Les Illuminés

Note: 4/5
(4/5 pour 5 avis)

Plongeant au coeur de notre patrimoine culturel, deux auteurs, au sommet de leur art, s'associent et nous entraînent dans le parcours chaotique du manuscrit des Illuminations, d'Arthur Rimbaud.


1872 - 1899 : de la IIIe république à la fin du XIXe siècle Arthur Rimbaud Mirages Poètes et poésie

Qui se cache à l'ombre des Illuminations, cette pièce unique de la poésie française ? Arthur Rimbaud, bien sûr, mais aussi Paul Verlaine et Germain Nouveau. Entre 1872 et 1877, les trois poètes se tournent autour, se cherchent, se fuient, s'enivrent, tentent d'être libres ou s'acharnent à ne pas l'être. Et puis un manuscrit, l'ultime, circule de main en main et semble leur brûler les doigts...

Scénario
Dessin
Couleurs
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution 25 Octobre 2023
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Les Illuminés © Delcourt 2023
Les notes
Note: 4/5
(4/5 pour 5 avis)
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Par gruizzli
Note: 4/5
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Voila un beau 3.5 que j'arrondis au supérieur pour l'ambiance qui se dégage de cette BD aux traits maitrisés. Je m'y attendais de la part de Jean Dytar, mais tout de même, quelle précision dans son dessin ! J'aime assez peu Verlaine et Rimbaud, trouvant les poèmes de Beaudelaire plus impactant à mon gout. Mais pour autant, cette BD arrive à transmettre le dynamisme et la fougue de l'impétueuse jeunesse de Rimbaud. La BD se découpe en histoires parallèles, plutôt faciles à suivre d'ailleurs, sur ces trois personnages qui vont se croiser autour du manuscrit des "Illuminations" de Rimbaud. Bien menée, cette histoire nous entraine dans les tourments de la vie des ces poètes, amoureux des mots et écorchés vifs. Le récit nous entraine dans les années que partagèrent Verlaine et Rimbaud, mais aussi Nouveau qui se lia d'amitié avec ce dernier. L'ensemble est magnifié par le dessin de Jean Dytar, qui en profite pour jouer sur un style proche des impressionnistes. J'ai l'impression qu'il a voulu capter cette idée de lumière, la façon dont elle accroche les environnements. C'est notamment perceptible dans les choix de couleurs qui marquent les environnements, entre le soleil de Provence, le ciel lourd de Bruxelles et le sombre brouillard de Londres. La BD est franchement bien menée, donnant envie de lire la poésie de ces trois hommes mais aussi retraçant la fouge d'un Rimbaud qui influença sur les deux autres hommes. Si Rimbaud est au centre du récit, je trouve qu'il y a une volonté de replacer Germain Nouveau plus en avant que ses deux compères bien connus. Et j'aime bien la façon dont le récit explore les questionnements autour de la poésie et la publication, avec Nouveau finissant par dire que tout n'est qu'éphémère, la quête de gloire comme la richesse, et que seul le bonheur de vivre est important à ses yeux désormais. Une belle leçon que j'apprécie beaucoup ! C'est le genre de lecture que je pense garder pour revoir ces dessins et m’immerger à nouveau dans le récit qui est prenant et laisse un petit gout léger au final. C'est une histoire qui laisse sa petite patte, une légère sensation, comme un petit bout de poésie du monde ! Léger et agréable, très joli, une petite lecture rafraichissante.

15/03/2024 (modifier)
Par Cleck
Note: 4/5
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"Les Illuminés" est une merveilleuse réussite visuelle de Dytar, une BD sur la poésie, mêlant un délicat trait charbonneux à une élégante trichromie de tons, au service de narrations enchevêtrées. Le scénariste Bollée a l'habileté d'évoquer la vie des trois poètes Rimbaud, Verlaine et Nouveau, à la manière d'un Barthes, en découpant de vagues fragments d'existence présentant les chassés-croisés des trois personnages à travers des bribes de tranches de vie. L'idée principale est d'esquisser une représentation fantasmée sinon mythologique (si l'on veut filer la métaphore barthienne) de l'univers de ces auteurs libres et maudits, d'en appeler à un imaginaire, de correspondre aux représentations que nous pouvons en avoir, usant de codes (les copains, l'alcool, les colères, les nuits enfiévrées, les cristallisations, l'amour déçu, la fuite du succès...) pour décrire le mythe fantasmé de l'artiste maudit et retracer ici la tortueuse digestion du recueil "Les Illuminations". Ces bribes de récits et la trichromie permettent de suivre sans gêne la narration, ce qui distingue clairement "Les Illuminés" du conceptuel Pour quelques degrés de plus, aussi parce que cette narration est d'une ampleur fort limitée, ce qui constitue là une première limite de l'œuvre. La seconde limite est liée au parti-pris clair et discutable dans la manière de nous présenter ces trois écorchés : pour le premier sous la belle aura du perdant magnifique, pour le second en tant que victime expiant son crime passionnel dans une auto-destruction résignée, pour le dernier comme un salop dont le talent n'a d'égal que l’égoïsme exacerbé. Un tel sujet ne pouvait engendrer une réussite complète, elle n'en demeure pas moins éclatante jusque dans ses imperfections fort à propos.

06/03/2024 (modifier)
Par Blue boy
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
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Une fois encore, Jean Dytar aura réussi à nous surprendre avec ces « Illuminés ». En s’associant avec LF Bollée pour le scénario, déjà connu pour quelques beaux albums parus ces dernières années (La Bombe, Terra Australis…), il s’attaque à un épisode de la vie de ces trois écorchés vifs qui avaient la poésie chevillée au corps et à l’âme. Rimbaud, parti vers des contrées lointaines, avait abandonné un célèbre manuscrit pas encore publié et auréolé de mystère, « Les Illuminations », un document maudit qui semblait encombrer ses deux amis. Si l’on connaît Paul Verlaine et Arthur Rimbaud, notamment à travers leur liaison à la fois fusionnelle et toxique, on connaît moins bien Germain Nouveau, qui figure pourtant ici comme l’un des membres à part entière du trio. D’une moindre notoriété que les deux autres, celui-ci n’en était pas moins un poète talentueux et digne d’intérêt, mais il a eu quelque peu tendance à se faire oublier, et on va comprendre pourquoi à la lecture de l’album. Cette biographie triangulaire coche toutes les cases d’une œuvre réussie, à commencer par le format de narration très original. Le pari était risqué de dérouler plusieurs fils narratifs cote à cote (deux ou trois en fonction des passages, centrés sur chacun des poètes), mais les auteurs ont su éviter la confusion grâce à différents codes couleur, s’en tenant à une structure de mise en page basique. Et contre toute attente, cela fonctionne à merveille. La lecture est d’une fluidité impeccable, avec, double trouvaille, des correspondances ponctuelles entre les différents fils, certaines évidentes (exemple p.110), d’autres plus suggérées pour la participation active du lecteur. C’est extrêmement bien vu voire addictif ! Quant au dessin, il faudra se réfréner pour ne pas tomber dans un éloge par trop déraisonnable ! Jean Dytar, véritable explorateur graphique et conteur hors pair, nous a prouvé son talent de caméléon créatif avec ses albums précédents. Il adopte ici un style réaliste, avec une technique au fusain et des tonalités sepia évoquant des œuvres du XIXe siècle. Si l’on apprécie les portraits des trois hommes, très ressemblants, on restera admiratifs devant les paysages naturels et les scènes urbaines : Londres s’estompant sous le « fog » des usines, le Pont neuf étincelant sous un féérique croissant de lune, un jardin bruxellois fantomatique dans la brume nocturne, ou encore un navire voguant sur une mer exotique. C’est tout simplement superbe ! Les doubles pages itératives du porche de la cathédrale d’Aix-en-Provence inaugurant chaque chapitre et la fin de l’album donnent à penser que les auteurs ont cherché en quelque sorte à réhabiliter cet artiste méconnu qu’était Germain Nouveau — une telle approche étant à l’évidence moins justifiée pour Verlaine et Rimbaud. Et nous, lecteurs, sommes heureux de faire connaissance avec ce poète qui ne voulut jamais être publié de son vivant et termina sa vie en clochard céleste dans sa Provence bien aimée. Finalement, ne serait-ce pas lui, Nouveau, le véritable poète ? « Les Illuminés » restera comme une des œuvres marquantes de cette année 2023, parvenant à allier modernité et intemporalité. Jean Dytar se révèle au fil de ses publications comme un artiste qui compte sans calculer, un artiste-conteur à qui l’audace graphique réussit à tous les coups. L’auteur de Florida et du « Sourire des marionnettes » est de la race des artisans-bâtisseurs avec ce je-ne-sais-quoi de médiéval, un peu hors du temps, construisant patiemment une palette d’univers très différents assortie à un propos toujours passionnant.

30/12/2023 (modifier)
Par PAco
Note: 3/5
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Pourtant assez fan du travail de Jean Dytar que j'avais découvert avec le merveilleux Florida ou encore le malicieux Les Tableaux de l'ombre, j'avoue être resté sur ma faim avec cet album. Ce ne sont pourtant pas les somptueuses planches qui composent les 144 pages de cet album qui m'ont déçu, loin de là ! J'adore en prime cette période créatrice de cette fin XIXe, que ce soit en littérature ou en peinture... Alors ? Ba je ne sais pas... Le récit de ce trio de poètes maudits qui va se chercher, s'écharper voire se perdre a tout pour captiver son lectorat... mais pschiiit... sans comprendre pourquoi la magie n'a pas opéré. Je suis resté en spectateur distant de ces relations décousues et ambivalentes qui au fil des années qui s'égrainent finiront tout de même par accoucher de ce mystérieux recueil "Illuminations" écrit par Raimbaud. C'est vraiment dommage, car j'ai l'impression d'être passé à côté de ce récit ; reste le plaisir intact du dessin impressionnant et de sa mise en couleur qui rend parfaitement hommage à l'époque et à ces trois grands poètes que sont Verlaine, Rimbaud et Nouveau.

03/11/2023 (modifier)

Quelle merveille ce livre! Commençons par le dessin! J'aime énormément le travail de Jean Dytar (une bibliographie sans fausse note (Scénario/dessin) et en particulier Florida, un de mes gros coups de coeur de l'année 2018) mais là, waouh, je ne m'attendais pas à pareille claque visuelle !! Un peu dans la même veine que David Vandermeulen pour Fritz Haber. Que c'est beau et cette idée de découpage des planches qui permet, aidé par les couleurs, de suivre en parallèle et aisément nos trois protagonistes (i.e. Rimbaud, Verlaine et Nouveau) est judicieuse et marche formidablement bien. Côté scénario, rien à redire, c'est d'une subtilité et finesse sans nom ! On ne présente plus non plus Laurent-Frédéric Bollée et on notera l'apport reconnu de Jean Dytar. Lire ce récit sur la genèse des Illuminations me donne des envies de (re)lire le(s) livre(s) de Rimbaud, (re)lire les livres de Verlaine et Nouveau, se renseigner sur cette période et ces trois auteurs et finalement, se replonger à nouveau dans cette BD ! Un immanquable de 2023 !

31/10/2023 (modifier)