Le Voyage de Phoenix

A travers le récit tragique et humaniste de plusieurs destins croisés, Jung évoque la guerre fratricide entre les deux Corées.
Adoption Corée Le deuil Quadrants
3 destins s’entrecroisent : Jennifer, fille d’un soldat américain passé en Corée du Nord. Fille d’un père absent, communiste et traître, l’Amérique la rejette. Elle consacre sa vie à un orphelinat de Séoul. Aron adopte un petit garçon et s’attache tant à lui qu’il délaisse sa fille ; il s’enfonce dans la dépression lorsque son fils tombe gravement malade. Doug, le meilleur ami d’Aron, est militaire et orphelin depuis longtemps. C’est lui qui a poussé Aron d’adopter. Il se sent responsable de ce qui se passe.
Scénario | |
Dessin | |
Editeur
/
Collection
|
|
Genre
/
Public
/
Type
|
|
Date de parution | 07 Octobre 2015 |
Statut histoire | 1 tome paru |
Les avis


Jung est un auteur dont j'apprécie beaucoup le travail scénaristique et graphique. J'avais bien été un peu déçu par son autobiographie mais "Le Voyage de Phoenix" restera une grande lecture de mon été. Sur deux destins entrecroisés (Kim et Jennifer), l'auteur fait vivre ses thèmes de prédilection, la Corée avec son déchirement historique, et surtout l'adoption des enfants coréens vers les USA ou l'Europe. Les premières planches installent le récit dans le drame. Kim est hospitalisé à NY pour une raison inconnue. Or Kim se trouve être un "noyau" autour duquel gravite l'équilibre d'Aron son père et de sa famille d'un côté et de Jennifer, sa tutrice à l'orphelinat de Seoul de l'autre. Le récit se déplace de Kim vers Jennifer qui devient instantanément la narratrice témoin de l'histoire contemporaine de la Corée et de ses habitants. Jennifer est née de deux parents américains avec un père qu'elle n'a jamais connu (déserteur en Corée). Jung nous propose alors une étude psychologique sur l'absence du père pour l'américaine ou sur l'absence de la mère du ventre pour Kim. C'est classique mais très bien maitrisé sans sentimentalité excessive. Jung installe alors un rebondissement inattendu qui me rappelle beaucoup les propositions de Grenson dans La Douceur de l'Enfer. Même si Jung n'insiste pas sur le cas du père cela permet une construction fluide et cohérente vers un épisode historique puis un changement des thématiques principales vers le deuil, la réconciliation et la reconstruction. Cette construction très cohérente nous mène tout droit vers le maximum d'intensité dramatique avec Kim au cœur de la dramaturgie. Le double final est très émouvant. Jung reste dans un N&B qu'il affectionne et qu'il maitrise. La narration visuelle reste fluide tout du long malgré les évolutions de thématiques au cours du récit. C'est souvent contemplatif avec quelques planches poétiques qui invite à un arrêt sur image pour la réflexion. Jung invite à prendre de la hauteur, comme le phoenix, malgré la pesanteur de certains épisodes tragiques que nous vivons. Une très belle lecture. Je pousse un peu ma note sans regret.


Décidément, Jung réalise quelques très bons albums, qui tous jouent sur une émotion à fleur de peau, mais qui n’entrave pas le développement de ses histoires. Ce qui rend la lecture agréable, c’est déjà ce dessin, vraiment très bon techniquement, dans un style semi-réaliste. Un trait simple (idem pour les décors), mais terriblement efficace, et agréable à l’œil, jouant sur des nuances de gris et un Noir et Blanc assez doux. Il sait magnifiquement rendre les émotions, qui sont au cœur de son intrigue. Intrigue qui entremêle plusieurs personnages, aux trajectoires qui se croisent plus ou moins (c’est un peu fouillis parfois, mais on s’y retrouve aisément). Certains passages sont pleins d’un bonheur irradiant, presque dégoulinant, alors même que le drame, ou plutôt les drames traversent ces histoires, comme le décès d’un fils/frère adoré, qui détruit à petit feu ceux qui sont restés, ou alors la tragédie vécue par un Nord-Coréen ayant échappé à un camp de concentration après une douzaine d’années d’enfer (ce passage, assez long, est vraiment terrible à lire !). Et, enfin, les dernières pages livrent la clé du titre, puisque, malgré les drames, l’espoir peut renaître, l’amour, la vie ou la rédemption s’invitant chez les protagonistes que nous avons croisés durant cette lecture. Un bel album, vraiment, à découvrir.


Encore une fois après Couleur de peau : miel, cet auteur a réussi à m'émouvoir avec ce voyage du Phoenix. Encore une fois, j'ai été pris aux larmes devant cette histoire dramatique très touchante. C'est encore un véritable coup de coeur car cet album est véritablement sublime. Il concerne ceux qui ont perdu un être cher, ceux également qui ne sont jamais arrivé à combler le vide laissé par l'abandon, mais également ceux qui arrivent à pardonner les erreurs et enfin ceux qui fuit l'oppression. Oui, cela fait beaucoup de monde et autant de thèmes qui sont traités autour de deux histoires parallèles qui ont quelques points communs. Le dessin en noir et blanc est de toute beauté avec une délicatesse du trait hors du commun. Jung parvient à entrer dans le coeur des gens grâce à cette sensibilité hors du commun qui se manifeste par de petits détails tel par exemple le nombril d'un enfant adopté qui constitue le dernier lien visible entre la mère et son fils. Il a le don de transcrire magnifiquement les émotions que traversent les personnages que l'on va croiser du Minnesota à la Corée du Sud. Le voyage de Phoenix nous entraîne certes vers la mort mais également vers une forme de rédemption. C'est tellement beau et puissant !


Pour son second roman graphique, le dessinateur d’origine sud-coréenne Jung nous raconte de petites histoires humaines affectées par la grande Histoire : celle d’une guerre froide bloquant quasiment tout échange entre la Corée du Sud et sa voisine du nord « communiste », dirigée d’une main de fer par un régime militaire impitoyable. Kim vient de trouver la mort dans un accident de voiture. Jennifer, à la fois narratrice et personnage principal, est sous le choc. C’est elle qui avait géré le dossier d’adoption du garçonnet lorsqu’elle travaillait en Corée du Sud. Cet événement tragique va raviver le souvenir douloureux de ce père qu’elle n’a pas connu et qui y était allé pour assurer la sécurité face à la menace du voisin communiste. Le thème dominant de ces récits croisés est la résilience face la douleur résultant d’un drame en apparence insurmontable. Celle de Jennifer d’abord, qui pleure ce père inconnu mort dans des circonstances tragiques. Celle des parents de Kim ensuite, qui vivront un cauchemar dans les mois suivant le décès du jeune garçon. Celle de son mari San-Ho enfin, qui a fui la Corée du Nord après avoir supporté l’enfer des camps de rééducation. Et quoi de mieux que le phœnix, cet oiseau légendaire qui a le pouvoir de renaître de ses cendres, pour donner corps à cette notion et servir de fil rouge au récit. Si la narration peut avoir tendance à se diluer dans la kyrielle de personnages, bien campés au demeurant, elle est parfaitement servie par le dessin raffiné et sensible de Jung. Avec ses lavis insufflant sans lourdeur ce qu’il faut de tension ou d’anxiété à l’histoire, le noir et blanc convient bien au propos. Par l’entremise de ces tragédies dénuées de pathos, « Le Voyage de Phoenix » peut être vu comme un don de l’auteur, un hommage à la vie malgré son âpreté, tout simplement. A l’image de San-Ho, « ce grand enfant » au sourire lumineux découvrant la vie après avoir survécu aux pires épreuves dans son propre pays.
Site réalisé avec CodeIgniter, jQuery, Bootstrap, fancyBox, Open Iconic, typeahead.js, Google Charts, Google Maps, echo
Copyright © 2001 - 2025 BDTheque | Contact | Les cookies sur le site | Les stats du site