Retour chez Dargaud pour Trondheim, engendrant l'arrêt des Nouvelles aventures de Lapinot et le lancement de cette "Aventure de Lapinot dans une situation pas possible". Aucune véritable rupture néanmoins hormis ce changement d'éditeur.
Je ne sais si l'impulsion et l'inspiration s'étaient quelque peu taries dans les locaux de L'Association, je constate modestement que la qualité était moindre depuis que les aventures avaient perdu en formidable, davantage la faute selon moi à des scénarios souvent bien maigres, que l'auteur parvenait néanmoins à sublimer via des illustrations chaleureuses et sympathiques associées à un réel talent de dialoguiste.
Le scénario de ce premier tome est totalement rocambolesque et eut pu être écrit par l'inénarrable personnage de Richard. Peut-être un moyen pour l'auteur de personnifier une liberté éditoriale retrouvée, pour un résultat que L'Association aurait néanmoins sans doute validé, tant il s'inscrit dans une continuité.
C'est toujours très agréable à lire, un divertissement humaniste discourant sans véritable revendication ni accusation sur nos sociétés contemporaines.
Mon point de vue sur les Nouvelles aventures est encore d'actualité pour cette aventure-ci, pas de baisse de régime selon moi (manque d'objectivité, horizon d'attente préparé par l'avis de Tomdelapampa ?).
Le scénariste adapte son propre roman et disons que ça se voit que c'est un roman au vu des nombreux textes narratifs, ça peut prendre des pages avant qu'un des personnages parle !
On suit la vie d'Ernst Hanfstaengl, un des premiers compagnons d'Hitler qui est peu connu. Il faut dire que le dictateur l'a vite viré de son entourage une fois qu'il a obtenu le pouvoir. Il y a des bonnes anecdotes, mais on tombe dans les travers des biographies en BD : on a souvent un résumé de ce qui arrive à Hanfstaengl et on saute d'une époque à une autre rapidement. J'aurais préféré, par exemple, qu'on voit un peu plus en quoi celui qu'on surnommait Putzi a été important dans les premières années politiques d'Hitler. Il parait qu'il avait des contacts influents, mais on voit surtout qu'Hitler aimait sa femme et qu'il joue Wagner au piano. S'il y a des bons passages, cela devient un peu monotone à un moment vu que le type a l'habitude de manquer son rendez-vous avec l'histoire et à la fin il a l'air d'un gros loser. Enfin un loser qui a vécu libre plus longtemps que la plupart de ses compagnons d'armes, la vie de Putzi est à lire pour au moins découvrir à quel point la vie est ironique.
Le dessin est correct, mais la mise en page manque de dynamique, ce qui accentue le fait que ce one-shot est pas mal, mais c'est surtout un album à emprunter parce que l'envie de relecture est tout de même un peu nulle.
Le Marsupilami – La Bête est une œuvre à part, qui revisite le mythe créé par Franquin avec une audace rare. Zidrou et Frank Pé ne se contentent pas de réutiliser un personnage culte : ils le réinventent totalement en le plaçant dans un contexte réaliste, dur, presque social. On est très loin de l’univers coloré et léger de Spirou : ici, le Marsupilami n’est plus une créature drôle et malicieuse, mais une bête traquée, prisonnière de la cruauté des hommes.
Le scénario de Zidrou surprend par son ton grave, mais aussi par la sensibilité qui s’en dégage. Il met en lumière la différence, le rejet, la peur de l’autre, tout en soulignant l’importance de la compassion et de la solidarité. Le Marsupilami devient alors le miroir de notre rapport à l’animalité, à l’altérité et même à la fragilité humaine.
Graphiquement, Frank Pé livre un travail absolument somptueux. Chaque planche respire la vie et la matière, qu’il s’agisse de la jungle luxuriante ou de la grisaille urbaine. Son trait puissant, expressif, presque sauvage, colle parfaitement à ce récit qui oscille entre dureté et tendresse. La mise en couleurs sublime les ambiances et donne une dimension presque cinématographique à l’ensemble.
En refermant l’album, on a le sentiment d’avoir lu bien plus qu’une simple « aventure du Marsupilami ». C’est une fable moderne, cruelle et émouvante, qui démontre qu’un mythe peut être revisité avec intelligence et profondeur.
Un comics lumineux et magique.
Le retour du trio Tom King, Bilquis Evely et Matheus Lopes après leur surprenant Supergirl - Woman of Tomorrow.
Un recit conté par une vieille femme (Lilith Appleton) à un jeune homme curieux, il veut en savoir plus sur l'écrivain C.K. Cole. Il enregistre cette discussion sur cassettes. Cette femme a été la gouvernante d'Helen la fille de C.K. Cole après la mort de celui-ci.
L'action se situe au début des années quarante au château de Wyndhorn.
La tache de la gouvernante n'est pas simple, la jeune Helen a un goût immodéré pour la boisson (les gènes familiaux) et a besoin de sa dose de nicotine. Le grand-père (Barnabas) d'Helen ne va pas lui faciliter la tache, il est taciturne et souvent absent.
Tom King va nous transporter de l'ambiance feutré du château à des contrées sauvages et fantastiques. Dans le jardin du château se trouve une porte magique gardée par une sorcière, et pour franchir celle-ci il faut payer son tribut : une dent. L'autre monde est peuplé de créatures surnaturelles et dangereuses. Monde réel et fiction se succèdent et se complètent pour crever les abcès qui pourrissent les liens familiaux de la famille Wyndhorn.
Une narration onirique où la voix off de la gouvernante sera omniprésente, mais elle ne sera pas la seule, et pour les différencier il faudra rester attentif, une couleur différente pour chaque voix off.
Un récit intimiste et flamboyant qui ne se concentre pas que sur Helen et sa famille puisqu'on va suivre en parallèle le parcours de ces fameuses cassettes enregistrées.
C'est aussi un hommage aux pulps magazines, comment ne pas penser à Robert E. Howard dans le personnage de C.K. Cole et à Conan dans celui d'Othan, le héros des pulps de C.K. Cole. Deux auteurs qui connaîtront le succès après leur mort.
Un final qui peut paraître abrupte, mais certains détails dans les deux dernières cases devraient vous donner une partie de la réponse.
La partie graphique est phénoménale. Bilquis Evely nous gratifie, avec son trait fin, fluide et d'une précision chirurgicale, de planches aux décors époustouflants, riches et variés, que ce soit dans cet autre monde ou celui plus conventionnel du château. Les personnages ne sont pas en reste, ils sont beaux et expressifs. La mise en page est inventive et les couleurs de Matheus Lopes sont somptueuses. Un album à l'atmosphère envoûtante.
On comprend pourquoi Bilquis Evely a reçu le prix de la meilleure dessinatrice aux Eisner Awards 2025.
Un enchantement.
Quelques couvertures VO en fin d'album. Elsa Charretier s'en tire très bien dans son style rétro, mais la plus belle est incontestablement celle de l'immense David Mack !
Coup de coeur.
Tronchet est un auteur que j’aime bien, surtout lorsqu’il nous propose des histoires dominées par un humour un peu con, de l’humour noir et pas mal de cynisme, avec des anti-héros frôlant le pathétique. Même s’il a aussi publié des histoires plus classiques et intéressantes hors de ce cadre, c’est quand même dans cette veine humoristique que je l’attendais (ou l’espérais ?) ici. Il faut dire que le titre, allez savoir pourquoi, m’avais fait penser à l’album de Fabcaro Carnet du Pérou, ce qui avait renforcé mes attentes.
Sauf que, contrairement à Fabcaro, Tronchet a bien mis les pieds dans le pays décrit – il y est même resté près de trois ans avec sa femme (Anne Sibran) et leur fils. Et qu’en plus ici on est plus proche du carnet de voyage classique que de la franche déconne.
La lecture est plaisante, mais m’a un chouia laissé sur ma faim. Surtout la première partie, intéressante, avec quelques anecdotes amusantes ou plaisantes, mais qui n’égale pas les récits de Guy Delisle. La deuxième moitié de l’album m’a davantage intéressé. On quitte Quito pour aller à la rencontre d’Indigènes dans la forêt amazonienne, puis on traverse un immense lac de sel, pour finir par évoquer une mine d’argent (cette dernière visite inspirera probablement en partie Anne Sibran pour un roman, puis Tronchet pour son adaptation en BD dans Le Monde du dessous). Là il y a plus de réflexion, la partie documentaire et critique affleure davantage et rehausse l’intérêt de la lecture.
Les parents n’ont pas hésité à laisser leur fils vivre un long séjour parmi les « Indigènes », et plus généralement des aventures exotiques et hors des sentiers battus – je ne sais pas si je l’aurais fait, même si on imagine les expériences et souvenirs extraordinaires que cela a pu lui procurer.
Une petite lecture sympathique.
Ce nouveau spin off des Stryges ne déçoit pas. On y retrouve le sel qui fait l'ADN de la série mère : des investigations qui amènent une part importante de mystères, sur fond de fantastique évidement.
Autre époque, autres protagonistes, même créatures ailées, même recette et ça marche toujours autant. Retour au 19e siècle, l'intrigue démarre avec des fouilles archéologiques en Egypte. La découverte d'un tombeau, des sarcophages géants, un étrange liquide noir, de curieuses momies ... il ne faut pas plus de quelques pages pour poser de solides bases à l'intrigue et lancer le récit.
C'est efficace, l'ambiance est là, le mystère aussi. Cette découverte attire la convoitise de personnages louches et la curiosité du lecteur. Ce premier tome donne déjà lieu à des révélations, qui font le lien avec la série principale. Corbeyran a intelligemment lié les Stryges à l'Egypte antique... c'est malin tout plein. On a maintenant envie de se plonger dans la suite pour connaitre le fin mot de tout ça. Parfois les spins off s'étirent avec peu de choses à raconter. Ici c'est tout l'inverse, la série est annoncée en 2 tomes alors qu'il semble qu'il y a encore du potentiel à développer et pleins de choses à découvrir.
Coté dessin, le trait de Nicolas Begue ne jure pas avec l'esprit de la série, au contraire. Son style dynamique, appuyé par des décors soignés, s'inscrit là aussi tout à fait dans l'esprit de cet univers. Un diptyque qui a tout pour ravir les fans de la série.
Après lecture de ce triptyque, je suis un peu surpris d'autant de louanges sur cette série qui figure dans les immanquables de BDThèque...
En effet, tout comme Bamiléké, j'ai trouvé la narration assez confuse entre passé et présent et avec des ficelles assez faciles pour introduire l'histoire. De plus, il ne se passe quand même pas grand chose dans le tome 1, qui se contente de planter le décor, ainsi que dans le tome 2 consacré au voyage de Siegfried avant l'affrontement final. Le tome 3 est un peu plus fouillé mais cela était malheureusement trop tard pour moi, n'ayant pas été sensible ni à la poésie qui devait se dégager de la série, ni aux personnages très lisses et classiques dans le genre.
J'ai également été un peu gêné par le trait très "Disneyien" d'Alex Alice avec son héros au physique parfait, ses jolis loups gambadant dans la forêt et le personnages de Mime au visage plus enfantin, dont l'objectif est uniquement de faire sourire le lecteur avec ses running gag relatifs à son enclume.
Il est vrai que je ne connais que très peu le mythe de l'anneau de Nibelung pour apprécier l'adaptation qu'en à faite Alex Alice et que j'ai peut-être trop lu de BD de ce type par le passé pour être surpris par cette série. J'ai ainsi préféré La Quête de l'Oiseau du Temps de Loisel dans le même genre.
L'ensemble reste tout de même honnête pour ne pas descendre en dessous de 3/5.
SCENARIO (Originalité, Histoire, personnages) : 5/10
GRAPHISME (Dessin, colorisation, mise en page) : 7/10
NOTE GLOBALE : 12/20
Julia & Roem se situe au milieu de la trilogie Coup de sang, entre Animal'z et La Couleur de l'air, et paradoxalement je ne l'ai lu que bien après les deux autres. Il transpose Roméo et Juliette dans l'univers post-apocalyptique étrangement écologique de cette trilogie un peu fantasque. L'idée de revisiter Shakespeare dans ce décor désolé aurait pu être intéressante, mais le résultat me laisse partagé.
Graphiquement, Bilal reste fidèle à lui-même : des planches sombres, dominées par les gris, bleus et bruns, un style immédiatement reconnaissable, parfois superbe, parfois redondant. J'avoue que je finis par me lasser de ces visages interchangeables, toujours les mêmes corps élancés, les mêmes regards figés. C'est beau, oui, mais pas surprenant, et la surprise me manque de plus en plus chez lui.
Côté scénario, la reprise de Shakespeare fonctionne à moitié. L'intrigue reprend trop directement les dialogues et situations de la pièce originale, ce qui produit parfois un effet artificiel, voire risible. On sent la volonté d'hommage ou de télescopage littéraire, mais la greffe ne prend pas toujours. Là où certains pourraient y voir une forme de poésie onirique, je trouve cela creux et répétitif.
Il est difficile de critiquer la qualité graphique de cet album et la patte immédiatement identifiable de son auteur, mais le récit, lui, manque d'intérêt et tourne en rond. Au mieux, c'est un Bilal mineur qui se lit vite et s'oublie vite ; au pire, une démonstration de style sans véritable souffle narratif.
BD importante s'il en est. Retour sur le procès Pelicot et sur les dramatiques questions sociétales que cette sordide affaire de viols par soumission chimique nous crache à la figure.
Cette œuvre collective se propose via de multiples récits essentiellement documentaires, réalisés par des auteurs généralement différents, de rendre compte de l'importantissime procès des viols de Mazan. Après cette affaire, il n'est plus tenable de réfuter la réalité de la culture du viol dans nos sociétés patriarcales. Oui, cela choque, heurte bien des hommes, mais c'est une réalité idéologique et surtout sociologique. Cela n'équivaut pas à prétendre que tous les hommes sont des "crocodiles" violeurs en puissance, mais déclare simplement et tristement que de multiples pans de notre culture, que les lois de nos sociétés, etc. instaurent une norme comportementale empreinte de sexisme et de misogynie ayant de multiples conséquences, toutes minimisées et excusées, dont les plus dramatiques sont les féminicides et viols.
Loin d'être indigeste, ce volumineux pavé se lit d'une traite le souffle coupé : cette affaire happe l'attention tant elle bouscule notre croyance en l'homme. Egalement parce que la BD, certes souvent dans la paraphrase ou "l'anecdotique", parvient à recréer le sentiment alors dominant chez les féministes s'étant emparées du sujet, que cette fois, la situation bougerait, que la honte changerait de camp !
Non, il ne s'agissait généralement pas de monstres : les coupables n'étaient que des hommes, de simples routiers, pompiers, ouvriers..., parfois de bons pères de famille, des conjoints aimant, de bons employés appréciés de leurs collègues et patrons, des hommes pour nombre d'entre soutenus durant le procès par leurs proches et notamment leur conjointe.
Cette BD malheureusement met peu en perspective les choses, la faute aussi au projet initial, à ce souhait de construire une œuvre collective offrant modérément la possibilité de développer un point de vue, de synthétiser une pensée. Les brefs propos sur l'inceste et la culture du viol font entrevoir ce qu'aurait pu être cette BD, mais le projet ne souhaitait visiblement pas l'ampleur, plutôt dégager le sentiment d'une prise de conscience collective pouvant laisser espérer des jours meilleurs. Sur ce point, c'est réussi.
Comme disait ma mamie : en voilà une série qu'elle est quand-même vachement bonne !
Je me suis lancée dans cette série pour deux raisons : la première c'est qu'elle ne sortait jamais à ma bibliothèque et la seconde c'est que le postulat me faisait miroiter de savoureuses petites histoires pleines de fantaisie et de créatures loufoques. Aussi car mon père m'en avait dit du bien, je l'avoue.
Bon, premièrement je regrette sincèrement que la série ne soit pas plus empruntée car, bien que n'étant pas du goût de tout le monde, elle reste suffisamment travaillée et atypique pour valoir un sincère coup d'œil et quelques louanges. En effet, pour tout-e amateur-ice de récits alambiqués où les rêves et les illusions se confrontent (et se confondent aussi) à la réalité, un peu à la Don Quijote, ce récit offre une lecture on ne peut plus agréable.
Le chasseur (car c'est son nom) rêve de chasse et de gloire. Ou, pour être plus précise, il chasse les rêves et la gloire. C'est un chasseur d'aventure, un désireux de grandiose, quelqu'un qui se refuse à l'ennui d'un quotidien banal. Pour lui, tout évènement insignifiant, que cela soit la lecture d'un roman, la vision de nuages aux formes atypiques dans le ciel ou encore le fait de tomber malade, est une nouvelle occasion de partir en chasse, de chercher une forme de grandeur et d'épique.
Comme Don Quijote, avec qui la comparaison est évidente, notre chasseur est affublé d'un Sancho, d'un assistant, un faire-valoir en apparence qui se révèle en réalité bien plus terre-à-terre que son maître et cherchant toujours à le connecter au réel. Il cherche à le protéger, à s'assurer que ses chasses et ses rêves n'aient pas de conséquences désastreuses, pour lui comme pour les espèces qu'ils croisent.
A noter cependant que les rêves du chasseurs sont bien plus concrets que les géants de l'hidalgo, les incartades du réel, les chassés-croisés entre le monde bien tangible et l'imaginaire semblent bel et bien être intradiégétiques. Bien que le chasseur se berce parfois d'illusions, préfère croire qu'une taupe géante se soit transformée en rocher que de reconnaître qu'il se soit trompé de cible, il semble pourtant que le monde dans lequel il vit ne soit pas aussi "normal" que ce que l'on pourrait croire. Comme dans une œuvre du réalisme magique, la fantaisie et le surnaturel ne sont qu'à un jeu de mot ou une métaphore de venir chambouler la narration. Un rien peu devenir concret et tout est possible. Chasser ses idées noires ? Chasser la baleine blanche ? A cœur rêveur rien d'impossible, surtout pour quiconque ne se laisse pas enfermé dans ses idées préconçues.
Est-ce qu'il faut voir la quête du chasseur comme un appel à rêver, une ode au fantasque et à la poésie ? Ou bien faut-il rapprocher le personnage à son modèle et considérer ses aventures comme les récits tragicomiques d'une personne préférant vivre des illusions que d'affronter la réalité ? Je ne sais pas. Mais même si je ne peut trancher sur la question je reconnais avoir été transportée, avoir voyagé avec ce chasseur et son Sancho, avoir apprécié les jeux sur les mots et les mondes traversés. L'œuvre est bonne, le texte inventif et le dessin coloré et expressif comme il faut (même si le style graphique n'est pas mon préféré).
Oui, après lecture, je regrette sincèrement que la série ne soit pas si souvent empruntée que ça.
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Les Aventures de Lapinot
Retour chez Dargaud pour Trondheim, engendrant l'arrêt des Nouvelles aventures de Lapinot et le lancement de cette "Aventure de Lapinot dans une situation pas possible". Aucune véritable rupture néanmoins hormis ce changement d'éditeur. Je ne sais si l'impulsion et l'inspiration s'étaient quelque peu taries dans les locaux de L'Association, je constate modestement que la qualité était moindre depuis que les aventures avaient perdu en formidable, davantage la faute selon moi à des scénarios souvent bien maigres, que l'auteur parvenait néanmoins à sublimer via des illustrations chaleureuses et sympathiques associées à un réel talent de dialoguiste. Le scénario de ce premier tome est totalement rocambolesque et eut pu être écrit par l'inénarrable personnage de Richard. Peut-être un moyen pour l'auteur de personnifier une liberté éditoriale retrouvée, pour un résultat que L'Association aurait néanmoins sans doute validé, tant il s'inscrit dans une continuité. C'est toujours très agréable à lire, un divertissement humaniste discourant sans véritable revendication ni accusation sur nos sociétés contemporaines. Mon point de vue sur les Nouvelles aventures est encore d'actualité pour cette aventure-ci, pas de baisse de régime selon moi (manque d'objectivité, horizon d'attente préparé par l'avis de Tomdelapampa ?).
Putzi
Le scénariste adapte son propre roman et disons que ça se voit que c'est un roman au vu des nombreux textes narratifs, ça peut prendre des pages avant qu'un des personnages parle ! On suit la vie d'Ernst Hanfstaengl, un des premiers compagnons d'Hitler qui est peu connu. Il faut dire que le dictateur l'a vite viré de son entourage une fois qu'il a obtenu le pouvoir. Il y a des bonnes anecdotes, mais on tombe dans les travers des biographies en BD : on a souvent un résumé de ce qui arrive à Hanfstaengl et on saute d'une époque à une autre rapidement. J'aurais préféré, par exemple, qu'on voit un peu plus en quoi celui qu'on surnommait Putzi a été important dans les premières années politiques d'Hitler. Il parait qu'il avait des contacts influents, mais on voit surtout qu'Hitler aimait sa femme et qu'il joue Wagner au piano. S'il y a des bons passages, cela devient un peu monotone à un moment vu que le type a l'habitude de manquer son rendez-vous avec l'histoire et à la fin il a l'air d'un gros loser. Enfin un loser qui a vécu libre plus longtemps que la plupart de ses compagnons d'armes, la vie de Putzi est à lire pour au moins découvrir à quel point la vie est ironique. Le dessin est correct, mais la mise en page manque de dynamique, ce qui accentue le fait que ce one-shot est pas mal, mais c'est surtout un album à emprunter parce que l'envie de relecture est tout de même un peu nulle.
Le Marsupilami de Frank Pé et Zidrou - La Bête
Le Marsupilami – La Bête est une œuvre à part, qui revisite le mythe créé par Franquin avec une audace rare. Zidrou et Frank Pé ne se contentent pas de réutiliser un personnage culte : ils le réinventent totalement en le plaçant dans un contexte réaliste, dur, presque social. On est très loin de l’univers coloré et léger de Spirou : ici, le Marsupilami n’est plus une créature drôle et malicieuse, mais une bête traquée, prisonnière de la cruauté des hommes. Le scénario de Zidrou surprend par son ton grave, mais aussi par la sensibilité qui s’en dégage. Il met en lumière la différence, le rejet, la peur de l’autre, tout en soulignant l’importance de la compassion et de la solidarité. Le Marsupilami devient alors le miroir de notre rapport à l’animalité, à l’altérité et même à la fragilité humaine. Graphiquement, Frank Pé livre un travail absolument somptueux. Chaque planche respire la vie et la matière, qu’il s’agisse de la jungle luxuriante ou de la grisaille urbaine. Son trait puissant, expressif, presque sauvage, colle parfaitement à ce récit qui oscille entre dureté et tendresse. La mise en couleurs sublime les ambiances et donne une dimension presque cinématographique à l’ensemble. En refermant l’album, on a le sentiment d’avoir lu bien plus qu’une simple « aventure du Marsupilami ». C’est une fable moderne, cruelle et émouvante, qui démontre qu’un mythe peut être revisité avec intelligence et profondeur.
Helen de Wyndhorn
Un comics lumineux et magique. Le retour du trio Tom King, Bilquis Evely et Matheus Lopes après leur surprenant Supergirl - Woman of Tomorrow. Un recit conté par une vieille femme (Lilith Appleton) à un jeune homme curieux, il veut en savoir plus sur l'écrivain C.K. Cole. Il enregistre cette discussion sur cassettes. Cette femme a été la gouvernante d'Helen la fille de C.K. Cole après la mort de celui-ci. L'action se situe au début des années quarante au château de Wyndhorn. La tache de la gouvernante n'est pas simple, la jeune Helen a un goût immodéré pour la boisson (les gènes familiaux) et a besoin de sa dose de nicotine. Le grand-père (Barnabas) d'Helen ne va pas lui faciliter la tache, il est taciturne et souvent absent. Tom King va nous transporter de l'ambiance feutré du château à des contrées sauvages et fantastiques. Dans le jardin du château se trouve une porte magique gardée par une sorcière, et pour franchir celle-ci il faut payer son tribut : une dent. L'autre monde est peuplé de créatures surnaturelles et dangereuses. Monde réel et fiction se succèdent et se complètent pour crever les abcès qui pourrissent les liens familiaux de la famille Wyndhorn. Une narration onirique où la voix off de la gouvernante sera omniprésente, mais elle ne sera pas la seule, et pour les différencier il faudra rester attentif, une couleur différente pour chaque voix off. Un récit intimiste et flamboyant qui ne se concentre pas que sur Helen et sa famille puisqu'on va suivre en parallèle le parcours de ces fameuses cassettes enregistrées. C'est aussi un hommage aux pulps magazines, comment ne pas penser à Robert E. Howard dans le personnage de C.K. Cole et à Conan dans celui d'Othan, le héros des pulps de C.K. Cole. Deux auteurs qui connaîtront le succès après leur mort. Un final qui peut paraître abrupte, mais certains détails dans les deux dernières cases devraient vous donner une partie de la réponse. La partie graphique est phénoménale. Bilquis Evely nous gratifie, avec son trait fin, fluide et d'une précision chirurgicale, de planches aux décors époustouflants, riches et variés, que ce soit dans cet autre monde ou celui plus conventionnel du château. Les personnages ne sont pas en reste, ils sont beaux et expressifs. La mise en page est inventive et les couleurs de Matheus Lopes sont somptueuses. Un album à l'atmosphère envoûtante. On comprend pourquoi Bilquis Evely a reçu le prix de la meilleure dessinatrice aux Eisner Awards 2025. Un enchantement. Quelques couvertures VO en fin d'album. Elsa Charretier s'en tire très bien dans son style rétro, mais la plus belle est incontestablement celle de l'immense David Mack ! Coup de coeur.
Vertiges de Quito
Tronchet est un auteur que j’aime bien, surtout lorsqu’il nous propose des histoires dominées par un humour un peu con, de l’humour noir et pas mal de cynisme, avec des anti-héros frôlant le pathétique. Même s’il a aussi publié des histoires plus classiques et intéressantes hors de ce cadre, c’est quand même dans cette veine humoristique que je l’attendais (ou l’espérais ?) ici. Il faut dire que le titre, allez savoir pourquoi, m’avais fait penser à l’album de Fabcaro Carnet du Pérou, ce qui avait renforcé mes attentes. Sauf que, contrairement à Fabcaro, Tronchet a bien mis les pieds dans le pays décrit – il y est même resté près de trois ans avec sa femme (Anne Sibran) et leur fils. Et qu’en plus ici on est plus proche du carnet de voyage classique que de la franche déconne. La lecture est plaisante, mais m’a un chouia laissé sur ma faim. Surtout la première partie, intéressante, avec quelques anecdotes amusantes ou plaisantes, mais qui n’égale pas les récits de Guy Delisle. La deuxième moitié de l’album m’a davantage intéressé. On quitte Quito pour aller à la rencontre d’Indigènes dans la forêt amazonienne, puis on traverse un immense lac de sel, pour finir par évoquer une mine d’argent (cette dernière visite inspirera probablement en partie Anne Sibran pour un roman, puis Tronchet pour son adaptation en BD dans Le Monde du dessous). Là il y a plus de réflexion, la partie documentaire et critique affleure davantage et rehausse l’intérêt de la lecture. Les parents n’ont pas hésité à laisser leur fils vivre un long séjour parmi les « Indigènes », et plus généralement des aventures exotiques et hors des sentiers battus – je ne sais pas si je l’aurais fait, même si on imagine les expériences et souvenirs extraordinaires que cela a pu lui procurer. Une petite lecture sympathique.
La Légende des Stryges
Ce nouveau spin off des Stryges ne déçoit pas. On y retrouve le sel qui fait l'ADN de la série mère : des investigations qui amènent une part importante de mystères, sur fond de fantastique évidement. Autre époque, autres protagonistes, même créatures ailées, même recette et ça marche toujours autant. Retour au 19e siècle, l'intrigue démarre avec des fouilles archéologiques en Egypte. La découverte d'un tombeau, des sarcophages géants, un étrange liquide noir, de curieuses momies ... il ne faut pas plus de quelques pages pour poser de solides bases à l'intrigue et lancer le récit. C'est efficace, l'ambiance est là, le mystère aussi. Cette découverte attire la convoitise de personnages louches et la curiosité du lecteur. Ce premier tome donne déjà lieu à des révélations, qui font le lien avec la série principale. Corbeyran a intelligemment lié les Stryges à l'Egypte antique... c'est malin tout plein. On a maintenant envie de se plonger dans la suite pour connaitre le fin mot de tout ça. Parfois les spins off s'étirent avec peu de choses à raconter. Ici c'est tout l'inverse, la série est annoncée en 2 tomes alors qu'il semble qu'il y a encore du potentiel à développer et pleins de choses à découvrir. Coté dessin, le trait de Nicolas Begue ne jure pas avec l'esprit de la série, au contraire. Son style dynamique, appuyé par des décors soignés, s'inscrit là aussi tout à fait dans l'esprit de cet univers. Un diptyque qui a tout pour ravir les fans de la série.
Siegfried
Après lecture de ce triptyque, je suis un peu surpris d'autant de louanges sur cette série qui figure dans les immanquables de BDThèque... En effet, tout comme Bamiléké, j'ai trouvé la narration assez confuse entre passé et présent et avec des ficelles assez faciles pour introduire l'histoire. De plus, il ne se passe quand même pas grand chose dans le tome 1, qui se contente de planter le décor, ainsi que dans le tome 2 consacré au voyage de Siegfried avant l'affrontement final. Le tome 3 est un peu plus fouillé mais cela était malheureusement trop tard pour moi, n'ayant pas été sensible ni à la poésie qui devait se dégager de la série, ni aux personnages très lisses et classiques dans le genre. J'ai également été un peu gêné par le trait très "Disneyien" d'Alex Alice avec son héros au physique parfait, ses jolis loups gambadant dans la forêt et le personnages de Mime au visage plus enfantin, dont l'objectif est uniquement de faire sourire le lecteur avec ses running gag relatifs à son enclume. Il est vrai que je ne connais que très peu le mythe de l'anneau de Nibelung pour apprécier l'adaptation qu'en à faite Alex Alice et que j'ai peut-être trop lu de BD de ce type par le passé pour être surpris par cette série. J'ai ainsi préféré La Quête de l'Oiseau du Temps de Loisel dans le même genre. L'ensemble reste tout de même honnête pour ne pas descendre en dessous de 3/5. SCENARIO (Originalité, Histoire, personnages) : 5/10 GRAPHISME (Dessin, colorisation, mise en page) : 7/10 NOTE GLOBALE : 12/20
Julia & Roem (Coup de sang)
Julia & Roem se situe au milieu de la trilogie Coup de sang, entre Animal'z et La Couleur de l'air, et paradoxalement je ne l'ai lu que bien après les deux autres. Il transpose Roméo et Juliette dans l'univers post-apocalyptique étrangement écologique de cette trilogie un peu fantasque. L'idée de revisiter Shakespeare dans ce décor désolé aurait pu être intéressante, mais le résultat me laisse partagé. Graphiquement, Bilal reste fidèle à lui-même : des planches sombres, dominées par les gris, bleus et bruns, un style immédiatement reconnaissable, parfois superbe, parfois redondant. J'avoue que je finis par me lasser de ces visages interchangeables, toujours les mêmes corps élancés, les mêmes regards figés. C'est beau, oui, mais pas surprenant, et la surprise me manque de plus en plus chez lui. Côté scénario, la reprise de Shakespeare fonctionne à moitié. L'intrigue reprend trop directement les dialogues et situations de la pièce originale, ce qui produit parfois un effet artificiel, voire risible. On sent la volonté d'hommage ou de télescopage littéraire, mais la greffe ne prend pas toujours. Là où certains pourraient y voir une forme de poésie onirique, je trouve cela creux et répétitif. Il est difficile de critiquer la qualité graphique de cet album et la patte immédiatement identifiable de son auteur, mais le récit, lui, manque d'intérêt et tourne en rond. Au mieux, c'est un Bilal mineur qui se lit vite et s'oublie vite ; au pire, une démonstration de style sans véritable souffle narratif.
Notre affaire - Une BD de combat et d'espoir
BD importante s'il en est. Retour sur le procès Pelicot et sur les dramatiques questions sociétales que cette sordide affaire de viols par soumission chimique nous crache à la figure. Cette œuvre collective se propose via de multiples récits essentiellement documentaires, réalisés par des auteurs généralement différents, de rendre compte de l'importantissime procès des viols de Mazan. Après cette affaire, il n'est plus tenable de réfuter la réalité de la culture du viol dans nos sociétés patriarcales. Oui, cela choque, heurte bien des hommes, mais c'est une réalité idéologique et surtout sociologique. Cela n'équivaut pas à prétendre que tous les hommes sont des "crocodiles" violeurs en puissance, mais déclare simplement et tristement que de multiples pans de notre culture, que les lois de nos sociétés, etc. instaurent une norme comportementale empreinte de sexisme et de misogynie ayant de multiples conséquences, toutes minimisées et excusées, dont les plus dramatiques sont les féminicides et viols. Loin d'être indigeste, ce volumineux pavé se lit d'une traite le souffle coupé : cette affaire happe l'attention tant elle bouscule notre croyance en l'homme. Egalement parce que la BD, certes souvent dans la paraphrase ou "l'anecdotique", parvient à recréer le sentiment alors dominant chez les féministes s'étant emparées du sujet, que cette fois, la situation bougerait, que la honte changerait de camp ! Non, il ne s'agissait généralement pas de monstres : les coupables n'étaient que des hommes, de simples routiers, pompiers, ouvriers..., parfois de bons pères de famille, des conjoints aimant, de bons employés appréciés de leurs collègues et patrons, des hommes pour nombre d'entre soutenus durant le procès par leurs proches et notamment leur conjointe. Cette BD malheureusement met peu en perspective les choses, la faute aussi au projet initial, à ce souhait de construire une œuvre collective offrant modérément la possibilité de développer un point de vue, de synthétiser une pensée. Les brefs propos sur l'inceste et la culture du viol font entrevoir ce qu'aurait pu être cette BD, mais le projet ne souhaitait visiblement pas l'ampleur, plutôt dégager le sentiment d'une prise de conscience collective pouvant laisser espérer des jours meilleurs. Sur ce point, c'est réussi.
Le Chasseur de Rêves
Comme disait ma mamie : en voilà une série qu'elle est quand-même vachement bonne ! Je me suis lancée dans cette série pour deux raisons : la première c'est qu'elle ne sortait jamais à ma bibliothèque et la seconde c'est que le postulat me faisait miroiter de savoureuses petites histoires pleines de fantaisie et de créatures loufoques. Aussi car mon père m'en avait dit du bien, je l'avoue. Bon, premièrement je regrette sincèrement que la série ne soit pas plus empruntée car, bien que n'étant pas du goût de tout le monde, elle reste suffisamment travaillée et atypique pour valoir un sincère coup d'œil et quelques louanges. En effet, pour tout-e amateur-ice de récits alambiqués où les rêves et les illusions se confrontent (et se confondent aussi) à la réalité, un peu à la Don Quijote, ce récit offre une lecture on ne peut plus agréable. Le chasseur (car c'est son nom) rêve de chasse et de gloire. Ou, pour être plus précise, il chasse les rêves et la gloire. C'est un chasseur d'aventure, un désireux de grandiose, quelqu'un qui se refuse à l'ennui d'un quotidien banal. Pour lui, tout évènement insignifiant, que cela soit la lecture d'un roman, la vision de nuages aux formes atypiques dans le ciel ou encore le fait de tomber malade, est une nouvelle occasion de partir en chasse, de chercher une forme de grandeur et d'épique. Comme Don Quijote, avec qui la comparaison est évidente, notre chasseur est affublé d'un Sancho, d'un assistant, un faire-valoir en apparence qui se révèle en réalité bien plus terre-à-terre que son maître et cherchant toujours à le connecter au réel. Il cherche à le protéger, à s'assurer que ses chasses et ses rêves n'aient pas de conséquences désastreuses, pour lui comme pour les espèces qu'ils croisent. A noter cependant que les rêves du chasseurs sont bien plus concrets que les géants de l'hidalgo, les incartades du réel, les chassés-croisés entre le monde bien tangible et l'imaginaire semblent bel et bien être intradiégétiques. Bien que le chasseur se berce parfois d'illusions, préfère croire qu'une taupe géante se soit transformée en rocher que de reconnaître qu'il se soit trompé de cible, il semble pourtant que le monde dans lequel il vit ne soit pas aussi "normal" que ce que l'on pourrait croire. Comme dans une œuvre du réalisme magique, la fantaisie et le surnaturel ne sont qu'à un jeu de mot ou une métaphore de venir chambouler la narration. Un rien peu devenir concret et tout est possible. Chasser ses idées noires ? Chasser la baleine blanche ? A cœur rêveur rien d'impossible, surtout pour quiconque ne se laisse pas enfermé dans ses idées préconçues. Est-ce qu'il faut voir la quête du chasseur comme un appel à rêver, une ode au fantasque et à la poésie ? Ou bien faut-il rapprocher le personnage à son modèle et considérer ses aventures comme les récits tragicomiques d'une personne préférant vivre des illusions que d'affronter la réalité ? Je ne sais pas. Mais même si je ne peut trancher sur la question je reconnais avoir été transportée, avoir voyagé avec ce chasseur et son Sancho, avoir apprécié les jeux sur les mots et les mondes traversés. L'œuvre est bonne, le texte inventif et le dessin coloré et expressif comme il faut (même si le style graphique n'est pas mon préféré). Oui, après lecture, je regrette sincèrement que la série ne soit pas si souvent empruntée que ça.