Les derniers avis (32 avis)

Couverture de la série Krimi
Krimi

Krimi est une œuvre magistrale, autant sur le fond que sur la forme. Alex W. Inker livre ici un travail graphique absolument saisissant, réalisé à l’encre et au fusain, qui confère à chaque planche une profondeur et une texture incroyables. Les noirs sont d’une densité rare, les contrastes subtilement dosés, et le trait évoque la pellicule d’un vieux film. On y retrouve tout l’esprit du cinéma expressionniste allemand, ses ombres mouvantes et son esthétique du clair-obscur. Graphiquement, c’est un choc. L’édition de Sarbacane est à la hauteur du contenu : grand format et dos toilé, un véritable écrin pour ce travail d’orfèvre. On sent une vraie volonté de mettre en valeur la matérialité du dessin, presque palpable à chaque page. C’est le genre d’album qu’on feuillette lentement, pour savourer la puissance de chaque composition. Le scénario, signé Thibault Vermot, plonge dans la figure complexe de Fritz Lang, cinéaste de génie hanté par ses démons, son époque et la culpabilité. L’histoire entremêle la réalité et la fiction avec une grande maîtrise, tout en gardant une cohérence narrative et émotionnelle remarquable. Le rythme, lent mais tendu, accompagne parfaitement cette descente dans l’ombre. Je conseille de voir le film M le Maudit avant de se plonger dans la BD : cela permet de saisir pleinement les enjeux artistiques et psychologiques du récit, et de comprendre comment Inker et Vermot dialoguent avec l’œuvre de Lang. En somme, Krimi est plus qu’un simple polar : c’est une réflexion sur la création, la culpabilité et le pouvoir des images. Un album ambitieux, noir et superbe, servi par un duo d’auteurs en parfaite symbiose.

13/11/2025 (modifier)
Couverture de la série Polly (La Joie de Lire)
Polly (La Joie de Lire)

J'ai l'impression d'enchaîner les coups de cœurs sur le site depuis quelques temps, je m'en excuse, mais j'ai le cœur sensible et il me faudrait bien du temps pour retrouver, relire et aviser toutes les séries que j'avais lues dans ma jeunesse et mon adolescence (forcément, cela équilibrerait mon ratio d'avis dithyrambiques et plus posés). Je pourrais essayer d'embrayer avec le sujet de l'album en vous parlant de ma peur du regard d'autrui, du fait que je craigne à chaque fois que j'avise d'être jugée négativement par des inconnus, que comme tout le monde je recherche une validation, à être acceptée dans la société, que comme tout le monde je suis intrinsèquement différente et que j'essaye de dissimuler ou de tordre cette différence pour vivre parmi les autres, quitte à rentrer dans des cases étriquées que le nombre nous impose. Si je vous embête en vous racontant ma vie, en enfonçant des portes ouvertes, ce n'est que parce que je ne sais comment vous transmettre autrement le fait que cet album a fait mouche, a su résonner en moi. Je n'ai jamais su répondre autrement aux échos empathiques d'autrui qu'en partageant les miens. Une histoire pour une histoire. Je ne suis pas personnellement concernée par le sujet de l'intersexualité, je ne suis même pas sûre d'avoir la moindre légitimité pour m'exprimer sur le sujet, mais pourtant le récit a fait écho avec ma vie, c'est sans doute aussi pour ça qu'à la fermeture l'album m'a laissée bien pensive. Je suis neuro-divergente, je suis queer, je suis transgenre aussi, j'ai dû me battre pour des questions de sexe et de genre depuis toute petite alors même si je suis loin d'avoir vécu la vie de Polly j'ai su reconnaître l'expérience, le poids du regard des autres, le sentiment que notre propre corps n'est pas vraiment nôtre mais finalement un objet social sur lequel le plus grand nombre semble avoir tout pouvoir. L'intersexualité, le fait que bon nombre de personnes à travers le monde naissent parfaitement en dehors des spectres mâles et femelles et, par là-même, invalident et remettent en question la totalité des fondements de ségrégations de sexes/genres que la société et ses individus tentent désespérément d'imposer depuis si longtemps, est un sujet important à mettre en lumière. Comme nous le rappelle l'album, encore aujourd'hui des enfants sont opéré-e-s sans consentement (de la personne concernée en tout cas) pour satisfaire le besoin malsain qu'ont encore beaucoup de gens de vouloir que tout se conforme à une vision du monde fixe, immuable, qui ne soit jamais remise en question pour que le monde tel qu'iels le visualisent reste inchangé. Nous sommes abreuvé-e-s d'histoires sur la différence, sur l'impossibilité d'une parfaite similarité entre chaque individus humains, sur la puissance du libre arbitre et sur la complexité de la nature humaine qui cherchera toujours à se démarquer et paradoxalement cherchera continuellement à se rapprocher des autres et à créer des liens. Pourtant, même si nous connaissons tous-tes (ne serait qu'inconsciemment) le besoin de liberté d'expression personnelle, le besoin de tout-un-chacun de pouvoir vivre en société sans que son existence-même soit remise en question, la réalité est bien différente. Les gens vantent l'individualité et les personnes atypiques tout en écrasant toute forme d'expression ou d'existence trop divergente à leur vision du monde. J'ai du mal à m'exprimer, je m'en excuse. J'essaye de retransmettre le ressenti que j'ai eu à la fin de cette histoire, j'essaye de faire passer par mes mots maladroits que la prose de Fabrice Melquiot m'a laissée avec un joli silence à la fermeture de cet album. L'expérience est simple, vive, similaire à plusieurs témoignages que j'ai entendus de ci de là pour des situations du même genre, le récit sonne réel et pourtant tout l'album baigne dans une forme étrangement flottante, poétique même. Les mots, les pensées de Polly, ses réflexions et son récit m'ont parus beaux, justes. Lui-Elle se cherche, cherche à trouver sa place, dans un monde qui ne comprend pas et ne cherche pas à comprendre comment quelqu'un comme lui-elle puisse exister, comme si sa simple existence devait être corrigée. J'ai particulièrement aimé sa discussion avec Ti-Mana, pleine de bons mots, de jeux sur les mots, pour donner un sens à sa vie, pour choisir son sens on pourrait dire. Polly (re)découvre ce que lui-elle est, ne cherche plus à rentrer dans les cases imposées, commence enfin à vivre sa vie selon ses règles et à se trouver définitivement beau-belle. Polly ne rentre pas dans les cases, qu'à cela ne tienne : Polly cochera à côté. Le travail graphique d'Isabelle Pralong est intéressant. Similaire à un carnet, plein de tâches, quelques ratures et avec un dessin simple qui ressemble à des esquisses faites à la volée, brut et ne rentrant pas dans l'image d'une bande-dessinée classique, professionnelle, mais sincère. J'ai beaucoup parlé de moi dans cet avis, je me suis aussi pas mal répétée j'ai l'impression, des défauts récurrents chez moi, j'en ai honte, je vous présente mes excuses. Mais je vais essayer de prendre à cœur l'une des nombreuses idées que l'on pourrait tirer de cet album et accepter que je puisse paraître bizarre aux yeux d'autrui et me contenter d'essayer de vivre ma vie en tant que moi-même. Bon, j'insiste sur le mot "essayer", parce que je reste une lâche et que je courbe quand-même souvent l'échine pour me faire accepter, mais le positif c'est que j'essaye de m'améliorer ! (Note réelle 3,5)

12/11/2025 (modifier)
Couverture de la série La Vie secrète des arbres
La Vie secrète des arbres

J’avais croisé le bouquin en librairie à sa sortie, mais n’avais pas fait l’effort de l’ouvrir pour en découvrir le propos. Je rattrape un peu cette erreur avec la lecture de l’adaptation publiée par Les Arènes. Qui plus est dans la nouvelle édition « Luxe « (plus grand format, dos toilé, filet marque-page, etc.), qui permet à Benjamin Flao de donner toute la mesure de son talent. J’aurais sans doute bien aimé voir Emmanuel Lepage dans ce projet, mais Flao parvient à donner vie aux propos de Wohlleben – ici adaptés par Fred Bernard, et surtout vie aux forêts, aux sous-bois : le rendu, avec un trait simple et dynamique est vraiment très chouette ! Il y a énormément de connaissances scientifiques qui sont présentées ici, mais on n’est jamais submergé, et jamais on ne s’ennuie. C’est toujours présenté de façon limpide, plaisante, les termes scientifiques (noms de plantes ou d’animaux) n’étant là que pour étayer le propos. Et ce propos est à la fois simple et revigorant. Fruit de longues observations, d’un bon sens qui font que le lecteur se sent immédiatement en symbiose avec le récit. Si celui-ci ne sombre pas dans le pessimisme absolu, et donne des pistes pour utiliser les forêts comme des alliés face aux défis climatiques et environnementaux (suite aux expérimentations à petite échelle de Wohllelben, mais aussi aux résultats de diverses recherches internationales), on ne peut que l’être un minimum, si l’on songe à Trump et consorts, ou aux industriels et à la FNSEA – au capitalisme débridé en fait… Reste que Wohlleben parvient à nous transmettre son amour des arbres, et à leur donner vie – et presque conscience ! A plusieurs reprises j’ai songé aux Ents de Tolkien… Une très chouette lecture, qui instruit intelligemment.

11/11/2025 (modifier)
Par Vaudou
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Hombre
Hombre

Hombre vit pour survivre. Son emploi du temps : trouver des balles pour son fusil et de la viande pour se nourrir. Hombre et ses décors post apo sont dessinés de main de maître. Hombre a des dialogues crus et intelligents. Hombre croise tout un tas d'ordures et leur fait la faveur de les envoyer ad patres. Hombre est désabusé, lassé mais a conservé ce fil rouge d'humanité qui le lie au monde. Hombre ferait passer Jeremiah pour un bisounours. Hombre a de faux airs de Sean Connery. Hombre est difficilement trouvable en librairie, ce qui renforce son statut d'oeuvre culte. Hombre a des airs de macho mais il se fait apprendre la vie par Attila, sa partenaire amazone. Attila a la phobie des fringues. Muchas gracias Hombre.

10/11/2025 (modifier)
Par Fair Play
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série La Voleuse du Père Fauteuil
La Voleuse du Père Fauteuil

Une bd originale qui à mon sens mèle la Créature de Frankeinstein et Arsène Lupin. Je les ai tous lu, et je les adore tous. Pas la peine de faire un récit de 15 lignes. Quand on aime, on ne compte pas.

10/11/2025 (modifier)
Couverture de la série Légendes de la Garde
Légendes de la Garde

Voilà un coup de cœur très inattendu ! Si j’ai toujours été attirée par cette série, j’ai trouvé la lecture du premier tome fastidieuse. J’ai eu beaucoup de mal à rentrer dans l’univers, la faute en partie au graphisme. Les souris sont certes adorables, mais il y a un petit quelque chose qui me dérange au niveau de la colorisation. Par ailleurs, j’ai eu du mal à différencier les souris au départ, et certaines scènes d’action manquent de lisibilité. C’est donc avec un sentiment plus que mitigé que je suis arrivée au bout de ce premier tome ; et là, sans que je m’y attende, la scène de conclusion a réveillé mon intérêt. Je ne saurais expliquer comment, mais j’ai commencé à ressentir un je-ne-sais-quoi… comme si l’histoire qu’on venait de me raconter n’était pas une pure fiction, mais une légende basée sur un monde ayant réellement existé. C’est comme si ce monde, ces personnages, prenaient soudainement vie sous mes yeux, et que je ressentais le souffle de l’aventure qui m’appelait… C’est donc avec enthousiasme que j’ai entamé la lecture du deuxième tome, et cette fois-ci j’ai été embarquée immédiatement. J’ai aimé les décors, parfois grandioses, dans lesquels évoluent courageusement ces souris minuscules. J’ai aimé l’univers, avec tous ces petits détails, ces cités différentes. J’ai aimé les personnages, leurs relations, leurs nuances. J’ai aimé le sentiment d’aventure et les confrontations épiques. J’ai dévoré la suite, et j’ai même relu le premier tome que j’ai finalement beaucoup apprécié à ma seconde lecture. J’ai lu les albums il y a quelques mois après les avoir empruntés à la bibliothèque, et rien que d’écrire cette critique, je sens un petit pincement au cœur qui me donne envie de me procurer la série pour repartir à l’aventure avec Kenzie, Saxon et Lieam.

10/11/2025 (modifier)
Couverture de la série 40 hommes et 12 fusils - Indochine 1954
40 hommes et 12 fusils - Indochine 1954

J'ai beaucoup apprécié cette fiction historique retraçant la fin de la guerre d'Indochine du côté Viet-Minh quelque peu dépolitisée. Minh est un jeune artiste libre d'esprit qui se retrouve enrôlé par les Rouges alors que sa famille et son éducation sont Bleues. Cela donne un récit documenté qui travaille sur deux axes. Le premier axe principal est militaire. Truong nous décrit d'une façon très crédible la montée du jeune soldat artiste vers la bataille décisive de Dien Ben Fu. L'auteur reprend toutes les situations qui ont fait la légende de la bravoure des paysans et paysannes Viet-Minh pour réussir à vaincre les troupes d'élites françaises qui se sont vaillamment battues. L'auteur utilise un road trip qui part du camp d'entrainement chinois jusqu'à l'enfer de Dien Bien Fu pour nous montrer la ténacité d'une armée en sandales, se déplaçant à pied de nuit sur des terrains difficiles aidée par des JF porteuses de lourdes caisses de munitions sur des axes continuellement bombardés et mitraillés. Le récit ne peut que conduire à l'admiration de ces combattant(e)s qui n'ont jamais faibli malgré des pertes colossales. L'auteur rappelle ainsi que le sort de la bataille a longtemps été incertain. Le second axe narratif concerne le côté politique qui imprégnait le discours idéologique des commissaires accompagnant la troupe. Les talents graphiques de Minh font de lui un élément de choix pour les unités de propagande (40 hommes ou femmes défendus par douze soldats) essentielles pour illustrer les exploits des uns et la cruauté des autres à une troupe et ses auxiliaires illettrés. Cette partie rend le personnage de Minh moins crédible. En effet il est douteux qu'une telle indépendance d'esprit considérée comme de l'insolence vis à vis de la doctrine communiste ait pu rester sans châtiment très sévère. Toutefois cela permet à l'auteur d'épingler la cécité de quelques intellectuels de l'époque qui participaient au culte de Staline et de rappeler le jdanovisme artistique qui sévissait dans les pays du bloc communiste. L'une des scènes est très symbolique du regard de l'auteur sur la liberté des artistes à cette époque. En effet la caricature que fait Minh de Staline superposé à Mao m'a immédiatement fait penser à la célèbre affaire du portrait de Picasso. Picasso est d'ailleurs honoré quelques pages plus loin comme artiste de la paix avec sa colombe. J'ai donc trouvé ce récit très riche tout au long des presque 300 pages qui se lisent sans effort. Le graphisme propose un N&B précis avec quelques nuances de couleurs. Les extérieurs sont bien travaillés ce qui plonge le/la lecteur-trice immédiatement dans l'ambiance du pays. Ma seule petite réserve graphique est qu'il est parfois difficile de distinguer certains personnages. Une lecture qui m'a parlé par sa justesse de ton et l'originalité de son point de vue. Un bon 4

08/11/2025 (modifier)
Par Chazelas
Note: 4/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Sherlock Holmes contre Arsène Lupin
Sherlock Holmes contre Arsène Lupin

Un graphisme emballant et des couleurs parfaites qui m’emmènent à l’intérieur. Des personnages un tout petit peu en dessous des canons dans les dialogues, dans la mesure de leur ego. Il manque quelques planches pour mieux comprendre les passages de déduction de l’un et l’autre. MAIS je retrouve mes deux héros préférés avec un grand bonheur. Et une pointe d’acidité digne de La Ligue des Gentlemen Extraordinaires. Une très très bonne bd découverte par hasard sur un rayon.

07/11/2025 (modifier)
Couverture de la série Dans les yeux de Billie Scott
Dans les yeux de Billie Scott

J'ai dégusté avec délectation ce premier essai de la jeune anglaise de vingt ans ( à l'époque), Zoé Thorogood. Comme quoi le talent... . J'ai immédiatement été séduit par son talent graphique qui peint à merveille cette ambiance un peu poisseuse des rues désertes et plus ou moins mal famées de Middlesborough ou de Londres. C'est à la fois dynamique et moderne avec un formidable sentiment de vitalité qui rend son héroïne Billie si attachante dans cette lutte entre fragilité et volonté. La mise en couleur est parfaite avec ce N&B dominateur dans un environnement peuplé de laissés pour compte mais où percent les couleurs du printemps final comme des perce-neiges obstinément optimistes à combattre l'obscurité hivernale. Combattre l'obscurité c'est bien ce que doit faire Billie dans un scénario compte à rebours digne d'un très bon thriller. L'idée initiale est originale et l'auteure en extrait un récit fluide, tonique et d'une grande humanité. Les rencontres et les lieux que Zoé/Billie explore ont fortement résonné avec mon vécu associatif. Je suis même impressionné comment une artiste aussi jeune arrive à mettre autant de profondeur et de justesse dans la personnalité de ses personnages. Toutefois le récit reste résolument optimiste sans jamais tomber dans la mièvrerie sentimentale. J'ai eu l'impression que Zoé jetait tout ce qu'elle avait dans cette œuvre comme si ensuite la lumière pouvait s'éteindre. Cela dégage une envie de création très forte. Je me suis retenu pour ne pas mettre la note max mais cette œuvre m'a beaucoup parlé par sa thématique et son exécution. Un vrai coup de cœur.

07/11/2025 (modifier)
Par Lodi
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Le Pacte des Yôkai
Le Pacte des Yôkai

Une série bien poétique ! Le trait, beau, n'est pas son seul attrait. Assez d'action pour chasser l'ennui, assez de contemplation pour être plongé dans une atmosphère étrange autant qu'esthétique. Et les deux ne me semblent faire qu'un, de même que l'auteur parlant de sa vie ne parvient pas à casser le rythme. Je l'attribue au fait que la dame est talentueuse, mais pas que. Il n'y a pas opposition entre la nature, et la culture, le réel et l'imaginaire, mais des glissements très subtils, au Japon. Sinon, j'aime que le héros protège les humains des yokais agressifs, mais aussi qu'il délivre "ses" yokais et protège aussi les créatures magiques quand c'est possible. Commenter me donne envie de le relire, ce qui va influencer ma note.

07/11/2025 (modifier)