Missak, Mélinée & le groupe Manouchian - Les Fusillés de l'Affiche Rouge

Note: 3/5
(3/5 pour 2 avis)

Torturé puis fusillé le 21 février 1944 avec 22 autres membres de son groupe Francs-Tireurs et Partisans - Main-d'oeuvre immigrée (FTP-MOI), le poète, ouvrier et militant communiste Missak Manouchian va devenir un symbole de la Résistance intérieure française. Un martyr que le peuple opprimé n'oubliera jamais.


1939 - 1945 : La Seconde Guerre Mondiale Biographies Ecole Supérieure des Arts Saint-Luc, Bruxelles Génocide arménien Jean-David Morvan La Résistance Les panthéonisé-e-s

Cette exécution, très médiatisée par les Allemands à travers la fameuse Affiche rouge, servira de propagande nazie pour déstabiliser et décrédibiliser la Résistance face au peuple français. Un destin hors du commun qui prend une nouvelle ampleur en février 2024 avec l'entrée de Missak et Mélinée, son épouse, au Panthéon. Le destin incroyable et tragique de Missak Manouchian et son groupe de résistants, exécutés par l'occupant allemand en février 1944.

Scénario
Dessin
Couleurs
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 16 Février 2024
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Missak, Mélinée & le groupe Manouchian - Les Fusillés de l'Affiche Rouge © Dupuis 2024
Les notes
Note: 3/5
(3/5 pour 2 avis)
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12/02/2024 | Ro
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Par Blue boy
Note: 3/5
L'avatar du posteur Blue boy

Difficile de masquer un certain embarras à la lecture de cet ouvrage. La couverture, plutôt réussie, était pourtant prometteuse. Simplement, on reste un peu sur sa faim, alors qu’on attendait davantage d’une bande dessinée destinée à célébrer ces héros de la résistance, donnant cette impression lancinante et désagréable que l’on a affaire à un travail de commande. Tout vient en grande partie d’une narration un peu décousue, quand bien même elle remplit convenablement le cahier des charges en retraçant le parcours de Missak Manouchian et en relatant les faits d’armes de l’homme et de ses 22 camarades, si bien évoqués dans la chanson de Louis Aragon et Léo Ferré, « L’Affiche rouge ». Certes, le défi imposé par un tel hommage était immense : non seulement il fallait, dans un format relativement court (143 pages), retracer l’épopée de cette « armée de l’ombre » mais aussi accorder un espace mémoriel équitable à chacun des 23, si bien sûr on excepte Missak et son épouse panthéonisés. Pour ce faire, JD Morvan a choisi de consacrer le premier tiers à la jeunesse de Manouchian jusqu’à son arrivée en France, avec la rencontre de sa chère Mélinée. Jusqu’ici tout va à peu près bien, mais c’est avec l’apparition des autres personnages liés à la Résistance que la confusion s’installe. Dans une chronologie morcelée (et pour tout dire assez fastidieuse), le livre alterne plusieurs récits courts des actions de la Résistance avec les témoignages de Mélinée, des « images d’Epinal » des nombreux attentats commis contre l’envahisseur, ainsi que des portraits pleine page légendés des protagonistes, qui viendront ponctuer les deux cent pages du livre. Face à cet enchevêtrement narratif, c’est un sentiment de confusion qui domine, et je n’ai moi-même pu éviter de céder à l’ennui durant cette lecture, égaré par la multitude de personnages. Cela est fort regrettable et c’est d’autant plus dommage de la part du co-auteur de l’acclamé « Madeleine, résistante ». Ainsi, on ne peut s’empêcher de supposer que l’ouvrage a été conçu dans l’urgence, supposition corroborée par ce rectificatif à l’épisode où l’on voit Missak débarquer à Marseille avec son frère, précisant qu’ « une découverte, trop récente pour [l’]album, montre que Garabed serait arrivé en France un an avant Missak ». Même si bien sûr, on saura gré aux auteurs d’avoir ajouté cette mention… Quant au dessin, il a été confié à Thomas Tcherkezian, un jeune auteur au patronyme explicite et légitimant sa participation au projet, dont c’est ici la première bande dessinée. Une carte de visite de poids pour ce nouveau venu, qui s’acquitte plutôt bien de sa mission en révélant une certaine maîtrise du trait (bien qu’un brin vert), même si on reste dans l’académisme relatif à ce genre d’ouvrage, « lissitude » comprise. D’ailleurs, on peut regretter que celui-ci, soucieux de tout donner pour ce premier projet, ait cru bon de gommer à ce point les aspérités des personnages, en particulier dans les portraits pleine page en question. Loin d’apparaître comme des « métèques » « noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants », la plupart ressemblent à des gravures de mode, y compris Missak dont l’aspect buriné sur sa plus célèbre photo a totalement disparu. Malgré ces quelques critiques, on admettra toutefois volontiers que l’ouvrage conserve une valeur historique qui ne déshonorera pas ces « grands hommes » dont la République peut s’enorgueillir, a fortiori dans le contexte actuel de montée de l’extrême-droite. Il est toujours bon de le rappeler, comme Joséphine Baker admise au Panthéon quelques mois avant, les Manouchian et ses compagnons d’armes étaient tous d’origine étrangère et n’ont jamais obtenu la nationalité française, mais ils demeurent les aïeux, symboliques ou pas, de tous ceux qui constituent aujourd’hui cette fabuleuse mosaïque faisant peuple qu’est la France.

08/05/2024 (modifier)
Par Ro
Note: 3/5
L'avatar du posteur Ro

Cet album rend hommage aux résistants étrangers fusillés en France et immortalisés par l'Affiche Rouge que la propagande nazie a placardée pour tenter de dénigrer leur action et les présenter comme des terroristes. Il s'agissait du groupe Manouchian comme il fut ensuite appelé, un ensemble de combattants dont une majorité d'étrangers réfugiés en France et qui avaient rejoint les rangs de la Résistance française et coordonné par Missak Manouchian, réfugié Arménien marqué par le massacre de sa famille lors du Génocide opéré par l'armée Turque quand il n'était encore qu'un enfant. L'album est structuré autour de cette fameuse Affiche Rouge qui en forme la première page. On y voit les photos de ces 10 résistants et le récit va nous amener à les découvrir les uns après les autres en se concentrant en priorité sur le parcours de Manouchian. Cela commence par sa prime jeunesse et le Génocide Arménien. On y suit le jeune Missak et son frère sauvés de justesse de la mort puis recueillis par une famille Turque accueillante avant d'être repris par leur communauté arménienne et de vivre en foyer. Quand ils en ont eu l'occasion, devenus jeunes adultes, ils ont émigré vers la France qu'ils ont acceptée comme leur nouveau foyer, Missak y trouvant même une compagne tout aussi engagée que lui dans le combat pour la justice et la dignité humaine. Puis vint l'invasion nazie et Missak voit comme une évidence de mener le combat contre eux et d'entrer dans la Résistance, rejoignant de nombreux autres étrangers, juifs d'Europe ou communistes, pour des actions armées et autres sabotages. Le graphisme de Thomas Tcherkezian présente une belle esthétique dans les tons rouge et gris faisant écho à la fameuse Affiche Rouge. Son trait est clair, les planches très propres. L'épure s'y révèle un tout petit froide mais le rendu est beau et bien mis en scène. Et régulièrement, les planches laissent la place à une pleine page présentant le portrait en noir et blanc d'un de ces résistants avec une courte biographie écrite en dessous. On découvre ainsi les 10 fusillés de l'affiche mais aussi d'autres combattants et combattantes qui ont résisté à leurs côtés. Sur une bonne moitié de l'album, l'histoire est très proche de Missak Manouchian et on le suit comme un vrai personnage de BD. C'est une lecture plaisante et on s'intéresse vite à cet homme au parcours dur et complexe. Mais une fois la Résistance engagée pour de bon, la narration se fait bien plus distante, plus factuelle. Outre les pages de portraits de chacun des protagonistes au fur et à mesure qu'ils apparaissent dans le récit, on y trouve également une succession de présentations des attaques, assassinats ciblés et autres sabotages réalisés par ces résistants. Certes on constate qu'ils en ont réalisé un nombre très important et qu'ils ont forcément eu un impact sur la défaite finale des nazis, mais il y en a tellement que ça devient assez rébarbatif. A raison d'une case d'une demi-page par action, cela ressemble trop à une énumération sans âme de faits, comme ces livres d'histoires peu passionnants. Si bien qu'on a un peu décroché du récit quand finalement leur action est stoppée par les nazis suite à une longue filature. Alors que l'album offrait une très belle esthétique et une intéressante structure autour de cette fameuse Affiche Rouge et de la biographie aventureuse de Missak Manouchian, sa seconde partie prend trop la forme d'une classique BD historique moins prenante et humaine que sa première moitié. Le lecteur en sortira donc informé mais moins touché qu'il l'aurait pu.

12/02/2024 (modifier)