Les derniers avis (4 avis)

Par gruizzli
Note: 4/5
Couverture de la série Le Dernier été de mon innocence
Le Dernier été de mon innocence

J'ai acheté cette BD après l'excellent avis de Spooky (qui n'est pas passé avis de la semaine, quelle indignité !) mais j'avais déjà repéré cette BD chez mon libraire le matin même. Et si je l'ai acheté, ce n'est pas tant pour l'excellent avis qui a été posté, mais parce que j'aime bien l'auteur. Petite explication et retour en arrière : Antonin Gallo est un auteur de BD que j'ai connu à l'époque florissante des blogs-bd sur le net. Il avait, à cette époque, plusieurs publications de BD régulières comme Minito et la série "Oubliés !" dont le premier tome que je possède semble vouloir rester à jamais orphelin (snif ...). A l'époque, je suivais ses BD qu'il faisait avec sa comparse Marlène, autre dessinatrice de cette époque dont je ne trouve aucune nouvelle. Bref ! (je vais quelque part, promis) De cette époque donc est née une BD auto-éditée, "État des lieux". Enfin, éditée via le site Amilova, site de BD sur lequel il publiait régulièrement notamment "La vie rêvée des profs", encore un travail non publié. Tout le monde suit ? Cette BD "État des lieux" fut rééditée récemment (sans que je participe au kickstarter, ce qui me désole puisque j'ai perdu le tome de la première impression que j'avais), mais toujours en auto-édition. Et cette BD ici présente, "Le dernier été de mon innocence" est une forme de continuité de cette première publication. Cette longue digression est totalement inutile, mais j'aime bien ce que fait cet auteur et je me suis dit que c'était l'occasion d'en parler ! Bon, l'introduction faite, j'ai beaucoup appréciée cette BD. J'ai voulu parler de continuité, puisque j'ai reconnu certaines scènes issues de "État des lieux" redessinées ici avec un point de vue externe, celui de la fille (appelée Julie dans l'autre volume, mais ici Chloé). Mais pour le reste, ce gros album est tout à fait neuf et propose une histoire longue et sombre, même si la lumière apparait finalement au bout du tunnel. La BD est dense, même si elle est finalement assez rapide à lire au regard de la quantité de pages. C'est une histoire qui se déploie dans la durée en présentant cette jeune femme de petite ville, qui va connaitre un évènement bouleversant mais continuera à vivre. Et j'ai beaucoup aimé ce détail qui peut paraitre anodin mais fait tout le sel de cette BD : le temps. La BD étire son histoire entre bien avant l'évènement, décrivant les détails de la vie de cette jeune femme, puis étire à nouveau ce qu'il advint après. Et j'adore cette idée de décrire une chose horrible non pas seulement en tant que tel mais en l'intégrant dans un parcours de vie. Cela permet de mettre en lumière tout ce qui va se cristalliser autour et j'aime beaucoup le message que cela véhicule. Il faut dire que la BD ne sera pas tendre avec le personnage qui fera parfois des choix douteux, poussé par les évènements et son état d'esprit qui va l'emmener dans des plans foireux sans trop réfléchir. Et pourtant on sent que l'auteur a une grande affection pour son personnage, qui va évoluer et devoir s'en sortir malgré tout. Contrairement à certaines écritures faciles de personnages féminins de nos jours, ici il y a une vraie volonté de montrer que s'en sortir c'est avant tout l'entraide et la solidarité, notamment de genre ou de minorité. Parce que seul, on ne réchappe pas bien longtemps à la société. Le dessin de Antonion Gallo est semblable à celui que je lui connaissais et d'ailleurs un peu éloigné de son style dans Détox, où je lui trouvais un faux air de Jim. Ici c'est plus le trait de son blog, avec sa patte très personnelle (d'ailleurs je pourrais dire que ses personnage féminins ont tendance à souvent se ressembler si je voulais pinailler, mais on pourrait faire le même reproche à Manara). Les couleurs sépias évoquant les vieilles photographies et le contraste volontaire entre le passé et le présent au niveau de l'ambiance (dans les lumières) permettent de rendre instantanément visible les transitions. Et oui, je trouve que ça rend plutôt bien ! J'aimerai encore beaucoup m'étendre sur la BD, qui m'a vraiment beaucoup plu ! (et pas que parce que je suis l'auteur depuis des années) Son personnage est attachant, j'ai plongé tout de suite dans l'histoire et j'ai aimée son déroulé, parfois hors norme mais toujours logique. Et j'ajouterai que le récit sonne vrai dans bien des situations de ces petites villes de campagne, proche de là où je suis né. Des situations que j'ai connu, des ambiances que j'ai vu. Et de fait, ce qui me rend le plus triste dans tout ceci, c'est de me demander combien de jeunes filles que je croisais à cette époque ont finie par connaitre ce que Chloé à connue ... (Eh, franchement Monsieur To, c'est pour quand la réédition chez un éditeur de État des lieux qu'on puisse le mettre à côté dans la bibliothèque ?)

20/10/2025 (modifier)
Couverture de la série Friday
Friday

La lecture a été globalement plaisante, même si plusieurs choses m’ont un peu chiffonné. D’abord le rythme endiablé est un atout. Brubaker – que je connais davantage pour ses polars plus classiques, avec son compère Phillips – est un vieux routier et il sait y faire pour construire une intrigue dynamique. Et là, j’ai bien aimé ce récit. Deux ados (en flash-backs) devenus de jeunes adultes, se transforment en détectives, enquêtant sur tout ce qui leur parait suspect dans leur petite ville de Kings Hill. Jusqu’au jour où l’affaire sur laquelle ils tombent est d’un tout autre ordre… Le dynamisme du récit m’a fait accepter une bonne partie du fantastique qui s’invite de plus en plus dans les deux derniers tomes (j’ai en particulier bien aimé le voyage dans le temps de Friday). J’ai aussi accepté certaines facilités scénaristiques (toutes les pistes laissées par Lancelot pour guider pas à pas Friday dans son enquête). Mais j’ai par contre eu du mal avec la fin, que j’ai trouvée un peu trop facile, après une surenchère de fantastique (un peu trop à mon goût) Le dessin de Martin n’est a priori pas mon truc – les visages en particulier. Mais il se laisse lire, et il passe finalement. A plusieurs reprises j’ai clairement eu l’impression que Brubaker s’inspirait d’Harry Potter, en tout cas glissait pas mal de clins d’œil à son univers. L’omniprésence de la chouette autour de Friday, les ados/jeunes adultes enquêtant contre les forces du mal, voire même les indices laissés par Lancelot à Friday. Enfin, la dernière case, avec ce train survolé par des chouettes m’a fait penser à celui de Poudlard. Je ne sais pas si j’ai fantasmé tout ça, mais je pense que Brubaker l’a fait sciemment… Note réelle 3,5/5.

20/10/2025 (modifier)
Couverture de la série Abîmes
Abîmes

Étrange album que celui-ci, quelque peu envoûtant. L’auteure nous livre un récit autobiographique et cathartique, dans lequel elle va chercher les « racines » du mal qui la ronge, un mal être lancinant, une dépression qui peine à livrer ses sources. Elle va donc se plonger dans l’histoire et les archives familiales. Lucile Corbeille parvient à maintenir une narration légère, un ton calme, alors que sa plongée dans le passé met au jour de multiples fractures, des douleurs niées et pourtant bien présentes. L’alcoolisme qui a tué son père. Des couples déchirés. L’homosexualité à peine aperçue de sa mère. Le fonctionnement parfois trop rigoriste de certains ancêtres, alors même que l’auteur elle-même chancelle, sous les coups de la mélancolie ou d’une dépression qui gangrène sa famille. Cette plongée introspective se fait par paliers, et le lecteur suit pas à pas la descente dans ce passé pourtant pas si lointain. Une descente qui permet de remonter plus forte, l’auteure faisant apparaitre à la fin, alors que la plupart des questions qu’elle se posait ont eu leur réponse, l’espoir d’une guérison. Une guérison qui prend la forme des couleurs vives qui illuminent les dernières cases, alors qu’un bleu grisâtre dominait tout le reste de l’album. Le travail graphique de l’auteure est pour beaucoup dans le plaisir de lecture. En effet, son travail à l’aquarelle est réussi, avare de détails dès lors qu’on s’écarte du cœur du sujet, il est vraiment agréable et beau. L’auteure utilise aussi en fond des photos retouchées et recouvertes de peintures, ce qui donne à certaines cases un rendu proche de ce que l’imagination peut faire des souvenirs, à partir d’une photo prise dans l’album familiale : reconstruire, dévier de la trajectoire qu’elle nous propose. Une lecture recommandable en tout cas.

20/10/2025 (modifier)
Couverture de la série Le Mètre des Caraïbes
Le Mètre des Caraïbes

A titre personnel, j’avais adoré La Bibliomule de Cordoue, et même si j’ai freiné ma consommation de bandes dessinées, je ne pouvais pas passer à côté de ce nouvel opus du duo d’auteurs responsables de l’œuvre susnommée. D’autant plus qu’ils travaillent dans la continuité en nous proposant à nouveau une fable historique sur un sujet oublié. Dès l’introduction, j’ai été intrigué, me demandant quel lien il allait y avoir entre cet incident à Cap Canaveral et une couverture digne d’un récit de piraterie. Ce lien porte un nom, celui de Joseph Dombey, obscur savant français oublié de l’Histoire, poissard multirécidiviste, qu’un destin malicieux chargea jadis de transmettre le système métrique aux Américains. Le navire sur lequel il se trouvait fut la victime de pirates et lui-même se retrouva séquestré sur une île des Caraïbes. Le récit tangue constamment entre la farce absurde et le récit historique car, si beaucoup d’informations sont véridiques et nous permettent d’en apprendre pas mal sur divers sujets, les évènements nous sont racontés avec beaucoup d’humour et, à l’occasion, une pointe très pertinente de philosophie. Vous l’aurez compris : une fois de plus, j’ai adoré ma lecture. J’en ressors amusé et un peu plus instruit et c’est vraiment ce que je demande à ce type d’œuvre. Coté dessin, Léonard Chemineau va à l’essentiel, avec un trait épuré et dynamique et des compositions simples en apparence mais qui permettent d’encore mieux faire ressortir les dialogues de Wilfrid Lupano, ici par la forme d’un phylactère, là par la manière dont ceux-ci sont reliés. Le résultat, très franco-belge de la grande époque, est encore rehaussé par la mise en couleurs de Christophe Bouchard qui permet justement de rester dans cet esprit « BD tout public classique ». Franchement bien ! Un achat que je ne regrette pas et la découverte d’une page d’Histoire dont j’ignorais tout.

20/10/2025 (modifier)