Le Passeur (Lowry) (The Giver)

Note: 4/5
(4/5 pour 4 avis)

Adaptation du roman de Lois Lowry.


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Lorsque Jonas aura douze ans, il se verra attribuer, comme tous les enfants de son âge, sa future fonction dans la communauté. Dans le monde où vit Jonas, la guerre, la pauvreté, le chômage, le divorce n'existent pas. Les inégalités n'existent pas. La désobéissance et la révolte n'existent pas. Jonas ne sait pas encore qu'il est unique... L'harmonie règne dans la communauté. Les cellules familiales sont constituées avec soin par le comité des sages. Les personnes trop âgées, ainsi que les nouveau-nés inaptes sont “déliés“, personne ne sait exactement ce que cela veut dire. Dans la communauté, une seule personne détient véritablement le savoir : le Receveur de Mémoire. Lui seul sait comment était le monde quand il y avait encore des animaux, quand l'œil humain pouvait voir les couleurs, quand les gens tombaient amoureux. (texte : Philéas)

Scénario
Oeuvre originale
Dessin
Couleurs
Traduction
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution 19 Octobre 2023
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Le Passeur (Lowry) © Philéas 2023
Les notes
Note: 4/5
(4/5 pour 4 avis)
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19/10/2023 | Spooky
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Par Blue boy
Note: 4/5
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Adaptée du best-seller de 1993 de l’écrivaine Lois Lowry, cette bande dessinée nous plonge dans un univers qui rappelle immanquablement « Le Meilleur des mondes » d’Aldous Huxley, ou encore par d’autres aspects, le film de Peter Weir, « The Truman Show ». Un monde ultra normé où la vie de chaque individu est contrôlée de la naissance à la mort, où tout le monde surveille tout le monde, où la moindre émotion, la moindre sensation est étouffée par camisole chimique, jusqu’au langage, à tel point qu’un terme incorrect ou inapproprié vaudra à son locuteur les remontrances de son entourage. Aucun citoyen ne cherche à remettre en cause le système et se contente de réciter les discours rabâchés depuis l’enfance. Un vrai paradis terrestre où tout le monde semble heureux ! Attention toutefois à ne pas s’écarter de la ligne de conduite imposée, le moindre faux pas risquant d’entraîner le suspect vers le « déliement ». Personne ne sait au juste ce qui se cache derrière ce terme, lequel en principe ne concerne que les vieux en fin de vie, mais pour celui qui est visé, il s’agit de la punition ultime, le signe d’infamie le plus honteux redouté par tout le monde. Philip Craig Russel a fait du roman une adaptation plutôt convaincante, même si la narration souffre de quelques longueurs, surtout au début, et prend un certain temps à trouver son rythme. Malgré sa finesse, le dessin reste lisse et la quasi-absence de couleurs accentue l’impression de monotonie mais cela correspond pourtant tout à fait au sujet comme on le réalisera par la suite. Par moments, l’univers évoque les vieilles publicités des années cinquante auxquelles on aurait retiré toutes les couleurs. D’ailleurs curieusement, la technologie est très peu présente dans cette histoire, ce qui lui confère un côté intemporel et permet de mettre en avant une réflexion philosophique sur un sujet vieux comme le monde : la place de l’individu au sein d’un système totalitaire. Une fois le malaise installé, car ce monde sous cette perfection des apparences est véritablement terrifiant, le récit va évoluer vers la prise de conscience progressive de Jonas lorsqu’il commencera sa formation pour devenir le nouveau receveur de mémoire de la communauté, et en parallèle les couleurs, associées aux émotions, vont peu à peu prendre le dessus et serviront de marqueur entre le monde connu du jeune garçon et l’« ailleurs » qu’il aspire à connaître. Le récit va gagner en profondeur dès le moment où Jonas sera formé par son prédécesseur (il y perdra d’ailleurs l’innocence lié à l’enfance), un vieil homme désireux de passer le flambeau car la tâche de receveur, mission sacrificielle, implique de conserver en soi les images d’un passé fait d’humanité mais aussi de souffrances et de violence, tout en tenant dans l’ignorance le reste de la communauté « lobotomisée ». Ainsi, le livre nous questionne sur la nature des émotions, qui comme le yin et le yang, revêtent des aspects sombres et lumineux, indissociables l’un de l’autre. Pour conserver notre humanité, peut-on faire le tri pour ne conserver que l’amour universel et la volonté de partage, ou n’avons-nous d’autre choix que d’accepter sa contrepartie, la compétition visant à dominer l’autre, avec son pendant le plus néfaste, la guerre ? « Le Passeur » raconte le passage à l’âge adulte et la quête inexpugnable de liberté d’un être qui vient de prendre conscience de l’existence d’un « ailleurs ». Si le début du livre ne sera pas forcément engageant pour tout le monde, il est recommandé de ne pas rester sur ses premières impressions, car il comporte beaucoup de qualité, notamment cette poésie qui irrigue délicatement le récit, mais aussi une vraie réflexion sur nos choix de vie, nos valeurs. Car en effet, les cages dorées que l’on accepte parfois pour préserver notre confort sont-elles compatibles avec notre aspiration à la liberté ? Sommes-nous juste des bêtes d’élevage dociles tout juste bonnes à faire fonctionner un système ou des êtres humains dotés du libre arbitre ?

28/11/2023 (modifier)
Par Lajt
Note: 4/5
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Fan de dystopie, j'ai suivi l'avis de Spooky. Heureusement car j'ai adoré ce récit (je ne connaissais pas le roman de Lowry) qui met en scène une société au fonctionnement réglé comme du papier à musique...en apparence. De plus, les prises de conscience de Jonas de la "vision" sont extrêmement percutantes et bien amenées. Une oeuvre que je diffuse largement autour de moi. Note réelle 4,5/5

26/11/2023 (modifier)
Par Cacal69
Note: 4/5
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Je confirme, ce comics, c’est du lourd. Cet album est une adaptation d’un roman de Lois Lowry, « The Giver » qui fait lui-même partie d’une tétralogie. Je découvre l’autrice et son œuvre. Philip Craig Russel, dont j’aime beaucoup la plume et le crayonné, a réalisé un formidable travail d’adaptation. Un auteur surtout connu en France pour ses collaborations avec Neil Gaiman (Sandman et Sandman - Nuits Éternelles) ou ses adaptations de Neil Gaiman ("L’Étrange vie de Nobody Owens" et Coraline). Cependant, on connaît moins sa passion pour l’opéra et ses adaptations en comics de Pelléas et Mélisande, La flûte enchantée ou L’anneau du Nibelung entre autres. Et j’attends toujours une traduction en français. Je disais donc un formidable travail d’adaptation, on va en apprendre de plus en plus sur la vie dans cette communauté au fil des pages. Une société structurée qui vit en autarcie. Un monde sans couleur, sans douleur et sans passé où la vie est ordonnée et disciplinée mais un monde sans amour, aseptisé. On ne dit pas « hommes et femmes » mais « mâles et femelles » ! Une narration maîtrisée qui prend le temps de suivre l’évolution du jeune Jonas qui va fêter ses douze ans. Un âge qui va faire entrer ce jeune garçon dans la vie adulte lors de la cérémonie des « douze », puisque qu’à l’issue de celle-ci, sa future fonction lui sera désignée : il sera le nouveau Receveur, le gardien des souvenirs. A partir de là, sa vision sur le monde va changer. Un récit riche, dense et captivant ! Le trait de Philip Craig Russel est délicat et très expressif. L'intensité de l'encrage ainsi que la présence de couleurs ou non suivront l'évolution du scénario. Un formidable travail graphique qui donne une puissance supplémentaire au récit. Du grand art ! Je recommande aux fans de dystopies et d'anticipation.

31/10/2023 (modifier)
Par Spooky
Note: 4/5
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Oh là, c'est du lourd. Voici donc l'adaptation d'un classique de la SF américaine, à savoir The Giver, de Lois Lowry. C'est une œuvre à ranger aux côtés de La Servante Ecarlate et Soleil vert. Elle nous conte donc l'histoire de Jonas, un adolescent élevé dans une société complètement policée, où l'individualisation est très réduite, et qui va donc tenter de s'en extraire pour vivre une autre vie, après avoir connu de nouvelles sensations sous la houlette du passeur en titre. C'est très malin, la montée des sensations de l'adolescent est subtile mais imparable. C'est P. Craig Russell, grand nom des comics, qui dirige de main de maître cette adaptation, s'entourant de deux collaborateurs pour certaines séquences et les couleurs, qui ont une importance primordiale. L'ensemble est d'une densité rare, finement transmise par la traduction ciselée de l'émérite Patrick Marcel. La couverture ne paye pas de mine, mais elle illustre un passage essentiel du récit, dans lequel Jonas va tenter de changer son destin. Difficile d'en dire plus sans spoiler, mais l'ensemble est d'un niveau presque exceptionnel. Fans de dystopies et d'anticipation, ce récit est fait pour vous.

19/10/2023 (modifier)