Pays kaki 92/08

Note: 4.25/5
(4.25/5 pour 4 avis)

Août 1992, en France… Comme tous les deux mois, des milliers de jeunes gens sont appelés à servir sous les drapeaux. Depuis 1798, le service militaire ponctue la vie des Français. En plein milieu de l’été, cela ressemble à une colonie de vacances un peu virile. Mais comme le temps, la situation va très vite se dégrader.


Le service national (ou service militaire) français Les petits éditeurs indépendants

Christophe Girard nous livre ici son expérience de l'armée. Une oeuvre coup de poing dans laquelle l'auteur n'hésite pas à se mettre à nu. Depuis le début de son service militaire jusqu'à sa démobilisation après une période d'engagé volontaire, nous suivrons l'auteur dans son quotidien, entre l'absurde et le sordide. Une expérience dont il ne sortira pas indemne.

Scénario
Dessin
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution Août 2008
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Pays kaki 92/08 © Les Enfants rouges 2008
Les notes
Note: 4.25/5
(4.25/5 pour 4 avis)
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27/12/2012 | Mac Arthur
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L'avatar du posteur carottebio

Je tiens cette BD pour une réussite totale. Le dessin N&B est une merveille de nervosité et de précision. Les plans et les découpages servent parfaitement le comique, le tragique, la longueur, la fébrilité, l'ennui selon le besoin de chaque situation. J'ai retrouvé l'esprit et l'ambiance de la vie qu'on menait à l'époque du service militaire obligatoire dans les bases militaires. Ce mélange étonnant de camaraderie toxique, de hiérarchie ubuesque, de jeunesse shootée à la testostérone, de désirs d'aventure... Bref, un récit très dense et instructif qui s'adresse à tous, homme ou femme, mais avec une grosse réserve pour les plus jeunes.

24/09/2023 (modifier)
Par sloane
Note: 4/5
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A plus d'un titre une grande et utile BD. Utile parce que le service militaire n'existe plus en France depuis maintenant plusieurs années. Faut-il s'en plaindre ? Regretter comme certains ce temps où le Service était en partie le lieu de la mixité sociale, certes dans un cadre particulier, mais au moins cela avait le mérite de faire se réunir pour le pire ou le meilleur des gens qui ne se seraient jamais côtoyer autrement. Je fais partie de cette génération qui y a eu droit et j'avoue que, plus que la mixité, c'est la notion d’abêtissement que je garde à l'esprit. Oh bien sûr, en fin de soirée après trop de verres je serais capable de vous sortir deux, trois anecdotes rigolotes à propos de mon service militaire, mais le sentiment qui persiste est tout de même qu'il s'agit d'un lieu où finalement on vous apprend à être plus rapide, plus fort, plus résistant pour pouvoir tuer l'autre. A ce titre cette histoire vécue fait donc œuvre de témoignage, de document sur un temps qui n'existe plus. L'auteur y livre son expérience personnelle mais encore plus intime puisqu'il n'hésite pas à nous montrer les affres psychologiques par lesquels il passe. A propos de psychologique je me suis toujours interrogé sur cette faculté, notamment à l'armée d'utiliser un langage fleuri à connotation sexuelle, entre autre "pédale" ou "enculé". De là à parler de refoulement il n'y a bien sûr qu'un pas que je n'oserais franchir !! Non ce récit est dur, âpre et à mon sens il reflète vraiment bien ce par quoi peut passer un jeune homme normal lorsqu'il passe dans le moule, dans une machine à décérébrer qu'est l'armée et où penser n'est plus une priorité. Le dessin n'est pas un problème, il est sans esbroufe et correspond parfaitement à son sujet. BD utile hautement recommandable et donc à lire.

23/10/2015 (modifier)
Par Benjamin
Note: 4/5

J'ai trouvé par hasard cette BD sur le festival d'Angoulême, sur un stand où il n'y avait que de la qualité. Après mure réflexion, j'ai décidé d’acheter Pays kaki 92/08 de Cristophe Girard, qui était présent et disponible pour me parler de ses travaux, et m'expliquer qu'il avait vécu la plupart des scènes de cette BD. J'ai eu droit à un bel autoportrait à l'aquarelle, en casque de bidasse, pour compléter la couverture, qui représente un soldat anonyme. La BD est agréable à lire et très prenante, je l'ai finie ce matin au réveil, on est dans une ambiance très dure, nuancée de traits d'humour. Parfois humain, parfois froid, j'ai plus appris sur la guerre moderne en général dans cette BD que dans tous mes cours d'histoire à l'école, surtout que la guerre de Yougo n'y était que peu traitée. Le réalisme historique d'un côté, le vécu d'un soldat de l'autre, soldat qui tournera insoumis dans son futur, à en voir les autres œuvres de l'auteur, permettent une vision un peu objective des faits qui se déroulent (presque) sous nos yeux de lecteurs. J'aime beaucoup ces BD de guerre, elles permettent de mettre à la lumière certains dessous d'un conflit qu'il ne fait pas bon passer au 20h, c'est très dur à lire si l'on se rappelle que ce sont des faits réels, ça a tendance à casser avec l'image humanitaire de la guerre, qu'on tend à faire croire de nos jours. A tous les passionnés d'histoire, de géopolitique, ou simplement des rapports entre humains similaires ou différents, je conseille donc cette BD, à déguster comme un bon film de la trempe de Full Metal Jacket, ou d'Apocalypse Now.

04/02/2013 (modifier)
L'avatar du posteur Mac Arthur

Comme tout lecteur de bandes dessinées amateur de récits historiques, ceux traitant de la première guerre mondiale m’ont marqué par la sensation de douleur, de souffrance et d’absurdité qui en émane. Mais il s’agit là d’une époque révolue, d’un passage obligé vers nos démocraties, vers l’Union Européenne actuelle. C’est du moins ce que je croyais… avant d’entamer cette lecture. Et c’est sans doute la raison pour laquelle cet album m’a tant marqué. Cette proximité, ce sentiment que cela aurait tout aussi bien pu m’arriver, à moi, m’ont choqué ! Dans Pays kaki 92/08, Christophe Girard évoque son service militaire ainsi que la période d’engagement volontaire qui suivra celui-ci. Tout commence d’une manière anodine (« Je ne suis pas enthousiaste ni même malheureux. J’ai bien des échos inquiétants de ce qui se passe derrière les murs des casernes mais je me fais plus l’idée d’une grosse colonie de vacances avec des « monos » un peu sévères. », dit-il en guise d’introduction). A son arrivée, Christophe n’est pas opposé aux militaires. Certes, il s’amuse de certains comportements mais reste nuancé dans ses critiques. Une approche humble, correcte, serais-je même tenté de dire. Une approche que le fils de militaire que je suis a bien appréciée. Pourtant, progressivement, le récit tourne au drame. Cette période de la vie de l’auteur sera si souvent marquée par des événements forts (la mort par épuisement d’un camarade, le viol d’un autre, de violentes envies suicidaires, …) que ce qui ne devait être qu’un ennuyeux passage obligé va le transformer à jamais, le traumatiser. Au début de la lecture, je me suis dit : « ben oui, on joue à la guerre, à se faire peur (comme ce passage où un instructeur explique le plus sérieusement du monde que si l’un de vos camarades est blessé, il vaut mieux l’abandonner, voire l’achever que de s’en encombrer. Un raisonnement logique en temps de guerre mais qui parait si absurde en temps de paix) »… mais la guerre n’est pas un jeu. Et Christophe Girard se charge de me le rappeler à coups de poing dans mes narines de lecteur naïf. J’ai aimé cette progression, cette manière d’emmener le lecteur vers la rupture tout en lui faisant comprendre pourquoi, dans certaines circonstances, on peut justement admettre l’inadmissible. Je dois bien avouer qu’en tant que lecteur, assister à un tel enchainement de situations extrêmes est, par moments, difficile à croire. On ne peut se dire qu’une seule chose : comment est-ce possible ? Comment peut-on aux abords de l’an 2000, dans un pays civilisé, laisser passer pareils comportements ? Rien que pour cet aspect du récit, véridique (je me dois de le rappeler), lire cet album me semble important. Et puis ; il y a la manière dont l’auteur se livre. Sans détours, avec sincérité, il nous offre d’assister, impuissants, à sa propre transformation. On ne nait pas salaud mais on le devient en fonction des circonstances, c’est vraiment ce sentiment qui émarge de cette mise à nu. Vous l’aurez compris : par son contenu, cet album m’a marqué. Et si ce contenu m’a marqué, c’est que le contenant est bien maitrisé. La narration est bien présente mais se lit sans peine. Le découpage en multiples chapitres permet de séquencer cette progression dans l’horreur. Le gaufrier régulier en multiples cases carrées est autant un clin d’œil vers la mentalité militaire (où tout doit être carré, dixit Christophe Girard) qu’une manière de créer un rythme répétitif, hypnotisant. Le dessin, lui, m’est apparu par moments maladroit. Un peu raide, parfois imprécis, il convient cependant bien à ce genre de récit biographique et ne constitue certainement pas un frein à la lecture. L’auteur a une patte personnelle et si celle-ci n’est pas totalement à mon goût, elle n'est pas non plus de nature à me faire fuir. Je suis même convaincu que beaucoup de lecteurs aimeront particulièrement ce style. Pays kaki 92/08 est donc l’œuvre d’un écorché vif, mais aussi d’un auteur de bandes dessinées doué, capable de se livrer sans détour sur le fond et d’offrir une forme travaillée. Un album à lire, selon moi. Ma seule réticence vient du caractère incroyable de certaines des anecdotes livrées ici mais après m’être entretenu avec son auteur, je suis plus enclin à le croire… à croire à cette mise en abyme ahurissante, à croire à ce monstrueux gâchis. La guerre n’est pas un jeu. La guerre détruit des vies. Cela peut sembler évident mais dans mon petit confort moderne, j’avais tendance à l’oublier. Christophe Girard m’a réveillé…

27/12/2012 (modifier)