Tiger Joe

Note: 3/5
(3/5 pour 6 avis)

Un chasseur guide des caravanes dans les jungles perdues...


Charlier Greg Institut Saint-Luc, Liège

Tiger Joe ?... c'est un fameux chasseur pour qui les mille et une traîtrises des jungles perdues n'ont aucun secret... C'est aussi un baroudeur. Guidant caravanes et explorateurs c'est lui qui -surtout- s'occupera et règlera les problèmes qui -forcément- vont survenir dans ce genre d'aventures... Les jungles ?... il connaît. Et leurs dangers aussi. Que ce soit à la recherche du mythique cimétière des éléphants, des féroces rencontres avec les hommes-léopards, les bandits et trafiquants de toutes natures. Heureusement, Tiger pourra compter sur l'assistance de ses deux amis et équipiers Mouton et Gin, deux gars qui -s'ils n'ont pas l'aura de leur "chef"- sont inséparables de ce dernier dans tous les coups durs...

Scénario
Dessin
Couleurs
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution Janvier 1951
Statut histoire Une histoire par tome 8 tomes parus

Couverture de la série Tiger Joe © Libre Belgique/Michel Deligne/Pan Pan 1951
Les notes
Note: 3/5
(3/5 pour 6 avis)
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12/11/2007 | L'Ymagier
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Par Josq
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
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Je pensais m'attaquer à une saga mineure de Charlier, mais je me trompais du tout au tout. Tiger Joe est du très grand Charlier, au même titre que Barbe-Rouge, Buck Danny ou encore Tanguy et Laverdure, une énorme surprise pour ma part ! C'est donc à la trilogie originale que je consacre cet avis, car je ne sais pas quand j'aurais l'occasion de me plonger dans sa continuation par Greg. En attendant, Tiger Joe période Charlier synthétise tout ce qui fait que j'aime la bande dessinée en général, et Charlier en particulier. Malgré mon amour pour ces sagas qui ont bercé mon enfance, j'avoue avoir été un peu lassé au bout d'un moment par les sagas d'aviation de l'auteur, alors c'est avec un immense plaisir que je le vois partir en des terres exotiques, ici, dans l'Afrique coloniale des années 50. Le dépaysement est garanti, et renforcé par le charme à toute épreuve de ces récits d'antan, dont j'ai parfois l'impression qu'on a perdu la recette. Il faut dire que Charlier n'a pas son pareil pour mettre en scène l'Afrique coloniale, aidé par un Hubinon en immense forme. Le trait toujours rigoureux du dessinateur, et les couleurs chaudes du studio Leonardo recréent une Afrique de carte postale absolument fascinante, où on n'échappera certes à aucun cliché du genre, et qui, pourtant, résiste bien aux attaques du temps. Quand je parle des clichés, j'évoque surtout les clichés narratifs, car j'ai été très agréablement surpris par la tonalité du récit et ses innombrables nuances, très loin du racisme qu'on veut à tout prix attribuer aux récits coloniaux de cette époque. Et de fait, si Tiger Joe propage évidemment une vision très colonialiste de l'Afrique (en même temps, vu le contexte, comme le lui reprocher ?), jamais Charlier ne fait jamais preuve de racisme, grâce à son talent incroyable pour l'écriture des personnages. Déjà, chaque tome est d'une densité narrative impressionnante, on en a clairement pour son argent. C'est ce qui permet à l'auteur de multiplier les péripéties, toutes plus captivantes les unes que les autres, et d'apporter à sa vision des choses une nuance très anti-manichéenne, à laquelle on ne s'attend pas. Ainsi, jamais les auteurs ne cherchent à mettre les Blancs en situation de supériorité par rapport aux Noirs. Si on a droit aux traditionnelles images de caravanes de chasseurs blancs suivis d'une cohorte de porteurs noirs, Tiger Joe et ses acolytes les traitent toujours d'égal à égal. Si certaines tribus reculées parlent le langage petit-nègre, d'autres parlent un Français tout-à-fait correct sans fautes grammaticales. Si certains Noirs veulent la mort des Blancs à tout prix, d'autres sont amis avec eux et d'autres y sont tout simplement indifférents. Si la plupart des Blancs colonisateurs semblent des humanistes en puissance, les scénarios successifs n'oublient pas non plus de montrer la cruauté ou la corruption de certains autres Blancs. Bref, Tiger Joe donne une vision étonnamment complète de l'Afrique colonialiste et ça fait plutôt plaisir, même s'il subsiste parfois quelques saillies plus désagréables, heureusement très rares et nuancées par tout ce que je viens de résumer. Colonialiste, oui, Tiger Joe l'est et on en pensera ce qu'on voudra, raciste, non, et c'est très bien comme ça. Maintenant, si j'ai autant adoré Tiger Joe, c'est avant tout pour la qualité extrême des scénarios. Toujours prenants, les récits de chaque tome donnent à voir un aspect différent de l'Afrique profonde, et jouent agréablement de la mythologie typique des aventures africaines de ce genre. On aura ainsi droit au cimetière d'éléphant, aux sectes sanguinaires, aux animaux sauvages en tous genres, aux lacs meurtriers, etc. Tout cela donne un parfum vintage absolument charmant à cette saga, qui traverse bien les âges, car Charlier n'oublie jamais de donner une dimension humaine importante à ses différentes histoires. Ainsi, le premier tome nous propose une approche des personnages très originale, car on les découvre à travers les yeux d'une femme qui n'a jamais mis le pied en Afrique et qui se heurte à la rudesse de Tiger Joe et de son acolyte. Cela la précipite évidemment dans les bras du méchant, et pendant une bonne partie du premier tome, Tiger Joe n'a pas le bon rôle, ce qui permet de mieux nous faire entrer dans la tête des personnages et de comprendre la méfiance de l'héroïne. A cette image, Charlier donne beaucoup de sentiments à ses différents personnages, ce qui permet de les rendre toujours attachants. Cela permet au lecteur de mieux s'immiscer dans l'atmosphère fascinante d'une Afrique où le danger rôde à chaque seconde, et dont on n'est jamais sûr de sortir vivant. Bref, Tiger Joe est clairement un gros coup de cœur, qui prouve une nouvelle fois que Charlier et son fidèle dessinateur Hubinon n'ont pas leur pareil pour mettre en scène l'Aventure dans la plus grande tradition de l'Art. On en ressort nostalgique et enthousiaste, comme au terme d'un voyage dont on aurait vécu les moindres détails. Et ça, c'est fort.

25/02/2022 (modifier)