Avant tout, je dois préciser que j'ai lu cet album dans son édition dite "prestige" en noir et blanc, et en grand format.
Malgré une couverture assez ratée à mon goût, j'ai été agréablement surpris par cette nouvelle aventure de Thorgal qui nous ramène en arrière, lorsque Louve était toute petite, et Jolan avait à peine 8 ans.
Mais ce qui frappe le lecteur en découvrant cette nouvelle intrigue est le dessin très minutieux de Aouamri, qui m'avait déjà bluffé sur un album de La Quête de l'Oiseau du Temps et sur un ersatz de Thorgal, Saga Valta. Cette édition n&b rend parfaitement hommage à son dessin;
Quant au scénario d'Ozanam, il s'inscrit parfaitement dans la lignée des Thorgal signés Van Hamme. L'auteur a même l'audace, pour le plus grand plaisir du lecteur, de faire revenir des personnages de la série mère, et c'est d'ailleurs fort réussi.
Les intrigues parallèles, que nous suivons tout au long de cet album, d'Aaricia et de Thorgal ne sont pas si éloignées que cela, ce qui donne une certaine unité à cette aventure.
L'idée de cette cité mouvante est originale et bien amenée.
Ce cinquième opus de "Thorgal saga" fait partie des meilleurs, avec évidement "Adieu Aaricia", qui reste pour moi inégalé.
Il y avait de bonnes idées dans ce récit pour en faire même un 2eme tome , mais malheureusement les évènements s'enchaînent très vite ,alors qu'il y avait matière a développer sur le " méchant" fouiller dans les arcanes du politicien véreux, explorer son passé, pas juste un petit flashback comme de 2 3 pages vite expédiées, même la ville manquait d'âme.
Une forte impression d'amateurisme se dégage du dessin, ce n'est pas totalement moche,mais on ressent une certaine faiblesse surtout au niveau des décors ( arrieres plans, plans larges etc..)
Les gunfights sont assez sanglants,mais ce n'est pas suffisant pour en faire un bon western.
Red Stone est une déception pour moi.
Une BD sur René Descartes qui n'a rien de cartésienne, un comble !
René Descartes meurt en 1650 à Stockholm où il sera enterré. On va suivre le périple de son squelette à partir de 1666 jusqu'à 1937 à la galerie d'anatomie comparée au musée national d'histoire naturelle. Un périple qui sera raconté par le crâne de Descartes à ses voisins, des animaux tout en os, avec pour question centrale : est-ce bien le véritable crâne de Descartes ?
Je connaissais les grandes lignes de cette incroyable aventure post mortem.
Daria Schmitt a réalisé un formidable travail de documentation sur ce parcours incroyable et sur l'homme, l'un des fondateurs de la philosophie moderne et le père de la Méthode. Il n'est pas forcément des plus attachant, mais après il a des circonstances atténuantes, puisqu'il sera enterré/déterré plusieurs fois et va perdre au fil des déplacements ses os pour ne rester qu'une tête incomplète (il manque la mâchoire inférieure).
Un récit qui demande de la concentration, c'est dense, érudit mais avec une touche d'humour, sa théorie de l'animal-machine ne plaît pas à son auditoire animal. J'ai un petit faible pour cette baleine bleue échouée à Ostende en 1827. Des échanges qui vont faire vaciller notre philosophe.
C'est aussi un récit historique, il permet de traverser les rebondissements de l'Histoire sur 300 ans.
Une lecture instructive mystérieuse et onirique.
J'ai été conquis par la patte graphique de Daria Schmitt avec son trait hachuré. La plus grande partie de l'album est dans un superbe noir et blanc détaillé, expressif et immersif avec des touches de bleu mer, en particulier pour le halo autour du crâne de Descartes, n'est-il pas une source de lumière ? Quelques planches magnifiquement colorées pour les passages fantasmagoriques.
Je tiens à souligner le travail sur la représentation des personnages historiques qui jalonnent ce récit, elles sont réalisées à partir de portraits d'époque.
Un gros dossier en fin d'album avec de nombreuses annexes pour y voir plus clair. Très instructif.
Je conseille des petites recherches sur le philosophe avant d'entamer ta lecture, pour mieux l'apprécier (ce que j'ai fait).
Repéré depuis un moment sur mon site favori, j'avoue avoir un peu hésité en librairie devant le prix de l'objet (une trentaine d'euros). Et bien m'en a pris de me laisser tenter, car ce fut un vrai bon moment que la lecture des aventures de ce Jean-Doux et de sa disquette molle. Une lecture qui appellera inévitablement une relecture dans quelques temps.
Cet album offre un petit voyage dans l'entreprise des années 90, celles des costumes cravates, des coupes mulets, des premiers open space, de windows 95, des fax et des broyeuses à papier. Tout un programme ! Et à vrai dire, ce cadre est juste idéal pour cette histoire. C'est décalé, voire faussement con-con par moment, l'auteur appuie fort sur le cliché et la caricature.... mais ça fonctionne tellement bien ! C'est original, c'est loufoque, on rigole joyeusement que ce soit avec les situations saugrenues ou les dialogues incisifs.
Mais ce qui est plus fort encore, c'est d'avoir réussi à mettre ce petit délire au service d'une vraie histoire. Ça marche vraiment bien, on se prend au jeu. On a envie de savoir quel mystère cache cette fameuse disquette retrouvée cachée au fond du débarras du 7e étage. Et sans dire qu'on va de surprises en surprises, les rebondissements sont au rendez-vous.
Le récit est équilibré entre cette intrigue assez prenante, et la bonne dose d'humour qui l'accompagne. Le dessin n'est pas en reste, ce style cartoon est un petit régal pour mettre tout ça en images et renforcer le côté délirant de l'ensemble. Et surtout : ça tient la longueur, ce qui n'est pas une mince affaire vu la pagination importante de l'ouvrage.
Un vrai plaisir de lecture, j'en redemande.
Karolus Magnus est un BD se penchant sur la partie la plus romancée de la vie de celui qu'on appelle en France Charlemagne. Karolus Magnus étant son surnom d'origine en latin, Charles le puissant. Hélas la francisation-bâtardisation a donné un nom qui ne veut strictement rien dire.
Mais passons: la BD se concentre en effet sur la désastreuse expéditions de Karolus en Espagne: au départ, il avait été invité à prendre le contrôle de la ville de Saragosse par le maître (musulman) des lieux, mais un retournement d'alliance le forcera à lever le camp.
Sur le chemin du retour, il ne trouvera rien de mieux que de piller la ville de Pampelune (pourtant chrétienne) tout en massacrant une partie de ses habitants. En représailles, les Vascons (ancêtres de basques) anéantirons l'arrière-garde du futur empereur, commandée par le Comte Rolland.
La BD a cela d'intéressant que c'est la première à se pencher sur les luttes de pouvoir au sein du Duché de Vasconie.
Hélas, trois fois hélas : si le titre laissait espérer une adaptation historique relativement fidèle (d'autant que les équipements militaires sont bien représentés), il ne s'agit que d'une fiction totalement délirante, mélangeant les époques (il donne par exemple un rôle prépondérant à un Wisigoth converti à l'Islam, Ibn Marwan, qui ne naîtra pourtant que plus de 30 ans après les faits) et générant des anachronismes aussi outranciers que ridicules : en effet, un autre personnage centrale est une certaine Brunehilde, sorte de Walkyrie blonde, espionne et guerrière à la assassin's creed, tout en étant ouvertement lesbienne, et affublée du titre de Missi Dominici..
Bien entendu, rien de tout cela n'est crédible, et accessoirement les Missi Dominici étaient des représentants du pouvoir chargés de contrôler les nobles et administrateurs locaux, pas des espions furtifs. Sans oublier que leur création n'interviendra que 11 ans après cette histoire.....
Le pire : je disais plus haut que la BD s'intéressait au sort du Duché de Vasconie...Mais tout ce qu'on nous montre n'est que pure invention : on nous met en scène un héritier du Duché qui sert d'otage à la cour de Karolus, qui s'évade et qui tente de reprendre le pouvoir après qu'un usurpateur eut tué son père, le Duc Lupus. Problème, l'usurpateur n'a jamais existé, le Duc Lupus n'a jamais été assassiné, et si son fils (qui portait un autre nom que dans la BD) fut bien amené à la cour de Karolus, ce fut après l'expédition d'Espagne et non avant! En plus, on nous donne une touche de fantastique avec le fameux héritier capable de transférer son esprit dans le corps d'animaux, et qui discute avec une divinité païenne.
Bref, cette BD est un énorme n'importe quoi, et même un gâchis certain face au potentiel qui s'ouvrait.
MAJ Tome 3: je disais que c'était n'importe quoi. Hé bien cela ne fait que s'aggraver dans ce troisième opus. La narration devient de plus en plus compliquée, rajoutant des sous-intrigues sans grand intérêt. Qui plus est, des personnages-clefs des tomes précédents sont expédiés en 1 à 2 cases, pour laisser la place à d'autres personnages qui eux prennent soudainement de l'importance. Sans compter des incohérences totales avec les précédents tomes (un personnage sûr de lui et de son destin devient soudainement l'inverse et suicidaire), des nouveaux éléments sortis d'on ne sait où (on découvre que la reine déteste ses fils et veut que ses filles lui succède, en contradiction totale avec la culture franque, que deux personnages extrêmement importants sont liés par le sang..) Bref c'est un foutoir indescriptible. Il y aura hélas un quatrième tome, je ne suis pas sûr d'avoir envie de le lire.
Je note la version intégrale collector. Un livre magnifique avec les pages dorées qui cependant peut vite s'abîmer, étrangement....
L'histoire en elle même est originale et vaut le détour même si à la fin on a l'impression d'être allé un peu vite. Il aurait été préférable de développer davantage le scénario sur un tome 4 ?
Car tout cela est dense. Et les dessins nous le démontrent bien. Olivier Ledroit est un grand artiste et chaque page est un réel délice pour les yeux. Les dessins sont vraiment somptueux, même s'ils ne sont pas du goût de tout le monde, car il faut s'habituer à lire sa manière de peindre.
Un livre à lire et à relire :)
Je note 4/5 car parfois un peu trop de décors "steampunk" viennent surcharger inutilement. Scénario à approfondir, il y a des choses qui ne sont pas claires.
Hmmm…
Pas facile pour moi de vraiment savoir quoi penser de ce manga.
D'un côté, le sujet du suicide, d'une vie si désespérante qu'un individu ne soit plus qu'une coquille se contentant d'avancer sans réfléchir, d'une fuite en avant pour symboliser le chaos passé et la difficulté de pleinement comprendre et digérer les émotions que l'on ressent, tout ça marche beaucoup sur moi. J'avoue même avoir pleuré.
Mais, de l'autre côté, je me dois d'être honnête, la forme m'a paru bien trop chaotique, décevante même. Trop "fofolle" pour pleinement émouvoir, cherchant trop à faire rire au détriment de la pleine gravité de la situation. C'est compliqué à dire, il est techniquement possible de lier le comique et le tragique, de traiter son sujet à la fois avec la gravité qui lui revient et la légèreté que l'on souhaite lui insuffler, mais pourtant, là, chacune des deux extrémités narratives dessert l'autre. Pas un problème d'idée, un problème de forme je pense. Peut-être que si les passages se voulant comiques n'intervenait/n'interrompait pas toutes les deux pages, qu'ils servaient plus à cristalliser les quelques bons souvenirs passés ou à symboliser l'espoir d'un futur ils auraient pu mieux passer.
Ce défaut de rythme et de ton mis-à-part (il reste tout de même un gros point noir à mes yeux) j'apprécie l'histoire qui nous est racontée. Disons en tout cas que je l'apprécie sur le papier.
C'est l'histoire d'une jeune femme apprenant un jour aux infos que sa meilleure amie s'est donnée la mort. Sachant à quel point sa vie a été dure auparavant, ne souhaitant pas laisser ses cendres entre les mains de son père qui lui avait fait tant de mal et ne parvenant pas encore à faire son deuil, Tomoyo décide de voler les reste de Mariko, son amie, et de lui offrir un dernier voyage. Un road-movie mélancolique, teinté du spectre de l'amitié perdu, de la mort et des souvenirs ça promet une histoire qui prend aux tripes, qui tape nos petits cœurs touts mous et nos glandes lacrymales avec la violence d'une barre de fer narrative. Pourtant, comme dit plus haut, l'exécution ne parvient pas vraiment à remplir ses promesses.
Dommage, car on ressent une justesse, une sincérité dans cet amitié, cette souffrance et ce deuil. Une sincérité qui a tout de même réussie à me toucher malgré les défauts de forme. Qu'il s'agisse des appels à l'aide de Mariko prenant la forme de chantages affectifs ou le mal-être qui habite Tomoyo face à tout ça depuis tout ce temps, tout ceci sonne vrai, sonne concret. Et le dessin et le découpage scénique de Waka Hirako (quand il ne s'interrompt pas toutes les cinq minutes pour des apartés comiques) est bon, léché, cinématographique même par moment. L'autrice s'exprime d'ailleurs sur ses inspirations lors d'une petite interview mise à disposition à la fin de l'album, une interview que j'ai trouvée très intéressante, notamment lorsqu'elle explique d'où lui est venu le sujet de l'histoire.
Non content de nous laissé-e-s face à cette histoire sur laquelle je ne sais toujours pas quoi pleinement penser, le manga nous mets également à disposition le tout premier récit de l'autrice, intitulé Yishka, là aussi un road-movie, cette fois-ci dans une ambiance mafieuse, dans le désert américains, troquant la relation fusionnelle entre deux jeunes filles pour une relation parentale et éphémère entre un repenti fuyant son passé et un jeune homme orphelin essayant de joindre les deux bouts comme ils peut, mais gardant tout de même cette ambiance désespérante et cette mise en scène cinématographique. C'est peut-être con à dire, mais j'ai finalement plus été touchée par cette courte histoire. Elle n'est pas révolutionnaire, plutôt clichée même, mais elle marche, elle reste efficace. Elle m'a moins impactée émotionnellement mais est parvenue à maintenir une narration et un ton fluides jusqu'au bout.
Conseillerais-je la lecture de ce manga ?
Eh bien malgré ses défauts, oui. La forme n'est pas parfaite mais le fond du récit est sincère, le dessin est inégal et le ton fluctue trop mais bien souvent le tout parvient à faire mouche, à être juste. Une œuvre inégale mais loin d'être dénuée d'intérêt. Pas un chef d'œuvre mais une création suffisamment intrigante et travaillée pour que je garde l'autrice en tête et que j'essaye de voir ses prochaines créations.
Beni est une lycéenne issue d’une riche famille, héritière blasée qui se fait régulièrement kidnapper et n’a aucune peur de mourir, tant que la responsabilité en revient à son père qu’elle déteste. Tout change lorsqu’un ninja, projeté depuis le Japon médiéval, atterrit sur elle par accident. La confondant avec son ancêtre, la princesse Beni, il jure de la protéger au péril de sa vie, mettant au service de la jeune fille aussi bien ses talents de shinobi que son charme.
Ce manga avait été pensé à l’origine comme un one-shot, et cela se ressent fortement. Le premier tome, à lui seul, est une réussite : mélange de voyage temporel, de ninjas, d’humour et de romance, il est à la fois vif et attachant. En un seul volume, il se passe beaucoup de choses, entre le Japon contemporain et médiéval. Malgré des facilités scénaristiques, une romance et un graphisme typiquement shojo, et quelques exagérations, l’intrigue reste cohérente, amusante et se conclut de façon un peu abrupte mais satisfaisante.
Seulement voilà : le succès aidant, l’éditeur a proposé à l’autrice d’en faire une série. Et si les tomes qui suivent immédiatement tiennent encore la route, développant les personnages et leur relation, on sent vite que la formule s’essouffle. La romance prend d’abord plus de place, avec des thématiques intéressantes (différences de statut social, fierté blessée de se faire protéger par une femme, ou encore confusion des sentiments face à une ressemblance avec une ancêtre). Mais l’intrigue finit par se diluer : le rythme ralentit, les péripéties se raréfient.
Pire encore, par la suite les deux protagonistes sont séparés pendant plusieurs tomes, l’héroïne retournant dans le passé tandis que le héros tente de la retrouver. Résultat : la romance stagne, remplacée par une guerre de ninjas assez convenue et peu palpitante, avant des retrouvailles évidemment attendues.
Bref, si vous cherchez une lecture courte et plaisante, le premier tome suffit largement. Pris comme un one-shot, il fonctionne bien et évite les longueurs qui plombent la suite.
Note : 3/5 pour le premier tome, et 2/5 pour la suite.
Il faut saluer cette sympathique mise en images du combat des femmes du Kurdistan : il n'y a pas que des barbus au Moyen-Orient.
La rentrée littéraire c'est aussi des albums BD : voici Rojava avec Aurélien Ducoudray au scénario et Sébastien Morice au dessin.
Sa formation d'architecte permet à S. Morice de se montrer très réaliste dans les scènes de guérilla urbaine au cœur des ruines syriennes et A. Ducoudray a réalisé de son côté un gros travail de documentation pour décrire cet épisode de la guerre civile syrienne.
Un second épisode est programmé : on a déjà hâte !
L'héroïne, Rojava, est une très jeune femme kurde (16 ans !) qui s'engage comme sniper (snipeuse ?) dans les YPJ, la déclinaison féminine (depuis 2013) des YPG (Yekîneyên Parastina Gel : Unités de Protection du Peuple), la branche armée de la lutte pour l'indépendance du Kurdistan au Moyen-Orient.
La nouveauté peut-être, c'est que les dirigeants des unités YPJ sont des dirigeantes, leurs chefs sont des cheffes, et ça c'est un peu nouveau dans l'histoire du combat au féminin.
Leur cri de ralliement : « La vie ! La femme ! La liberté ! »
L'ironie de la chose (si ironie il y a ici), c'est qu'elles sont devenues les bêtes noires de Daesh : aux yeux des barbus intégristes, se faire tuer par une femme est déshonorant et ferme la porte du paradis ...
Rojava c'est aussi le nom de la région du nord de la Syrie, c'est donc la partie sud-ouest du Kurdistan.
Lorsque la snipeuse Rojava débarque dans l'album, elle tient le rôle principal dans un reportage Youtube filmé par des journalistes occidentaux, ce qui ne plait pas forcément à la commandante de la section, Rukan.
Pour la petite histoire, A. Ducoudray a eu cette idée en lisant (chez son dentiste !) un reportage-photo de Paris-Match sur des combattantes kurdes vêtues de propre, maquillées, baskets neuves aux pieds, comme à la fashion-week : sans doute un peu d'habile propagande de la part du PKK !
Au premier abord, on pourrait croire à une BD pour ados, mièvre et éducative : l'héroïne est moitié snipeuse moitié youtubeuse et il y a même dans l'équipe une gamine qui collectionne les photos de martyrs !?
De plus, A. Ducoudray parsème son récit de blagues anti-Daesh histoire de détendre un peu une atmosphère de guérilla pour le moins tendue.
Mais ce n'est qu'une amusante façade, et le propos, très documenté, va s'avérer bien plus sérieux que cela.
« [...] Après mon premier affrontement, j'ai décidé de ne plus avoir mes règles ... À partir de là, j'étais dans un monde où il n'y avait plus que la mort, donc continuer chaque mois d'avoir un rappel que je pouvais donner la vie, ça ne coïncidait pas avec ce que je vivais ... »
Ou bien encore :
« [...] - Tiens, mets ce caillou dans ton slip. Chaque fois que tu seras couchée pour tirer, ça te griffera le ventre et tu t'endormiras pas ... Le confort c'est l'ennemi du sniper. »
Pour cette dernière anecdote, A. Ducoudray s'est sans doute inspiré du livre de Azad Cudi, célèbre sniper kurde iranien ("Sniper - Ma guerre contre Daech" éditions Nouveau Monde).
On sait que les guerres changent les pays et les frontières, mais aussi les habitants et les mœurs. Les américains l'ont découvert à la fin de la Seconde Guerre Mondiale quand les noirs sont revenus au pays après avoir servi dans les armes et été acclamés en libérateurs en Europe, ... tout comme les blancs, ou bien encore quand les GI sont rentrés chez eux et ont retrouvé des femmes qui avaient pris les affaires en main ... en leur absence.
Les femmes des brigades YPJ espèrent qu'il en sera de même au Kurdistan, si du moins ces guerres prennent fin un jour.
« [...] Contre Daesh, on est tous égaux, mais après ?
Ils me respectent parce que j'ai un fusil et un uniforme. Change le costume, le respect part avec.
Notre plus grand combat après Daesh, sera celui d'une société mixte vraiment égalitaire. »
Les dessins de S. Morice sont ceux d'une belle ligne claire et laissent toute la place à l'intrigue et aux personnages, dessinés et typés avec soin. On a déjà évoqué son passé d'architecte et la colorisation comme les éclairages font ressortir les différentes ambiances : le bleu pour la nuit sur la terrasse, le rouge au fond des tunnels creusés sous la ville, les ocres du désert, ...
Le récit ne révolutionne sans doute rien, et je peux lui reprocher d’être parfois un peu trop « léger », de manquer d’une certaine densité (malgré une pagination très importante). Certains passages m’ont aussi paru un chouia obscurs, et la conclusion, un peu ouverte, n’est, elle aussi pas assez claire.
Mais, malgré ces remarques, c’est une lecture que j’ai trouvé sympathique, agréable.
D’abord, les plus de 500 pages se dévorent rapidement. Il y a peu de texte, de cases. On est d’emblée plongé dans cet univers carcéral horrible, cette immense prison en grande partie souterraine, où des détenus – pour de longues peines, voire des peines infinies – vivent et travaillent quasiment en vase clos, survivent plutôt.
Au milieu de cette masse de réprouvés, l’auteur nous propose de suivre quelques personnages, qui cherchent à s’en sortir, voire à sortir de ce mouroir implacable, où on fouille les bas-fonds pour en retrouver des objets, des restes de la société « ordinaire », artefacts vendus plus ou moins cher, seuls les plus riches, les plus forts pouvant agrémenter leur séjour d’un petit confort.
Le jeu sur les couleurs est intéressant. Il y en a peu, c’est tranché, du Noir et Blanc avec nuances de gris, un peu de bichromies. Là aussi c’est simple et volontairement pauvre.
L’univers créé par Chris Gooch est oppressant, franchement noir. Et prenant. On s’attache aussi aux personnages qui se débattent pour s’échapper, en lisant des livres pour l’un d’entre eux, ou physiquement pour d’autres.
Comme à leur habitude, les éditions Huber nous proposent un auteur indé intéressant et original, avec un beau travail éditorial.
Note réelle 3,5/5.
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Thorgal Saga - La Cité mouvante
Avant tout, je dois préciser que j'ai lu cet album dans son édition dite "prestige" en noir et blanc, et en grand format. Malgré une couverture assez ratée à mon goût, j'ai été agréablement surpris par cette nouvelle aventure de Thorgal qui nous ramène en arrière, lorsque Louve était toute petite, et Jolan avait à peine 8 ans. Mais ce qui frappe le lecteur en découvrant cette nouvelle intrigue est le dessin très minutieux de Aouamri, qui m'avait déjà bluffé sur un album de La Quête de l'Oiseau du Temps et sur un ersatz de Thorgal, Saga Valta. Cette édition n&b rend parfaitement hommage à son dessin; Quant au scénario d'Ozanam, il s'inscrit parfaitement dans la lignée des Thorgal signés Van Hamme. L'auteur a même l'audace, pour le plus grand plaisir du lecteur, de faire revenir des personnages de la série mère, et c'est d'ailleurs fort réussi. Les intrigues parallèles, que nous suivons tout au long de cet album, d'Aaricia et de Thorgal ne sont pas si éloignées que cela, ce qui donne une certaine unité à cette aventure. L'idée de cette cité mouvante est originale et bien amenée. Ce cinquième opus de "Thorgal saga" fait partie des meilleurs, avec évidement "Adieu Aaricia", qui reste pour moi inégalé.
Red Stone
Il y avait de bonnes idées dans ce récit pour en faire même un 2eme tome , mais malheureusement les évènements s'enchaînent très vite ,alors qu'il y avait matière a développer sur le " méchant" fouiller dans les arcanes du politicien véreux, explorer son passé, pas juste un petit flashback comme de 2 3 pages vite expédiées, même la ville manquait d'âme. Une forte impression d'amateurisme se dégage du dessin, ce n'est pas totalement moche,mais on ressent une certaine faiblesse surtout au niveau des décors ( arrieres plans, plans larges etc..) Les gunfights sont assez sanglants,mais ce n'est pas suffisant pour en faire un bon western. Red Stone est une déception pour moi.
La Tête de mort venue de Suède
Une BD sur René Descartes qui n'a rien de cartésienne, un comble ! René Descartes meurt en 1650 à Stockholm où il sera enterré. On va suivre le périple de son squelette à partir de 1666 jusqu'à 1937 à la galerie d'anatomie comparée au musée national d'histoire naturelle. Un périple qui sera raconté par le crâne de Descartes à ses voisins, des animaux tout en os, avec pour question centrale : est-ce bien le véritable crâne de Descartes ? Je connaissais les grandes lignes de cette incroyable aventure post mortem. Daria Schmitt a réalisé un formidable travail de documentation sur ce parcours incroyable et sur l'homme, l'un des fondateurs de la philosophie moderne et le père de la Méthode. Il n'est pas forcément des plus attachant, mais après il a des circonstances atténuantes, puisqu'il sera enterré/déterré plusieurs fois et va perdre au fil des déplacements ses os pour ne rester qu'une tête incomplète (il manque la mâchoire inférieure). Un récit qui demande de la concentration, c'est dense, érudit mais avec une touche d'humour, sa théorie de l'animal-machine ne plaît pas à son auditoire animal. J'ai un petit faible pour cette baleine bleue échouée à Ostende en 1827. Des échanges qui vont faire vaciller notre philosophe. C'est aussi un récit historique, il permet de traverser les rebondissements de l'Histoire sur 300 ans. Une lecture instructive mystérieuse et onirique. J'ai été conquis par la patte graphique de Daria Schmitt avec son trait hachuré. La plus grande partie de l'album est dans un superbe noir et blanc détaillé, expressif et immersif avec des touches de bleu mer, en particulier pour le halo autour du crâne de Descartes, n'est-il pas une source de lumière ? Quelques planches magnifiquement colorées pour les passages fantasmagoriques. Je tiens à souligner le travail sur la représentation des personnages historiques qui jalonnent ce récit, elles sont réalisées à partir de portraits d'époque. Un gros dossier en fin d'album avec de nombreuses annexes pour y voir plus clair. Très instructif. Je conseille des petites recherches sur le philosophe avant d'entamer ta lecture, pour mieux l'apprécier (ce que j'ai fait).
Jean Doux et le Mystère de la Disquette Molle
Repéré depuis un moment sur mon site favori, j'avoue avoir un peu hésité en librairie devant le prix de l'objet (une trentaine d'euros). Et bien m'en a pris de me laisser tenter, car ce fut un vrai bon moment que la lecture des aventures de ce Jean-Doux et de sa disquette molle. Une lecture qui appellera inévitablement une relecture dans quelques temps. Cet album offre un petit voyage dans l'entreprise des années 90, celles des costumes cravates, des coupes mulets, des premiers open space, de windows 95, des fax et des broyeuses à papier. Tout un programme ! Et à vrai dire, ce cadre est juste idéal pour cette histoire. C'est décalé, voire faussement con-con par moment, l'auteur appuie fort sur le cliché et la caricature.... mais ça fonctionne tellement bien ! C'est original, c'est loufoque, on rigole joyeusement que ce soit avec les situations saugrenues ou les dialogues incisifs. Mais ce qui est plus fort encore, c'est d'avoir réussi à mettre ce petit délire au service d'une vraie histoire. Ça marche vraiment bien, on se prend au jeu. On a envie de savoir quel mystère cache cette fameuse disquette retrouvée cachée au fond du débarras du 7e étage. Et sans dire qu'on va de surprises en surprises, les rebondissements sont au rendez-vous. Le récit est équilibré entre cette intrigue assez prenante, et la bonne dose d'humour qui l'accompagne. Le dessin n'est pas en reste, ce style cartoon est un petit régal pour mettre tout ça en images et renforcer le côté délirant de l'ensemble. Et surtout : ça tient la longueur, ce qui n'est pas une mince affaire vu la pagination importante de l'ouvrage. Un vrai plaisir de lecture, j'en redemande.
Karolus Magnus - L'Empereur des barbares
Karolus Magnus est un BD se penchant sur la partie la plus romancée de la vie de celui qu'on appelle en France Charlemagne. Karolus Magnus étant son surnom d'origine en latin, Charles le puissant. Hélas la francisation-bâtardisation a donné un nom qui ne veut strictement rien dire. Mais passons: la BD se concentre en effet sur la désastreuse expéditions de Karolus en Espagne: au départ, il avait été invité à prendre le contrôle de la ville de Saragosse par le maître (musulman) des lieux, mais un retournement d'alliance le forcera à lever le camp. Sur le chemin du retour, il ne trouvera rien de mieux que de piller la ville de Pampelune (pourtant chrétienne) tout en massacrant une partie de ses habitants. En représailles, les Vascons (ancêtres de basques) anéantirons l'arrière-garde du futur empereur, commandée par le Comte Rolland. La BD a cela d'intéressant que c'est la première à se pencher sur les luttes de pouvoir au sein du Duché de Vasconie. Hélas, trois fois hélas : si le titre laissait espérer une adaptation historique relativement fidèle (d'autant que les équipements militaires sont bien représentés), il ne s'agit que d'une fiction totalement délirante, mélangeant les époques (il donne par exemple un rôle prépondérant à un Wisigoth converti à l'Islam, Ibn Marwan, qui ne naîtra pourtant que plus de 30 ans après les faits) et générant des anachronismes aussi outranciers que ridicules : en effet, un autre personnage centrale est une certaine Brunehilde, sorte de Walkyrie blonde, espionne et guerrière à la assassin's creed, tout en étant ouvertement lesbienne, et affublée du titre de Missi Dominici.. Bien entendu, rien de tout cela n'est crédible, et accessoirement les Missi Dominici étaient des représentants du pouvoir chargés de contrôler les nobles et administrateurs locaux, pas des espions furtifs. Sans oublier que leur création n'interviendra que 11 ans après cette histoire..... Le pire : je disais plus haut que la BD s'intéressait au sort du Duché de Vasconie...Mais tout ce qu'on nous montre n'est que pure invention : on nous met en scène un héritier du Duché qui sert d'otage à la cour de Karolus, qui s'évade et qui tente de reprendre le pouvoir après qu'un usurpateur eut tué son père, le Duc Lupus. Problème, l'usurpateur n'a jamais existé, le Duc Lupus n'a jamais été assassiné, et si son fils (qui portait un autre nom que dans la BD) fut bien amené à la cour de Karolus, ce fut après l'expédition d'Espagne et non avant! En plus, on nous donne une touche de fantastique avec le fameux héritier capable de transférer son esprit dans le corps d'animaux, et qui discute avec une divinité païenne. Bref, cette BD est un énorme n'importe quoi, et même un gâchis certain face au potentiel qui s'ouvrait. MAJ Tome 3: je disais que c'était n'importe quoi. Hé bien cela ne fait que s'aggraver dans ce troisième opus. La narration devient de plus en plus compliquée, rajoutant des sous-intrigues sans grand intérêt. Qui plus est, des personnages-clefs des tomes précédents sont expédiés en 1 à 2 cases, pour laisser la place à d'autres personnages qui eux prennent soudainement de l'importance. Sans compter des incohérences totales avec les précédents tomes (un personnage sûr de lui et de son destin devient soudainement l'inverse et suicidaire), des nouveaux éléments sortis d'on ne sait où (on découvre que la reine déteste ses fils et veut que ses filles lui succède, en contradiction totale avec la culture franque, que deux personnages extrêmement importants sont liés par le sang..) Bref c'est un foutoir indescriptible. Il y aura hélas un quatrième tome, je ne suis pas sûr d'avoir envie de le lire.
Wika
Je note la version intégrale collector. Un livre magnifique avec les pages dorées qui cependant peut vite s'abîmer, étrangement.... L'histoire en elle même est originale et vaut le détour même si à la fin on a l'impression d'être allé un peu vite. Il aurait été préférable de développer davantage le scénario sur un tome 4 ? Car tout cela est dense. Et les dessins nous le démontrent bien. Olivier Ledroit est un grand artiste et chaque page est un réel délice pour les yeux. Les dessins sont vraiment somptueux, même s'ils ne sont pas du goût de tout le monde, car il faut s'habituer à lire sa manière de peindre. Un livre à lire et à relire :) Je note 4/5 car parfois un peu trop de décors "steampunk" viennent surcharger inutilement. Scénario à approfondir, il y a des choses qui ne sont pas claires.
My Broken Mariko
Hmmm… Pas facile pour moi de vraiment savoir quoi penser de ce manga. D'un côté, le sujet du suicide, d'une vie si désespérante qu'un individu ne soit plus qu'une coquille se contentant d'avancer sans réfléchir, d'une fuite en avant pour symboliser le chaos passé et la difficulté de pleinement comprendre et digérer les émotions que l'on ressent, tout ça marche beaucoup sur moi. J'avoue même avoir pleuré. Mais, de l'autre côté, je me dois d'être honnête, la forme m'a paru bien trop chaotique, décevante même. Trop "fofolle" pour pleinement émouvoir, cherchant trop à faire rire au détriment de la pleine gravité de la situation. C'est compliqué à dire, il est techniquement possible de lier le comique et le tragique, de traiter son sujet à la fois avec la gravité qui lui revient et la légèreté que l'on souhaite lui insuffler, mais pourtant, là, chacune des deux extrémités narratives dessert l'autre. Pas un problème d'idée, un problème de forme je pense. Peut-être que si les passages se voulant comiques n'intervenait/n'interrompait pas toutes les deux pages, qu'ils servaient plus à cristalliser les quelques bons souvenirs passés ou à symboliser l'espoir d'un futur ils auraient pu mieux passer. Ce défaut de rythme et de ton mis-à-part (il reste tout de même un gros point noir à mes yeux) j'apprécie l'histoire qui nous est racontée. Disons en tout cas que je l'apprécie sur le papier. C'est l'histoire d'une jeune femme apprenant un jour aux infos que sa meilleure amie s'est donnée la mort. Sachant à quel point sa vie a été dure auparavant, ne souhaitant pas laisser ses cendres entre les mains de son père qui lui avait fait tant de mal et ne parvenant pas encore à faire son deuil, Tomoyo décide de voler les reste de Mariko, son amie, et de lui offrir un dernier voyage. Un road-movie mélancolique, teinté du spectre de l'amitié perdu, de la mort et des souvenirs ça promet une histoire qui prend aux tripes, qui tape nos petits cœurs touts mous et nos glandes lacrymales avec la violence d'une barre de fer narrative. Pourtant, comme dit plus haut, l'exécution ne parvient pas vraiment à remplir ses promesses. Dommage, car on ressent une justesse, une sincérité dans cet amitié, cette souffrance et ce deuil. Une sincérité qui a tout de même réussie à me toucher malgré les défauts de forme. Qu'il s'agisse des appels à l'aide de Mariko prenant la forme de chantages affectifs ou le mal-être qui habite Tomoyo face à tout ça depuis tout ce temps, tout ceci sonne vrai, sonne concret. Et le dessin et le découpage scénique de Waka Hirako (quand il ne s'interrompt pas toutes les cinq minutes pour des apartés comiques) est bon, léché, cinématographique même par moment. L'autrice s'exprime d'ailleurs sur ses inspirations lors d'une petite interview mise à disposition à la fin de l'album, une interview que j'ai trouvée très intéressante, notamment lorsqu'elle explique d'où lui est venu le sujet de l'histoire. Non content de nous laissé-e-s face à cette histoire sur laquelle je ne sais toujours pas quoi pleinement penser, le manga nous mets également à disposition le tout premier récit de l'autrice, intitulé Yishka, là aussi un road-movie, cette fois-ci dans une ambiance mafieuse, dans le désert américains, troquant la relation fusionnelle entre deux jeunes filles pour une relation parentale et éphémère entre un repenti fuyant son passé et un jeune homme orphelin essayant de joindre les deux bouts comme ils peut, mais gardant tout de même cette ambiance désespérante et cette mise en scène cinématographique. C'est peut-être con à dire, mais j'ai finalement plus été touchée par cette courte histoire. Elle n'est pas révolutionnaire, plutôt clichée même, mais elle marche, elle reste efficace. Elle m'a moins impactée émotionnellement mais est parvenue à maintenir une narration et un ton fluides jusqu'au bout. Conseillerais-je la lecture de ce manga ? Eh bien malgré ses défauts, oui. La forme n'est pas parfaite mais le fond du récit est sincère, le dessin est inégal et le ton fluctue trop mais bien souvent le tout parvient à faire mouche, à être juste. Une œuvre inégale mais loin d'être dénuée d'intérêt. Pas un chef d'œuvre mais une création suffisamment intrigante et travaillée pour que je garde l'autrice en tête et que j'essaye de voir ses prochaines créations.
Shinobi Life
Beni est une lycéenne issue d’une riche famille, héritière blasée qui se fait régulièrement kidnapper et n’a aucune peur de mourir, tant que la responsabilité en revient à son père qu’elle déteste. Tout change lorsqu’un ninja, projeté depuis le Japon médiéval, atterrit sur elle par accident. La confondant avec son ancêtre, la princesse Beni, il jure de la protéger au péril de sa vie, mettant au service de la jeune fille aussi bien ses talents de shinobi que son charme. Ce manga avait été pensé à l’origine comme un one-shot, et cela se ressent fortement. Le premier tome, à lui seul, est une réussite : mélange de voyage temporel, de ninjas, d’humour et de romance, il est à la fois vif et attachant. En un seul volume, il se passe beaucoup de choses, entre le Japon contemporain et médiéval. Malgré des facilités scénaristiques, une romance et un graphisme typiquement shojo, et quelques exagérations, l’intrigue reste cohérente, amusante et se conclut de façon un peu abrupte mais satisfaisante. Seulement voilà : le succès aidant, l’éditeur a proposé à l’autrice d’en faire une série. Et si les tomes qui suivent immédiatement tiennent encore la route, développant les personnages et leur relation, on sent vite que la formule s’essouffle. La romance prend d’abord plus de place, avec des thématiques intéressantes (différences de statut social, fierté blessée de se faire protéger par une femme, ou encore confusion des sentiments face à une ressemblance avec une ancêtre). Mais l’intrigue finit par se diluer : le rythme ralentit, les péripéties se raréfient. Pire encore, par la suite les deux protagonistes sont séparés pendant plusieurs tomes, l’héroïne retournant dans le passé tandis que le héros tente de la retrouver. Résultat : la romance stagne, remplacée par une guerre de ninjas assez convenue et peu palpitante, avant des retrouvailles évidemment attendues. Bref, si vous cherchez une lecture courte et plaisante, le premier tome suffit largement. Pris comme un one-shot, il fonctionne bien et évite les longueurs qui plombent la suite. Note : 3/5 pour le premier tome, et 2/5 pour la suite.
Rojava
Il faut saluer cette sympathique mise en images du combat des femmes du Kurdistan : il n'y a pas que des barbus au Moyen-Orient. La rentrée littéraire c'est aussi des albums BD : voici Rojava avec Aurélien Ducoudray au scénario et Sébastien Morice au dessin. Sa formation d'architecte permet à S. Morice de se montrer très réaliste dans les scènes de guérilla urbaine au cœur des ruines syriennes et A. Ducoudray a réalisé de son côté un gros travail de documentation pour décrire cet épisode de la guerre civile syrienne. Un second épisode est programmé : on a déjà hâte ! L'héroïne, Rojava, est une très jeune femme kurde (16 ans !) qui s'engage comme sniper (snipeuse ?) dans les YPJ, la déclinaison féminine (depuis 2013) des YPG (Yekîneyên Parastina Gel : Unités de Protection du Peuple), la branche armée de la lutte pour l'indépendance du Kurdistan au Moyen-Orient. La nouveauté peut-être, c'est que les dirigeants des unités YPJ sont des dirigeantes, leurs chefs sont des cheffes, et ça c'est un peu nouveau dans l'histoire du combat au féminin. Leur cri de ralliement : « La vie ! La femme ! La liberté ! » L'ironie de la chose (si ironie il y a ici), c'est qu'elles sont devenues les bêtes noires de Daesh : aux yeux des barbus intégristes, se faire tuer par une femme est déshonorant et ferme la porte du paradis ... Rojava c'est aussi le nom de la région du nord de la Syrie, c'est donc la partie sud-ouest du Kurdistan. Lorsque la snipeuse Rojava débarque dans l'album, elle tient le rôle principal dans un reportage Youtube filmé par des journalistes occidentaux, ce qui ne plait pas forcément à la commandante de la section, Rukan. Pour la petite histoire, A. Ducoudray a eu cette idée en lisant (chez son dentiste !) un reportage-photo de Paris-Match sur des combattantes kurdes vêtues de propre, maquillées, baskets neuves aux pieds, comme à la fashion-week : sans doute un peu d'habile propagande de la part du PKK ! Au premier abord, on pourrait croire à une BD pour ados, mièvre et éducative : l'héroïne est moitié snipeuse moitié youtubeuse et il y a même dans l'équipe une gamine qui collectionne les photos de martyrs !? De plus, A. Ducoudray parsème son récit de blagues anti-Daesh histoire de détendre un peu une atmosphère de guérilla pour le moins tendue. Mais ce n'est qu'une amusante façade, et le propos, très documenté, va s'avérer bien plus sérieux que cela. « [...] Après mon premier affrontement, j'ai décidé de ne plus avoir mes règles ... À partir de là, j'étais dans un monde où il n'y avait plus que la mort, donc continuer chaque mois d'avoir un rappel que je pouvais donner la vie, ça ne coïncidait pas avec ce que je vivais ... » Ou bien encore : « [...] - Tiens, mets ce caillou dans ton slip. Chaque fois que tu seras couchée pour tirer, ça te griffera le ventre et tu t'endormiras pas ... Le confort c'est l'ennemi du sniper. » Pour cette dernière anecdote, A. Ducoudray s'est sans doute inspiré du livre de Azad Cudi, célèbre sniper kurde iranien ("Sniper - Ma guerre contre Daech" éditions Nouveau Monde). On sait que les guerres changent les pays et les frontières, mais aussi les habitants et les mœurs. Les américains l'ont découvert à la fin de la Seconde Guerre Mondiale quand les noirs sont revenus au pays après avoir servi dans les armes et été acclamés en libérateurs en Europe, ... tout comme les blancs, ou bien encore quand les GI sont rentrés chez eux et ont retrouvé des femmes qui avaient pris les affaires en main ... en leur absence. Les femmes des brigades YPJ espèrent qu'il en sera de même au Kurdistan, si du moins ces guerres prennent fin un jour. « [...] Contre Daesh, on est tous égaux, mais après ? Ils me respectent parce que j'ai un fusil et un uniforme. Change le costume, le respect part avec. Notre plus grand combat après Daesh, sera celui d'une société mixte vraiment égalitaire. » Les dessins de S. Morice sont ceux d'une belle ligne claire et laissent toute la place à l'intrigue et aux personnages, dessinés et typés avec soin. On a déjà évoqué son passé d'architecte et la colorisation comme les éclairages font ressortir les différentes ambiances : le bleu pour la nuit sur la terrasse, le rouge au fond des tunnels creusés sous la ville, les ocres du désert, ...
Under Earth
Le récit ne révolutionne sans doute rien, et je peux lui reprocher d’être parfois un peu trop « léger », de manquer d’une certaine densité (malgré une pagination très importante). Certains passages m’ont aussi paru un chouia obscurs, et la conclusion, un peu ouverte, n’est, elle aussi pas assez claire. Mais, malgré ces remarques, c’est une lecture que j’ai trouvé sympathique, agréable. D’abord, les plus de 500 pages se dévorent rapidement. Il y a peu de texte, de cases. On est d’emblée plongé dans cet univers carcéral horrible, cette immense prison en grande partie souterraine, où des détenus – pour de longues peines, voire des peines infinies – vivent et travaillent quasiment en vase clos, survivent plutôt. Au milieu de cette masse de réprouvés, l’auteur nous propose de suivre quelques personnages, qui cherchent à s’en sortir, voire à sortir de ce mouroir implacable, où on fouille les bas-fonds pour en retrouver des objets, des restes de la société « ordinaire », artefacts vendus plus ou moins cher, seuls les plus riches, les plus forts pouvant agrémenter leur séjour d’un petit confort. Le jeu sur les couleurs est intéressant. Il y en a peu, c’est tranché, du Noir et Blanc avec nuances de gris, un peu de bichromies. Là aussi c’est simple et volontairement pauvre. L’univers créé par Chris Gooch est oppressant, franchement noir. Et prenant. On s’attache aussi aux personnages qui se débattent pour s’échapper, en lisant des livres pour l’un d’entre eux, ou physiquement pour d’autres. Comme à leur habitude, les éditions Huber nous proposent un auteur indé intéressant et original, avec un beau travail éditorial. Note réelle 3,5/5.