Moi, menteur

Note: 4/5
(4/5 pour 1 avis)

Adrian Cuadrado est conseiller en communication du Parti Démocratique Populaire, force dominante de l'échiquier politique espagnol vouée à la corruption, aux magouilles financières, aux coups tordus, à la manipulation des consciences et des suffrages.


Auteurs espagnols Espagne Politique Séries avec un unique avis

Roi du storytelling, Adrian est l'un de ces spin doctors chargés de produire la lumière qui illuminera le meilleur profil d'un candidat, en fera un produit désirable pour les électeurs. Menteur par vocation, par profession et par nécessité conjugale, il est l'heureux détenteur d'une double vie, entre son épouse et ses deux enfants à Vitoria, et sa maîtresse torride à Madrid. Pour l'heure, sa mission est de faire entrer dans le grand bain national le jeune élu local Javier Morodo, dont l'homosexualité assumée offrira un gaywashing au Parti, trop longtemps accusé d'homophobie. Tâche élémentaire pour Adrian, que vient compliquer la découverte inopinée de trois têtes coupées de conseillers municipaux artistement conservées dans des bonbonnes en cristal. Qui est derrière ces meurtres baroques ? Quel lien les rattache à une opération autour des palais en ruine qui constellent la cité basque ? Soudain, la vie d'Adrian l'imposteur se détraque, menaçant de faire mentir sa devise, selon laquelle «le menteur est un dieu dont le verbe crée des mondes».Avec ce tome ultime, la très sombre «Trilogie du Moi» acquiert sa dimension finale. Celle d'une ode lovecraftienne à la ville où l'auteur vit depuis des décennies, où tous les fils se nouent, toutes les trajectoires se recoupent, tous les conflits se terminent (mal le plus souvent) pour tracer le portrait d'une Vitoria noire, gothique, mythique. Celle aussi, majestueuse, d'une cathédrale de papier dédiée à nos modernités perturbées.

Scénario
Dessin
Couleurs
Traduction
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution 24 Mars 2021
Statut histoire One shot (Troisième tome de la "Trilogie du Moi" après "Moi, assassin" et "Moi, fou") 1 tome paru

Couverture de la série Moi, menteur © Denoël 2021
Les notes
Note: 4/5
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01/05/2023 | Cacal69
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Par Cacal69
Note: 4/5
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"Gouverner, c'est faire croire". Machiavel - Le Prince. Cet album est le premier que je lis de la "trilogie du Moi", après Moi, assassin et Moi, fou. Je commence donc par le dernier opus et cela n'est pas gênant pour la compréhension du récit même si il fait référence au tueur en série du premier album. Une lecture qui se mérite, elle est exigeante. Antonio Altarriba se base sur les faits qui ont amené à la mention de censure en 2018, ce qui provoqua la démission du gouvernement de Mariano Rajoy. A partir de là, il va brosser un portrait peu reluisant du monde politique espagnol, un monde de magouilles où le mensonge est roi. Une narration assez verbeuse mais elle n'est pas rébarbative, au contraire je la trouve prenante. Un récit maîtrisé et sans concession sur les rouages du pouvoir. Madrid, Salamanque et Vitoria-Gasteiz seront les témoins de ces conspirations, ainsi que Bruxelles et le rôle de l'UE. Une lecture effarante. Un Adrian Cuadrado qui transpire le mensonge, tant dans sa vie professionnelle que personnelle, il est d'un cynisme à toute épreuve. La communication est une arme de persuasion. "Un mensonge devient une réalité dès lors que tout le monde y croit..." Un index en fin d'album avec tous les noms des protagonistes (ils sont légèrement modifiés des véritables personnages) et leurs fonctions, un vrai plus pour s'y retrouver. Une lecture instructive où tout n'est qu'apparence et qui ne donne pas envie de croire en la politique. La dernière planche, en forme de conclusion de la trilogie, retranscrit les trois thèmes : assassin, fou et menteur. Trois thèmes intimement liés. J'avais déjà pu apprécier le talent de Keko avec Contrition et je suis toujours sous le charme de ce noir et blanc ou le noir domine, juste rehaussé de vert, pas celui de l'espoir, mais plutôt du ver dans le fruit. Un trait épais et légèrement charbonneux, il est très expressif. La couverture est tout un symbole avec ces nombreux masques, les différents visages du menteur. Vous vous dites qu'il est impossible de mettre une tête dans un bocal, et bien vous vous trompez. En conclusion, une excellente trilogie du "Moi, ...." que je recommande de lire dans l'ordre de parution pour mieux l'apprécier et découvrir un portrait de l'Espagne au vitriol !

01/05/2023 (MAJ le 21/02/2024) (modifier)