Les derniers avis (75 avis)

Par Gaston
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Patrick Dewaere - A part ça la vie est belle
Patrick Dewaere - A part ça la vie est belle

Patrick Dewaere est un acteur que j'apprécie beaucoup et dont j'ai vu une bonne douzaine de ses films de sa trop courte filmographie. Les bonnes notes avaient attiré mon attention sur cette biographie. À force de lire des biographies médiocres en BD, je me méfie un peu, mais les auteurs évitent tous les défauts habituels de ce type de production. Déjà, il y a la bonne idée que la narration soit narrée par Dewaere lui-même ce qui donne un ton plus personnel qu'une bête narration qui ne ferait que montrer de manière chronologique les moments importants de la vie de l'acteur. Le scénario est vraiment bien fait, j'ai vraiment eu l'impression que c'était le vrai Dewaere qui racontait sa vie. Ce n'est pas raconté de manière chronologique et on saute souvent d'un sujet à l'autre, mais on ne se perd jamais et cela rend le tout encore plus authentique vu qu'il parle comme quelqu'un qui raconterait sa vie en parlant de ce qui lui passe par la tête. Je n'ai pas appris grand chose vu que j'avais déjà lu au sujet de cet acteur et aussi vu le documentaire de sa vie, mais j'ai tout de même trouvé la lecture de cette BD passionnante. On a un bon résumé de la vie compliqué de Dewaere et ses nombreux problèmes. Le dessin est très classe. Je recommande l'album à tous les fans de l'acteur.

03/08/2025 (modifier)
Par taxil
Note: 5/5
Couverture de la série Voutch
Voutch

Voutch est dans la mouvance du nonsense anglais. Il n'est pas critique, il est cynique. On peut le comprendre comme un homme qui se sait supérieur, tout en voulant s'en excuser de le montrer à travers des situations d'une banale profondeur. Ses planches sont sa catharsis officieuse, et ses albums des dictionnaires de profession de mauvaise foi, humaine, si humaine. Si je/moi disais que son oeuvre est incontournable, iconique et soutenablement culte, un contradicteur pourrait-il me répondre: "Je ne dirais pas qu'elle ne l'est pas"?

02/08/2025 (modifier)
Par Cleck
Note: 4/5
Couverture de la série Nuits romaines
Nuits romaines

Visuellement, le rendu de cette BD est vraiment intéressant : des peintures sombres, très stylisées, traversées par de régulières hachures, multipliant les effets de lumière. Après, j'ai davantage de réserves quant au procédé informatique permettant d'y aboutir : aucun travail tortueux de la matière, juste sa reproduction, c'est moins romantique ! Ces belles illustrations servent un polar poisseux et noir à souhait : une sordide enquête autour de meurtres d'enfants, menée par le charismatique et désabusé inspecteur Flavio. Certes, l'on regrette la manière peu habile de faire avancer l'enquête : tout y est accéléré, fort peu vraisemblable. Mais c'est conduit avec un esprit sacrément joueur, les rebondissements y sont ludiques et assez cinématographiques. De manière surprenante, ce polar très noir dégage finalement beaucoup de légèreté dans sa narration, tant via la dynamique de son rythme que par la roublardise de ses péripéties. Un spectacle fort agréable, stylisé en diable !

02/08/2025 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Jesse Owens - Des miles et des miles
Jesse Owens - Des miles et des miles

Ce n’est plus une vie, ça, mais une épreuve de résistance sans fin ! - Ce tome contient une autobiographie de Jesse Owens (1913-1980), quadruple médaillé aux Jeux Olympiques de 1936 à Berlin, en présence d’Adolf Hitler. Son édition originale date de 2024. Il a été réalisé par Gradimir Smudja, pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il comporte cent-vingt-et-une pages de bandes dessinées. Oakville, le douze septembre 1913. Un chat en salopette jouant du banjo est assis sur une haute branche d’un arbre, et il commente la scène qui se passe devant lui, dans une modeste cabane en bois. La naissance d’un nouveau jour, en même temps que celle d’une nouvelle vie, que c’est beau ! Le chat va raconter une histoire certainement encore jamais entendue. Cette histoire, c’est celle de son petit frère noir. Bienvenue dans ce monde cruel, et plein d’injustices et de dangers… Il voudrait que la chance soit à ses côtés et que jamais elle ne le lâche. Lui, il va prendre soin u nouveau-né, veiller à sa sécurité… Et lorsqu’il saura marcher, le chat le suivra comme son ombre. Mary-Emma et Henry Cleveland Owens avaient beaucoup d’enfants. Le dixième, le plus jeune s’appelait James, surnommé Jesse. Dans la cour de la famille Owens, on n’entend que les éclats de rire joyeux des enfants. Les parents n’en reviennent pas : Jesse n’a que cinq mois et il sait déjà marcher. Un matin, alors que le bambin est resté tout seul à la maison, il se retrouve soudain face à face avec… un monstre !!! Qui aurait pu prédire que Jesse aurait peur d’un campagnol ? Si peur qu’il va se coucher sous le lit, il y reste jusqu’au soir, lorsque son père lui vient en aide. Un autre jour, le grand jar Auguste se pavane tel un empereur régnant souverainement sur toute la cour. Personne ne sait avec certitude pourquoi Jesse se retrouve tout en haut de la liste noire d’Auguste. Le fait est qu’Auguste est perpétuellement après lui et le pourchasse partout… jusque dans la cabane au fond de la cour, servant de toilettes. Il n’y a aucun lieu sûr ou Jesse peut trouver refuge. Mais l’enfant apprend bien vite que la peur fait bouger ses jambes d’une manière incroyablement rapide. Ainsi, il distance Auguste, et il va se réfugier dans l’espace existant sous les planches formant la terrasse de la cabane. Dans le même temps, le chat, installé dans le rockingchair avec son banjo, incite Jesse à courir, courir le plus vite qu’il peut car bien d’autres dangers le poursuivront bientôt. Par une étouffante après-midi d’été, alors que Jesse n’a que cinq ans, il est assis sur les marches permettant d’accéder à la terrasse. Sans que rien n’annonce le danger, un serpent vient soudain le mordre par derrière au mollet droit. Quand il rentre le soir, le père ne trouve personne pour expliquer pour quelle raison l’enfant gît inanimé sur le sol. Même le médecin du village ne peut établir un diagnostic précis. Les parents couchent l’enfant dans son lit, personne n’imaginant qu’il passera la nuit. Invisible de tous, la mort approche pendant la nuit, mais le chat la lacère jusqu’à ce qu’elle reparte, puis il aspire le venin dans le mollet. Jesse reprend connaissance et il peut voir le chat qui se présente : il se nomme Essej Snewo. Les parents entrent dans la chambre et trouvent leur enfant conscient : ils estiment qu’il s’agit d’un miracle. Ils ne voient pas Essej. Une couverture impressionnante pour son pouvoir évocateur : le jeune garçon qui court, promis à un avenir olympique, la tenue du Ku Klux Klan comme épouvantail, les champs de coton, de nombreux esclaves et un maître, et un autre épouvantail à l’effigie d’Adolf Hitler. Le lecteur retrouve cette même beauté dans les dessins des pages intérieures, chaque case étant une illustration soignée. Cela devient une évidence lorsqu’il découvre une illustration en double, pages seize et dix-sept : un panoramique très large, avec en premier plan et second plan des dizaines d’exclaves en train de travailler dans des champs de coton. Le lecteur commence par assimiler l’image dans sa globalité, avec un troisième plan consacré à deux énormes bateaux à aube aux cheminées noires fumantes, et en arrière-plan des collines, puis encore des montagnes. Curieux, il regarde des groupes d’esclaves, puis certains un par un : chacun est occupé à une tâche propre qui s’additionne pour donner une image globale entre les cueilleurs (y compris des enfants), des personnes portant de lourds paniers, les chevaux tirant de grandes remorques pour les acheminer vers la baie de chargement d’un deux bateaux, les balles déjà à quai, les chemins de circulation s’adaptant au relief, les maitres à cheval avec leur fusil, etc. Quel tableau ! Ainsi éveillé, le regard du lecteur prend le temps de savourer des illustrations magnifiques et marquantes : la tornade qui soulève une grande cabane en bois dans un dessin en pleine page, la tornade qui détruit un bateau avec roue à aube dans un large panoramique occupant deux tiers de la hauteur sur la largeur de deux pages en vis-à-vis, le dessin en double page à couper le souffle montrant un viaduc ferroviaire en bois, une dizaine d’éléphants en équilibre les uns sur les autres dans un numéro de cirque exceptionnel (dessin en pleine page), les athlètes étatsuniens embarquant sur le paquebot transatlantique Manhattan (dessin en pleine page), une rue du Bronx (vue du ciel en oblique dans une illustration en double page). En réalité, chaque planche est un festin visuel roboratif. À raison d’un exemple par page : la vue du ciel en oblique sur la cabane de nuit, le chat en train de jouer du banjo sur les trois marches menant à la terrasse, la pose de groupe des parents Owens avec huit enfants dont six juchés sur le dos d’un âne, le campagnol pourchassant le tout petit Jesse dans la pièce principale, le jar Auguste s’en prenant à Jesse assis sur les cabinets, les deux parents consternés laissant leur fils sur son lit sans espoir de le retrouver vivant le lendemain, le chat griffant la Mort, etc. Le degré d’investissement de l’artiste dans chaque case de chaque planche emporte le lecteur, qui ressent l’importance du récit pour son auteur, pour qu’il s’y soit autant impliqué. Dans le même temps, l’artiste sait raconter une histoire par des séquences visuelles, chaque planche étant bien plus qu’une collection de superbes images. Après avoir été poursuivi par le jar, ce pauvre Jesse se fait courser par le bouc. Dans une planche irrésistible de cinq cases, le lecteur sourit devant la tête du bouc, son expression et le morceau de jean accroché à sa corne gauche, puis Jesse caché derrière le puits, ensuite à l’abri sous la carriole, l’image improbable du chat faisant tournoyer un lasso, et enfin le chat sur le dos du bouc se cabrant comme au rodéo. En page trente-trois, c’est une nuée de sauterelles qui ravage tout en quatre cases de la largeur de la page : une scène terrifiante dans leur efficacité, accablante dans la dernière case où il ne reste rien des champs. L’artiste aime bien les grandes cases, et il sait aussi raconter avec des structures de pages conçues sur mesure en fonction de la séquence. Celle relative à la qualification au saut en longueur et à la médaille olympique aux deux cents mètres repose sur un découpage à l’échelle des deux planches en vis-à-vis, trois bandes panoramiques contenant chacune trois cases, la première et la dernière étant de taille identique, et celle milieu s’étalant sur la page de gauche et celle de droite. Une composition identique pour les trois cases, une idée visuelle très intelligente pour rendre compte du point de départ, puis de la course de Jesse Owens, puis de la réaction de Hitler. Décidément, tous les malheurs du monde s’acharnent sur le pauvre Jesse Owens. Le lecteur part avec l’a priori d’une biographie factuelle sur l’un de plus grands champions olympiques du monde. Il apprécie l’idée d’un chat anthropomorphe (tout en conservant sa taille de gros chat), bluesman et narrateur omniscient, qui apporte un commentaire avec du recul sur ce que vit le futur champion. Il comprend qu’il faut y voir un dispositif narratif qui amène des métaphores, une version imagée de la réalité, par exemple quand le chat aspire le venin du serpent. Il se trouve un peu surpris par cette anecdote pour les cinq moins du bébé : étonnant que de tels détails aient survécu au passage des décennies. En fonction de sa capacité d’acceptation, il tique aussi un peu en découvrant que Nat King Cole (1919-1975) et Louis Armstrong (1901-1971) étaient présents au mariage de Jesse Owens. Encore plus fort : une version inédite de l’incendie du zeppelin LZ 129 Hindenburg qui chute sur le stade de Berlin en 1936, ou la coïncidence des causes du décès de Jesse. Une petite vérification en ligne permet de rectifier les faits. Le lecteur comprend alors que le récit amalgame à la fois une reconstitution biographique factuelle et une licence artistique relevant du conte, sensibilité de genre littéraire incarnée dans ce chat Essej Snewo. Il devient alors patent que l’auteur a choisi de rendre apparentes les conditions de vie pour les afro-américains au travers de son personnage. Le ton gentil et tout public de Essej Snewo permet d’intégrer Jesse Owens aux grandes forces systémiques accablant les citoyens de couleur noire. Et c’est ignoble et monstrueux. Sont ainsi mis en scène : l’esclavage et la cruauté des maîtres traitant les Noirs avec une cruauté pire que s’ils étaient des animaux, le règne de terreur du Ku Klux Klan avec massacres, ravages et lynchages, la ségrégation sous toutes ses formes, y compris après le retour du quadruple médaillé aux jeux olympiques, qui ne peut pas accéder aux hôtels de luxe du fait de sa couleur de peau, le fait que le président Franklin Delano Roosevelt (1882-1945) ne le remercie pas à son retour, alors qu’il remercie les athlètes blancs. Dans le même temps, la forme de conte constitue une manière de mettre en scène une époque : les bateaux à roue à aube sur le Mississipi, la tornade en Alabama, le blues, la nuée de sauterelles, les prisonniers noirs pour les chaingangs (groupe de prisonniers enchaînés ensemble et contraints d'effectuer des travaux pénibles), les trains de marchandise interminables et les hobos (vagabonds ferroviaires), le pont ferroviaire en bois, les logs (troncs d’arbre acheminés par le fleuve), le football américain, les cirques gigantesques, le métro à Cleveland (construit en 1913), les poutrelles des gratte-ciels, le linge aux fenêtres d’un immeuble à l’autre, la mafia dans le quartier italien et les règlements de compte, les majorettes (Pom-pom girls), le jazz, une parade (ticker-tape parade) à New York avec les bandelettes de papier, etc. Ce récit foisonne d’éléments, comme encore la relation avec le règne animal et son symbolisme (campagnol, jar, serpent, bouc, sauterelles, bisons, putois, éléphants, tigre), ou aussi l’évocation du troisième Reich et sa théorie de la suprématie de la race aryenne, avec Joseph Goebbels (1897-1945), Albert Speer (1905-1981) architecte, Adolf Hitler (1889-1945), Leni Riefenstahl (1902-2003) en train de tourner Les dieux du stade (1938, Olympia). Il faut peut-être un peu de temps pour que le lecteur s’adapte au parti pris de l’auteur, un récit entre biographie factuelle et conte. Il tombe immédiatement sous le charme de la narration visuelle, à la fois des dessins s’apparentant souvent à des illustrations magnifiques, à la fois dans les plans de prise de vue et les découpages. Il découvre le parcours de l’athlète, mis dans le contexte de l’oppression systémique s’exerçant sur les afro-américains. Splendide.

02/08/2025 (modifier)
Par Josq
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Sherlock Holmes contre Arsène Lupin
Sherlock Holmes contre Arsène Lupin

Je ne m'attendais pas forcément à grand-chose en ouvrant ce qui m'apparaissait comme une bande dessinée que je qualifierais de "facile". Et pourtant, quelle jolie surprise ! On est bien dans les standards du genre, et la facilité reste bien présente : on prend deux noms ultra-connus, on imagine un récit tirant vers le buddy movie tournant autour d'un artefact mystérieux et un peu mystique, et emballe tout ça dans un univers réaliste aux tonalités presque steampunk (sans y entrer totalement). Il n'y a là que du très connu, et avouons que Denis-Pierre Filippi ne s'éloigne jamais trop loin des sentiers battus. Mais je dois reconnaître qu'il sait nous offrir une variation qui, sans rien réinventer, nous balade plus qu'agréablement dans un univers plaisant. Le récit tient debout, et surtout, Filippi a fourni un très bel effort pour nous offrir un pastiche digne de ce nom. Ainsi, le pouvoir de déduction de Holmes est tout entier, et il nous offre avec Lupin quelques échanges particulièrement jouissifs. Le scénario fait la part belle aux particularités de ces deux héros (ainsi que de l'envahissant Mycroft Holmes), et on prend largement plaisir à alterner entre la rigueur déductive de Holmes et la chance insolente de Lupin (même si ce dernier n'a pas l'air mauvais non plus pour la déduction !). Les dialogues sont travaillés pour être vraiment élégants, mais ils le sont parfois presque trop. Certaines tournures un peu ampoulées ou le plaisir de faire durer une joute oratoire un peu trop longtemps ont tendance à alourdir la narration. Cela dit, le dessin de Roger Vidal est vraiment somptueux et d'une très grande clarté. Il rend certaines scènes d'action muettes avec une limpidité exemplaire, notamment une séquence sous-marine assez impressionnante. Il a l'élégance qui convient au récit et aux personnages, avec une touche de modernité pas déplaisante. A l'image d'une bande dessinée fort agréable à lire, qui n'invente pas l'eau chaude, mais ne prétend pas le faire, et se contente de mener son récit avec beaucoup de rigueur et de finesse. Croisons les doigts pour que le premier tome se vende bien pour avoir le droit à des suites qu'on espère au même niveau !

01/08/2025 (modifier)