Dragman

Note: 2.67/5
(2.67/5 pour 3 avis)

Angoulême 2021 : Prix spécial du jury "Il n'y a pas de super-héros plus super que Dragman, le héros travesti de Steven Appleby. Appelé aussi Dolly Marie, il mène contre les voleurs d'âmes de Black Mist un combat apocalyptique, névrotique, tendre, drôle - et brillamment dessiné". Posy Simmonds Depuis qu'il a trouvé, adolescent, un bas de sa mère dans le sofa, August Crimp a découvert deux choses. La première est qu'il adore porter des vêtements de femme. La seconde est que lorsqu'il le fait, il devient capable de voler. Oui, comme un super-héros !


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Hélas, cette passion un peu obsessionnelle est contrariée par la peur du ridicule et de la réprobation générale. Si sa mère, puis sa femme venaient à l'apprendre, c'en serait fait de lui. Du coup, il range sagement dans des cartons les tenues et souvenirs de Dragman, le nom de guerre qu'il s'était donné. De toute façon, la ville regorge de justiciers masqués. Mais voici que Cherry Mingle, la petite fille qu'il a sauvée d'une terrible chute du toit du Musée d'Art moderne un jour qu'il s'y était rendu en Dragman, réapparait dans sa vie. Elle a encore besoin de lui, cette fois pour aider ses parents qui ont vendu leurs âmes à la mystérieuse compagnie Black Mist pour lui payer ses études. Dragman reprend donc du service et l'aventure (même si elle finit bien) ne sera pas de tout repos... Comment partager sa vie entre le rôle de bon père de famille et celui de super-héros quand tous vos pouvoirs tiennent au fait de vous travestir en femme ? Telle est la question. Le coming-out et la confession de cette passion très singulière produisent le roman graphique le plus étonnant, détonnant et délirant de l'année...

Scénario
Dessin
Couleurs
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 16 Septembre 2020
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Dragman © Denoël 2020
Les notes
Note: 2.67/5
(2.67/5 pour 3 avis)
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10/03/2021 | cac
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L'avatar du posteur Deretaline

Bon, sur le papier, un super-héros drag-queen et une parodie du monde super-héroïque ça devrait me plaire. Sauf que, vous vous en doutez avec cette intro, le résultat ne m'a pas vraiment plu. Si je n'ai pas apprécié cette lecture c'est pour une raison très simple : j'ai perçu cette histoire comme une insulte maladroite. J'emploie le terme d'insulte maladroite car je suis persuadée que l'auteur ne cherchait sincèrement pas insulter qui que ce soit en écrivant cette histoire mais c'est malheureusement ce qui est arrivé. Tout au long de l'album, dès la première page de présentation des alias super-héroïques, la narration mélange maladroitement travestissement et transidentité. Cela peut paraître minime comme détail pour des personnes n'y connaissant rien, mais ce sont deux choses qui n'ont proprement rien à voir : une personne pratiquant le travestissement apprécie simplement s'habiller comme un-e individu-e d'un autre genre, une personne transgenre se sent/revendique un autre genre que celui qui lui a été assigné à la naissance. L'un est un costume, l'autre est fait partie de l'identité d'un-e individu-e. Certes, il existes des personnes trans (hommes comme femmes) qui pratiquent également le drag, forme plus théâtrale du travestissement, l'un n'empêche pas l'autre, mais il n'empêche que ce sont deux choses indépendantes. Dans cet album, donc, on confond le fait de s'habiller comme une femme avec le fait d'en être une "à l'intérieur" (bonjour les images clichées), on nous balance au détour d'une page que le protagoniste n'a pas eu de présence paternelle (bon sang, tout s'explique !), on traite même le fait de s'habiller en femme comme un fétiche sexuel (en tout cas, on nous explique bien que les drag-queens/femmes trans ressentent de l'excitation lorsqu'elles s'habillent et se font traiter "comme de jolies femmes"). Ah, et toutes ces drag-queens/femmes trans sont également attirées par les hommes, parce que bien évidemment que l'un induit forcément l'autre, et on mélange le tout avec l'homosexualité parce qu'on ne sait toujours pas si ce sont des femmes (ce qui en ferait donc des relations hétéros) ou bel et bien des hommes (ce qui effectivement en ferait des relations achiléennes). Et pas de drag-kings ou d'hommes trans d'ailleurs, ici il n'y en a que pour les zizis (je vous jure que je suis quasiment en train de paraphraser, là). Bon, encore une fois, les drag-queens/femmes trans sont, certes, les seules représentées, mais sont également de véritables clichés ambulants, montrées quelques fois mal rasées, avec du poil aux guiboles et des épaules bien larges, histoire d'avoir de véritables figures de proues des images préconçues. Bref, même si l'histoire tente d'avoir un message sur le fait d'apprécier les différences et tout et tout, la forme finale rend tout ça malheureusement insultant. C'est en tout cas comme ça que je l'ai perçu. L'auteur est britannique, ça se passe à Londres, je m'étais bêtement dit que l'on avait là encore une preuve que le Royaume-Uni n'avait pas volé son surnom de TERF Island (le pays étant célèbre pour sa vision très conservatrice et rétrograde de la question du genre), sauf que la post-face m'a révélée que l'auteur... pratiquait le drag. Peut-être cherchait-il à retranscrire son expérience du drag, sa vision de la chose. Il n'y aurait théoriquement pas de mal, mais là ça fait quand-même beaucoup de généralités et d'idées préconçues traitées comme des vérités. Il est tout à fait possible que ces problèmes (ou en tout cas la majeur partie) soient propre à la VF, pour être honnête je n'ai pas pu vérifier. Dans ce cas-là cela ne serait pas la faute de l'auteur mais de l'équipe de traduction. Au delà de ce problème l'histoire n'est pas inintéressante, on a un propos sympathique sur l'âme, l'individualité et le libre-arbitre, on parodie le monde des super-héros de manière assez amusante (même si classique), mais ça n'est pas non plus transcendant. J'ai sincèrement hésité entre mettre une ou deux étoiles, car ce gros défaut mis à part je reconnais tout de même des qualités à l’œuvre, mais je pense qu'il vaudrait mieux que je me montre sévère parce que j'aimerais sincèrement ne plus avoir à lire/voir ce genre de clichés. Encore dommage, parce qu'utiliser le drag, une activité très théâtrale proche du cabaret, pour représenter un super-héros lui aussi tout en costume et en strass promettait une histoire une minimum sympathique et originale. Le résultat final est simplement passable et malheureusement insultant.

27/04/2025 (modifier)
Par Blue boy
Note: 3/5
L'avatar du posteur Blue boy

S’il est difficile de résumer cette œuvre atypique, la couverture pourrait très bien le faire à elle seule. Sur la pointe du désormais emblématique gratte-ciel londonien, le Shard, une silhouette féminine se tient debout, face au vent. Cette silhouette à la fois frêle et élancée, on l’apprendra très vite, est celle d’un travesti, double de l’auteur, dotée de superpouvoirs Ainsi, la couverture est en quelque sorte le miroir inversé un peu ironique, de par son dessin « imparfait », des superhéros musclés d’outre-Atlantique pavoisant sur l’Empire State Building. Bien qu’il s’en défende en postface, c’est bien Steven Appleby qui se raconte dans cette histoire, dont les premiers mots sont ceux d’un conte de fées : « Once upon a time » (« Il était une fois »). Certes, il n’a pas le pouvoir de voler mais comme August Crimp, il adore porter des vêtements de femme, même si à l’inverse du héros, il lui fallut beaucoup de temps pour « se sentir à l’aise avec l’idée d’être un travesti ». D’ailleurs, dans le récit, le jeune papa mettra un certain temps avant de révéler sa double vie à son épouse, ce qui ne se fera pas sans psychodrame… Il faudrait donc plutôt voir Dragman (le personnage) comme une sorte de super-fée trans des temps modernes, le double idéalisé qu’il aurait peut-être rêvé d’être, celui qui chasse les trafiquants d’âmes pour les rendre à leur propriétaire, dans un monde qui en manque cruellement. Steven Appleby exprime à travers cette amusante parabole son désarroi de voir comment la perte d’âme, un bien comme un autre qui s’achète et se vend, transforme les personnages du récit en robots décervelés uniquement préoccupés par l’appât du gain, indifférents au sort d’autrui. Un pur cauchemar capitaliste qui n’est pas forcément si éloigné de notre réalité contemporaine. « Dragman » raconte aussi la solitude que l’on peut éprouver quand on naît fille dans un corps de garçon. Le livre parle de ces êtres ignorés ou subissant la risée de la meute, avec deux alternatives possibles : se cacher pour vivre leurs aspirations ou se comporter en bête de foire dans des clubs privés pour exister. Et le jour où un tueur les laissera dans le caniveau, cela n’inquiétera pas grand monde, ces « pervers » l’avaient bien mérité après tout… Tout cela Steven Appelby le raconte sans haine et sans acrimonie, préférant la poésie et l’humour, sans doute pour apaiser ses blessures intérieures. Quant au récit en lui-même, il peut déconcerter à naviguer entre gravité et légèreté. La partie dessinée, qui décrit un univers fantaisiste, alterne avec des textes courts marquant chaque début de chapitre, dans une tonalité évoquant une sorte de thriller glauque empreint de poésie. On peut même avoir un peu de mal à rentrer dans l’histoire avant d’en comprendre les rouages. L’esprit de « Dragman », c’est cela. Un récit en forme d’exutoire, sympathique mais bavard, au scénario touffu et un peu foutraque, qui révèle chez son auteur un besoin profond d’exprimer des choses, ce que l’on comprendra aisément. Mais encore une fois, Appleby évite de plomber l’ambiance et choisit la distanciation fictionnelle pour mieux se raconter, avec un humour à la fois naïf et tendre, discrètement « british » (aucune allusion sexuelle mal placée ici)… Sur le plan du dessin, l’auteur anglais n’est pas vraiment un nouveau venu puisqu’il produit depuis les années 80 des comics trips pour de très nombreux journaux et magazines, dont le Times, le Guardian ou encore le New Musical Express. Au-delà de ses pattes de mouche et son trait faussement maladroit, Steven Appleby possède un vrai style très reconnaissable, et on apprécie particulièrement les pleines pages représentant des décors ou des paysages tellement… « so british »… Globalement, malgré les quelques réserves émises plus haut, « Dragman » est une lecture sympathique révélant un univers très original. Avec le message distillé par le livre — « soyez vous-même et ne renoncez pas à votre âme » —, Appleby nous sert peut-être une lapalissade, mais qui prend une dimension plus prégnante quand comme lui on est à ce point éloigné des normes sociales. Aujourd’hui, à plus de 65 ans, Sir Appleby semble parfaitement en paix avec lui-même, ne cherchant même pas à revendiquer une étiquette quelconque. Père de deux enfants, il continue à se vêtir en femme et, de plus, a conservé son prénom masculin (comme quoi…). Cette année, Appleby a reçu pour « Dragman » une distinction à Angoulême. Parce que sans doute, il le vaut bien ;-)

18/03/2021 (modifier)
Par cac
Note: 4/5
L'avatar du posteur cac

Dragman n'est pas un album sur un fan de dragster ou un pro de la séduction... mais sur un superhéros travesti. August Crimp a le pouvoir de voler dans les airs une fois qu'il est paré de ses habits féminins. Original, beaucoup d'humour. Et cela fait écho à la propre vie de l'auteur britannique qui se travestit depuis des années, au départ secrètement et maintenant ouvertement. On se trouve dans une Angleterre un peu différente de ce qu'on connait où les superhéros de tout type, et même certains qu'on ne soupçonne pas, sont monnaie courante. Les habitants ont une police d'assurance pour que les héros leur viennent en aide en cas de besoin. Dans cette société, un homme a trouvé le moyen de séparer le corps physique de son âme, celle-ci devient l'objet d'un marché où les gens viennent vendre ou acheter. Et c'est justement pour aider une jeune fille à récupérer l'âme de ses parents que Dragman va reprendre du service. Il avait en effet rangé toute sa panoplie au grenier et s'est mis en couple avec une femme qui ne sait rien de son passé. On sent tout le poids de la réprobation sociale, la culpabilité et du qu'en-dira-t-on sur sa pratique. Plein d'idées et de personnages dans ce gros et long roman graphique, le premier de l'auteur qui est plutôt spécialisé dans le dessin d'humour dans la presse et le strip. Il a mis des années à en accoucher. Le dessin n'est pas fou de prime abord mais il est efficace. Bon rythme de l'histoire menée comme une enquête qui va de rebondissement en rebondissement ; j'ai trouvé ça réussi et l'ai lu d'une traite.

10/03/2021 (modifier)