Electric Miles

Avec Electric Miles, le duo Nury / Brüno, continue de nous surprendre, en transportant le lecteur dans un polar fantastique digne de Philip K. Dick et Stephen King.
Futurs immanquables Glénat
Los Angeles, 1949. Parmi les rayons d’un magasin de comics, Morris Millman, agent littéraire, croise une de ses idoles : le prolifique et brillant Wilbur H. Arbogast, qui a jadis publié de nombreuses nouvelles dans le magazine pulp Outstanding. Mais Arbogast, fantomatique et secret, n’est plus que l’ombre de ce qu’il a été. Morris rêve de remettre Wilbur sur le devant de la scène. Aurait-il un texte, n’importe quoi à vendre, à promouvoir ? Oui, peut-être… Mais ce livre promis est aussi toxique, il rend fou, il tue. C’est du moins ce qu’affirme l’auteur déchu… L’agent, appâté, veut à tout prix publier ce texte, le vendre à des producteurs de cinéma, tout ça sans même l’avoir lu. Il vient, sans le savoir, de réveiller la folle volonté de puissance d’un auteur dément. Wilbur H. Arbogast ne veut pas seulement vendre un livre, il veut créer une bible. Fonder une religion, régenter le monde... Et grâce à la naïveté de son premier lecteur, il pourrait bien y arriver.
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Date de parution | 02 Avril 2025 |
Statut histoire |
Série en cours
1 tome paru
Dernière parution :
Moins d'un an
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Les avis


Au sortir de ce tome introductif, je ne sais pas trop quoi penser. D’abord parce que certaines choses m’ont clairement échappé, des passages sont restés obscurs, comme l’histoire elle-même. Je ne sais pas où elle va nous mener, si le polar, un certain fantastique ésotérique vont prendre le dessus. Pour le moment, Nury est aussi mystérieux que son personnage principal, auteur putatif d’un livre que quasiment personne n’a lu ou vu, mais qui attire les convoitises, jusqu’aux producteurs vénaux d’Hollywood (au passage Nury caricature – à peine – les techniques marketing et publicitaires, avec un passage savoureux lorsque deux producteurs envisagent leur campagne de lancement de l’adaptation du bouquin – qu’ils n’ont pourtant pas lu !). Du coup, entre ces mystères entretenus et les passages un peu obscurs (le rôle du clébard, les digressions religieuses, etc.), je reste pour le moment réservé. Mais la lecture n’en a pas pour autant été désagréable, en grande partie grâce au travail graphique de Brüno. En effet, je trouve que son dessin se bonifie avec le temps. Toujours aussi épuré, le rendu est ici très chouette. A voir donc ce que ça donnera par la suite.


Écris. - Premier tome d’un diptyque, son édition originale date de 2025. Il a été réalisé par Fabien Nury pour le scénario et par Brüno (Bruno Thielleux) pour les dessins, la mise en couleurs ayant été réalisée par Laurence Croix. Il comporte quatre-vingt-une pages de bande dessinée. Il se termine par dix-sept couvertures du magazine Outstanding, toutes dessinées par Brüno. Le dernier numéro de Outstanding Magazine se trouve sur les présentoirs. Il contient une histoire de Lester Kent : Perdu en Proboscidie. Il s’agit du numéro de décembre 1948, et il coûte vingt cents, il est précisé qu’il s’agit d’une publication John Rockwell. Dans le magasin, Wilbur H. Arbogast en tient un exemplaire en main, et il en examine la couverture. Un autre client entre et s’adresse à lui. Morris Millman a reconnu l’écrivain et il se présente à lui. Il lui explique qu’ils se sont déjà rencontrés à San Diego, à l’occasion de la convention de l’American Science-Fiction Guild en 38. Il l’avait questionné sur deux de ses nouvelles : La septième dimension, et La machine à écrire dans le ciel. Millman se rappelle que Arbogast était très demandé, lui et toute la bande d’Oustanding Magazine. L’écrivain lui a offert un café et il s’est montré très patient. Le jeune Morris rêvait de devenir écrivain, et l’auteur confirmé lui a conseillé de coller son derrière dans un fauteuil, et d’écrire tout ce qui lui venait en tête, sans se soucier du résultat. Arbogast s’en souvient, c’est ce qu’il disait à tous les fans ; il lui demande s’il a réussi à écrire. Son interlocuteur répond que non, il n’avait pas le talent d’Arbogast, il est devenu agent littéraire. L’auteur le félicite, repose la revue, et sort du magasin. Morris Millman sort à son tour, entre dans sa voiture, et roule à la hauteur de Arbogast lui indiquant qu’il va du côté de Pasadena, et lui demandant s’il peut le déposer quelque part. L’autre accepte. Tout en conduisant, Millman fait constater l’intensité de la pluie, un vrai déluge. Cela lui rappelle le début de la nouvelle La fanfare de l’enfer : Le ciel s’ouvrit, et Dieu déversa ses larmes sur la population de Milwaukee. La nuit s’éclaira soudain, et quelques secondes plus tard, un grondement se fit entendre. Mais ce n’était pas le tonnerre. Non, c’était un roulement de tambour, et il annonçait une menace encore plus terrible que la colère divine… Une fanfare approchait de la ville. Arbogast le félicite pour sa bonne mémoire. La conversation s’éteint, et l’agent littéraire la relance en demandant s’il peut poser une question. Arbogast a deviné de laquelle il s’agit et il explique qu’il n’a pas d’agent, que personne ne le représente, qu’il n’a pas été publié depuis janvier 1942. Il continue : il n’y a rien à lire. Devant l’étonnement de son chauffeur, il répond qu’il est sûr que Millman fera une belle carrière, que ce n’est pas la peine que l’agent perde son temps avec lui l’écrivain, et qu’il peut le déposer au prochain arrêt de bus. Millman lui demande encore de quoi il vit. L’auteur répond qu’il touche une pension, invalide de guerre. Il ajoute qu’il est mort, et il demande si son interlocuteur souhaite qu’il lui raconte sa mort. Ces deux créateurs ont déjà collaboré ensemble précédemment, en particulier pour les trois tomes de la série Tyler Cross (2013-2018) : le lecteur a toute confiance de découvrir un récit sophistiqué tant sur le plan de l’intrigue, que sur celui de la narration graphique. La couverture s’avère énigmatique à souhait avec cette pluie tombante, cette silhouette de chien qui domine un individu isolé. Le texte de la quatrième de couverture évoque les écrits d’Arbogast sur la nature de la vie et de l’esprit humain, et la possibilité qu’il ait réalisé une découverte révolutionnaire dans ce domaine. La page d’ouverture correspond à la couverture d’un magazine bon marché (qualifié de Pulps), spécialisé dans les récits d’horreur et de science-fiction. Le lecteur se souvient de ces publications imprimées sur du mauvais papier, très populaires aux États-Unis, ayant permis à de nombreux écrivains d’être publiés. Un auteur maudit, ostracisé, ayant écrit des récits de fiction révélant un autre monde : le lecteur peut penser à un mélange de Howard Phillips Lovecraft (1890-1937), Robert Ervin Howard (1906-1936), Philip Kindred Dick (1928-1982). Les fac-similés de couverture mentionnent d’autres auteurs : Lester Kent, Yvan Artemiev, Ray B. Funine. Cela peut évoquer Isaac Asimov (1920-1992) et Ray Bradbury (1920-2012) qui furent eux aussi publiés dans les Pulps Magazines. D’entrée de jeu, le lecteur se trouve hypnotisé par la narration visuelle. L’artiste réalise des dessins instantanément assimilés par le lecteur : d’une clarté exemplaire, apparaissant d’une grande simplicité et d’une évidence totale. Qu’il dispose de références de couvertures de magazines Pulp ou non, le lecteur se rend compte que les reproductions réalisées par Brüno s’imposent dans son esprit comme authentiques, et même plus que le souvenir qu’il a pu en garder. Les dessins présentent un mélange de ligne claire et d’expressionnisme : des formes savamment épurées conservant l’essentiel, et en même temps des ombres envahissantes, des effets de cadrage, des jeux sur des couleurs vives, des cases parfois construites vers l’abstraction. Par exemple : un gros plan sur les verres des lunettes d’Arbogast en page cinquante-six (motif qui revient régulièrement), ou encore des croix rouges sur fond noir. Le jeu sur les verres des lunettes présente souvent des surfaces opaques : il n’est pas possible de voir les yeux du personnage (alors que ceux-ci sont censés être le miroir de l’âme), à tel point que le lecteur finit par se demander si reflets jaunes et oranges ne contiendraient pas des lettres, un message secret. L’artiste joue également avec les gros plans sur les visages au centre d’une case de la largeur de la page, ou un peu décalés à gauche ou à droite. Insensiblement, cela produit un effet de rapprochement quand il dessine la gueule de Wilbur (le chien) avec le même cadrage, induisant qu’il s’agit également d’un être doué de conscience. De temps à autre, le lecteur se retrouve tenté de se dire que les dessins ne font que montrer ce qui va de soi, ce qui est déjà majoritairement contenu dans les dialogues. Toutefois, il ressent rapidement que la narration visuelle accomplit beaucoup plus que ça. De manière patente, elle installe une ambiance de polar : scènes souvent nocturnes, mystérieux individu dans son imperméable avec le visage partiellement masqué par son chapeau et ses lunettes, et sa barbe de trois jours, personnages aux expressions souvent neutres et indéchiffrables. Les dessins montrent également les environnements qui parlent des conditions de vie des personnages : le trailer park de Pasadena où Arbogast habite dans une caravane, le luxueux et fastueux restaurant Beverly Hills où les producteurs de cinéma Hazebrook & Nett (Nick & Harry), de Wonder Pictures, reçoivent l’écrivain et son agent pour leur en mettre plein la vue, le très ordinaire pavillon de banlieue des Millman (Morris & Iris) et le bureau de l’agent avec des étagères débordant de livres, le superbe salon de coiffure pour dames et sa décoration tout en rose, sans oublier le chien sur la pelouse. La narration visuelle fait également ressortir avec une acuité peu commune les moments étranges ou mystérieux : la minuscule silhouette en ombre chinoise chutant dans le vide sur un fond jaune pétant, puis comme un écho la silhouette du Christ en ombre chinoise sur le fond du même jaune, le vert fluo de plusieurs cases ce qui rapproche le chien des Millman, le jouet robot et l’extraterrestre (sûrement un martien), le motif des coquelicots, etc. Même avec une intrigue naturaliste, l’histoire dégagerait une intense sensation de mystères et de surnaturel. Le lecteur s’attache immédiatement à cet agent littéraire sous le charme des écrits de Wilbur H. Arbogast : comme lui dit son épouse Iris, il aime les créateurs, il aime leur folie, leurs rêves de grandeur, plus leurs histoires sont absurdes plus elles le font vibrer. Le lecteur se surprend à éprouver de l’empathie pour cet écrivain qui n’est plus publié, sa nostalgie pour la grande époque des pulps, le questionnement sur la réalité de son expérience de mort imminente, ses découvertes révolutionnaires sur la nature de la vie et de l’esprit, etc. Il se prend au jeu d’une révélation, d’une explication du sens de la vie. Au cours du récit, Arbogast évoque la révélation de Paul de Tarse, et il en propose une interprétation bien différente que celle de la conversion présentée par la religion chrétienne. Le lecteur pense alors aux romans de Philip K. Dick, ceux traitant de religion empreint de gnosticisme, débusquant le faux, qui régit ce monde. Une expérience initiatique amène Arbogast à une révélation totale, et il se sent investi d’une mission de prosélytisme, de dispenser un enseignement ésotérique. Une autre composante attire l’attention du lecteur : une approche très matérialiste. Il y a les producteurs Hazebrook & Nett qui ne voient en l‘œuvre d’Arbogast qu’une opportunité mercantile, prêts à déployer un dispositif sensationnaliste de publicité, sans aucun intérêt pour le contenu. Il y a Morris Millman qui souhaite à la fois lire de nouvelles productions de cet auteur majeur, et les faire fructifier sur le plan financier. Enfin, Arbogast lui-même fait une remarque en passant, sur l’exemption fiscale qui accompagne toute religion et son Église. Le lecteur ajoute alors un autre auteur de science-fiction à la liste des références : L. Ron Hubbard (1911-1986), fondateur de la dianétique (dont la psychogénie d’Arbogast pourrait être le pendant) et de l’église de scientologie. Dans le même temps, avec une utilisation très sensible du poème Au champ d’honneur (1915, In Flanders Fields), de John Alexander McCrae (1872-1918), le scénariste intègre également le développement de la psychanalyse. La couverture intrigante, le plaisir esthétique immédiat des dessins, la dimension ludique du mystère, la haute teneur en artefacts culturels américains, les dialogues d’une grande précision, l’efficacité de la structure narrative : la puissance du pouvoir d’attraction de cette bande dessinée est irrésistible. Le plaisir de lecture est immédiat, les références aux Pulps titillent le lecteur novice comme le connaisseur. Addictif.

" Electric Miles ", c'est de la balle ! Un découpage canon qui offre presque une expérience sensorielle avec des séquences de haute volée (les auteurs donnent l'impression de faire du Christopher Nolan en BD !), Brüno au sommet de son art, quelques touches d'humour bien senties, une introduction prenante, bourrée de références, un Wilbur insaisissable (gourou charismatique ou être fantasque au sérieux délicieusement ridicule). Nury semble aussi bien s'amuser dans cet album en s'affichant en démiurge tout puissant qui expose de façon volontairement caricaturale les liens pernicieux entre l'artiste qui a soif de création et les esprits mercantiles grossiers dont il dépend. Et les femmes de Brüno, ah ses femmes ! Bref, ça donne envie de lire la suite !


Depuis l’excellente série Tyler Cross, la sortie d’un album du duo Nury-Brüno fait figure d’événement, et « Electric Miles » ne déroge pas à la règle. De plus, il s’agit ici du premier tome d’une série qui réussit à nous mettre en appétit, je dirais même plus, « en état de fringale »… Si le titre et la couverture de cette nouvelle série tant attendue de Fabien Nury, prolifique et brillant scénariste de la planète du neuvième art, et de Brüno, tout aussi brillant dans son dessin, sont assez mystérieux, son contenu est à l’avenant. Dès les premières pages, on découvre un écrivain ténébreux, Wilbur H. Arbogast, qui raconte à l’agent littéraire qui l’a contacté, comment son expérience de mort imminente l’a conduit à écrire un livre qui comportait trop de danger pour être publié. Les rares lecteurs du monde de l’édition qui s’y sont risqués seraient devenus fous ou auraient mis fin à leurs jours. L’accroche fonctionne à merveille et le lecteur est immédiatement embarqué dans ce récit oscillant entre le polar noir et un onirisme mystique saupoudré de science-fiction. L’action se situe dans les Etats-Unis de la fin des années 40, mais si on doit parler de polar, le suspense est plutôt d’ordre psychologique puisqu’ici, il n’est aucunement question de coups de feu ou de course-poursuite. Et c’est ce fameux livre secret qui sera au centre de l’histoire, donnant lieu à une plongée dans le monde de l’édition et du cinéma. Flairant le bon coup, les pontes d’Hollywood aimeraient, sans même l’avoir lu, le voir porté sur les écrans à coup de marketing vulgaire et survitaminé, provoquant dans un premier temps la colère et la fuite de l’écrivain. Mais les assauts de l’agent littéraire ont réveillé chez lui une sorte de folie ténébreuse : Arbogast a décidé de créer sa propre religion ! Dans ce tome introductif qui donne lieu à quelques digressions où Aborgast évoque notamment un passage de la Bible (comment Paul de Tarse est devenu disciple après avoir persécuté les premiers Chrétiens) ou pratique une séance de « psychogénie », curieux mélange d’hypnose et de psychanalyse, sur l’épouse de Morris Millman, on peut supposer que ce qui apparaît un peu comme un puzzle trouvera ses pièces manquantes dans le(s) tome(s) suivant(s), suggérant, peut-être, un lien avec les « Portes de la perception » décrites par Aldous Huxley, mais de manière plus ironique, on peut y voir surtout une allusion au fondateur de la scientologie Ron Hubbard et sa dianétique. Le personnage principal correspond au profil classique de l’écrivain ténébreux et taiseux, un peu loser et revenu de tout. Mais dans le cas présent, Wilbur H. Argobast est au moins revenu d’entre les morts et semble avoir vu des choses trop difficiles (trop dures ou trop dangereuses, vraiment ?) à appréhender pour l’esprit humain… On peut apprécier également l’autre protagoniste, l’agent littéraire Morris Millman, qui révèle au fil des pages ses doutes et ses failles, alors qu’on pensait avoir affaire à un homme vénal et obséquieux. Fidèle à sa ligne claire cinématographique qu’on apprécie tant, Brüno parvient à nous immerger dans le récit avec une ambiance noire et poisseuse en mode « hardboiled », avec éclairs et orages en toile de fond, même si ce n’est pas vraiment le même registre. Globalement, on reste dans une forme de glamour où le danger rôde, avec des échappées psychédéliques ou surréalistes qui font parfois songer à Charles Burns. Mais ça reste du Brüno, et on ne saurait lui en vouloir, parce que si on peut apprécier chez certains auteurs une approche stylistique évolutive, on n’aimerait pas que ça change chez lui. Brüno, lui, a trouvé ses marques et c’est puissant. C’est certain, son trait immédiatement reconnaissable a totalement pénétré son ADN. Si donc la narration apparaît un rien disparate — mais comme on le sait, Nury ne construit pas ses récits de façon aléatoire, et chacune des séquences a sa raison d’être —, cela ne remet pas du tout en cause l’intérêt que l’on peut avoir pour dans ce premier tome et la forte envie que l’on aura à découvrir la suite. « Electric Miles » se place ainsi directement dans le haut du panier des BD de l’année.


Comme c'est étrange... Moi qui suis d'habitude très hermétique à ce genre de récit abscons qui s'affranchit de la réalité pour nous emmener dans un trip psychédélique, j'ai adoré ! Alors que je regrettais récemment que mon auteur (vivant) préféré, Alain Ayroles, s'enferme un peu trop dans le même type d'histoire (Les Indes fourbes, L'Ombre des Lumières, La Terre verte, même si chacune de ces BD est réussie), on peut clairement dire que ce n'est pas ce qui menace Fabien Nury, mon deuxième auteur vivant préféré. Ici, l'auteur s'engage dans un terrain qu'à ma connaissance, il n'a encore jamais exploré. Un terrain difficile à décrire, quelque chose qui relèverait du polar métaphysique sous substances. A priori, je déteste plutôt ça, mais là, Nury parvient à nous prendre par la main et à nous emmener dans son délire avec un art impressionnant. Très aidé par le dessin de Brüno, dont je ne suis là aussi pas toujours client mais parfaitement exploité ici, il crée une atmosphère incroyable, qui convoque les plus grandes heures de Lovecraft et de ses disciples (difficile de ne pas penser à L'Antre de la folie de Carpenter). Il se lance dans un jeu de pistes qui efface peu à peu les frontières de la réalité, et même si ce premier tome n'est "que" une longue introduction, on est pris du début à la fin. Il y a là un fascinant puzzle que j'ai certes hâte de résoudre, mais que je n'ai pas envie de résoudre trop vite. Et en cela, je suis très heureux d'être soumis au rythme des parutions. Comme ça, on profite du délire poético-ésotérique de Nury sans se précipiter sur la fin. Il faut dire qu'il y a des moments où la mise en scène touche des sommets, comme cette séquence où des femmes discutent d'une nouvelle forme de discipline censée libérer leur cerveau, la tête emprisonnée dans le casque du coiffeur qui prend alors un air menaçant. C'est drôle, simple et génial. Comme tout ce premier tome, en fait. Vivement que la suite paraisse !


Une nouvelle série signée du duo Nury / Bruno, forcement ça m'intéresse. J'adore le style du dessinateur et comme d'habitude, je ne suis pas déçu. Il faut dire que l'époque choisie pour ce récit se prête à merveille à son style. Les gueules de ses personnages collent parfaitement aux années 60-70, époque dans laquelle il a dessiné bon nombre d'albums. Eh bien, ça fonctionne tout aussi bien avec les années 40. Niveau graphique c'est donc le pied. D'autant qu'au delà des personnages on a droit à de bons cadrages bien cinématographiques, des couleurs aux petits oignons et en bonus quelques fausses couvertures de magazines dont il a le secret. Du coté du scénario, j'ai certes passé un bon moment de lecture (j'ai englouti l'album d'une traite), mais j'ai quelques réserves. J'ai bien aimé la façon dont ça démarre, j'ai bien aimé ce personnage mystérieux. Mais je ne suis pas totalement convaincu par le développement de l'intrigue. Le coté un peu fantastique / mystique de certaines séquences ne m'a pas trop emballé. Je serai quand même un client curieux de la suite - une BD de Bruno c'est toujours un plaisir - même si je n'envisage pas tellement un virage dans le style de l'histoire qui me fasse revoir ma note à la hausse.


Depuis quelques années, J'ai pour habitude d'acheter la version noir et blanc, et la version couleur à chaque sortie d'un album signé Nury et Brüno. Avec cet album, je n'ai pas dérogé à cette habitude, aussi j'ai été surpris de découvrir une version n&b d'une grande qualité éditoriale : un grand format avec dos toilé. Le dessin de Brüno y prend toute son importance car, il faut le dire, son style inimitable et simple à la fois fait beaucoup dans le succès de ses albums signés avec Fabien Nury. Pourtant à la lecture de cet album, dans les deux versions, je dois dire que ma préférence va, pour une fois, vers la version courante, les couleurs de Laurence Croix, apportant au récit une touche des années 40 qui n'est pas pour me déplaire. Le duo d'auteurs n'ayant pas signé un one shot ici, cet album se présente comme une longue introduction qui oscille entre récit de Charles Burns et le réel avec l'histoire romancée de Ronald Hubbard, créateur de la scientologie. Car, je crois que cette histoire, dont nous ne connaissons pas encore le nombre de volumes qui la composera, s'achemine sans nul doute vers cette "découverte révolutionnaire" dont il est fait mention sur le quatrième de couverture. Mais cet album ne se limite pas à cela, l'auteur distille sa vision du monde éditorial de l'Amérique des années 40, dominé par le polar et la science fiction, comme le prouvent les couvertures des revues présentes dans le dossier en fin d'album. Même si le lecteur peut sembler rester sur sa faim, j'ai beaucoup aimé ce premier album, et j'ai hâte de découvrir la suite.

Avec cette BD, Nury et Brüno s'essaieraient presque à faire du Burns, ce qui n'est pas pour me déplaire. Mais ce ne sont que des promesses pour l'instant et il faudra attendre la suite pour véritablement juger de l'ensemble. En tout cas, les bases sont là, le livre est très prenant, les dessins de Brüno sont toujours aussi superbes et le scénario, très solide, est ultra intriguant, à tiroirs et propose donc différentes grilles de lecture. Malgré son imposante pagination, le livre se révèle assez frustrant car se résume à une profonde mise en place de l'intrigue, une mise en bouche donc qui attise notre appétit! Le parallèle avec la vie et l'oeuvre de L. Ron Hubbard est évident. Ou cela va-t-il emmener nos deux auteurs? Je brule d'impatience! Vite la suite!!!
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