et pourtant ce fait de résistance est remonté à la fois jusqu’à Hitler et jusqu’à Churchill ! Enfin, il indique qu’il a trouvé une offre de vente d’un exemplaire du Faux Soir et qu’il a fait une offre que le vendeur ne peut pas refuser. Le 10 septembre 1943 à Bruxelles, il fait encore chaud, l’été tarde à se retirer. René Noël, dit Jean, marche dans la rue, croisant une patrouille de soldats allemands. Il est le responsable du Front de l’Indépendance (F.I.) pour le Brabant et le Hainaut. Jean se rend ainsi, en cette fin d’après-midi un peu étouffante, chez son ami le peintre Léon Navez. Mais il ne s’agit pas d’amitié cette fois. Ils ont rendez-vous. Léon le fait rentrer chez lui et il lui présente Marc Aubrion qui déclare qu’il se sent si inutile avec ses petites actions sporadiques, il est prêt à se mettre au service du F.I., il n’a pas d’attaches et il est déterminé. Jean sait que si Léon lui recommande quelqu’un, il peut lui faire confiance. Il boit donc une petite gorgée de mauvaise chicorée, sans rien laisser paraître de sa grimace, avant de se tourner vers Marc Aubrion et de lui annoncer qu’ils cherchent un responsable de presse, est-ce que cela lui conviendrait ? Quelques jours plus tard, Jean a convoqué Aubrion pour 19h30 place du Grand Sablon. Il lui annonce que son interlocuteur va devoir disparaître officiellement, quitter son emploi actuel et sa famille, sans donner d’explications à personne. Il se cachera dans une famille d’accueil qui ne connaîtra rien de Marc, M. et Mme Hellas, ils résident rue Cyriel-Verschaeren, à l’Evere. Et désormais, il portera le sobriquet d’Yvon. Le lecteur prend l’ouvrage en main, et il découvre qu’il contient un encart inséré à l’intérieur : une reproduction intégrale du Faux Soir, une feuille indépendante qui se déplie et qui permet de lire l’édition de Le Soir du neuf novembre 1943.il y découvre les différents articles, les deux photographies, et les différentes rubriques : Nouvelles du pays, Un fait entre 1000, Les sports, Cinémas, Théâtres, Faits divers, Petites annonces, Nécrologie. Les auteurs ont fait le choix de construire leur récit sur la base de deux fils chronologiques différents : celui au temps présent dans lequel les auteurs se mettent en scène dans leur démarche de réaliser cette bande dessinée, et celui qui suit la conception, la fabrication et la distribution du Faux Soir par les différents acteurs. Ainsi les auteurs rendent hommage à la démarche de Marc Aubrion (nom de code Yvon), René Noël (Jean), Louis Müller (Jacques), Fernand Demany, Andrée Grandjean (1910-1999, avocate et journaliste), Ferdinand Wellens, Théo Mullier, Léon Navez (1900-1967, peintre). Au cours du récit, les auteurs font en sorte d’apporter les éléments d’information historique nécessaires à la compréhension des faits. À l’époque contemporaine, la conservatrice d’un musée explique à Lapière le fonctionnement du Front de l’Indépendance, et ses liens avec l’Armée des Partisans. Puis ils montrent comment René Noël entre en clandestinité, la manière dont il est hébergé, il est également question de la rétribution correspondante pour pouvoir vivre. Dans un premier temps, le lecteur s’intéresse au récit de l’idée du Faux Soir et au reportage sur sa création. Il attend une reconstitution historique. Les dessins passent de personnages en train de se parler, représentés en plan taille ou en plan poitrine, à des cases présentant une plus forte densité d’informations visuelles. Lors de ces dialogues, il apprécie de pouvoir voir les tenues vestimentaires des uns et des autres, assez formelles. Majoritairement pantalon, chemise et veste pour les hommes, avec régulièrement une cravate, sans oublier les uniformes militaires pour les soldats de l’armée d’occupation. Le récit comporte quelques femmes, en nombre moins importants, avec en particulier l’avocate Andrée Grandjean, habillée d’un tailleur strict, visiblement sous le charme de Léon Navez et de son beau pull jacquart, avec qui elle partage une cigarette. Le dessinateur effectue également un gros travail de représentation de la ville : les rues pavées, les tramways, les façades des bâtiments et leur architecture, les bâtiments célèbres tel le palais de Justice, la place de la Bourse, la résidence Belvédère au 453 de l'avenue Louise, etc. Il montre également des éléments techniques essentiels pour le récit comme les machines d’imprimerie (en particulier une de marque Mariononi), les machines à écrire, les dentelures de journaux, un énorme massicot, les véhicules de distribution des journaux, et bien sûr les kiosques de la ville. L’artiste reconstitue également les faits et gestes des résistants. Il sait bien capturer le besoin de vigilance pour eux : petits coups d’œil en arrière dans la rue, tension lorsqu’ils se déplacent après l’heure du couvre-feu, mines déterminées pour accomplir leurs missions, enthousiasme pour rédiger les articles à base de moqueries, pastiches et zwanze, action d’éclat pour endommager les véhicules de distribution des journaux, sourire en coin en voyant la réaction des lecteurs du Faux Soir. Le lecteur se retrouve pris par l’ambiance qu’il s’agisse d’une discussion en pleine rue entre Jean et Yvon pour évoquer l’entrée en clandestinité de ce dernier, des discussions discrètes dans les cafés entre conspirateurs, de la connivence née de la satisfaction de voir le projet progressivement devenir réalité, des échanges très professionnels devant la machine d’imprimerie pour arriver au résultat souhaité, c’est-à-dire des exemplaires qui pourront faire illusion quand ils seront remis aux kiosquiers, afin que ceux-ci les vendent sans soupçonner la supercherie. La quinzaine de pages consacrées au temps présent semblent faire écho à cette complicité : les trois auteurs travaillant de concert lors de réunions (qui n’ont rien de clandestines) pour rendre hommage à ces résistants utilisant une méthode totalement pacifiste. Il s’agit pour les auteurs de raconter un haut fait de la Résistance belge pendant la seconde guerre mondiale. Dans la postface, Daniel Couvreur l’exprime ainsi : […] un exploit accompli dans un temps où les idéaux de fraternité, de démocratie étaient sous la botte de penseurs et de dirigeants prêts à toutes les extrémités pour fracturer les solidarités humaines et le vivre-ensemble. […] Le récit d’un petit groupe de citoyens courageux, animés par le formidable espoir de bâtir un monde meilleur. À la seule force de l’esprit et de l’humour, ils ont tenté pacifiquement de triompher de l’obscurantisme aveugle. Dans un moment où la population était ébranlée, désorientée, et offrait une proie facile à la propagande, ils ont tourné les faux prophètes et leurs collaborateurs en ridicule. En creux le lecteur retrouve ou découvre toutes ces qualités dans le mode opératoire qui est décrit, et dans le passage vers la fin qui informe sur ce qu’il est advenu des différentes personnes ayant participé à cette opération, une fois qu’ils ont été identifiés par les Nazis. Le récit présente un autre intérêt, très factuel et pédagogique : comment s’y sont-ils pris ? Après tout, cela n’a pas l’air bien compliqué d’écrire de faux articles et de faire distribuer le journal correspondant dans les kiosques. Les auteurs savent bien mettre en place et montrer que l’occupation allemande implique une répression bien réelle, une atmosphère de suspicion (À qui se fier ?) et une résignation pour pouvoir survivre. Les artisans du Faux Soir ont bien l’intention de réussir leur projet, et d’y survivre. Le récit raconte et explique la réalité matérielle d’une telle entreprise : trouver une imprimerie et un propriétaire prêt à courir le risque quand bien même il est rétribué, trouver assez de rédacteurs pour remplir un journal, substituer le Faux Soir au vrai lors de la distribution, trouver le financement d’une telle opération. À la lecture apparaissent aussi bien la fragilité d’une telle entreprise qui peut être découverte à tout moment, que l’ingéniosité et l’entraide des participants. Réaliser un faux numéro d’un quotidien, à base d’articles fonctionnant sur les moqueries, les pastiches, la zwanze, au nez et à la barbe de l’occupant allemand. Une entreprise de résistance totalement pacifique et belge, une ode au pouvoir de la presse et de l’humour. Les auteurs racontent cette aventure avec respect et réalisme, permettant au lecteur de comprendre et d’admirer le courage de ces résistants. Formidable.
La Maison où rêvent les arbres
Les gens se plaignent de trop d'explications, mais quand on les laisse cogiter, dériver dans les songes, il n'y a plus personne ! Des êtres capables d'en rêver d'autres, les arbres, se rebellent contre les humains. Lesquels ne sont pas diabolisés, leur charge pèse trop sur les arbres, c'est tout, ils nous rejettent. Réaction vitale de la vie, bien évidemment de l'ordre du mythe ! Les arbres rêvant ne sont pas plus sympas que le commun des humains dont on peut penser qu'il vaut mieux qu'ils se purgent de leur agressivité dans la chasse qu'entre eux, et c'est bien vu, la vie n'est pas gentille, souffrance et mort existant bien avant l'espèce humaine et trouvant des développements inédits avec elle. Ce sont souvent les innocents qui paient pour les autres, ça aussi, c'est bien vu. Il y a une fin ouverte terrifiante : et si tout ce qui vient des arbres nous rejetait ? Les amateurs de BD savent qu'ils serait difficile de s'en passer, ne fut-ce que parce que les BD et autres livres se lisent surtout sur du papier tiré de leur coupe.. La petite fille, personnage principal, est la plus intelligente, sorte d'Alice au pays des merveilles d'un monde à peine esquissé opportunément recouvert de brume. Les animaux de rêve sont marrants, exemple l'enfant a peur de dormir à cause du monstre qu'elle craint qu'il y ait sous le lit ? L'animal dit qu'il y en a toujours un sur un ton normal, et comme si rien de mal ne pouvait en advenir. Pour une fois, Comes fait quelques références sur la BD, et en plus, elles ne tombent pas comme un cheveu sur la soupe. Chapeau l'artiste !
Silence
Comes est vraiment très inégal, et par là, je vise surtout ses albums en couleur, dispensables que je noterais à 2 si je m'en donnais la peine. Son talent pour le noir et blanc égale les créateurs de Mort Cinder et Corto Maltese, ce n'est pas rien. Mais ses visages sont peu variés, oscillant souvent entre dégénérés de la campagne et visages à la Giacometti de partout. Encore que la vieille très ridée au visage de masque de La maison où rêvent les arbres, et l'ingénuité de sa petite fille amorcent une diversification passée incroyablement inaperçue ! J'aime l'exploration d'une ruralité non idéalisée mais défendue contre le mépris de trop d'urbains. Il y a des éclats de magie, offrant une évasion à certains mal intégrés par la société en raison d'un psychisme particulier comme le héros éponyme Silence, ou bien parce que femmes insoumises. L'appétence vers l'esthétique nazie me met mal à l'aise, me semblant présentée comme morbide, certes, mais aussi le privilège de certains êtres raffinés. Cependant, tout cela me semble non une complaisance idéologique, mais des résurgences historiques dans le psychisme des personnages et la prolongation perverse du romantisme allemand. Pour alléger un peu l'atmosphère, un humour bienvenue apparaît parfois. Mais à son meilleur comme ici, Comes mérite toutes nos étoiles.
Sherlock Holmes contre Arsène Lupin
Un graphisme emballant et des couleurs parfaites qui m’emmènent à l’intérieur. Des personnages un tout petit peu en dessous des canons dans les dialogues, dans la mesure de leur ego. Il manque quelques planches pour mieux comprendre les passages de déduction de l’un et l’autre. MAIS je retrouve mes deux héros préférés avec un grand bonheur. Et une pointe d’acidité digne de La Ligue des Gentlemen Extraordinaires. Une très très bonne bd découverte par hasard sur un rayon.
Undertaker
Pas grand chose à ajouter à mes prédécesseurs, je fais partie des très satisfaits avec cette série. Depuis le début, la partie graphique est d’une solidité à toute épreuve. Ralph Meyer régale tout simplement, on savait qu’il avait du talent mais dans ce genre ça explose. Franchement rien à redire. Niveau histoire, on aura ses préférences en fonction des diptyques (4 à ce jour) mais ça ne faiblit pas (peut-être même l’inverse), c’est d’une belle constance. J’aime toujours autant le cynisme du héros, Jonas Crow est encore loin de m’avoir saoulé. Je suis même bien plus impatient (qu’avec les précédents tomes) de connaître la suite de ses aventures. Du très bon western avec juste ce qu’il faut de classique et différent. Une série qui monte tout doucement les marches des véritables poids lourds dans la catégorie.
Quartier Western
Tehem es un auteur que j'apprécie, surtout quand il nous parle de son île d'adoption, La Réunion. La série propose un très sympathique récit choral autour de la boutique du "Chinois" amateur de photographie. En ce 22 septembre 1976, Titi, Gérard, Céline, Angelo, Turpin et ses fantômes vont être entrainer dans une folle sarabande où se mêlent zamal, rhum trafiqué, alcool à brûler, #dénoncemonporc et punition divine. La construction en quatre chapitres qui se recoupent parfaitement pour fournir de multiples rebondissements dans une progression qui ne dévoile rien du final. C'est aussi un prétexte pour nous décrire le ressenti d'un petit "Zoreille" qui vit au milieu de ce quartier cosmopolite dans un langage mi français mi créole très chantant et facile à lire. L'auteur utilise un univers animalier qui rend bien le cosmopolitisme de la situation dans un graphisme précis et dynamique. Ma seule réserve tient au choix d'un N&B qui nous prive des couleurs de l'île. Une belle découverte.
Dans les yeux de Billie Scott
J'ai dégusté avec délectation ce premier essai de la jeune anglaise de vingt ans ( à l'époque), Zoé Thorogood. Comme quoi le talent... . J'ai immédiatement été séduit par son talent graphique qui peint à merveille cette ambiance un peu poisseuse des rues désertes et plus ou moins mal famées de Middlesborough ou de Londres. C'est à la fois dynamique et moderne avec un formidable sentiment de vitalité qui rend son héroïne Billie si attachante dans cette lutte entre fragilité et volonté. La mise en couleur est parfaite avec ce N&B dominateur dans un environnement peuplé de laissés pour compte mais où percent les couleurs du printemps final comme des perce-neiges obstinément optimistes à combattre l'obscurité hivernale. Combattre l'obscurité c'est bien ce que doit faire Billie dans un scénario compte à rebours digne d'un très bon thriller. L'idée initiale est originale et l'auteure en extrait un récit fluide, tonique et d'une grande humanité. Les rencontres et les lieux que Zoé/Billie explore ont fortement résonné avec mon vécu associatif. Je suis même impressionné comment une artiste aussi jeune arrive à mettre autant de profondeur et de justesse dans la personnalité de ses personnages. Toutefois le récit reste résolument optimiste sans jamais tomber dans la mièvrerie sentimentale. J'ai eu l'impression que Zoé jetait tout ce qu'elle avait dans cette œuvre comme si ensuite la lumière pouvait s'éteindre. Cela dégage une envie de création très forte. Je me suis retenu pour ne pas mettre la note max mais cette œuvre m'a beaucoup parlé par sa thématique et son exécution. Un vrai coup de cœur.
Le Pacte des Yôkai
Une série bien poétique ! Le trait, beau, n'est pas son seul attrait. Assez d'action pour chasser l'ennui, assez de contemplation pour être plongé dans une atmosphère étrange autant qu'esthétique. Et les deux ne me semblent faire qu'un, de même que l'auteur parlant de sa vie ne parvient pas à casser le rythme. Je l'attribue au fait que la dame est talentueuse, mais pas que. Il n'y a pas opposition entre la nature, et la culture, le réel et l'imaginaire, mais des glissements très subtils, au Japon. Sinon, j'aime que le héros protège les humains des yokais agressifs, mais aussi qu'il délivre "ses" yokais et protège aussi les créatures magiques quand c'est possible. Commenter me donne envie de le relire, ce qui va influencer ma note.
Nash
Vraiment très bon ... Je lis et relis cette aventure,tous les 4,ou 5 ans depuis sa sortie complète. Depuis 1998 je suis un admirateur du travail de Damour, Pécau, mais aussi de l'équipe d'origine des 1ers albums ... Scénario, encrage, dialogues, mise en pages et dessins ... Tout est beau, et très bien ficelé... J'adore, ainsi que la 15aine de personnes à qui j'ai passé la série.. 17/20, (les 3 derniers un peu moins 14/20).
Annie Sullivan & Helen Keller
J'avais découvert l'extraordinaire parcours d'Helen Keller dans un roman pour la jeunesse que m'avait conseillé ma fille. J'avais été vraiment touché par ce récit qui développait une émotion bien plus forte que dans le série de Joseph Lambert. Je pense que l'œuvre de Lambert s'adresse avant tout à un public US qui connait déjà bien l'histoire d'Helen. Cela explique probablement pourquoi le centre de gravité du récit est déplacé vers Annie Sullivan et sa personnalité très complexe. C'est bien la personnalité de la jeune immigrée irlandaise qui est mise en avant par l'auteur d'une façon très travaillée. Les séquences alternent empathie ( les flashback dans le terrible asile de Tewksbury à Boston) et antipathie avec une méthode éducative violente et une absence de compromis. Cette complexité du caractère de Sullivan est bien mise en avant par son rapport à l'autorité qu''elle ne supporte pas pour elle-même mais qu'elle impose avec brutalité à la jeune Helen. En outre j'ai apprécié que Lambert développe deux autres points. Le premier point va de soi en montrant la formidable richesse du cerveau humain à travers les apprentissages d'Helen. Le second point est moins évident pour un public non américain. L'auteur souligne souvent l'appartenance sociale et culturelle opposées d'Helen et d'Annie. Vingt ans à peine après la guerre de Sécession les Keller sont Sudistes, le papa fut capitaine des Gris et reprend souvent Annie sur l'inconvenance de ses actes dans la culture locale. Annnie est Nordiste, immigrée et orpheline. La rencontre improbable de ces deux êtres exceptionnels a eu un avenir d'une richesse insoupçonnée . C'est comme si l'auteur voulait montrer que l'union de ces deux parties pouvait conduire au dépassement de soi comme une sorte de "miracle". On peut faire la fine bouche sur un graphisme minimaliste , parfois assez repoussant et qui ne met pas en valeur les personnages. J'ai lu cet excès de froideur comme une volonté de laisser l'émotion naturelle du récit seulement en arrière plan d'une lecture plus réflective. Je comprends que certains lecteurs ou lectrices aient pu être déroutés voire rebutés mais perso j'y ai trouvé une réelle richesse humaine.