Bruno Brazil

Note: 3/5
(3/5 pour 15 avis)

Tiré à quatre épingles dans ses smokings cintrés ou ses cols roulés noirs, l'agent américain Bruno Brazil s'entoure, dès le deuxième album, d'une équipe de marginaux et d'anciens repris de justice, qui forment le Commando Caïman. A voir aussi: Bruno Brazil (Les Nouvelles aventures de)


Greg Histoires d'espions Journal Tintin

Au moment où Greg et Vance lancèrent Bruno Brazil, ils avaient évidemment en tête l'adaptation cinématographique de James Bond. C'est donc dans cet esprit que s'inscrirent les premiers épisodes, alliant élégance et action, manichéisme et anticipation. Tiré à quatre épingles dans ses smokings cintrés ou ses cols roulés noirs, l'agent américain Bruno Brazil s'entoure, dès le deuxième album, d'une équipe de marginaux et d'anciens repris de justice, qui forment le Commando Caïman. Ses compagnons d'armes sont autant de «caractères» : la brune Whip Rafale use de son charme autant que de son fouet, Texas Bronco est un cow-boy moderne qui sait jouer du six-coups, le Mexicain Gaucho Moralès cache ses bons sentiments derrière ses sautes d'humeur, l'ancien jockey Big Boy Lafayette neutralise ses ennemis grâce à son yoyo d'acier et Billy Brazil, le petit frère de Bruno, est spécialisé dans le maniement des explosifs Brazil et son commando de choc obéissent toujours aux ordres des autorités militaires dont ils dépendent avec enthousiasme et patriotisme. Du moins, dans un premier temps. Avec La Nuit des chacals, le ton de la série change singulièrement et la référence aux sympathiques films d'espionnage stéréotypés des années soixante s'efface au profit d'une ambiance plus noire, voire tragique. En consacrant un diptyque à la Mafia, Greg donne plus d'épaisseur à des personnages qui restaient jusqu'alors sans aucune autre motivation que celle de remplir leurs missions pour le compte des Services Spéciaux. Peu de temps après, le scénariste rompt également avec une règle de la BD classique, héritée du roman-feuilleton, qui veut que les personnages sympathiques ne doivent pas mourir au cours d'une aventure. La mort de Big Boy Lafayette dans Des caïmans dans la rizière fut un véritable choc pour les lecteurs de l'époque, tant la série s'écartait de la tradition. Brazil, en étant confronté à la mort de ses proches, perd pour la première fois un peu de ses certitudes de samouraï moderne. Du héros invincible et triomphant des premiers épisodes, il ne reste bientôt plus qu'un homme désabusé, affaibli par les échecs accumulés. À la fin de Quitte ou double pour Alak 6, Bruno Brazil mesure combien l'idéal pour lequel il avait combattu jusqu'alors était vain et inutile. L'exaltation héroïque des débuts n'est plus qu'un souvenir et Brazil, perdant son regard dans de vieilles photographies, se morfond dans un «aquoibonisme» sans illusion et sans retour. Il ne s'est d'ailleurs jamais relevé de cette dépression, puisque la série s'est malheureusement interrompue au début des années quatre-vingt.

Scénario
Dessin
Couleurs
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution Mai 1969
Statut histoire Une histoire par tome 11 tomes parus

Couverture de la série Bruno Brazil © Le Lombard 1969
Les notes
Note: 3/5
(3/5 pour 15 avis)
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13/06/2002 | ArzaK
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Avec ce héros prodigieux crée dans le journal Tintin en 1967, Vance et Greg (qui signe Louis Albert) surfent sur la vague de bondomania qui soufflait alors à l'écran, à la TV et en BD où nombre de personnages vont s'engouffrer. Au début , les aventures de Bruno Brazil sont traditionnelles, de plus il évolue seul, dans une succession de récits complets ainsi que dans son premier récit long : Le Requin qui mourut deux fois, en 1968, qui s'ouvre par un crash tonitruant digne des James Bond. Durant cette période, Brazil est un agent secret très bondien (coupe clean, costume bien coupé, toujours élégant) qui évolue dans un contexte policier-espionnage. Dès le second épisode, Commando Caïman, c'est le grand démarrage de la série, le ton va changer, et la série va prendre un aspect Mission impossible, grâce aux agents qu'il recrute pour composer son groupe d'élite, chacun a sa spécialité : Brazil, véritable playboy qui prépare tout au millimètre ; Gaucho Moralès, un Mexicain exubérant qui est le plus redoutable des Caïmans ; Texas Bronco, au look cowboy, casse-cou superbe et chimiste doué pour la fabrication de gadgets ; Billy Brazil, jeune frère de Bruno, le plus influençable mais as du sabotage ; la sublime Whip Rafale, une véritable Lara Croft avant l'heure qui manie le fouet avec dextérité ; et enfin Big Boy Lafayette, ancien jockey adroit par sa petite taille, spécialisé dans la pose des micros et manieur d'un yoyo en acier redoutable. Il sera le premier à être tué au cours d'une mission. Car c'est là le détail qui tranche résolument avec toutes les séries réalistes de la même époque, ce qui est aussi la patte de Greg : briser le cliché des héros immaculés à qui il n'arrive jamais rien. On verra qu'à la même époque, Greg malmenait aussi durement Bernard Prince et ses amis. La série se transforme au fil des épisodes, Greg et Vance se complètent parfaitement, faisant de cette bande l'une des grandes séries du journal Tintin ; Vance atteint une qualité graphique, notamment sur l'épisode Sarabande à Sacramento, à l'aide d'un crayon aiguisé surtout sur les visages très carrés, en éclatant ses cases et en apportant un soin dans les décors (qui seront confiés à son beau-frère Coria), de même qu'il dessine toujours de très belles femmes. A la même époque, il a repris Bob Morane, et on se demande comment il pouvait alimenter avec autant de talent 2 séries importantes. De son côté, Greg laisse s'épanouir la personnalité de chacun des Caïmans, en insufflant toujours son ton ironique et son humour cynique, perceptible dans les répliques de Brazil, c'est sa marque de fabrique qu'on retrouve dans Bernard Prince et Comanche. Mais sans doute lassé ou occupé par ses autres activités, il décime durement l'équipe, Brazil vieillit, il est moralement brisé et se marie avec Gina Loudéac, une jolie Française, mais les missions sont terminées, l'embourgeoisement seyant mal avec les services secrets. La série s'arrête en 1983 au grand désespoir des fans dont j'étais ; le choc des morts dans une série était totalement inhabituel à l'époque, contrairement à aujourd'hui, et je connais des gars qui ne s'en sont pas remis ; déja le premier, celui de Big Boy m'avait déconcerté. Mais tout ça reste une belle aventure, une très bonne série dont on peut acheter les albums car ils ne sont pas nombreux.

22/06/2013 (modifier)