J'avais découvert Tamos avec l'album Le Chevalier Imberbe, un album qui m'avait permise de découvrir les éditions Exemplaire que j'apprécie énormément aujourd'hui. Le dessin d'apparence simple et enfantin, les dialogues se prenant seulement à moitié au sérieux et glissant régulièrement des apartés/digressions comiques, le sujet du genre et du poids des conventions sociales qui semble cher à l'auteur-ice, ... Sans être parfait l'album m'avait agréablement surprise et m'avait fait ajouté Tamos à la liste des auteur-ice-s dont je souhaitais voir la suite des travaux. Alors, quand en explorant une librairie, je suis tombée sur la première création dudit Tamos aux éditions Exemplaire, une autobiographie parlant des questionnements de genre de l'auteur-ice justement, je me suis sans soucis laissée tentée par la lecture.
(Tamos s'exprimant justement dans cet album sur le fait qu'il reste encore en questionnement quant aux pronoms à utiliser à son égard je vais essayer de me cantonner au masculin et à l'écriture inclusive qu'il privilégie et alterner entre les deux usages - même si je vais sans doute plus utiliser l'écriture inclusive par sécurité).
Comme toute autobiographie, Tamos nous raconte sa vie, des débuts jusqu'à l'époque de rédaction (choquant, je sais). Comme souvent dans les biographie, la vie de l'auteur-ice nous est racontée sous un angle bien particulier : ici, les questionnements de genre. Depuis ses déboires d'enfance avec son apparence masculine jusqu'à sa recherche d'identité une fois adulte en passant par les innombrables questionnements entre les deux (et même après), Tamos nous raconte mine de rien une expérience assez universelle chez toutes les personnes transgenres (binaires comme non-binaires).
Bon, ici surtout les personnes non-binaires, car bien que de nombreux points communs lient les deux expériences, elles restent mine de rien différentes. Au delà des questionnements sur les codes et attentes de la société, de la peur de la perception des autres sur notre corps, des montagnes russes émotionnelles que peuvent être les euphories et dysphories de genres, les personnes non-binaires affrontent tout de même un ennemi de taille bien particulier : une sortie totale et absolue des carcans sociaux préétablis et une incompatibilité avec les petites cases bien rangées dans lesquelles on catégorise si souvent les gens.
Mon genre se plaçant (en tout cas pour l'instant) dans la binarité je ne connais pas personnellement ce genre d'expérience si particulière et la lecture de témoignages comme ceux de Tamos sont on ne peut plus intéressants. Les doutes que l'on vit, le sentiment d'avoir ouvert la boîte de pandore lorsque le déclic vient, le traitement ostracisant (parfois même involontaire) que certaines personnes peuvent avoir, les petits riens qui apportent tout de même du soutien, la complication des relations sociales (en particulier amoureuses ; en particulier lorsque l'on est non-binaire), l'étrange fascination qu'ont les autres pour savoir si oui ou non la personne en face est un homme ou une femme, le sentiment d'avoir besoin d'être à tout heure prêt-e à défendre bec et ongle et avec grands talents oratoires notre droit à exister (ou tout simplement d'avoir à expliquer ce que nous sommes), ... Oui, je pense que cet album est on ne peut plus intéressant à lire, surtout pour les personnes non-directement concernées.
Le dessin de Tamos est ici un peu plus épuré que dans ses précédents travaux que j'avais lus. Presque pas de décors, des personnages qui font parfois "griffonnés", ... Ce n'est pas fainéant, l'album met surtout en avant ses dialogues et sa pensée, mais j'avoue que, moi qui aime bien le style de Tamos, je n'aurais pas dit non à retrouver les jolies couleurs qu'iel utilise souvent. Pas mauvais, remplit son office, mais je regrette tout de même de ne pas retrouver un dessin aussi travaillé que dans Le Chevalier Imberbe par exemple.
Une lecture on ne peut plus intéressante, très personnelle. On sent que l'auteur-ice s'est aussi servi de cette œuvre pour extérioriser ses doutes, ses réflexions, ses pensées, ses peurs, ses joies et ses bons souvenirs. L’œuvre est un petit exutoire, oui, mais plein de positivité (en tout cas je l'ai trouvé joyeux). J'ai l'impression de m'être surtout arrêtée sur les complications liés aux genres dans mon avis, mais l'album aborde également le pan joyeux et libérateur de l'exploration de l'identité et je dois dire que l'optimisme qui semble transcender au final est contagieux.
Si Tamos passe par là (sait-on jamais), j'espère que les doutes et les questionnements se sont adoucis depuis (même s'ils sont sans doute toujours là) et j'espère aussi que le sourire que tu sembles arborer si souvent dans la vie est toujours bien là !
Impossible de ne pas être intrigué par ce lourd pavé à la couverture un brin mystique évoquant un univers heroïc-fantasy. C’est à partir de l’expérience personnelle de l’auteur qu’est née l’idée de ce récit, assez étonnant il faut l’avouer.
Démarrant sur une accroche spectaculaire, où l’on voit Sébastien s’effondrer sur le sol avant de se tordre de douleur, le récit va ensuite adopter une tonalité plus intimiste et pour le moins délicate d’un point de vue graphique. On ne sera pas surpris puisque l’auteur a vécu quelques années au Pays du soleil levant, et son dessin traduit plus que clairement une influence manga. Son style, assez sobre, évoque peu ou prou le travail de Jiro Taniguchi, en moins réaliste cependant.
On va d’abord le suivre dans son parcours médical qui s’apparentera davantage à un chemin de croix, narré de façon très elliptique et se terminant sur le constat d’impuissance des docteurs. Ce qui mènera le jeune homme à se tourner vers les médecines « alternatives », inspirées des pratiques ancestrales asiatiques, souvent récupérées de façon mercantile en Occident, sous l’appellation « développement personnel » ou « New Age ». Et dans un passage plus orienté « cartoon », lorsque ses genoux lui suggèrent cette option, la première réaction de Sébastien est la dérision, lui qui s’avoue athée. Mais quand on a tout essayé et que rien ne marche, pourquoi ne pas tenter le coup ? Au pire, rien ne changera…
Ainsi, le processus va commencer par la quête intérieure de ce fameux sanctuaire. Et contre toute attente, les premiers effets se font sentir, la douleur semble reculer ! Le pouvoir de la pensée, ce n’était donc pas juste du blabla de charlatan ? Certes, ça ne sera pas miraculeux et pour l’instant, ça ne fait que le soulager. Et pour peu qu’il décide de persévérer dans cette voie, il y aura encore du chemin à faire… en outre, Sébastien se trouve alors face à un dilemme : alors qu’on l’invite au Japon pour un job dans l’animation, il craint de ne pas être à la hauteur et de ne pas supporter la pression. Son genou risquerait alors de ne pas le remercier…
Qu’on se rassure, « Les Sanctuaires » ne cherche pas à convaincre les sceptiques ou à faire du prosélytisme à trois balles sur des techniques ancestrales qui d’ailleurs sont plus spirituelles (ou mentales) que religieuses. Ceux qui n’y croient pas camperont sur leur position, tout comme ceux qui y croient seront renforcés dans leurs convictions. Le livre raconte juste une histoire, celle de l’auteur, qui s’est fait explorateur pour trouver le graal qui soignerait ses douleurs… A ce titre, il va entamer une quête introspective par des exercices de relaxation, quête qu’il illustre de façon métaphorique par un voyage dans les profondeurs terrestres, associé à diverses méthodes d’autosuggestion inspirées entre autres par le bouddhisme, où il est question de reconnecter le corps et l’esprit…
Son dessin très imagé oscille entre le raffinement et le spectaculaire. Les scènes du quotidien distillent une certaine sérénité (malgré la douleur), avec un travail admirable sur l’aquarelle et ces représentations nocturnes de la ville sous la pluie. Pour les passages plus oniriques, Sébastien Pons adopte un style proche du manga d’action, teinté d’humour et parfois légèrement grand-guignolesque, où interviennent des personnages haut en couleurs, notamment un vieux barbu, porteur d’une sagesse bouddhique, dont le but est d’aider Sébastien à dompter ces monstres symbolisant son « ennemi intérieur ». Et le lecteur d’être immergé dans les grottes de la Moria…
Découpée en chapitres, chacun étant introduit par un haiku, la narration est assez captivante. Avec « Les Sanctuaires », Sébastien Pons nous offre un récit très personnel où il détaille le long parcours qui lui a permis de se reconstruire et de puiser en lui des forces insoupçonnées pour renforcer la confiance qui lui faisait défaut. Un ouvrage qui pourra livrer quelques clés de sagesse pour comprendre que sans l’esprit, le corps n’est rien…
J'ai un petit problème avec cet album qui contient une histoire intéressante mais qui a encore une fois le défaut de se limiter au témoignage. En effet, le phénomène des Kamalari est assez peu connu en Occident. Ces jeunes femmes vendues comme esclaves domestiques (et sexuelles aussi d'ailleurs) sont une réalité apparemment énorme dans le Népal où on les dénombre en centaine de milliers, malgré une loi interdisant cette pratique en vigueur depuis 2006.
Le récit ici est celui d'une de ces jeunes femmes, devenue esclave pour rembourser les dettes de ses parents et qui va le rester pendant des années avant de pouvoir s'enfuir et ensuite participer avec une ONG a des actions pour libérer celles encore prisonnières de riches propriétaires. A dire le récit comme ça, on s'attendrait à une seconde partie après sa fuite, mais la BD est en fait surtout centré sur son esclavage domestique, cantonnant encore une fois la BD à un simple rôle de témoignage. C'est d'autant plus dommage que ses actions ensuite sont inspirantes aussi, notamment sur la façon dont elle essaye de libérer progressivement et individuellement chaque femme (la BD représente un seul cas d'une jeune femme qu'elle a côtoyé). C'est dommage que la BD n'explore pas plus l'après, ce qu'il s'est passé notamment au niveau politique, l'implication de ces jeunes femmes ensuite dans la société, les changements sociétaux que cela provoqua ... On reste assez en surface d'un récit certes touchant mais qui ne développe rien de plus.
D'autre part je dois avouer que la couverture m'a trompé sur le style de dessin et que je dois dire que j'ai assez peu apprécié l'intérieur. Il y a une vraie recherche esthétique dans le trait, notamment avec les cadrages et la pagination qui joue sur la lecture pour faire comprendre certaines choses (on peut le voir dans les planches en galerie avec le voyage qu'elle entreprend en quittant sa famille). Ce n'est pas mauvais dans la construction, mais je trouve l'ensemble un peu trop imparfait. Plusieurs cases ont des cadrages pas assez maitrisé et il y a également des erreurs de proportions qui se voient vite lorsqu'on lit. Ces défauts m'ont fait sortir de la BD plusieurs fois lorsque je notais les détails qui ne collaient pas.
Donc pas mauvais, loin de là, mais cette BD se limite encore une fois à collecter un témoignage certes intéressant mais qui n'éclairera pas sur les raisons, les moyens de lutter et les différences de société qu'il faut combattre. Imparfait, sympathique à lire mais pas inoubliable.
Bon, je note en prenant en compte que c'est pour jeune mais je dois dire qu'en tant qu'adulte j'ai été assez peu porté par la BD. Et pourtant les BD jeunesse peuvent être marquantes et j'en ai plus d'une en tête pour la question du plaisir de lecture adulte (voir de la relecture).
La faute en incombe, selon moi, à un récit assez linéaire et franchement manichéen dans le traitement des personnages. Le côté positif de l’œuvre est sympathique mais le conjoint est un peu trop caricatural à mon gout, de même que la question du petit vieux dans la zone avec ses autruches, animal servant souvent de levier scénaristique d'ailleurs. C'est un peu trop facile et simple à mon gout, un peu trop enfantin.
Mais c'est sympathique de voir une œuvre parler des dangers du nucléaire pour enfant et des conséquences de Fukushima sur l'environnement local. Le moyen utilisé (les Yokais) permet de le lier à une vision plus animiste de la nature et de l'impact de l'homme dessus. C'est plus facile pour intégrer les concepts étant enfant, malheureusement ça brouille aussi pas mal la réalité et le message reste positif, ce qui est un peu étrange vu le sujet traité.
Niveau dessin c'est très inspiré du manga, ce qui est logique au vu du sujet, et colorisé de façon agréable. J'ai juste été dérangé par le trope courant des bouches grandes ouvertes régulièrement qui m'ont parasité la lecture à un moment donné, mais ça c'est un souci personnel.
En terme de lecture pour jeune, ça reste bon, mais je dois avouer qu'en tant qu'adulte j'ai un regard plus critique et je ne m'en satisfait pas. D'autres œuvres ont mieux réussi à fédérer un large public et je recommanderais moins celle-ci.
Ma note est une cote mal taillée. J’aurais en effet pu mettre deux étoiles comme quatre, tant qualités et défauts se mêlent dans ce triptyque.
Le dessin, dans un style manhua affirmé, n’est a priori pas ma tasse de thé. Il est aussi loin d’être exempt de défauts. Quelques erreurs de proportions, des perspectives parfois hasardeuses, et des scènes de combats (dans l’espace ou entre personnages) souvent difficiles à lire. J’ai aussi eu du mal au début avec la colorisation.
Mais, tout ceci étant dit, je me suis fait à ce travail graphique hésitant de Huang. Son trait se stabilise un peu et le dessin s’améliore au fil des tomes, et je me suis aussi fait à la colorisation : au final, malgré les défauts – et peut-être aussi grâce à eux, je ne sais pas – le dessin un peu brouillon m’a finalement paru plaisant, moderne et adapté au rythme donné par Morvan à son scénario.
Le scénario de Morvan est relativement original et ambitieux, avec une ancienne membre d’une organisation criminelle (la Spirale) « à la retraite » rappelée pour une ultime mission. Mission qui, bien évidemment, ne va pas se passer comme prévu. Aidée de l’IA de son vaisseau et d’un mystérieux hacker de ses amis, elle va se trouver confronter à la police, à la Spirale. Et surtout à une situation imprévue après avoir accéléré dans l’espace pour fuir un danger. Mais, si cette situation est intrigante, j’ai trouvé que Morvan l’exploitait mal. Ou plutôt qu’il se débarrassait trop rapidement de ça pour une conclusion que j’ai trouvé décevante. Cette situation, les personnages clés du troisième tome, et les retournements de situation sont mal expliqués, en tout cas la décélération jusqu’au calme final m’est apparue trop brutale.
Boucq est un auteur que j’aime bien, et surtout dans ses œuvres d’humour plus ou moins absurde. C’est dans cette veine que s’inscrit cette série, et donc a priori c’est ma came.
Le dessin de Boucq est vraiment bon. Avec un trait classique, qui vire parfois à la caricature, il parvient à croquer tout et n’importe quoi – et il y a parfois du n’importe quoi ! – avec un minimum de moyens. C’est très expressif, mais les décors sont souvent évacués. Par contre, sur des histoires plus tardives, l’apport de la couleur n’est pas nécessaire, j’ai préféré lorsqu’il se contentait du Noir et Blanc.
Le point de départ est assez osé, puisque nous suivons un duo constitué de la Mort et d’un cochon domestique nommé Lao Tseu ! La Mort se baladant par monts et par vaux pour chercher du client. Il y a là matière à franche déconnade, c’est certain. Car, même si depuis nombreux ont été les auteurs à user du personnage de la Mort pour développer de l’humour noir ou con, c’était plus rare dans les années 1990 (et surtout sur des histoires plus ou moins longues, loin des strips qui dominent sur le sujet depuis).
Ce qui me laisse un peu sur ma faim concernant cette série, c’est que j’attendais de Boucq quelque chose de plus uniformément absurde, loufoque, et ça n’est pas toujours ou exactement le cas. En effet, si l’humour est bien présent, il s’accompagne aussi de quelques réflexions sur la vie, la mort – ou autres – et l’humour n’est pas toujours aussi présent qu’escompté, et pas aussi percutant qu’espéré. La Mort s’embourgeoise parfois, perd le cynisme de ses débuts, s’accommode parfois de vivre « normalement » au milieu des mortels.
Mais bon, ça reste globalement une série amusante, intéressante, même si c’est loin d’être ma série préférée de Boucq.
Pour moi, cette lecture est devenue une évidence. Hugo Pratt se devait de rencontrer Antoine de St Exupéry tellement il y a de parallèles entre les deux hommes. A y bien réfléchir c'est même à se demander si l'aviateur romancier (ou le contraire) n'a pas servi de modèle sur de nombreux points au marin aventurier maltais. En tout cas cet amour des espaces lointains, cette attirance pour des peuples indomptés, cette vie de trompe-la-mort, cette relation complexe avec les femmes, cette fidélité dans leurs valeurs humanistes et bien sûr cette poésie qui sourde de leurs propos et engagements sont partagés par les deux personnages. Au cours de ces 60 pages qui laissent aux biographes le soin des faits et des dates précises, Pratt plonge à la compréhension la plus intime de l'auteur du "Petit Prince". C'est plus facile d'accès si on connait un peu la vie de l'aviateur et la complexité du personnage. J'ai lu il y a peu Le Prince des oiseaux de haut vol de Philippe Girard. Je trouve que les deux lectures se complètent bien pour aborder les différentes facettes de St Ex.
Enfin, j'ai découvert que cet album fut le dernier ou presque de Pratt comme si l'artiste voulait insister sur une possible fraternité qui unissait les deux hommes. Le graphisme épuré m'a toujours autant séduit. Il vise l'essentiel que l'on garde en mémoire quand il reste dix minutes à vivre.
Une très belle surprise à redécouvrir.
Comme souvent avec les séries traitant du handicap, l'auteur est directement touché par le sujet. Ainsi Jean-Paul Eid nous avoue qu'il est papa d'un fils atteint de paralysie cérébrale. Cela crédibilise son œuvre qui se situe donc entre fiction et témoignage. Le témoignage décrit le parcours classique des personnes confrontées à une telle situation sans y être préparées du choc initial à la découverte d'un bonheur en dehors des normes sociétales compétitives. Je n'ai pas pu m'empêcher de faire le parallèle avec le très beau Ce n'est pas toi que j'attendais de Fabien Toulmé qui se met bien plus en scène que Eid. Le côté fictionnel plus prononcé chez Eid accentue à mes yeux les émotions dues à l'indignation de certaines situations et au choix de l'auteur de favoriser un parcours tragique pour le petit Tom. Toutefois la narration reste fluide et le récit se lit facilement.
Le graphisme est très moderne , précis et très expressif. Les détails extérieurs sont soignés et procurent une belle ambiance autour du petit Tom.
Une lecture intéressante sur une thématique du handicap fondamentale pour notre notion d'humanité.
Je ne connaissais pas le personnage de Little Nemo. Cette série m'a donc permis de découvrir l'univers du personnage de Winsor Mc Cay et de jeter un œil intéressé sur la galerie de l'œuvre originale. J'ai lu les deux premiers ouvrages de Marchand et Moebius et je ne pense pas rechercher la suite. En effet j'ai été bien déçu par l'adaptation de ces deux auteurs . Ainsi j'ai trouvé le scénario assez plat, présentant des longueurs et un manque d'originalité assez pénalisant pour le dynamisme de la lecture. Mais surtout quand je compare les graphismes de l'œuvre originale avec celui de Marchand je trouve que l'on est complétement sorti de la féérie de l'univers du personnage. Ce graphisme très classique et daté 90's s'inscrit dans la tendance de ces années mais je le trouve bien fade pour traduire le rêve et l'imagination .
Une déception.
Cette BD part d'une excellente idée, inspirée d'un essai d'anthropologie fictive de 1978 qui imaginait que si les hommes avaient leurs règles, celles-ci seraient une source de fierté, de rituels virils, de privilèges et d'exclusion des femmes. L'essai montrait par contraste comment un fait biologique neutre est socialement construit comme une faiblesse lorsqu'il concerne les femmes. Je trouve cette idée particulièrement juste (et je n'y avais jamais pensé auparavant) : dans une société patriarcale comme la nôtre, si les règles étaient masculines, elles auraient probablement été élevées au rang de preuve de courage et de virilité, au même titre que les fameuses "couilles".
À partir de cette base, les auteurs imaginent des saynètes disséminées dans l'histoire humaine, montrant comment la société serait bâtie si ses dirigeants masculins avaient leurs règles chaque mois, avec douleurs, sautes hormonales et même endométriose. Le début de l'album fonctionne très bien : les gags sont drôles, la mise en scène efficace et l'humour percutant. En même temps, cela pousse à réfléchir sur la manière dont un même phénomène peut être perçu de façon totalement différente selon le regard social qui le glorifie ou le stigmatise.
Le problème, c'est que le concept s'essouffle. Malgré des efforts visibles pour varier les situations et ancrer les saynètes dans différentes circonstances bien documentées, l'album devient vite redondant. On trouve bien quelques sujets de gags différent (le concours de révérences des officiers anglais et français m'a fait rire), mais pas assez pour compenser un sentiment de lassitude face à ce fil rouge trop répétitif.
Une très bonne idée de départ, bien mise en scène au début, qui combine humour et réflexion sociétale, mais qui finit par tourner un peu en rond et peine à maintenir son rythme sur la longueur d'un album entier.
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J'avais découvert Tamos avec l'album Le Chevalier Imberbe, un album qui m'avait permise de découvrir les éditions Exemplaire que j'apprécie énormément aujourd'hui. Le dessin d'apparence simple et enfantin, les dialogues se prenant seulement à moitié au sérieux et glissant régulièrement des apartés/digressions comiques, le sujet du genre et du poids des conventions sociales qui semble cher à l'auteur-ice, ... Sans être parfait l'album m'avait agréablement surprise et m'avait fait ajouté Tamos à la liste des auteur-ice-s dont je souhaitais voir la suite des travaux. Alors, quand en explorant une librairie, je suis tombée sur la première création dudit Tamos aux éditions Exemplaire, une autobiographie parlant des questionnements de genre de l'auteur-ice justement, je me suis sans soucis laissée tentée par la lecture. (Tamos s'exprimant justement dans cet album sur le fait qu'il reste encore en questionnement quant aux pronoms à utiliser à son égard je vais essayer de me cantonner au masculin et à l'écriture inclusive qu'il privilégie et alterner entre les deux usages - même si je vais sans doute plus utiliser l'écriture inclusive par sécurité). Comme toute autobiographie, Tamos nous raconte sa vie, des débuts jusqu'à l'époque de rédaction (choquant, je sais). Comme souvent dans les biographie, la vie de l'auteur-ice nous est racontée sous un angle bien particulier : ici, les questionnements de genre. Depuis ses déboires d'enfance avec son apparence masculine jusqu'à sa recherche d'identité une fois adulte en passant par les innombrables questionnements entre les deux (et même après), Tamos nous raconte mine de rien une expérience assez universelle chez toutes les personnes transgenres (binaires comme non-binaires). Bon, ici surtout les personnes non-binaires, car bien que de nombreux points communs lient les deux expériences, elles restent mine de rien différentes. Au delà des questionnements sur les codes et attentes de la société, de la peur de la perception des autres sur notre corps, des montagnes russes émotionnelles que peuvent être les euphories et dysphories de genres, les personnes non-binaires affrontent tout de même un ennemi de taille bien particulier : une sortie totale et absolue des carcans sociaux préétablis et une incompatibilité avec les petites cases bien rangées dans lesquelles on catégorise si souvent les gens. Mon genre se plaçant (en tout cas pour l'instant) dans la binarité je ne connais pas personnellement ce genre d'expérience si particulière et la lecture de témoignages comme ceux de Tamos sont on ne peut plus intéressants. Les doutes que l'on vit, le sentiment d'avoir ouvert la boîte de pandore lorsque le déclic vient, le traitement ostracisant (parfois même involontaire) que certaines personnes peuvent avoir, les petits riens qui apportent tout de même du soutien, la complication des relations sociales (en particulier amoureuses ; en particulier lorsque l'on est non-binaire), l'étrange fascination qu'ont les autres pour savoir si oui ou non la personne en face est un homme ou une femme, le sentiment d'avoir besoin d'être à tout heure prêt-e à défendre bec et ongle et avec grands talents oratoires notre droit à exister (ou tout simplement d'avoir à expliquer ce que nous sommes), ... Oui, je pense que cet album est on ne peut plus intéressant à lire, surtout pour les personnes non-directement concernées. Le dessin de Tamos est ici un peu plus épuré que dans ses précédents travaux que j'avais lus. Presque pas de décors, des personnages qui font parfois "griffonnés", ... Ce n'est pas fainéant, l'album met surtout en avant ses dialogues et sa pensée, mais j'avoue que, moi qui aime bien le style de Tamos, je n'aurais pas dit non à retrouver les jolies couleurs qu'iel utilise souvent. Pas mauvais, remplit son office, mais je regrette tout de même de ne pas retrouver un dessin aussi travaillé que dans Le Chevalier Imberbe par exemple. Une lecture on ne peut plus intéressante, très personnelle. On sent que l'auteur-ice s'est aussi servi de cette œuvre pour extérioriser ses doutes, ses réflexions, ses pensées, ses peurs, ses joies et ses bons souvenirs. L’œuvre est un petit exutoire, oui, mais plein de positivité (en tout cas je l'ai trouvé joyeux). J'ai l'impression de m'être surtout arrêtée sur les complications liés aux genres dans mon avis, mais l'album aborde également le pan joyeux et libérateur de l'exploration de l'identité et je dois dire que l'optimisme qui semble transcender au final est contagieux. Si Tamos passe par là (sait-on jamais), j'espère que les doutes et les questionnements se sont adoucis depuis (même s'ils sont sans doute toujours là) et j'espère aussi que le sourire que tu sembles arborer si souvent dans la vie est toujours bien là !
Les Sanctuaires
Impossible de ne pas être intrigué par ce lourd pavé à la couverture un brin mystique évoquant un univers heroïc-fantasy. C’est à partir de l’expérience personnelle de l’auteur qu’est née l’idée de ce récit, assez étonnant il faut l’avouer. Démarrant sur une accroche spectaculaire, où l’on voit Sébastien s’effondrer sur le sol avant de se tordre de douleur, le récit va ensuite adopter une tonalité plus intimiste et pour le moins délicate d’un point de vue graphique. On ne sera pas surpris puisque l’auteur a vécu quelques années au Pays du soleil levant, et son dessin traduit plus que clairement une influence manga. Son style, assez sobre, évoque peu ou prou le travail de Jiro Taniguchi, en moins réaliste cependant. On va d’abord le suivre dans son parcours médical qui s’apparentera davantage à un chemin de croix, narré de façon très elliptique et se terminant sur le constat d’impuissance des docteurs. Ce qui mènera le jeune homme à se tourner vers les médecines « alternatives », inspirées des pratiques ancestrales asiatiques, souvent récupérées de façon mercantile en Occident, sous l’appellation « développement personnel » ou « New Age ». Et dans un passage plus orienté « cartoon », lorsque ses genoux lui suggèrent cette option, la première réaction de Sébastien est la dérision, lui qui s’avoue athée. Mais quand on a tout essayé et que rien ne marche, pourquoi ne pas tenter le coup ? Au pire, rien ne changera… Ainsi, le processus va commencer par la quête intérieure de ce fameux sanctuaire. Et contre toute attente, les premiers effets se font sentir, la douleur semble reculer ! Le pouvoir de la pensée, ce n’était donc pas juste du blabla de charlatan ? Certes, ça ne sera pas miraculeux et pour l’instant, ça ne fait que le soulager. Et pour peu qu’il décide de persévérer dans cette voie, il y aura encore du chemin à faire… en outre, Sébastien se trouve alors face à un dilemme : alors qu’on l’invite au Japon pour un job dans l’animation, il craint de ne pas être à la hauteur et de ne pas supporter la pression. Son genou risquerait alors de ne pas le remercier… Qu’on se rassure, « Les Sanctuaires » ne cherche pas à convaincre les sceptiques ou à faire du prosélytisme à trois balles sur des techniques ancestrales qui d’ailleurs sont plus spirituelles (ou mentales) que religieuses. Ceux qui n’y croient pas camperont sur leur position, tout comme ceux qui y croient seront renforcés dans leurs convictions. Le livre raconte juste une histoire, celle de l’auteur, qui s’est fait explorateur pour trouver le graal qui soignerait ses douleurs… A ce titre, il va entamer une quête introspective par des exercices de relaxation, quête qu’il illustre de façon métaphorique par un voyage dans les profondeurs terrestres, associé à diverses méthodes d’autosuggestion inspirées entre autres par le bouddhisme, où il est question de reconnecter le corps et l’esprit… Son dessin très imagé oscille entre le raffinement et le spectaculaire. Les scènes du quotidien distillent une certaine sérénité (malgré la douleur), avec un travail admirable sur l’aquarelle et ces représentations nocturnes de la ville sous la pluie. Pour les passages plus oniriques, Sébastien Pons adopte un style proche du manga d’action, teinté d’humour et parfois légèrement grand-guignolesque, où interviennent des personnages haut en couleurs, notamment un vieux barbu, porteur d’une sagesse bouddhique, dont le but est d’aider Sébastien à dompter ces monstres symbolisant son « ennemi intérieur ». Et le lecteur d’être immergé dans les grottes de la Moria… Découpée en chapitres, chacun étant introduit par un haiku, la narration est assez captivante. Avec « Les Sanctuaires », Sébastien Pons nous offre un récit très personnel où il détaille le long parcours qui lui a permis de se reconstruire et de puiser en lui des forces insoupçonnées pour renforcer la confiance qui lui faisait défaut. Un ouvrage qui pourra livrer quelques clés de sagesse pour comprendre que sans l’esprit, le corps n’est rien…
Kamalari
J'ai un petit problème avec cet album qui contient une histoire intéressante mais qui a encore une fois le défaut de se limiter au témoignage. En effet, le phénomène des Kamalari est assez peu connu en Occident. Ces jeunes femmes vendues comme esclaves domestiques (et sexuelles aussi d'ailleurs) sont une réalité apparemment énorme dans le Népal où on les dénombre en centaine de milliers, malgré une loi interdisant cette pratique en vigueur depuis 2006. Le récit ici est celui d'une de ces jeunes femmes, devenue esclave pour rembourser les dettes de ses parents et qui va le rester pendant des années avant de pouvoir s'enfuir et ensuite participer avec une ONG a des actions pour libérer celles encore prisonnières de riches propriétaires. A dire le récit comme ça, on s'attendrait à une seconde partie après sa fuite, mais la BD est en fait surtout centré sur son esclavage domestique, cantonnant encore une fois la BD à un simple rôle de témoignage. C'est d'autant plus dommage que ses actions ensuite sont inspirantes aussi, notamment sur la façon dont elle essaye de libérer progressivement et individuellement chaque femme (la BD représente un seul cas d'une jeune femme qu'elle a côtoyé). C'est dommage que la BD n'explore pas plus l'après, ce qu'il s'est passé notamment au niveau politique, l'implication de ces jeunes femmes ensuite dans la société, les changements sociétaux que cela provoqua ... On reste assez en surface d'un récit certes touchant mais qui ne développe rien de plus. D'autre part je dois avouer que la couverture m'a trompé sur le style de dessin et que je dois dire que j'ai assez peu apprécié l'intérieur. Il y a une vraie recherche esthétique dans le trait, notamment avec les cadrages et la pagination qui joue sur la lecture pour faire comprendre certaines choses (on peut le voir dans les planches en galerie avec le voyage qu'elle entreprend en quittant sa famille). Ce n'est pas mauvais dans la construction, mais je trouve l'ensemble un peu trop imparfait. Plusieurs cases ont des cadrages pas assez maitrisé et il y a également des erreurs de proportions qui se voient vite lorsqu'on lit. Ces défauts m'ont fait sortir de la BD plusieurs fois lorsque je notais les détails qui ne collaient pas. Donc pas mauvais, loin de là, mais cette BD se limite encore une fois à collecter un témoignage certes intéressant mais qui n'éclairera pas sur les raisons, les moyens de lutter et les différences de société qu'il faut combattre. Imparfait, sympathique à lire mais pas inoubliable.
Retour à Tomioka
Bon, je note en prenant en compte que c'est pour jeune mais je dois dire qu'en tant qu'adulte j'ai été assez peu porté par la BD. Et pourtant les BD jeunesse peuvent être marquantes et j'en ai plus d'une en tête pour la question du plaisir de lecture adulte (voir de la relecture). La faute en incombe, selon moi, à un récit assez linéaire et franchement manichéen dans le traitement des personnages. Le côté positif de l’œuvre est sympathique mais le conjoint est un peu trop caricatural à mon gout, de même que la question du petit vieux dans la zone avec ses autruches, animal servant souvent de levier scénaristique d'ailleurs. C'est un peu trop facile et simple à mon gout, un peu trop enfantin. Mais c'est sympathique de voir une œuvre parler des dangers du nucléaire pour enfant et des conséquences de Fukushima sur l'environnement local. Le moyen utilisé (les Yokais) permet de le lier à une vision plus animiste de la nature et de l'impact de l'homme dessus. C'est plus facile pour intégrer les concepts étant enfant, malheureusement ça brouille aussi pas mal la réalité et le message reste positif, ce qui est un peu étrange vu le sujet traité. Niveau dessin c'est très inspiré du manga, ce qui est logique au vu du sujet, et colorisé de façon agréable. J'ai juste été dérangé par le trope courant des bouches grandes ouvertes régulièrement qui m'ont parasité la lecture à un moment donné, mais ça c'est un souci personnel. En terme de lecture pour jeune, ça reste bon, mais je dois avouer qu'en tant qu'adulte j'ai un regard plus critique et je ne m'en satisfait pas. D'autres œuvres ont mieux réussi à fédérer un large public et je recommanderais moins celle-ci.
Zaya
Ma note est une cote mal taillée. J’aurais en effet pu mettre deux étoiles comme quatre, tant qualités et défauts se mêlent dans ce triptyque. Le dessin, dans un style manhua affirmé, n’est a priori pas ma tasse de thé. Il est aussi loin d’être exempt de défauts. Quelques erreurs de proportions, des perspectives parfois hasardeuses, et des scènes de combats (dans l’espace ou entre personnages) souvent difficiles à lire. J’ai aussi eu du mal au début avec la colorisation. Mais, tout ceci étant dit, je me suis fait à ce travail graphique hésitant de Huang. Son trait se stabilise un peu et le dessin s’améliore au fil des tomes, et je me suis aussi fait à la colorisation : au final, malgré les défauts – et peut-être aussi grâce à eux, je ne sais pas – le dessin un peu brouillon m’a finalement paru plaisant, moderne et adapté au rythme donné par Morvan à son scénario. Le scénario de Morvan est relativement original et ambitieux, avec une ancienne membre d’une organisation criminelle (la Spirale) « à la retraite » rappelée pour une ultime mission. Mission qui, bien évidemment, ne va pas se passer comme prévu. Aidée de l’IA de son vaisseau et d’un mystérieux hacker de ses amis, elle va se trouver confronter à la police, à la Spirale. Et surtout à une situation imprévue après avoir accéléré dans l’espace pour fuir un danger. Mais, si cette situation est intrigante, j’ai trouvé que Morvan l’exploitait mal. Ou plutôt qu’il se débarrassait trop rapidement de ça pour une conclusion que j’ai trouvé décevante. Cette situation, les personnages clés du troisième tome, et les retournements de situation sont mal expliqués, en tout cas la décélération jusqu’au calme final m’est apparue trop brutale.
Les Aventures de La Mort et de Lao-Tseu
Boucq est un auteur que j’aime bien, et surtout dans ses œuvres d’humour plus ou moins absurde. C’est dans cette veine que s’inscrit cette série, et donc a priori c’est ma came. Le dessin de Boucq est vraiment bon. Avec un trait classique, qui vire parfois à la caricature, il parvient à croquer tout et n’importe quoi – et il y a parfois du n’importe quoi ! – avec un minimum de moyens. C’est très expressif, mais les décors sont souvent évacués. Par contre, sur des histoires plus tardives, l’apport de la couleur n’est pas nécessaire, j’ai préféré lorsqu’il se contentait du Noir et Blanc. Le point de départ est assez osé, puisque nous suivons un duo constitué de la Mort et d’un cochon domestique nommé Lao Tseu ! La Mort se baladant par monts et par vaux pour chercher du client. Il y a là matière à franche déconnade, c’est certain. Car, même si depuis nombreux ont été les auteurs à user du personnage de la Mort pour développer de l’humour noir ou con, c’était plus rare dans les années 1990 (et surtout sur des histoires plus ou moins longues, loin des strips qui dominent sur le sujet depuis). Ce qui me laisse un peu sur ma faim concernant cette série, c’est que j’attendais de Boucq quelque chose de plus uniformément absurde, loufoque, et ça n’est pas toujours ou exactement le cas. En effet, si l’humour est bien présent, il s’accompagne aussi de quelques réflexions sur la vie, la mort – ou autres – et l’humour n’est pas toujours aussi présent qu’escompté, et pas aussi percutant qu’espéré. La Mort s’embourgeoise parfois, perd le cynisme de ses débuts, s’accommode parfois de vivre « normalement » au milieu des mortels. Mais bon, ça reste globalement une série amusante, intéressante, même si c’est loin d’être ma série préférée de Boucq.
Saint-Exupéry - Le dernier vol
Pour moi, cette lecture est devenue une évidence. Hugo Pratt se devait de rencontrer Antoine de St Exupéry tellement il y a de parallèles entre les deux hommes. A y bien réfléchir c'est même à se demander si l'aviateur romancier (ou le contraire) n'a pas servi de modèle sur de nombreux points au marin aventurier maltais. En tout cas cet amour des espaces lointains, cette attirance pour des peuples indomptés, cette vie de trompe-la-mort, cette relation complexe avec les femmes, cette fidélité dans leurs valeurs humanistes et bien sûr cette poésie qui sourde de leurs propos et engagements sont partagés par les deux personnages. Au cours de ces 60 pages qui laissent aux biographes le soin des faits et des dates précises, Pratt plonge à la compréhension la plus intime de l'auteur du "Petit Prince". C'est plus facile d'accès si on connait un peu la vie de l'aviateur et la complexité du personnage. J'ai lu il y a peu Le Prince des oiseaux de haut vol de Philippe Girard. Je trouve que les deux lectures se complètent bien pour aborder les différentes facettes de St Ex. Enfin, j'ai découvert que cet album fut le dernier ou presque de Pratt comme si l'artiste voulait insister sur une possible fraternité qui unissait les deux hommes. Le graphisme épuré m'a toujours autant séduit. Il vise l'essentiel que l'on garde en mémoire quand il reste dix minutes à vivre. Une très belle surprise à redécouvrir.
Le Petit Astronaute
Comme souvent avec les séries traitant du handicap, l'auteur est directement touché par le sujet. Ainsi Jean-Paul Eid nous avoue qu'il est papa d'un fils atteint de paralysie cérébrale. Cela crédibilise son œuvre qui se situe donc entre fiction et témoignage. Le témoignage décrit le parcours classique des personnes confrontées à une telle situation sans y être préparées du choc initial à la découverte d'un bonheur en dehors des normes sociétales compétitives. Je n'ai pas pu m'empêcher de faire le parallèle avec le très beau Ce n'est pas toi que j'attendais de Fabien Toulmé qui se met bien plus en scène que Eid. Le côté fictionnel plus prononcé chez Eid accentue à mes yeux les émotions dues à l'indignation de certaines situations et au choix de l'auteur de favoriser un parcours tragique pour le petit Tom. Toutefois la narration reste fluide et le récit se lit facilement. Le graphisme est très moderne , précis et très expressif. Les détails extérieurs sont soignés et procurent une belle ambiance autour du petit Tom. Une lecture intéressante sur une thématique du handicap fondamentale pour notre notion d'humanité.
Little Nemo (Marchand)
Je ne connaissais pas le personnage de Little Nemo. Cette série m'a donc permis de découvrir l'univers du personnage de Winsor Mc Cay et de jeter un œil intéressé sur la galerie de l'œuvre originale. J'ai lu les deux premiers ouvrages de Marchand et Moebius et je ne pense pas rechercher la suite. En effet j'ai été bien déçu par l'adaptation de ces deux auteurs . Ainsi j'ai trouvé le scénario assez plat, présentant des longueurs et un manque d'originalité assez pénalisant pour le dynamisme de la lecture. Mais surtout quand je compare les graphismes de l'œuvre originale avec celui de Marchand je trouve que l'on est complétement sorti de la féérie de l'univers du personnage. Ce graphisme très classique et daté 90's s'inscrit dans la tendance de ces années mais je le trouve bien fade pour traduire le rêve et l'imagination . Une déception.
Si les hommes avaient leurs règles
Cette BD part d'une excellente idée, inspirée d'un essai d'anthropologie fictive de 1978 qui imaginait que si les hommes avaient leurs règles, celles-ci seraient une source de fierté, de rituels virils, de privilèges et d'exclusion des femmes. L'essai montrait par contraste comment un fait biologique neutre est socialement construit comme une faiblesse lorsqu'il concerne les femmes. Je trouve cette idée particulièrement juste (et je n'y avais jamais pensé auparavant) : dans une société patriarcale comme la nôtre, si les règles étaient masculines, elles auraient probablement été élevées au rang de preuve de courage et de virilité, au même titre que les fameuses "couilles". À partir de cette base, les auteurs imaginent des saynètes disséminées dans l'histoire humaine, montrant comment la société serait bâtie si ses dirigeants masculins avaient leurs règles chaque mois, avec douleurs, sautes hormonales et même endométriose. Le début de l'album fonctionne très bien : les gags sont drôles, la mise en scène efficace et l'humour percutant. En même temps, cela pousse à réfléchir sur la manière dont un même phénomène peut être perçu de façon totalement différente selon le regard social qui le glorifie ou le stigmatise. Le problème, c'est que le concept s'essouffle. Malgré des efforts visibles pour varier les situations et ancrer les saynètes dans différentes circonstances bien documentées, l'album devient vite redondant. On trouve bien quelques sujets de gags différent (le concours de révérences des officiers anglais et français m'a fait rire), mais pas assez pour compenser un sentiment de lassitude face à ce fil rouge trop répétitif. Une très bonne idée de départ, bien mise en scène au début, qui combine humour et réflexion sociétale, mais qui finit par tourner un peu en rond et peine à maintenir son rythme sur la longueur d'un album entier.