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Couverture de la série La Neige était sale
La Neige était sale

En ce début d’année, après quelques très très bonnes lectures dont celles partagées sur ce site (Le Fauve de Corleone, À mourir entre les bras de ma nourrice), je m’extasie enfin devant la première pépite de 2024. Pas réellement une découverte puisqu’elle provient de deux auteurs chevronnés à la bibliographie passé déjà remarquable. Je ne connais pas le bouquin original de Simenon dont est issue cette oeuvre, Mais à la lecture, je n’ai à aucun moment pensé que cette BD ne se suffisait pas à elle-même. Sentiment que l’on peut ressentir quand on a l’impression que le parti pris de l’adaptation a laissé sur le trottoir une partie du texte. Cette BD est donc un petit bijou, ou le moindre détail du trio texte/dialogue/dessin est finement ciselé. Tout comme dans Contrition (une des perles de l’année dernière), cette histoire sonde les tréfonds de l’âme humaine, ici à travers le destin de Frank. Jeune Adulte d’une rare noirceur, privé de sentiment, celui-ci va se complaire à se détruire pour enfin atteindre une forme de rédemption et d’épanouissement. Malgré la froideur du personnage et la répulsion attendue générée par un personnage aussi détestable dans ses pensées et ses actes, une attirance malsaine est à l’œuvre tant nous sommes fasciné par ce démon au visage d’ange. Le dessin d’Yslaire est juste magique. A l’image de notre héros (avant de se faire salement amocher), chaque planche se révèle d’une beauté gracieuse, mais là ou on ne ressent que froideur en lui, le dessin réhaussé par un choix de couleurs subtils et délicats dégage à l’opposé une chaleur soyeuse et ce malgré un temps hivernal et une neige omniprésente qui sert de fil rouge à l'intrigue jusqu'à se retrouver dans le titre. Sublime.

29/02/2024 (modifier)
Par Josq
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Les Aventures de Tintin
Les Aventures de Tintin

Qu'est-ce qui rend Tintin si intemporel ? Après m'être éloigné un certain temps de la saga, je m'y suis remis il y a peu et l'ai redécouverte avec mes yeux d'enfants. D'où la question qui m'est venue à l'esprit : quel est le secret de Tintin ? Finalement, qu'est-ce qui fait de Tintin... Tintin ? Il est difficile - pour ne pas dire impossible - de répondre à cette question. Mais il est permis d'essayer d'identifier ce qui, chez Hergé, dégage cette magie si singulière qu'on ne retrouve nulle part ailleurs, alors même que la formule Tintin a été reprise partout et par tous jusqu'à l'overdose. Commençons par le plus évident : Tintin, c'est cette ligne claire, devenue si culte, qui fait d'un dessin d'Hergé un dessin reconnaissable entre mille. Bien sûr, ce style n'a pas commencé avec Hergé, mais aujourd'hui, il en est presque synonyme. On ne peut dissocier l'un de l'autre tant, sur le plan graphique, Tintin pose des bases qui se révéleront fondatrices pour toute une frange des dessinateurs de bande dessinée à venir. Ce dessin très pur, libéré de toute entrave, de tout détail excessif, trouve une forme d'équilibre qui explique sans aucun doute pourquoi Tintin est aussi marquant sur le plan graphique. Pas de fantaisie, pas de remise en cause des codes établis, tout est conforme aux règles de base, donnant à la bande dessinée une unité qu'on ne retrouve finalement que rarement (à ce point) chez d'autres dessinateurs. Tintin, c'est aussi cet art narratif unique qui fait d'Hergé un des plus grands conteurs du monde de la bande dessinée. Contrairement à d'autres auteurs comme Greg, qui s'amusent à tout tenter et multiplient les récits sans souci excessif de cohérence (mais pour notre plus grand plaisir quand même), Hergé est en quête du scénario parfait. Il publie (relativement) peu, mais ne veut publier que de l'extrême qualité. Il sait même à quel point il est le seul à mener cette démarche très entière, et interdit donc qu'un quelconque auteur lui succède. L'unité entre les séquences est absolument remarquable, il n'y a qu'à voir l'admirable introduction de Tintin au Congo pour voir l'aisance avec laquelle Hergé nous fait découvrir les différents endroits du bateau, en introduisant peu à peu ses personnages (Milou étant la star de cette introduction), avec un art de la progression unique, nous faisant aboutir à la découverte de l'antagoniste, caché dans la cale. Ce merveilleux enchaînement de scènes introduit tout l'art narratif d'Hergé, dans ce qui reste à mes yeux le vrai premier tome de la saga (Tintin au pays des Soviets étant pour moi un tome zéro, une sorte de préfiguration de ce qui deviendra seulement au tome suivant Tintin, ne me demandez pas pourquoi). A cette image, quelle que soit l'aventure que l'on sélectionne, la saga d'Hergé ne nous offre que des moments d'anthologie, formidables dans le découpage de l'action, très cinématographiques dans le choix des plans et du montage des séquences. Tintin, c'est évidemment ce parfum de mystère unique, qui transporte la saga dans une sorte de terrain entre la réalité et le fantastique, sans jamais basculer pleinement dans le merveilleux. C'est peut-être pour moi ce qui définit le mieux la saga : le mystère est omniprésent, pas un vague mystère policier sur le "qui ?", mais un mystère bien plus épais sur le "comment ?". On veut savoir comment Tintin va pouvoir à lui seul démanteler ce grand réseau de trafiquants qui semble tout-puissant, on veut savoir comment les savants des Sept boules de cristal ont été envoutés et comment les tirer de là, on veut savoir comment Tintin retrouvera le pauvre Tchang après ce terrible crash d'avion. Et puis, bien sûr, on veut toujours savoir comment Tintin va se tirer de cette terrible situation dans laquelle l'a plongé un auteur malicieux et sans scrupules. N'hésitant pas à emprunter au fantastique (poupées vaudou, rêve prémonitoire) ou à la science-fiction (une météorite tombée du ciel, un voyage spatial), Hergé ne fait jamais entrer ses récits dans ces cases trop étriquées pour lui et reste aux frontières des genres en préférant rester dans cette catégorie bien vaste qu'est l'Aventure, qui autorise toutes les fantaisies, sans nous emprisonner derrière une étiquette trop définie. Tintin, c'est cette écriture savante des personnages. Tous les personnages de la saga sont attachants. A la lisseté volontaire du héros s'oppose la brutalité d'un capitaine Haddock au grand cœur, la surdité d'un savant parfois pénible mais souvent génial, la bêtise touchante d'un duo de détectives animé par un réel sens de la justice, mais aussi l'exubérante amitié d'une cantatrice insensible aux réactions d'un public exigeant, la terrifiante ambiguïté d'un méchant qui cache son jeu sous le masque d'une bonté rugueuse ou encore l'implacable radicalité d'un mystérieux docteur dont la corruption est la principale activité. Chacun de ces personnages est haut en couleur, attachant ou repoussant, mais toujours fort en caractère, et finalement, terriblement humain. Tintin, enfin (on pourrait continuer longtemps !), c'est ce rapport brûlant à l'actualité, qui fait de terribles événements de fantaisistes sujets d'aventure. Qu'il s'agisse de l'URSS, du Congo belge de la Mandchourie ou de la Palestine mandataire (rares ancrages vraiment réalistes dans l'univers d'Hergé), Tintin traverse les grands lieux de conflits et d'intrigues géopolitiques de son époque. Mais Hergé les invente aussi parfois, et il est évident que le San Theodoros, la Syldavie et la Bordurie ne sont que des métaphores joyeuses mettant en scène des réalités beaucoup moins joyeuses, à peine masquées par le voile du conte. En outre, Tintin ira sur la lune, sera à deux doigts de rencontrer des extraterrestres, ou sera emprisonné (ou ne le sera pas, selon si l'on considère que Tintin et l'Alph-art existe ou non) par un gourou arnaqueur à l'identité bien connue. Ce faisant, Hergé fait systématiquement ressurgir les grands débats, les grands conflits, les grandes idées de son époque, en les exorcisant de leur noirceur pour les mettre au cœur d'un combat où le Bien finit toujours par triompher. Et finalement, c'est peut-être là que réside le grand secret de cette immense saga : Tintin ne serait-il pas, tout simplement, le remède universel à l'horreur du monde contemporain ?

29/02/2024 (modifier)
Par Charly
Note: 5/5
Couverture de la série De Cape et de Crocs
De Cape et de Crocs

De Cape et de Crocs est une œuvre originale, inventive, drôle et émouvante, qui rend hommage à la littérature classique, notamment à Alexandre Dumas, Jules Verne, Molière, Racine, Cyrano de Bergerac et Victor Hugo. Cette série de bande dessinée m'a enchanté par son humour, son aventure et son originalité. C'est un hommage aux romans de cape et d'épée, mais aussi à la littérature classique, au théâtre, à la poésie, à la science-fiction et à la fantasy. Les auteurs, Alain Ayroles et Jean-Luc Masbou, ont créé un univers riche et foisonnant, peuplé de personnages hauts en couleur et attachants. Le scénario Le scénario est truffé de références culturelles, de jeux de mots, de calembours, de quiproquos, de rebondissements, de duels, de romances, de trahisons, de révélations, et de dialogues savoureux, souvent en vers. De cape et de crocs est une bande dessinée qui m'a séduit par son scénario, qui est à la fois complexe et limpide, original et classique, divertissant et instructif. C'est une histoire qui ne cesse de surprendre le lecteur, en lui faisant découvrir des mondes et des secrets insoupçonnés. C'est une intrigue qui se déroule sur plusieurs tomes, mais qui ne perd jamais le fil ni le rythme. C'est un récit qui fait appel à l'intelligence, à l'imagination, et à la sensibilité du lecteur. Le scénario de cette saga est construit comme un puzzle, où chaque pièce s'emboîte parfaitement avec les autres. Les auteurs, Alain Ayroles et Jean-Luc Masbou, ont su créer une cohérence interne, tout en jouant avec les codes et les clichés du genre. Ils ont su doser les rebondissements, les révélations, les mystères, et les quiproquos, sans jamais tomber dans la facilité ou la redondance. Ils ont su varier les tonalités, en passant de la comédie au drame, de l'horreur à la romance, de la satire à l'épopée, sans jamais perdre le sens de l'humour ou de la poésie. Le scénario de cette bande dessinée est aussi un hommage à la culture, à la littérature, et à l'histoire. Les auteurs ont puisé leur inspiration dans de nombreuses sources, comme les romans de cape et d'épée, les fables de La Fontaine, les contes orientaux, les voyages de Gulliver, la mythologie grecque, la Renaissance italienne, le Siècle d'or espagnol, ou encore la Révolution française. Ils ont parsemé leur histoire de clins d'œil, de citations, de parodies, et de références, qui ravissent les lecteurs les plus érudits, sans gêner les lecteurs les moins initiés. Le dessin Le dessin est dynamique, expressif, coloré, et fourmille de détails. De cape et de crocs est une bande dessinée qui m'a ébloui par son dessin, qui est d'une qualité exceptionnelle. C'est un dessin qui rend hommage au style franco-belge, mais qui a aussi sa propre identité. C'est un dessin qui exprime avec finesse et dynamisme les émotions, les actions, et les décors des personnages. C'est un dessin qui sublime le scénario, en lui donnant de la profondeur, de la couleur, et de la vie. Le dessin de cette saga est l'œuvre de Jean-Luc Masbou, qui a su créer un univers visuel unique et cohérent. Il a su dessiner des animaux anthropomorphes, qui ont tous une apparence, une gestuelle, et une expression propres. Il a su dessiner des paysages variés, qui vont de la France à la Lune, en passant par la Turquie, la Venise, ou le Nouveau Monde. Il a su dessiner des scènes d'action, qui sont fluides, lisibles, et spectaculaires. Il a su dessiner des scènes d'humour, qui sont drôles, ironiques, et burlesques. Le dessin de cette bande dessinée est aussi un régal pour les yeux, grâce à la maîtrise des couleurs, des lumières, et des ombres. Les couleurs sont vives, contrastées, et harmonieuses. Elles reflètent l'ambiance, le climat, et le ton de chaque scène. Les lumières sont subtiles, nuancées, et réalistes. Elles mettent en valeur les volumes, les reliefs, et les textures. Les ombres sont délicates, précises, et suggestives. Elles créent du mystère, du relief, et du mouvement. Les personnages Les personnages sont attachants, charismatiques, complexes, et évoluent au fil de l’histoire. Le héros de cette saga est le chevalier Armand Raynal de Maupertuis, un gentilhomme français qui se lance dans une quête du fabuleux trésor des îles Tangerines, accompagné de son fidèle ami, le poète et aventurier Don Lope de Villalobos y Sangrin. Mais ce qui rend cette histoire si singulière, c'est que ces deux personnages sont en réalité... des animaux anthropomorphes ! Armand est un renard et Don Lope est un loup. Ils croiseront sur leur chemin d'autres créatures étonnantes, comme le lapin Eusèbe, le mouton Sémiramide, le lion Bombastus, le crocodile Kader, ou encore le singe Malatesta. Ces personnages sont le véritable atout de cette bande dessinée. Ils sont tous dotés d'une personnalité forte et d'un charisme indéniable. Ils sont drôles, émouvants, courageux, rusés, romantiques, loyaux, ou parfois fourbes, cruels, lâches, ou jaloux. Ils parlent avec élégance, en vers ou en prose, en français, en espagnol, en italien, en latin, ou en langues inventées. Ils font preuve d'une culture immense, en citant des auteurs célèbres, en jouant des pièces de théâtre, en récitant des poèmes, ou en inventant des machines extraordinaires. Ils vivent des aventures palpitantes, en traversant des mers, en explorant des îles, en combattant des pirates, en affrontant des monstres, en s'évadant de prisons, ou en découvrant des civilisations secrètes. Les thèmes abordés La série aborde aussi des thèmes universels, comme l’amitié, l’amour, la liberté, la justice, le courage, la loyauté, la quête de soi, et le sens de la vie. De cape et de crocs est une bande dessinée qui m'a fasciné par ses thèmes, qui sont à la fois universels et originaux. C'est une bande dessinée qui aborde des sujets variés, comme la liberté, l'amitié, l'amour, la quête, l'identité, la tolérance, la justice, ou encore la folie. C'est une bande dessinée qui traite ces thèmes avec finesse, intelligence, et sensibilité. C'est une bande dessinée qui fait réfléchir, rire, pleurer, et rêver le lecteur. Les thèmes de cette saga sont développés à travers les personnages, les situations, et les dialogues. Les auteurs, Alain Ayroles et Jean-Luc Masbou, ont su créer des personnages qui incarnent des valeurs, des idéaux, ou des contradictions. Ils ont su créer des situations qui illustrent des enjeux, des dilemmes, ou des paradoxes. Ils ont su créer des dialogues qui expriment des opinions, des sentiments, ou des philosophies. Ils ont su faire dialoguer les thèmes entre eux, en créant des oppositions, des contrastes, ou des harmonies. Les thèmes de cette bande dessinée sont aussi enrichis par les références, les symboles, et les métaphores. Les auteurs ont utilisé des références culturelles, historiques, ou littéraires, qui renvoient à des courants, des époques, ou des œuvres. Ils ont utilisé des symboles visuels, sonores, ou narratifs, qui renforcent le sens, l'émotion, ou l'esthétique. Ils ont utilisé des métaphores animales, spatiales, ou temporelles, qui suggèrent des analogies, des comparaisons, ou des allégories. Ils ont su jouer avec les niveaux de lecture, en proposant des interprétations multiples, implicites, ou cachées. Conclusion De cape et de crocs est une bande dessinée qui m'a fait rire, rêver, voyager, et réfléchir. C'est une œuvre magistrale, qui mêle avec brio l'humour, l'action, le fantastique, et la poésie. C'est une ode à la liberté, à l'amitié, à l'amour, et à la beauté. C'est une bande dessinée que je recommande vivement à tous les amateurs du genre, et que je relis avec plaisir à chaque fois. C'est une œuvre qui se renouvelle à chaque tome, sans jamais se répéter ni se trahir. C'est une œuvre qui se savoure à chaque page, sans jamais s'ennuyer ni se lasser. C'est une œuvre qui se partage avec plaisir, sans jamais s'oublier ni se regretter. C'est une œuvre qui s’admire à chaque planche, sans jamais se démoder ni se faner. C'est une œuvre qui se distingue par sa beauté, sa richesse, et sa diversité. C'est une œuvre qui se respecte par son travail, son talent, et son art. De cape et de crocs est une bande dessinée qui m'a impressionné par ses thèmes, qui sont à la fois profonds et légers, sérieux et drôles, classiques et modernes. C'est une œuvre qui se questionne sur le sens de la vie, de l'art, et de l'histoire. C'est une œuvre qui se moque des préjugés, des conventions, et des absurdités. C'est une œuvre qui se réjouit de la diversité, de la beauté, et de la liberté. C'est une œuvre qui se vit avec passion, avec humour, et avec poésie. De Cape et de Crocs est une série qui se savoure, se relit, et se partage. C’est une véritable invitation au voyage, à l’aventure, et à la rêverie. C’est une série qui fait rire, pleurer, réfléchir, et vibrer. C’est une série qui restera dans les mémoires comme un chef-d’œuvre de la bande dessinée.

29/02/2024 (modifier)
Par LilyEve
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Les Royaumes muets
Les Royaumes muets

Les royaumes muets est une BD comme je les aime. Notre héroïne voit les fantômes et ne sais pas vraiment pourquoi. J'ai trouvé l'histoire bien rythmée et originale. Les illustrations sont tout simplement magnifiques, c'est un réel coup de cœur. Les dessins gothiques et les couleurs sombres fonctionnent à merveille avec le thème et que dire des décors ? On ne s'ennuie pas une seconde en lisant ce livre et j'ai hâte d'en savoir d'avantage. Cette BD convient très bien à un jeune public comme à un lectorat plus âgé.

27/02/2024 (modifier)
Par gruizzli
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Le Dieu vagabond
Le Dieu vagabond

Oh qu'il est beau celui-là ! J'ai un attrait pour la mythologie grecque, riche, foisonnante, mainte fois reprise et retravaillée en tout sens. J'aime surtout qu'elle soit toujours reprise, rejouée et réécrite pour en tirer de nouveaux commentaires sur notre monde, notre actualité, nos idées. Ici, Fabrizio Dori a fait dans l'excellence, à mes yeux. Une réappropriation à la croisée des genres et des influences, pour tirer de cette mythologie un commentaire sur notre monde contemporain. Brillant ! Ce qui saute aux yeux rapidement, c'est le talent du dessin. C'est coloré, dynamique, mais aussi bourré de références et de symboliques. Des plus évidentes (les reprises d'amphores grecques) aux clins d’œils vers les impressionnistes (Van Gogh ne pouvait pas être absent de cette BD), avec une recherche dans les décors, les personnages ... C'est des têtes de mort mexicaines qui côtoient des images de la Grèce antique pourrait paraitre étrange mais passe très bien, mélangeant des mythologies et des cultures pour en montrer l'universalité. Le dessin est inspiré, et la lecture s'en ressent. C'est beau, on en redemande. Personnellement j'ai hâte de le relire pour rechercher toutes les références. Niveau histoire, on brode sur la thématique habituelle du monde duquel les dieux se sont retirés avec l'arrivée du Christianisme. Cette thématique dans l'air du temps semble se nourrir d'une déconnexion de l'homme contemporain de la spiritualité qui l'a habité pendant des siècles : retour à la nature, retrouvailles d'anciennes fêtes, nostalgie d'un passé où l'homme se sentait plus en harmonie avec le monde (que ce fut vrai ou non). Sur ces thématiques, l'auteur livre une histoire aux multiples facettes que l'on pourra interpréter à loisir : regarder par les yeux du satyre, est-ce regarder par les yeux d'un artiste ? Eustis représente-t-il les vagabonds, les clochards, "ceux d'en bas" ? Est-ce une critique du monde contemporain, détaché de la nature et d'un sens profond du bonheur ? Tout ceci et plus encore, sans doute. Impossible de ne pas voir des choix réfléchis et conscient dans la représentation de Arès comme un ancien militaire néo-nazi et complotiste, très protecteur de "son" territoire, Aphrodite gérant un parc d'attraction aux multiples plaisirs proposés (que j'ai personnellement vu comme une métaphore d'Internet, avec sa bibliothèque infinie de tout les livres existants ou l'ancienne prostituée qui vient y travailler sans se rendre compte de la facticité du lieu, entouré d'obscurité). Les dieux grecs sont des archétypes dont l'auteur joue, et le sens qu'il donne à tout cela n'est pas anodin : l'entrée des enfers est dans la décharge derrière le parc d'attraction. Je trouve l'image parlante ! C'est typiquement le genre de BD que j'adore parce qu'elle utilise des codes et des symboles pour parler d'un monde, d'un air du temps, d'une idée. La déconnexion de l'homme avec la nature est assez nette, mais aussi la question de la beauté du monde (contrebalancé par des décharges et des tours d'immeubles), l'accomplissement personnel, la désillusion de nos choix de vie ... C'est riche et dense, mais beau aussi et la fin me donne le sourire. Une sorte de triomphe de l'amour et de la fête, du positif dans toutes ces représentations parfois triste. Comme dirait Pacôme Thiellement : "Carnaval doit renaitre", et cette BD invite aux libations antiques, à retrouver la beauté de la nature, à la fête éternelle de Dionysos, aux plaisirs ! Quelle belle BD ...

27/02/2024 (modifier)
Par LilyEve
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Le Pêcheur de rêves
Le Pêcheur de rêves

Cette BD est un coup de coeur pour moi. Je ne connaissais pas l'autrice mais je dois dire que la BD m'a enchantée. L'histoire de ce jeune Mael est intéressante. Nous le suivons dans sa recherche d'identité. J'ai adoré les dessins et la recherche d'équilibre entre le bien et le mal. Je recommande cette BD pour les jeunes qui sauront s'émerveiller devant ces pages colorées.

25/02/2024 (modifier)
Par Gregory
Note: 5/5
Couverture de la série Jeu de dames
Jeu de dames

J'avais acheté le premier tome pour mon ex femme qui ne l'a pas trop aimé. Pour moi c'était une promesse de suite sympa. Je me doutais d'un joli rebondissement. En effet le second (et dernier) tome apporte une suite plus forte que je ne l'avais imaginé. Je n'en dis pas plus pour maintenir le suspense. ;) Un bon coup de coeur ! Le dessin est simple mais efficace. Il dessert bien l'histoire et très agréable.

22/02/2024 (modifier)
Par Bruno :)
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Monster
Monster

Hé bé ! C'est l'Iliade & l'Odyssée ! Guerre et Paix ! Ou encore plus "fleuve " : Candy - Candy !! Quel foisonnement d'idées scénaristiques ! Quels personnages magnifiquement élaborés (et si nombreux !) ! Et surtout, quelle maestria à renouveler le suspense, tout au long des CENT SOIXANTE DEUX chapitres -en toutes lettres et en majuscules !- de cette effarante quête rédemptrice... Culte, ne serait-ce que pour l'ampleur de la chose, proprement époustouflante en elle-même -mais pas seulement. L'argument est élaboré, historiquement documenté et sinistre à souhaits ; et la spirale de violence et de mort provoquée par Johan ne cesse d'intriguer tant il est difficile d'assimiler immédiatement la nature des rapports entre le "monstre" et ses comparses (volontaires ou dupes). J'ai eu le tort de lire le tout d'une traite (difficile de résister !) ; mais il est évident que prendre son temps doit permettre de mieux appréhender les détails. Ça doit s'améliorer à la relecture. La forme du récit -presque un "road-trip" pour l'héroïque Kenzo Tenma, mais d'avantage des "scènes de vies" pour le reste du casting-, permet néanmoins de bien installer chaque "arc" ; et on a le temps de respirer entre deux exactions. C'est véritablement très classique dans la mise en scène : la tranquillité des multiples enquêtes, qui s'additionnent en parallèle ; et le crescendo vers chaque nouvelle révélation (ou scène-clé) est habilement mené. Un polard passionnant, dénonçant avec une grande richesse de détails réalistes les dérives éthiques des puissants, en opposant deux archétypes de comportement au travers des deux héros principaux, presque artificiels dans leur hyper-caractérisation antipode. Ceci venant encore accentuer le charme, limite suranné (siècle dernier, quoi !), du traitement de l'histoire. C'est à leur démesure que la profonde humanité des autres intervenants (les bons comme les mauvais) se révèle, en une variété de portraits prodigieusement variés (!). Le dessin est typique du genre : décors documentés et figuratifs sur lesquels se détachent si puissamment les personnages, dont la stylisation des visages résume adroitement les ressentis -quand on n'est pas réfractaire au procédé, si magnifiquement maitrisé par les Mangaka. À noter : une particularité au niveau de la taille des occiputs, trop petits, sauf quand le protagoniste nous fait face ?! Problème déjà évoqué pour le Manga Planètes, par Yukimura Makoto ?! ici, Urasawa Naoki est tellement balaise pour le reste que, là aussi, je n'ai pas d'explication rationnelle... La conclusion peut sembler manquer de "panache", tant les nombreuses péripéties qui nous y amènent s'apparentent à une virée (sans barrières de sécurité !) sur un Grand Huit ; mais elle est définitivement logique, et parfaitement à même de justifier la folie de Johan. Il est clair que l'aisance de son itinéraire meurtrier, ainsi que sa facilité à manipuler autrui, procèdent d'un brillant intellect (supposément génétiquement "supérieur" dans le récit) ; mais la plausibilité de la nature du véritable traumatisme originel, malheureusement plus banal que ce que l'auteur nous laisse imaginer, est, aux vues des conséquences terrifiantes, une puissante -et émouvante- validation de la profession de foi (originelle, elle aussi) du Docteur Tenma. Culte, donc.

21/02/2024 (modifier)
Par Alain
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Dieu qui pue, Dieu qui pète
Dieu qui pue, Dieu qui pète

Magnifique ! Soit c'est la mise en bd de vrais contes africains, pleins de bon sens et de malice, soit c'est de la fiction pure, et dans ce cas on ne peut qu'être admiratif de la capacité de l'auteur à se glisser dans la peau d'un griot (conteur) africain. Que du plaisir en tous cas.

20/02/2024 (modifier)
Par Spooky
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Bobigny 1972
Bobigny 1972

En 1972 a eu lieu un procès dont le sujet, les débats et la conclusion ont eu un impact énorme sur la société française depuis cinq décennies. Ce procès n'était pas seulement celui de Marie-Claire Chevalier, qui a avorté à la suite d'un viol, et de sa mère, pénalement responsable pour elle, mais aussi celui d'une loi inique, celle de 1920 condamnant toute femme ayant recours à l'avortement à une peine de prison. En 1971, lorsque Marie-Claire et sa mère sont arrêtées, 343 femmes, célèbres et anonymes, sont sortie du bois, pour affirmer qu'elles aussi ont dû avorter (plusieurs fois pour certaines), comme des milliers, des centaines de milliers de femmes (on parlait alors de 500 000 à UN MILLION d'avortements par an dans le pays). Sous l'impulsion de l'association Choisir (qui existe toujours) ces femmes et des milliers d'autres qui manifestent dans la rue refusent que cette situation perdure, que les hommes dictent leur volonté, prennent le contrôle de leur corps. Le procès de Marie-Claire et sa mère Michèle n'est pas le premier du genre, mais l'avocate Gisèle Halimi, co-fondatrice de Choisir, est déterminée à faire de ce procès, tellement exemplaire, celui qui fera basculer l'opinion publique et le législateur dans une nouvelle phase de leur histoire. Marie Bardiaux-Vaïente, historienne et scénariste passionnée par toutes les questions liées à la liberté individuelle et elle-même personnellement concernée par le sujet, a donc décidé, cinquante ans après les faits, de raconter ce moment crucial de notre Histoire. Elle a consulté pour cela de nombreux documents et témoignages, et tenté de retranscrire au mieux les différentes phases de cette affaire. Ainsi, même si Marie-Claire, sa mère et Me Halimi sont au centre de l'histoire, de nombreuses autres personnalités, comme Delphine Seyrig, à l'aura incroyable, Simone Veil, qui a porté au Parlement la loi légalisant l'IVG en tant que Ministre de la Santé, ou encore Françoise Giroud, journaliste qui fait fi des demandes de confidentialité du président du tribunal, sont-elles présentes. On pourra citer également Michel Rocard, qui a porté le projet de loi, ou le prix Nobel de médecine, parmi les personnages masculins. Le récit fait bien sûr la part belle aux interrogatoires et plaidoiries qui ont émaillé le procès, mais n'est pas avare de scènes intimistes, de scènes de mobilisations dans la rue, afin de retranscrire non seulement l'ambiance de l'époque, mais aussi de saisir à quel point les femmes -pauvres, de surcroît, une injustice supplémentaire soulevée par Gisèle Halimi durant le procès- ont pu souffrir physiquement, moralement, socialement, économiquement de tout ça. Le résultat est tétanisant. Certains passages, parmi les intimistes, m'ont serré le cœur. Parce qu'ils synthétisent parfaitement tout ça. Cette souffrance, cette injustice. Pendant le procès, ce sont quatre femmes (en plus de la mère et de la fille, sur le banc des accusées se trouvent également celle qui a pratiqué l'avortement et l'amie qui les a mises en relation) face à quatre hommes. Si le procureur fait preuve de veulerie, d'obscurantisme et de machisme, le juge principal a quant à lui, comme il se doit bien sûr, pris ses responsabilités et fait preuve de discernement et laissé l'avocate dérouler ses arguments, interrogé les accusées et les témoins, les experts. Bien sûr nous n'avons pas l'intégralité des débats, qui peuvent facilement se retrouver si on souhaite approfondir. Le travail graphique de Carole Maurel est remarquable. Chaque case est ciselée, travaillée pour avoir un impact maximal sur le lectorat. Il y a des moments de silence, qui se passent de paroles, tant l'intensité des regards, des attitudes, est forte. Lors de scènes traumatisantes, les ambiances se font plus glaçantes, souvent en noir et blanc, avec quelques effets graphiques mais sans en faire trop. Indispensable.

19/02/2024 (modifier)