Une biographie honnête, mais qui ne m’a pas emballé plus que ça.
Je connais assez bien la période au cœur de l’album, à savoir le monde artistique et littéraire de l’entre-deux guerres parisien. Mais c’est surtout l’autre côté de la rue de l’Odéon qui m’avait intéressé, la librairie d’Adrienne Monnier ayant été un creuset et un lieu de rencontres pour beaucoup d’écrivains (Aragon, Breton, Apollinaire je crois).
Il s’agit ici de suivre l’amie d’Adrienne qui, à sa suite, a ouvert une librairie originale portant son nom, Sylvia Beach. Il y a des parties intéressantes dans ce récit, autour des rencontres, du hasard, de l’effervescence du Paris de cette époque, de son cosmopolitisme. Et le casting est bien évidemment impressionnant pour qui s’intéresse à la littérature de l’époque (Française et anglo-saxonne).
Mais j’ai trouvé le récit finalement un peu creux. Je n’ai pas trop aimé le tic – hélas répandu – de multiplier les apparitions de « noms célèbres », qui s’interpellent tous par leurs noms et prénoms. Ça n’est pas naturel et fait un peu trop « placement de produit ».
Je ne connais pas Joyce, que Sylvia Beach a énormément aidé, en publiant son « Ulysse », mais les auteurs le présentent comme quelqu’un d’ingrat et peu estimable, même si Beach semble ne pas lui en vouloir de son manque de reconnaissance.
Les dernières années de la librairie, du moins telle que rêvée et dirigée par Sylvia sont plus sombres – la seconde guerre mondiale est passée par là. Mais le reflux des auteurs américains dès la crise des années 1930 avait quelque peu sonné le glas d’une période d’euphorie pour cette femme qui a joué dans l’ombre un rôle majeure (comme Monnier).
La librairie qui porte encore son nom – délocalisée sur les quais de Seine pas loin de Notre Dame – est un témoignage souvent oublié de celle qui fut une passeuse remarquable.
Le sujet m’intéressait, et j’ai appris un certain nombre de choses. Mais il m’a manqué sans doute un souffle créateur, et j’ai été gêné par quelques facilités (évoquées plus hauts). Je ne regrette pas ma lecture, mais je n’y reviendrai pas.
Une lecture pas désagréable, même si elle m’a un chouia laissé sur ma faim.
Le dessin d’Arianna Melone est original et intéressant, avec un beau travail à l’aquarelle. J’ai par contre parfois été surpris et gêné (et n’ai pas vraiment aimé ça) par les tâches rouges sur les visages, qui leur donnent parfois des airs de clowns incongrus.
L’intrigue a un arrière-plan intéressant, autour d’Eugénie, une femme prétendant entendre des voix, être en contact avec des défunts, avoir des « visions ». Scandaleux pour son père, grand bourgeois coincé, qui la fait interner de force à la Salpêtrière, où elle rejoint la cohorte de femmes « soignées », mais aussi exhibées par Charcot.
Au travers de l’exemple d’Eugénie, et de quelques femmes compagnes d’infortune internée, c’est la condition féminine qui est au cœur des débats, avec un parallèle à faire avec le traitement réservé à de nombreuses femmes trois ou quatre siècles plus tôt : l’asile et les accusations d’hystérie ayant remplacé le bûcher et les accusations de sorcellerie.
Mais cet aspect est sous-employé selon moi. Et l’intrigue elle-même manque un peu de fond. Et je pense qu’elle aurait pu fonctionner sans faire d’Eugénie une interlocutrice des fantômes.
On ne sait trop quelle est la part autobiographique de ce récit, mais on peut penser que Max de Radiguès y a mis de lui-même. En effet, l’histoire se déroule vraisemblablement dans la Belgique des années 90 (parmi d’autres références à la pop-culture de cette période, les kids jouent à la console mais le téléphone portable n’existe pas encore), et l’auteur, né en 1982 en Wallonie, était alors un adolescent. Avec « Dix secondes », il dresse à travers Marco le portrait d’une génération dans cette tranche d’âge entre deux eaux, où l’on n’est plus tout à fait un enfant mais pas encore un adulte, dans le cadre en apparence paisible de ces zones résidentielles bien rangées où il ne se passe jamais rien…
Max de Radiguès appartient à cette catégorie d’auteurs en retrait des codes traditionnels de la BD. Son talent à lui est de dévoiler, à l’aide de sa ligne claire un peu frêle, et néanmoins très stylée, agrémentée de couleurs vives et « innocentes », le malaise rampant d’une société bien trop lisse pour être honnête. Et ce malaise vient principalement de Marco, ce teenager déconcertant qui ne devrait pas avoir trop de raisons de se lamenter, si ce n’était ce manque patent de communication avec ses parents (un père qui semble toujours être de passage, accaparé dit-il par un boulot « prenant », et une mère aimante mais totalement « à l’ouest », peu disposée à affronter une situation familiale quelque peu problématique) et cet amour qu’il voue à Zoé, malheureusement à sens unique… Comme pour se venger de cet état de fait, Marco s’en prend à lui-même, car Marco, bonne pâte, ne ferait pas de mal à une mouche. Marco se fait donc du mal à lui-même, torture son corps et à sa tête en s’infligeant de grosses bitures, engloutissant les pires mixtures qui passent à sa portée pourvu qu’elles soient alcoolisées, et pour être sûr d’être suffisamment défoncé, renforce son alcoolémie à coup de spliffs bien dosés… et ça ne s’arrête pas là puisque lorsqu’il reprend son scooter en pleine nuit, il aime à tutoyer le danger en fermant les yeux pendant dix secondes… l’accident survient presque toujours, mais comme dans une bande dessinée de Tintin, notre « héros » semble se relever à chaque fois sans une égratignure malgré des vols planés impressionnants… un vrai jackass le Marco !
Alors n’allons pas dire que Marco est un modèle, c’est loin d’être le cas, et ce qu’il vit est plutôt assez glauque voire déprimant. Et pourtant, allez savoir pourquoi, Max de Radiguès réussit à produire un récit plein de fraîcheur et d’humour où les haleines alcoolisées sont tenues à distance, heureusement pour le lecteur d’ailleurs ! C’est très paradoxal mais ça doit être ça, le style Radiguès, et ça fonctionne à merveille, un peu comme si Quick (ou son copain Flupke…), avec quelques années de plus, avait croisé Charles Bukowski et Bob Marley sur sa route (mais sans jamais voir Jah).
Il est malin, le Max, et sans avoir l’air d’y toucher, mais c’est une autre grille de lecture qu’on pourra éventuellement privilégier, s’efforce de montrer que le confort de nos sociétés modernes peut générer du mal-être, sur lequel ses victimes ne pourront pas forcément mettre des mots. Dans le cas de Marco, c’est un peu comme s’il était prisonnier de lui-même et de son image de gentil garçon, incapable d’exprimer le mal indicible qui le ronge et le pousse à commettre des actes suicidaires dans un contexte pourtant familier et rassurant. L’auteur ne nous livre pas de réponse mais se contente de montrer une réalité sous le prisme de son vécu, en évitant d’être démonstratif, sans jugement, d’où cette fraîcheur sans doute. Ainsi, il laisse le soin à chacun d’en tirer ses propres conclusions, notamment avec une fin qui peut laisser perplexe mais s’imprime sur nos rétines pendant longtemps. En cela, il fait confiance à ses lecteurs et c’est plus qu’appréciable.
« Dix secondes », voilà un titre qui résume parfaitement cet album, évoquant la brièveté d’un coup de folie pouvant faire basculer une vie vers le néant absolu, reflétant par là même son absurdité. Max de Radiguès nous livre ici une étude sociologique sans prétention et qui sonne vrai, sous un angle original et faussement candide, assurément une bande dessinée à retenir pour cette année 2025.
Je me dois de préciser avant toute chose que je ne connais que les 5 premiers tomes de la série, et n'ai pas lu la suite, en tout cas pour le moment.
Mon rapide avis ne concerne donc que cette première 'période'.
Je dois dire que la lecture d'un résumé de l'intrigue trouvé sur le net avait tout pour me faire bailler : un enfant qui grandit au milieu des loups, accompagné d'une sorte de 'maître-loup', dont la famille a été assassinée par un méchant, vraiment pas gentil, et qui va, prendre le temps de grandir avant de se venger dans un grand bouquet final, après avoir accepté sa propre animalité, et sa capacité à recourir à la violence.
Ouais...........comme je le disais on sent vite l'ennui nous gagner.
Sauf que, sauf que, y a rien à dire, Swolfs est un maître dessinateur, et... un grand conteur. Le bougre sait vraiment y faire.
Les dessins sont d'une très grande qualité, à l'image de ce qu'il avait pu produire avec le Prince de la Nuit (ambiance châteaux, également), ou dans Durango, par exemple. (j'ai un souci avec les Black Hills, raison pour laquelle je ne les nomme pas). J'apprécie non seulement son travail sur le dessin, mais aussi sur les angles de vue, les perspectives, les inserts de personnages dans d'autres cases, bref, tout ça se déguste comme, on dégusterait, un vrai classique, alors que l'on s'était pourtant dit que ça n'avait guère d'intérêt au vu du côté 'déjà vu 100 fois du scénar'.
Un bon 4/5 pour moi.
J'attends vraiment le jour où sortira LA Bd de Swolfs, avec l'histoire véritablement à la hauteur du dessin, ce jour là, on touchera du doigt le chef-d'œuvre clairement.
ARfff... Encore une notation difficile pour cet album qui oscille pour moi entre le 3 et le 4... J'arrondis donc au supérieur pour le bon moment de lecture passé quand même.
Si je dis "quand même", c'est qu'effectivement, il m'a manqué le transport que procure certains albums épiques et shakespearien dont se réclame cet opus. Ayrolles nous le distille, construit, fait monter la sauce, avec son sens du récit et du dialogue qui le caractérise, mais... mais je ne sais pas, il manque le petit quelque chose qui fait la différence et hisse un album au dessus des autres pour sortir du lot. Peut-être la forme ampoulée des dialogues qui manque parfois de naturel ?
Le dessin de Tanquerelle est en adéquation parfaite avec l'histoire que nous propose Ayrolles ; on ressent parfaitement la rudesse de cette contrée, qu'il s'agisse de pays lui même ou de ses habitants. Le Groenland est un pays rude, ajoutez-y les fourberies et manigances d'un personnage haut en couleur, et le tout devient détonnant, ce que sait parfaitement nous rendre compte Hervé Tanquerelle.
Alors oui, c'est agréable à lire, on s'immerge quand même de façon intense dans ce ce rude pays, cadre parfait pour ce psychodrame historique où évolue une sacré brochette de personnages.
(3.5/5)
C'est avec Waterlose que j'avais découvert ce duo tonitruant maltraitant les personnages historiques illustres pour la bonne cause. C'est ici Jeanne d'Arc, et par effet de bande, Dieu, qui vont déguster !
En effet, Jeanne s'entête à vouloir sauver la France de l'invasion anglaise, malgré les dénégations insistantes de Dieu. Il teste sa foi, elle en est certaine...
Bref, à partir de là tout tourne aux quiproquos, donnant lieu à des dialogues épiques et lunaires ou la bêtise se tire la bourre avec l'absurde pour notre plus grand plaisir.
Alors oui, certains passages sont moins drôles (j'ai trouvé la fin sur le bûcher moins mordante), mais l'ensemble tient largement la route. Et pour qu'une BD arrive à me faire rire haut et fort, c'est que ça fonctionne !
Côté dessin, Josselin Duparcmeur reste fidèle au style qu'il a adopté pour cette collection : c'est minimaliste mais expressif au niveau du trait ; pour la couleur, fi du saumon, on passe au vert pale égayer les planches.
Une BD qu'il fait bon de lire par ces temps moroses, histoire de se dérider les zygomatiques un bon coup !
Oh, waw… Je viens de me prendre une belle claque.
Pour tout vous dire, j'écris cet avis quelques minutes après avoir fermé l'album et j'ai encore des larmes dans les yeux, vous pouvez donc imaginer à quel point l'histoire a pu me toucher.
C'est une histoire simple et tristement réaliste.
Marcia et Florence sont deux amies d'enfance qui ne sont malheureusement plus revues depuis que Marcia a quitté le village il y a de ça une trentaine d'années pour vivre sur Paris. Le récit commence lorsque Marcia revient au village pour s'occuper de sa mère, pile à temps pour retrouver Florence aux funérailles de son mari. Très rapidement on comprend que les deux s'aiment, s'aimaient également dans leur jeunesse, mais qu'une petite rancœur vient noircir le tableau pour chacune d'entre elles : Marcia est partie seule sur Paris et a abandonnée Florence, Florence n'est pas partie avec Marcia et a préféré se marier avec un homme et rester au village.
C'est un drame quotidien sur un amour raté, le poids des regrets et du passé, sur le poids des attentes familiales aussi. J'ai particulièrement aimé le parallèle intéressant sur le passé de Marcia et de sa mère, mettant en lumière que des évènements tristes comme ceux-là arrivent toujours mais que les choix que l'on prend face à eux différencient les individus.
Il y aurait beaucoup de choses à dire sur cette histoire, comme son joli jeu des temporalité ou son propos sur la peur et les choix, mais je pense que le tout mérite d'être découvert.
C'est un album qui brille par sa simplicité, sa mélancolie, sa volonté de croire au fait qu'il n'est jamais trop tard pour aimer. C'est beau, c'est triste, c'est romantique, que voulez-vous que je dise de plus ? Ce serait déjà bien assez pour me faire pleurer, alors si en plus on ajoute à ça un dessin très joli dans une approche graphique proche de l'aquarelle et une qualité d'écriture simple mais finement trouvée je suis sûre d'adorer le résultat.
Coup de cœur.
Bon, je vais laisser ma note sur 2* mais j'ai pas mal hésité sur laquelle lui attribuer. En fait, j'ai du mal à être objectif dans mon jugement avec la quantité de BD documentaire que j'ai lu ces dernières années, et la qualité que j'attends désormais de l'une d'entre elles.
Cette BD traite de sociologie et de la façon dont les modèles familiaux influencent les pensées de leur pays, créant des idéologies. En ce sens, je suis carrément intéressé par la proposition !
Maintenant, la réalisation n'est clairement pas au niveau de ce que j'ai pu lire dans d'autres ouvrages bien plus instructifs. Déjà, la qualité graphique pâtit. Non pas que Terreur Graphique ne sait pas dessiner, mais ses pages ne sont pas toujours claires et précises. J'entends par là que le comparatif avec d'autres auteurs ou autrices saute aux yeux, notamment pour ce qui est de la clarté du propos lorsque c'est nécessaire. Je cite souvent Lou Lubie comme une référence en la matière mais c'est ce à quoi j'ai pensé en ressortant de cette BD. Un manque de clarté lorsque les informations devenaient précises et factuelles, permettant de comprendre le cœur du propos.
D'autre part, il y a de nombreuses parasitismes du déroulé factuel. Le récit met en scène Terreur Graphique et Emmanuel Todd qui se balade de monde en monde présentant les modèles familiaux ainsi que leur impact sur la pensée du pays. C'est malheureusement parasité par de nombreuses interventions humoristiques entre les deux personnages, dans une dynamique de professeur-mauvais élève qui n'ajoute pas grand chose au récit. Et ces pensées sont nombreuses, trop nombreuses à mon gout, surtout quand elles se glissent dans des explications. Le récit devient haché et la structure disparait, laissant assez peu de fluidité pour comprendre le propos.
Et puisque j'en parle, je dois bien dire que j'ai trouvé le propos assez faiblard. En soi, il manque de consistance, de corps. Plein de petites pistes ne sont pas exploitées, et même le propos central des différentes formes de familles qui structurent différents systèmes politique reste assez en surface. Il manque beaucoup de développement sur ces structures familiales, d'où elles viennent, comment elles se sont développées, qu'est-ce que ça implique comme type de pensées, etc ... De fait, il y a des pistes très intéressantes mais j'ai l'impression de lire une grande introduction à une pensée complexe mais sans avoir pu appréhender ses arcanes. D'où viennent les réflexions ? Comment ont-elles émergées ? Qu'est-ce que cela change dans notre approche de l'Histoire ou de notre temps ?
Bref, je suis sorti de la BD avec plus de questions que de réponses et pas mal de frustrations sur le peu que l'ensemble contient. Dans le style documentaire, ce n'est vraiment pas le meilleur.
Ma note est donc autant ce reflet que le fait que je sois un peu circonspect vis-à-vis des théories avancées, même si l'auteur l'appuie selon ses dires sur les faits. L'auteur est controversé dans bien des situations (Emmanuel Todd est critiqué notamment sur sa méthodologie) et je trouve que ses thèses semblent parfois bien trop faciles dans leur démonstration (ce qui est potentiellement imputable à l'adaptation). Bref, je suis assez mitigé sur le fond, pas convaincu par la forme et prudent vis-à-vis de l'auteur, donc pas recommandé !
J'ai offert cette BD à ma copine pour la fin de sa thèse et dans la continuité de ses recherches sur l'agriculture urbaine. Et j'ai mis pas mal de temps à la lire, ralenti par une envie de lire bien plus de livres que j'ai depuis le début d'année. Mais finalement j'ai cédé et je suis surpris d'être le premier à le poster ici !
Au vu de ma note, je vais commencer directement par le négatif histoire de l'évacuer en une fois. Déjà, je suis assez distant de propos que l'autrice tient personnellement sur divers points : sylvothérapie qui est de la pseudo-science, vision de la sorcière comme femme savante (à l'opposée de ce que fut réellement la figure et bien plus dans les réinterprétations contemporaines), vision souvent animiste de la nature, explication par des phases de la lune non-documentée, etc ... En soi, j'ai l'impression de voir plusieurs fois des commentaires de la réalisatrice qui sentent bon le new-age et les considérations très loin du consensus scientifique. Comme si dès lors que l'on s'oppose au modèle agricole actuel et à la vision capitaliste-libérale de notre monde, il fallait avoir des croyances irraisonnées. Réenchanter le monde ne passe pas forcément pas les croyances !
Cela dit, donc, je dois avouer que j'ai été touchée par cette BD. Toute considération personnelle sur les croyances de la réalisatrice mis à part -surtout que ces apartés en changent en rien le reste du propos- j'ai apprécié cette plongée dans l'agriculture qui change. On suit le parcours de la réalisatrice qui a eu ses moments de prises de conscience puis fait ensuite cette petite tournée de paysans qui agissent différemment, inventant l'agriculture de demain. Ces différents portraits sont l'intérêt principal du récit, avec des portraits extrêmement intéressants, que je ne connaissais absolument pas.
La BD est vite lue, n'insistant pas sur les différents personnages et se contentant de présenter leurs parcours, leurs motivations et ce qu'ils ont changés. Et franchement, c'est inspirant. Il y a des passages que j'ai trouvé émouvant (le paysan déclarant qu'il a dû être aidé par ses enfants, ce qui lui a semblé si peu normal) et d'autres incroyable, comme ces vignes devenues refuge de la LPO. Le genre de proposition qui semble si antinomique que je ne pensais pas la voir de mon vivant !
Le dessin de l'autrice (que je découvre ici) est franchement superbe et s'harmonise avec le sujet, faisant une part belle aux paysages et images fortes. C'est souvent de grandes cases, très champêtre. L'utilisation de couleurs pastels et surtout pas vive ramène une certaine nature non magnifiée mais au contraire vivante. De fait, les cases et l'ambiance très belle, très douce, permet de se plonger encore plus dans le propos qui frôle le concept de décroissance sans jamais l'aborder frontalement. C'est une ode à la nature et à la paysannerie, loin des ouvriers agricoles (donc subordonnés à l'entreprise) que sont devenus nos agriculteurs d'aujourd'hui. Il y a quelques défauts que je dirais presque inhérent au sujet, mais la BD reste une excellente bouffée d'oxygène qui permet de se remotiver, dans le marasme actuel, notamment en allant vers ceux qui osent changer de modèle. Une promotion que je note plus large que réel, la BD méritant sans doute un bon 3.5 que j'arrondis au supérieur.
Arawn est une BD de bourrin pour les bourrins. Beaucoup de sang, de têtes tranchées et de guerrières en culotte avec des gros seins. Notre côté pervers aimera scruter les courbes délicieuses de Siamh. Pour le reste, ça se lit pour passer le temps. Globalement on passe un bon moment mais sans plus. La façon de conter l'histoire est sobre, il n'y a pas énormément de dialogues. Les dessins sont parfois très imprécis, tandis que d'autres fois ils sont sublimes. On sent que S. GRENIER porte une attention particulière à son personnage féminin Siamh, qu'il lui rend hommage en dessinant son corps avec soin.
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Sylvia, Shakespeare & Co
Une biographie honnête, mais qui ne m’a pas emballé plus que ça. Je connais assez bien la période au cœur de l’album, à savoir le monde artistique et littéraire de l’entre-deux guerres parisien. Mais c’est surtout l’autre côté de la rue de l’Odéon qui m’avait intéressé, la librairie d’Adrienne Monnier ayant été un creuset et un lieu de rencontres pour beaucoup d’écrivains (Aragon, Breton, Apollinaire je crois). Il s’agit ici de suivre l’amie d’Adrienne qui, à sa suite, a ouvert une librairie originale portant son nom, Sylvia Beach. Il y a des parties intéressantes dans ce récit, autour des rencontres, du hasard, de l’effervescence du Paris de cette époque, de son cosmopolitisme. Et le casting est bien évidemment impressionnant pour qui s’intéresse à la littérature de l’époque (Française et anglo-saxonne). Mais j’ai trouvé le récit finalement un peu creux. Je n’ai pas trop aimé le tic – hélas répandu – de multiplier les apparitions de « noms célèbres », qui s’interpellent tous par leurs noms et prénoms. Ça n’est pas naturel et fait un peu trop « placement de produit ». Je ne connais pas Joyce, que Sylvia Beach a énormément aidé, en publiant son « Ulysse », mais les auteurs le présentent comme quelqu’un d’ingrat et peu estimable, même si Beach semble ne pas lui en vouloir de son manque de reconnaissance. Les dernières années de la librairie, du moins telle que rêvée et dirigée par Sylvia sont plus sombres – la seconde guerre mondiale est passée par là. Mais le reflux des auteurs américains dès la crise des années 1930 avait quelque peu sonné le glas d’une période d’euphorie pour cette femme qui a joué dans l’ombre un rôle majeure (comme Monnier). La librairie qui porte encore son nom – délocalisée sur les quais de Seine pas loin de Notre Dame – est un témoignage souvent oublié de celle qui fut une passeuse remarquable. Le sujet m’intéressait, et j’ai appris un certain nombre de choses. Mais il m’a manqué sans doute un souffle créateur, et j’ai été gêné par quelques facilités (évoquées plus hauts). Je ne regrette pas ma lecture, mais je n’y reviendrai pas.
Le Bal des folles
Une lecture pas désagréable, même si elle m’a un chouia laissé sur ma faim. Le dessin d’Arianna Melone est original et intéressant, avec un beau travail à l’aquarelle. J’ai par contre parfois été surpris et gêné (et n’ai pas vraiment aimé ça) par les tâches rouges sur les visages, qui leur donnent parfois des airs de clowns incongrus. L’intrigue a un arrière-plan intéressant, autour d’Eugénie, une femme prétendant entendre des voix, être en contact avec des défunts, avoir des « visions ». Scandaleux pour son père, grand bourgeois coincé, qui la fait interner de force à la Salpêtrière, où elle rejoint la cohorte de femmes « soignées », mais aussi exhibées par Charcot. Au travers de l’exemple d’Eugénie, et de quelques femmes compagnes d’infortune internée, c’est la condition féminine qui est au cœur des débats, avec un parallèle à faire avec le traitement réservé à de nombreuses femmes trois ou quatre siècles plus tôt : l’asile et les accusations d’hystérie ayant remplacé le bûcher et les accusations de sorcellerie. Mais cet aspect est sous-employé selon moi. Et l’intrigue elle-même manque un peu de fond. Et je pense qu’elle aurait pu fonctionner sans faire d’Eugénie une interlocutrice des fantômes.
Dix Secondes
On ne sait trop quelle est la part autobiographique de ce récit, mais on peut penser que Max de Radiguès y a mis de lui-même. En effet, l’histoire se déroule vraisemblablement dans la Belgique des années 90 (parmi d’autres références à la pop-culture de cette période, les kids jouent à la console mais le téléphone portable n’existe pas encore), et l’auteur, né en 1982 en Wallonie, était alors un adolescent. Avec « Dix secondes », il dresse à travers Marco le portrait d’une génération dans cette tranche d’âge entre deux eaux, où l’on n’est plus tout à fait un enfant mais pas encore un adulte, dans le cadre en apparence paisible de ces zones résidentielles bien rangées où il ne se passe jamais rien… Max de Radiguès appartient à cette catégorie d’auteurs en retrait des codes traditionnels de la BD. Son talent à lui est de dévoiler, à l’aide de sa ligne claire un peu frêle, et néanmoins très stylée, agrémentée de couleurs vives et « innocentes », le malaise rampant d’une société bien trop lisse pour être honnête. Et ce malaise vient principalement de Marco, ce teenager déconcertant qui ne devrait pas avoir trop de raisons de se lamenter, si ce n’était ce manque patent de communication avec ses parents (un père qui semble toujours être de passage, accaparé dit-il par un boulot « prenant », et une mère aimante mais totalement « à l’ouest », peu disposée à affronter une situation familiale quelque peu problématique) et cet amour qu’il voue à Zoé, malheureusement à sens unique… Comme pour se venger de cet état de fait, Marco s’en prend à lui-même, car Marco, bonne pâte, ne ferait pas de mal à une mouche. Marco se fait donc du mal à lui-même, torture son corps et à sa tête en s’infligeant de grosses bitures, engloutissant les pires mixtures qui passent à sa portée pourvu qu’elles soient alcoolisées, et pour être sûr d’être suffisamment défoncé, renforce son alcoolémie à coup de spliffs bien dosés… et ça ne s’arrête pas là puisque lorsqu’il reprend son scooter en pleine nuit, il aime à tutoyer le danger en fermant les yeux pendant dix secondes… l’accident survient presque toujours, mais comme dans une bande dessinée de Tintin, notre « héros » semble se relever à chaque fois sans une égratignure malgré des vols planés impressionnants… un vrai jackass le Marco ! Alors n’allons pas dire que Marco est un modèle, c’est loin d’être le cas, et ce qu’il vit est plutôt assez glauque voire déprimant. Et pourtant, allez savoir pourquoi, Max de Radiguès réussit à produire un récit plein de fraîcheur et d’humour où les haleines alcoolisées sont tenues à distance, heureusement pour le lecteur d’ailleurs ! C’est très paradoxal mais ça doit être ça, le style Radiguès, et ça fonctionne à merveille, un peu comme si Quick (ou son copain Flupke…), avec quelques années de plus, avait croisé Charles Bukowski et Bob Marley sur sa route (mais sans jamais voir Jah). Il est malin, le Max, et sans avoir l’air d’y toucher, mais c’est une autre grille de lecture qu’on pourra éventuellement privilégier, s’efforce de montrer que le confort de nos sociétés modernes peut générer du mal-être, sur lequel ses victimes ne pourront pas forcément mettre des mots. Dans le cas de Marco, c’est un peu comme s’il était prisonnier de lui-même et de son image de gentil garçon, incapable d’exprimer le mal indicible qui le ronge et le pousse à commettre des actes suicidaires dans un contexte pourtant familier et rassurant. L’auteur ne nous livre pas de réponse mais se contente de montrer une réalité sous le prisme de son vécu, en évitant d’être démonstratif, sans jugement, d’où cette fraîcheur sans doute. Ainsi, il laisse le soin à chacun d’en tirer ses propres conclusions, notamment avec une fin qui peut laisser perplexe mais s’imprime sur nos rétines pendant longtemps. En cela, il fait confiance à ses lecteurs et c’est plus qu’appréciable. « Dix secondes », voilà un titre qui résume parfaitement cet album, évoquant la brièveté d’un coup de folie pouvant faire basculer une vie vers le néant absolu, reflétant par là même son absurdité. Max de Radiguès nous livre ici une étude sociologique sans prétention et qui sonne vrai, sous un angle original et faussement candide, assurément une bande dessinée à retenir pour cette année 2025.
Légende
Je me dois de préciser avant toute chose que je ne connais que les 5 premiers tomes de la série, et n'ai pas lu la suite, en tout cas pour le moment. Mon rapide avis ne concerne donc que cette première 'période'. Je dois dire que la lecture d'un résumé de l'intrigue trouvé sur le net avait tout pour me faire bailler : un enfant qui grandit au milieu des loups, accompagné d'une sorte de 'maître-loup', dont la famille a été assassinée par un méchant, vraiment pas gentil, et qui va, prendre le temps de grandir avant de se venger dans un grand bouquet final, après avoir accepté sa propre animalité, et sa capacité à recourir à la violence. Ouais...........comme je le disais on sent vite l'ennui nous gagner. Sauf que, sauf que, y a rien à dire, Swolfs est un maître dessinateur, et... un grand conteur. Le bougre sait vraiment y faire. Les dessins sont d'une très grande qualité, à l'image de ce qu'il avait pu produire avec le Prince de la Nuit (ambiance châteaux, également), ou dans Durango, par exemple. (j'ai un souci avec les Black Hills, raison pour laquelle je ne les nomme pas). J'apprécie non seulement son travail sur le dessin, mais aussi sur les angles de vue, les perspectives, les inserts de personnages dans d'autres cases, bref, tout ça se déguste comme, on dégusterait, un vrai classique, alors que l'on s'était pourtant dit que ça n'avait guère d'intérêt au vu du côté 'déjà vu 100 fois du scénar'. Un bon 4/5 pour moi. J'attends vraiment le jour où sortira LA Bd de Swolfs, avec l'histoire véritablement à la hauteur du dessin, ce jour là, on touchera du doigt le chef-d'œuvre clairement.
La Terre verte
ARfff... Encore une notation difficile pour cet album qui oscille pour moi entre le 3 et le 4... J'arrondis donc au supérieur pour le bon moment de lecture passé quand même. Si je dis "quand même", c'est qu'effectivement, il m'a manqué le transport que procure certains albums épiques et shakespearien dont se réclame cet opus. Ayrolles nous le distille, construit, fait monter la sauce, avec son sens du récit et du dialogue qui le caractérise, mais... mais je ne sais pas, il manque le petit quelque chose qui fait la différence et hisse un album au dessus des autres pour sortir du lot. Peut-être la forme ampoulée des dialogues qui manque parfois de naturel ? Le dessin de Tanquerelle est en adéquation parfaite avec l'histoire que nous propose Ayrolles ; on ressent parfaitement la rudesse de cette contrée, qu'il s'agisse de pays lui même ou de ses habitants. Le Groenland est un pays rude, ajoutez-y les fourberies et manigances d'un personnage haut en couleur, et le tout devient détonnant, ce que sait parfaitement nous rendre compte Hervé Tanquerelle. Alors oui, c'est agréable à lire, on s'immerge quand même de façon intense dans ce ce rude pays, cadre parfait pour ce psychodrame historique où évolue une sacré brochette de personnages. (3.5/5)
Jeanne et Cierges
C'est avec Waterlose que j'avais découvert ce duo tonitruant maltraitant les personnages historiques illustres pour la bonne cause. C'est ici Jeanne d'Arc, et par effet de bande, Dieu, qui vont déguster ! En effet, Jeanne s'entête à vouloir sauver la France de l'invasion anglaise, malgré les dénégations insistantes de Dieu. Il teste sa foi, elle en est certaine... Bref, à partir de là tout tourne aux quiproquos, donnant lieu à des dialogues épiques et lunaires ou la bêtise se tire la bourre avec l'absurde pour notre plus grand plaisir. Alors oui, certains passages sont moins drôles (j'ai trouvé la fin sur le bûcher moins mordante), mais l'ensemble tient largement la route. Et pour qu'une BD arrive à me faire rire haut et fort, c'est que ça fonctionne ! Côté dessin, Josselin Duparcmeur reste fidèle au style qu'il a adopté pour cette collection : c'est minimaliste mais expressif au niveau du trait ; pour la couleur, fi du saumon, on passe au vert pale égayer les planches. Une BD qu'il fait bon de lire par ces temps moroses, histoire de se dérider les zygomatiques un bon coup !
La Montagne entre nous
Oh, waw… Je viens de me prendre une belle claque. Pour tout vous dire, j'écris cet avis quelques minutes après avoir fermé l'album et j'ai encore des larmes dans les yeux, vous pouvez donc imaginer à quel point l'histoire a pu me toucher. C'est une histoire simple et tristement réaliste. Marcia et Florence sont deux amies d'enfance qui ne sont malheureusement plus revues depuis que Marcia a quitté le village il y a de ça une trentaine d'années pour vivre sur Paris. Le récit commence lorsque Marcia revient au village pour s'occuper de sa mère, pile à temps pour retrouver Florence aux funérailles de son mari. Très rapidement on comprend que les deux s'aiment, s'aimaient également dans leur jeunesse, mais qu'une petite rancœur vient noircir le tableau pour chacune d'entre elles : Marcia est partie seule sur Paris et a abandonnée Florence, Florence n'est pas partie avec Marcia et a préféré se marier avec un homme et rester au village. C'est un drame quotidien sur un amour raté, le poids des regrets et du passé, sur le poids des attentes familiales aussi. J'ai particulièrement aimé le parallèle intéressant sur le passé de Marcia et de sa mère, mettant en lumière que des évènements tristes comme ceux-là arrivent toujours mais que les choix que l'on prend face à eux différencient les individus. Il y aurait beaucoup de choses à dire sur cette histoire, comme son joli jeu des temporalité ou son propos sur la peur et les choix, mais je pense que le tout mérite d'être découvert. C'est un album qui brille par sa simplicité, sa mélancolie, sa volonté de croire au fait qu'il n'est jamais trop tard pour aimer. C'est beau, c'est triste, c'est romantique, que voulez-vous que je dise de plus ? Ce serait déjà bien assez pour me faire pleurer, alors si en plus on ajoute à ça un dessin très joli dans une approche graphique proche de l'aquarelle et une qualité d'écriture simple mais finement trouvée je suis sûre d'adorer le résultat. Coup de cœur.
Il était une fois la famille - Systèmes familiaux et idéologie
Bon, je vais laisser ma note sur 2* mais j'ai pas mal hésité sur laquelle lui attribuer. En fait, j'ai du mal à être objectif dans mon jugement avec la quantité de BD documentaire que j'ai lu ces dernières années, et la qualité que j'attends désormais de l'une d'entre elles. Cette BD traite de sociologie et de la façon dont les modèles familiaux influencent les pensées de leur pays, créant des idéologies. En ce sens, je suis carrément intéressé par la proposition ! Maintenant, la réalisation n'est clairement pas au niveau de ce que j'ai pu lire dans d'autres ouvrages bien plus instructifs. Déjà, la qualité graphique pâtit. Non pas que Terreur Graphique ne sait pas dessiner, mais ses pages ne sont pas toujours claires et précises. J'entends par là que le comparatif avec d'autres auteurs ou autrices saute aux yeux, notamment pour ce qui est de la clarté du propos lorsque c'est nécessaire. Je cite souvent Lou Lubie comme une référence en la matière mais c'est ce à quoi j'ai pensé en ressortant de cette BD. Un manque de clarté lorsque les informations devenaient précises et factuelles, permettant de comprendre le cœur du propos. D'autre part, il y a de nombreuses parasitismes du déroulé factuel. Le récit met en scène Terreur Graphique et Emmanuel Todd qui se balade de monde en monde présentant les modèles familiaux ainsi que leur impact sur la pensée du pays. C'est malheureusement parasité par de nombreuses interventions humoristiques entre les deux personnages, dans une dynamique de professeur-mauvais élève qui n'ajoute pas grand chose au récit. Et ces pensées sont nombreuses, trop nombreuses à mon gout, surtout quand elles se glissent dans des explications. Le récit devient haché et la structure disparait, laissant assez peu de fluidité pour comprendre le propos. Et puisque j'en parle, je dois bien dire que j'ai trouvé le propos assez faiblard. En soi, il manque de consistance, de corps. Plein de petites pistes ne sont pas exploitées, et même le propos central des différentes formes de familles qui structurent différents systèmes politique reste assez en surface. Il manque beaucoup de développement sur ces structures familiales, d'où elles viennent, comment elles se sont développées, qu'est-ce que ça implique comme type de pensées, etc ... De fait, il y a des pistes très intéressantes mais j'ai l'impression de lire une grande introduction à une pensée complexe mais sans avoir pu appréhender ses arcanes. D'où viennent les réflexions ? Comment ont-elles émergées ? Qu'est-ce que cela change dans notre approche de l'Histoire ou de notre temps ? Bref, je suis sorti de la BD avec plus de questions que de réponses et pas mal de frustrations sur le peu que l'ensemble contient. Dans le style documentaire, ce n'est vraiment pas le meilleur. Ma note est donc autant ce reflet que le fait que je sois un peu circonspect vis-à-vis des théories avancées, même si l'auteur l'appuie selon ses dires sur les faits. L'auteur est controversé dans bien des situations (Emmanuel Todd est critiqué notamment sur sa méthodologie) et je trouve que ses thèses semblent parfois bien trop faciles dans leur démonstration (ce qui est potentiellement imputable à l'adaptation). Bref, je suis assez mitigé sur le fond, pas convaincu par la forme et prudent vis-à-vis de l'auteur, donc pas recommandé !
Paysans - Le Champ des possibles
J'ai offert cette BD à ma copine pour la fin de sa thèse et dans la continuité de ses recherches sur l'agriculture urbaine. Et j'ai mis pas mal de temps à la lire, ralenti par une envie de lire bien plus de livres que j'ai depuis le début d'année. Mais finalement j'ai cédé et je suis surpris d'être le premier à le poster ici ! Au vu de ma note, je vais commencer directement par le négatif histoire de l'évacuer en une fois. Déjà, je suis assez distant de propos que l'autrice tient personnellement sur divers points : sylvothérapie qui est de la pseudo-science, vision de la sorcière comme femme savante (à l'opposée de ce que fut réellement la figure et bien plus dans les réinterprétations contemporaines), vision souvent animiste de la nature, explication par des phases de la lune non-documentée, etc ... En soi, j'ai l'impression de voir plusieurs fois des commentaires de la réalisatrice qui sentent bon le new-age et les considérations très loin du consensus scientifique. Comme si dès lors que l'on s'oppose au modèle agricole actuel et à la vision capitaliste-libérale de notre monde, il fallait avoir des croyances irraisonnées. Réenchanter le monde ne passe pas forcément pas les croyances ! Cela dit, donc, je dois avouer que j'ai été touchée par cette BD. Toute considération personnelle sur les croyances de la réalisatrice mis à part -surtout que ces apartés en changent en rien le reste du propos- j'ai apprécié cette plongée dans l'agriculture qui change. On suit le parcours de la réalisatrice qui a eu ses moments de prises de conscience puis fait ensuite cette petite tournée de paysans qui agissent différemment, inventant l'agriculture de demain. Ces différents portraits sont l'intérêt principal du récit, avec des portraits extrêmement intéressants, que je ne connaissais absolument pas. La BD est vite lue, n'insistant pas sur les différents personnages et se contentant de présenter leurs parcours, leurs motivations et ce qu'ils ont changés. Et franchement, c'est inspirant. Il y a des passages que j'ai trouvé émouvant (le paysan déclarant qu'il a dû être aidé par ses enfants, ce qui lui a semblé si peu normal) et d'autres incroyable, comme ces vignes devenues refuge de la LPO. Le genre de proposition qui semble si antinomique que je ne pensais pas la voir de mon vivant ! Le dessin de l'autrice (que je découvre ici) est franchement superbe et s'harmonise avec le sujet, faisant une part belle aux paysages et images fortes. C'est souvent de grandes cases, très champêtre. L'utilisation de couleurs pastels et surtout pas vive ramène une certaine nature non magnifiée mais au contraire vivante. De fait, les cases et l'ambiance très belle, très douce, permet de se plonger encore plus dans le propos qui frôle le concept de décroissance sans jamais l'aborder frontalement. C'est une ode à la nature et à la paysannerie, loin des ouvriers agricoles (donc subordonnés à l'entreprise) que sont devenus nos agriculteurs d'aujourd'hui. Il y a quelques défauts que je dirais presque inhérent au sujet, mais la BD reste une excellente bouffée d'oxygène qui permet de se remotiver, dans le marasme actuel, notamment en allant vers ceux qui osent changer de modèle. Une promotion que je note plus large que réel, la BD méritant sans doute un bon 3.5 que j'arrondis au supérieur.
Arawn
Arawn est une BD de bourrin pour les bourrins. Beaucoup de sang, de têtes tranchées et de guerrières en culotte avec des gros seins. Notre côté pervers aimera scruter les courbes délicieuses de Siamh. Pour le reste, ça se lit pour passer le temps. Globalement on passe un bon moment mais sans plus. La façon de conter l'histoire est sobre, il n'y a pas énormément de dialogues. Les dessins sont parfois très imprécis, tandis que d'autres fois ils sont sublimes. On sent que S. GRENIER porte une attention particulière à son personnage féminin Siamh, qu'il lui rend hommage en dessinant son corps avec soin.