Jeux sans frontière

Note: 4/5
(4/5 pour 2 avis)

Au cœur d'une Afrique gangrénée par les tensions ethniques, les guerres civiles, les ingérences extérieures, les trafics, le sida, le réchauffement climatique, la hausse du pétrole et la chute du cours les matières premières, quelques héros presque solitaires essayent encore de changer les choses ... Mais ce coup-ci, pas de bol, ils se sont faits kidnapper, ces cons-là !


Afrique Noire Paquet

Une BD pas très polie sur le monde complexe de l'aide humanitaire en Afrique. Ptiluc a sillonné l'Afrique à moto et en a ramené un regard unique et corrosif.

Scénario
Dessin
Couleurs
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 18 Janvier 2014
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Jeux sans frontière © Paquet 2014
Les notes
Note: 4/5
(4/5 pour 2 avis)
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27/10/2021 | gruizzli
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L'avatar du posteur bamiléké

La série de Ptiluc est bien loin de l'émission TV du même nom où s'opposaient des villes européennes dans une ambiance bon enfant. Des enfants, Ptiluc en met en scène de nombreuses fois mais il manie plus facilement la Kalashnikov que la piscine à boules. Ptiluc nous propose une randonnée très acide dans une Afrique Centrale postcoloniale où l'état de droit est une notion illusoire. Nos trois idéalistes de TSF sont pris au piège de leurs bons sentiments confrontés à une réalité qui les fait vivre et exister quand ils en sont "extérieurs" mais qui se montre cruelle dès qu'ils deviennent des acteurs intérieurs comme les autres. Ptiluc possède une bonne connaissance de l'Afrique même s’il force le trait, ses nombreuses anecdotes pour être féroces sont souvent drôles et finement observées avec un brin de cynisme et de désillusion. C'est un "pamphlet respectueux" de l'action des ONG ou du Star system où la thématique de" qui fait vivre qui ?" est toujours présente. Le scénario est tout de même un peu trop pessimiste car qui occulte les forces créatrices et de renouvellement du continent. Le graphisme caricatural convient très bien à l'ambiance du récit. Il y a beaucoup de dynamisme dans les épisodes rocambolesques de nos trois humanitaires. Peu ou pas d'extérieurs, tout est concentré sur le comique amer des personnages. Une mention spéciale aux enfants soldats dont la cruauté n'a d'égal que leur insouciance. Une lecture, drôle au second degré, qui n'a malheureusement rien perdu de son actualité tellement l'Afrique est victime de ses nombreux conflits.

12/08/2022 (modifier)
Par gruizzli
Note: 4/5
L'avatar du posteur gruizzli

En retombant sur les anciennes BD qui trainaient, je me suis rendu compte que celle-ci n'était pas enregistrée dans la base de BDthèque. Il faut dire que l'histoire de la BD est originale, puisque Ptiluc a tout d'abord publié la BD sur le net, sans avoir d'éditeur, puis que Paquet a accepté de le publier en album dans ses collections. La collaboration semble cependant s'être mal passée, mais cela est une autre histoire. La BD est une satire sur les ONG officiant dans les pays d'Afrique, et le moins que l'on puisse dire, c'est que Ptiluc tire à boulets rouges ! Dès le début, on sent sa patte qui revient, dans les personnages (qui fument des pétards dès les premières cases), dans le décor et le trait, mais aussi dans la vulgarité et la crasse pas gratuite pour un sou. Si je dis qu'elle n'est pas gratuite pour un sou, c'est que j'avais eu l'occasion de lire, lorsqu'il avait publié sa BD en blog, quelques commentaires qu'il avait ajoutés à ses planches. Et que ces quelques commentaires sont parfois très éclairants (à tel point que je regrette de ne pas les voir dans la BD éditée). Par exemple, la présence de joints dès les premières pages est expliquée par Ptiluc de la façon suivante : "Alors, je lui ai expliqué que souvent, les logisticiens, sur le terrain, ils vivaient des trucs qu'ils auraient vite trouvés insupportables sans l'aide de substances variables mais qui toutes changent un peu la perception de l'insupportable. Après j'ai du lui expliquer que quand des rebelles prenaient des otages, s'il fallait en tuer un pour faire régner la terreur, c'était toujours un local, pas un blanc, un blanc ça vaut du pognon, un local ça vaut rien, mais si tu le dégommes devant les autres, tu sais qu'ils vont se tenir à carreau." Bref, à travers les petits éclaircissements qu'il apportait, je comprenais mieux l'aspect caricatural qu'il mettait dans son œuvre. Ptiluc ne se contente pas de faire de la provocation gratuite, bien que ce soit assez facilement son style. Il parle ici de choses qu'il a connues, par lui ou par ses amis. La BD se veut une représentation générale de la situation de l'humanitaire en Afrique, et surtout pas une considération juste et exacte d'une opération en particulier. Cela donne lieu à moult situations caricaturales, mais qui donnent une idée de la difficulté de ceux qui tentent d'aider l'Afrique. Sans remettre en question la volonté de ceux-ci, on en découvre les aspects confrontés au réel. Rien que la question de vacciner ou non des enfants soldats est déjà un sacré dilemme éthique. On balaye aussi l'implication des multinationales dans les conflits type Rwanda, l'exploitation de diamants, la question des représentations par les médias (et des liens avec ceux-ci), de la Françafrique et des liens entre dictateurs et politiques, etc ... Mine de rien, je trouve que la BD a un aspect bien sombre, et je ne dis pas cela uniquement par rapport à la fin volontairement pessimiste. A travers les différentes situations, il dresse un portrait acide de l'Afrique et de l'aide humanitaire. Entre les volontés déçues et les réalités dures du terrain, le tout finissant sur cet occident qui préfère voir le cul de ses stars que la pauvreté de l'autre bout du monde ... C'est acide, très acide. En y repensant, j'aime bien cette BD. Elle a quelque chose de méchant, un peu dans le style habituel de Ptiluc, mais avec des considérations derrière. On sent que ce n'est pas juste gratuit, mais réfléchi. Je me demande à quel point tout cela est actuel, mais je crois que la réponse me ferait peur. La BD a un message, pour peu que vous passiez le style de Ptiluc parfois trop provocateur ou trash, mais qui a le mérite d'une certaine franchise. Pas de considérations simples et faciles, on parle crument. Et ça fait du bien, aussi, de parfois se reprendre un peu de la réalité en pleine gueule.

27/10/2021 (modifier)