Presque

Note: 4.18/5
(4.18/5 pour 17 avis)

Presque est un album-choc, une introspection très brutale de Manu Larcenet, qui revient sur un service militaire vécu comme un cauchemar. Le ton est dur, on devine qu'il y a un vrai traumatisme, et ce n'est pas facile de voir quelqu'un exhiber ses blessures.


Auteurs complets Autobiographie BD à offrir Best of 1990-1999 Format à l’italienne Larcenet Le service national (ou service militaire) français Les Arts Appliqués de Paris Les petits éditeurs indépendants One-shots, le best-of

Larcenet raconte dans cet album son service militaire. Une année passée sous les drapeaux, base aérienne de Toul, section disciplinaire. Sans fioritures, sans grand dramatique hollywoodien, l’auteur décrit ce qui a été son enfer quotidien, et constate son impuissance à transcrire l’incommunicable.

Scénario
Dessin
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution Septembre 1998
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Presque © Les Rêveurs 1998
Les notes
Note: 4.18/5
(4.18/5 pour 17 avis)
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16/03/2003 | ThePatrick
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L'avatar du posteur Noirdésir

« Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir… » disait la chanson. Et on peut en effet, après cette plongée en apnée dans les entrailles d’une certaine armée, de la douleur de Manu Larcenet, chercher à respirer de nouveau. On est évidemment là très loin de la grosse déconne Fluide, de la pochade « Donjon », ou d’une certaine introspection tranquille glissée dans Le Retour à la terre. Sa part d’ombre, Larcenet la réserve plus aux Rêveurs. Larcenet nous livre là, de manière à la fois pudique, intelligente, mais aussi sans concession, la violente expérience qu’a été pour lui le service militaire. Et dans sa dénonciation je retrouve en partie ce que comme lui ou d’autres j’ai connu pendant mes « classes ». C’est-à-dire l’abus fait par des hommes sur d’autres hommes parce qu’on leur donne un pouvoir. C’est-à-dire l’abrutissement, la lobotomisation volontaire, dans un milieu clos sur lui-même où l’obéissance prime sur la réflexion et l’intelligence (encore que Larcenet montre, avec ce qui est arrivé à Marco, que l’obéissance ne garantit pas de s’en sortir). En formatant les « appelés », l’armée déshumanisait les individus, avec des méthodes employées ailleurs par des systèmes totalitaires. Mais ici Larcenet ne donne pas dans la critique de comptoir, le pathos inutile, son propos est au contraire d’une froideur, d’une précision quasi chirurgicale. Voilà pour le fond. Pour la forme, il alterne des esquisses volontairement brouillonnes, noires et difficiles à « lire » et des personnages patatoïdes à la Trondheim lorsqu’il se représente dialoguant avec sa mère. Ces passages avec sa mère – outre la différence graphique avec les reste des dessins, sont aussi importants car ces moments d’humour permettent de respirer. Ils permettent aussi à Larcenet d’illustrer, avec l’incompréhension entre lui et sa mère, qu’on ne peut se faire une idée réelle de son expérience sans l’avoir vécue. Et j’avoue qu’après les passages avec sa mère, on ressent à la reprise de la lecture un peu du malaise qui étreignait Larcenet à l’idée « d’y retourner ». Et ces passages s’avèrent au final presque aussi violents que le reste ! A lire, évidemment !

22/09/2015 (modifier)
Par PAco
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur PAco

C'est complètement par hasard que je suis tombé sur cette BD de Larcenet que je ne connaissais pas. Et là c'est le choc ! Traiter en BD le sujet de feu le service militaire obligatoire, on voit pas ça tous les jours. Et puis on sent les clichés arriver par paquet de 12... Mais non, loin de là. Larcenet a la force et l'énergie de poser à plat tous ses ressentis et de nous les exposer de façon magistrale. Moi qui sors de Blast, j'avoue y avoir retrouvé la charge émotionnelle volontairement pesante qui s'en dégage. On est dans la retranscription d'un malaise profond, dans l'introspection qui fait mal. Et puis le côté très brut et chargé du graphisme est un excellent parti pris. Il renforce complètement la trame de son récit et sers son propos de la meilleure façon. J'ai aussi beaucoup apprécié les autres styles graphiques qui viennent se glisser dans le récit à différent moments cruciaux. Le côté humoristique façon Donjon pour le style quand il retranscrit les rencontre avec sa mère ; même si cela surprend au début, cela s'intègre finalement très bien au reste, et allège le propos. Et enfin, le style "hiéroglyphe inca" que j'ai trouvé magnifique : un pur bijou de graphisme noir & blanc ! Une grande BD donc, sur un thème délicat, et qui plus qu'un exercice est une vrai réussite de l'auteur pour nous signifier et retranscrire l'horreur qu'il a vécu. C'est là, que je ne regrette vraiment pas d'avoir choisi d'être objecteur de conscience...

29/01/2010 (modifier)