Carnet de voyage (Un américain en balade) (Carnet De Voyage)

Note: 3.21/5
(3.21/5 pour 14 avis)

Réflexions de Craig Thompson lors de son séjour en Europe.


Carnets de voyages Ecritures Top Shelf Productions

Début mars 2004 : en provenance des Etats-Unis, et précédé par la flatteuse réputation que lui a valu son album "Blankets-Manteau de Neige", Craig Thompson débarque à l'aéroport Charles de Gaulle de Paris, pour un séjour d'un peu plus de deux mois en Europe et au Maroc. A la fois séjour d'agrément et voyage professionnel, son périple va aussi lui fournir l'occasion de beaucoup dessiner. Et ce sont ces images, déroulées jour après jour à la manière d'une chronique personnelle du temps qui passe, que rassemble "Un Américain en Balade". A la manière d'une composition impressionniste, on y retrouve l'art de la notation et des petits riens qui fait toute la saveur du "style Craig Thompson", porté par une grande tendresse et une belle aptitude à l'émerveillement.

Scénario
Dessin
Traduction
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution Janvier 2005
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Carnet de voyage (Un américain en balade) © Casterman 2005
Les notes
Note: 3.21/5
(3.21/5 pour 14 avis)
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17/02/2005 | Kael
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Par Blue Boy
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
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Quand Craig Thompson a publié Blankets - Manteau de neige en 2004, il était encore un génie qui s’ignorait, du moins c’est ce qui ressort de ce « Carnet de voyage », publié dans une version augmentée de quelques pages par rapport à la version originale de 2005, intitulée « Un Américain en balade ». C’est donc l’occasion de revenir sur cet ouvrage au charme immense. L’auteur y relate sa tournée européenne pour la sortie de "Blankets", ce qui lui a permis, entre une interview et une séance de dédicaces, de revoir de vieux amis croisés ici et là dans les festivals de bande dessinée, notamment Blutch, Benoit Peeters et Lewis Trondheim. Il raconte aussi comment il traversé le Maroc, un pays qu’il ne connaissait qu’à travers la littérature ou le cinéma, un pays à mille lieues de sa personnalité introvertie d’Américain élevé dans la religion baptiste la plus stricte. Sans aucun doute, ce voyage a inspiré Habibi, son autre œuvre majeure, quelques années plus tard. Et cet Américain-là, il serait difficile de ne pas le trouver singulièrement attachant. D’une humilité rare pour un citoyen issu de la « Great America », Craig Thompson se met véritablement à nu dans ce récit, se livrant avec sincérité, sans faux semblants. Il ne joue pas, ne triche pas, ne se fait pas de cadeau à lui-même, énonce ce qu’il aime et ce qu’il n’aime pas, de façon factuelle, sans aucune trace de mépris même quand il est au Maroc. Car le petit « péquenaud » de Traverse City reste un homme curieux du monde qui l’entoure, même si parfois certaines expériences s’avéraient pénibles à vivre en Afrique du nord. Se confronter à d’autres cultures, seul qui plus est, relevait pour lui du défi, celui de sortir de sa coquille de préjugés familiaux et castrateurs pour s’ouvrir au monde extérieur, ailleurs qu’aux seuls USA. La rupture douloureuse avec sa petite amie, juste avant son voyage en Europe, n’arrangeait rien à l’affaire, mais Thompson, a pris son courage et ses pinceaux à deux mains, en allant jusqu’au bout de son « exil ». Cet artiste hypersensible, qui ne semble jamais se sentir vraiment à sa place, n’est d’ailleurs même pas né là où il aurait dû. En contemplant ses dessins si délicats, pourrait-on imaginer qu’il a grandi dans un trou perdu du Michigan, conduisant des tracteurs et nourrissant du bétail ? Craig Thompson est un dessinateur extrêmement doué, doublé d’un conteur hors-pair, mais sa timidité et son « background » ont longtemps obturé la prise de conscience de son talent. La particularité de ce récit est qu’il révèle davantage l’homme avec ses faiblesses qu’avec ses forces, empreint d’une autodérision freinant toute velléité d’auto-apitoiement. Le dessin l’accompagne à merveille, rendant hommage avec finesse à la beauté du monde, ainsi qu'à la gente féminine avec de jolis portraits. Son pinceau fluide et gracieux est un plaisir des yeux, exprimant toujours le mouvement même dans des représentations figées, avec un sens du détail révélant chez son auteur une curiosité innée. Ce « Carnet de voyage » reste un must du genre, Thompson réussissant à nous embarquer dans son périple sans forcer, sans promesses de découvertes extraordinaires ou de paysages splendides. A ce titre, le choix du noir et blanc est on ne peut plus adapté. Au final, aucun événement exceptionnel n’y est relaté, seulement le quotidien d’un homme peu enclin au voyage, lunaire et timoré, donc un peu à côté de ses pompes, davantage spectateur qu’acteur (il se plie à contrecœur à la tournée européenne d’interviews et de dédicaces), mais cet auteur attachant reste aussi ouvert aux rencontres et semble avoir le don de s’attirer des amis, ce qui nous le rend d’autant plus proche en tant que lecteur.

21/07/2018 (modifier)