La Brigade Chimérique - Ultime Renaissance

Note: 4/5
(4/5 pour 3 avis)

Près d'un siècle après avoir été effacés de la mémoire collective, les surhommes légendaires de La Brigade Chimérique font leur retour à Paris !


Les super-héros 'à la française' Paris Super-héros

Dans le métro parisien, l'apparition d'un mutant monstrueux pousse les autorités à ouvrir leurs archives. Elles y trouvent trace de vieux justiciers aux pouvoirs étranges, oubliés depuis la seconde guerre mondiale. Charles Dex, « spécialiste en aberrations scientifiques », est chargé de les ramener à Paris. Mais y a-t-il encore une place pour les superhéros européens au XXIe siècle ?

Scénario
Dessin
Couleurs
Lou
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution 05 Janvier 2022
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série La Brigade Chimérique - Ultime Renaissance © Delcourt 2022
Les notes
Note: 4/5
(4/5 pour 3 avis)
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11/02/2022 | PAco
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L'avatar du posteur Tomdelapampa

J’aime beaucoup La brigade chimérique 1ère du nom, le scénariste remettait au goût du jour le « super-héros » européen de bien belle manière. Depuis Lehman a approfondi cet univers avec quelques séries dérivées, même si je ne les ai pas toutes lues, je trouve le tout d’une sacré richesse et cohérence. La brigade chimérique ultime renaissance s’annonce comme une conclusion (ouverte) de tout ce petit monde. Un sacré paris pour son maître d’orchestre, d’autant que cette fois le récit se passe à notre époque, fini la première moitié du XXème siècle. La grande question est comment faire revivre ces héros « old school » et oubliés ? A mes yeux une sacré gageure. Le scénariste s’en sort admirablement, sur un récit au fond « Marvelien » (le grand vilain m’a direct fait penser à Galactus) il propose un bel hommage au genre super-héros et en allant bien plus loin avec cette thématique européenne. Il construit un récit intelligent et rempli de nombreux clins d’œil habilement placés et plutôt discrets, les connaisseurs apprécieront, j’ai personnellement été surpris de quelques uns, ce monde est commun à celui du Shield, du Bprd … et même de Masqué, ceux ne sont que des détails sans importance mais rajoutent au charme. En postface l’auteur avoue avoir accouché de cette œuvre dans la douleur, ça ne se voit pas à la lecture, j’aime beaucoup ce qu’il propose. Une idée qui marche sur un fil mais qui reste toujours sur un juste équilibre et dosage. Je dis bravo. Aux dessins, Stéphane De Caneva assure la relève de Gess de belle manière, il rend une très bonne copie, une lecture fluide. J’ai pris grand plaisir à découvrir cette aventure et retrouver certains personnages (ou versions). Je conseille forcément à ceux ayant appréciés les précédentes séries, mais aussi aux néophytes, la force de cet univers est que ça forme un grand tout mais que chacune peut se lire indépendamment. Enfin un mot sur l’édition, pas donné mais vous en aurez pour votre argent en temps de lecture, et l’album est très classe avec sa jaquette, une couverture en partie toilée et maquette hommage au début de l’aventure chez l’Atalante.

13/01/2023 (modifier)
Par Blue boy
Note: 4/5
L'avatar du posteur Blue boy

Avant toute chose, je préfère annoncer la couleur. L’auteur de ces lignes, et ceux qui me connaissent ne seront pas surpris, lit peu de comics et n’a aucune réticence à s’avouer profane en la matière, si ce n’est les quelques rares Marvel glanés ça et là durant une enfance déjà lointaine, et plus récemment des ouvrages d’Alan Moore ou de Robert Kirkman. Pardon pour les inconditionnels ! Mais c’était sans compter Serge Lehman, qui est arrivé avec son érudition unique dans le domaine et son ambition digne d’un titan (oui !), celle de faire revivre les « surhommes » (traduction européenne de superhéros) de l’époque dite « du radium », en référence à Marie Curie, première femme nobélisée pour ses travaux sur l’élément chimique. Car on l’ignore souvent, la chercheuse a inspiré nombre de feuilletonistes de la première moitié du XXe siècle, dans un genre qu’on n’appelait pas encore « science-fiction », le « merveilleux scientifique ». A commencer par Jean Severac, héros amnésique qui aurait travaillé avec Marie Curie dans son institut du radium et sera cité comme le Soldat inconnu dans le récit. A ses côtés, nous retrouverons Jean Lebris, alias l’Homme truqué, héros de la guerre des tranchées doté d’une vue surhumaine suite à une opération des yeux (créé en 1921 par Maurice Renard), et Felifax, homme-tigre surpuissant issu d’une expérience génétique, un personnage sorti de l’imagination de Paul Féval fils. Des personnages qui curieusement tombèrent dans l’oubli dès le début de la Seconde guerre mondiale… Dans « La Brigade chimérique – Ultime Renaissance », ces personnages formeront donc l’équipe de superhéros missionnés par le professeur Charles Dex pour défendre le Grand Paris contre les menaces diverses, dans un premier temps venues des sous-sols de la capitale (les hommes-rats donc), puis dans un second temps d’outre-espace (Chob). Serge Lehman a donc puisé, à l’aide de ses bras puissants (oui, très puissants les bras !), dans la mythologie de l’époque, en ressuscitant, sans nostalgie aucune, ces créatures de l’ « hypermonde », sorte de monde parallèle où la fiction dialogue avec la réalité. Cet opus est la suite de la première série intitulée simplement « La Brigade chimérique », avec la participation du fidèle Gess au dessin, déjà co-auteur d’autres productions de Lehman empruntant à cet univers (« L’Homme truqué » et « L’œil de la nuit »). Inutile de dire que cette suite est une réussite, et même le béotien que je suis a traversé cette lecture avec engouement voire émerveillement grâce notamment au talent narratif de l’auteur et malgré les références pléthoriques qui jalonnent l’ouvrage et ne font au contraire qu’enrichir nos connaissances ! D’un point de vue graphique, Stéphane de Caneva remplit parfaitement le cahier des charges de ce que doit être un « comic book ». Les scènes spectaculaires et « couillues » ne manquent pas, son trait réaliste et son sens du mouvement sont efficaces, et la mise en page correspond aux codes américains du genre. Mais la comparaison s’arrête là. La principale différence est que l’action se situe non pas à New York ou L.A., mais principalement en région parisienne, dans ce fameux « Grand Paris » qui pour certains appartient toujours au futur, tant il peine à prendre forme. S’il peut paraître anachronique au départ, le lecteur s’habitue pourtant très vite à ce parti pris qui consiste à réintégrer l’Europe dans la pop-culture après l’éclipse qui dure quasiment depuis la Seconde guerre mondiale, un objectif devenu sacerdoce pour Serge Lehman. L’autre caractéristique notable qui distingue « La Brigade » des productions U.S., c’est l’aspect et le genre de ces super-héros. Exit les corps bodybuildés des confrères yankees (qui sont assurément pour beaucoup dans le succès des salles de sport de ce côté-ci de l’Atlantique !). Nos « vieux » héros ont le physique modeste : l’Homme truqué (Jean Legris) est constitué de métal à 90 %, d’une corpulence plus raisonnable que celle de Robocop, tandis que le Soldat inconnu (Séverac), certes très bien gaulé, ne porte ni collant ni tenue moulante destinés à faire ressortir sa musculature. De plus, il n’échappera à personne que la « dream team » qu’est la Brigade respecte quasiment la parité. En effet, le lecteur découvrira vite que l’homme-tigre originel Félifax est désormais une femme-tigre, de son vrai nom Béatrice Ortega, et on assistera à la métamorphose de Nelly Malherbe, recrutée au départ pour ses compétences en ressources humaines, qui va peu à peu prendre conscience des super-pouvoirs dont elle a hérité de son arrière-grand-mère Palmyre. On apprécie accessoirement le chapitre scientifique, où Lehman introduit via quelques créatures d’outre-espace aux propriétés étonnantes (Chos, le redoutable « titan de l’espace » et la Xénobie, déesse cosmique polymorphe), des concepts quantiques et biologiques inconnus sur notre bonne vieille Terre. Tout cela fait de la « Brigade chimérique - Ultime Renaissance », pourrait-on dire, un vrai comics européen. Le format très vertical propre au genre est respecté, avec un découpage en huit épisodes qui auraient dû paraître les uns après les autres, mais Covid oblige, le projet est tombé à l’eau, comme l’explique Serge Lehman dans la passionnante post-face qui ne fait que dévoiler sa connaissance exhaustive du sujet. Le récit a finalement été publié en intégrale, et la motivation de David Chauvel, directeur éditorial quand il n’est pas scénariste, n’y est pas étrangère (on lui sera infiniment reconnaissant d’avoir cru au projet), car l’accouchement a été compliqué pour ce « bébé mal né ». Et pourtant, à l’heure où les menaces n’ont jamais été aussi grandes, le moment est peut-être venu pour cette bande dessinée de faire un vrai carton. Si à la base cela reste du divertissement, on peut y voir en filigrane les dangers qui traversent notre époque : réchauffement climatique et catastrophes environnementales rampantes, terrorisme de masse, violences urbaines, pandémies mondiales, montée de l’extrême-droite (les fameux hommes-rats ne sont-ils pas la meilleure métaphore pour décrire le phénomène ?), et désormais menace nucléaire avec la récente guerre en Ukraine. L’Europe que l’on croyait un havre de paix depuis 1945 est désormais un théâtre potentiel de conflits et de catastrophes, et peut-être plus encore la France, un pays où les tensions et les violences tendent souvent à s’exacerber plus qu’ailleurs. Et aujourd’hui, alors que l’Europe se cherche, sachant que depuis l’élection de Trump, elle ne peut plus compter totalement sur ses alliés historiques que sont les Etats-Unis, qu’elle doit désormais s’inventer une nouvelle identité et ne compter que sur elle-même pour sa défense, nos surhommes nietzschéens symbolisent à merveille cette problématique, prenant en quelque sorte leur revanche après des décennies d’effacement derrière les Superman, Batman et autres Captain America. Pourrait-on avancer l’hypothèse, sans tomber dans le chauvinisme, que ces héros oubliés ont été victimes de la colonisation culturelle (ce qu’on appelle aujourd’hui le « soft power ») menée avec succès par l’Oncle Sam dans la foulée du plan Marshall ? Et si leur heure était venue, et si la conjoncture actuelle était la bonne, celle qui leur permettra de s’imposer à nouveau ? Plongez-vous sans hésiter dans cette saga à la fois délicieusement régressive et pleine de sagesse, avec des héros plutôt humbles donc forcément attachants ! Une occasion d’en savoir plus sur une page de l’histoire culturelle européenne méconnue et des héros injustement refoulés aux portes de la pop-culture mondiale de la deuxième moitié du XXe siècle et de notre début de millénaire. Cet ouvrage conséquent ne fait que leur rendre justice, et cette chronique inhabituellement longue tente d’y contribuer à sa façon. Terminons juste en saluant le travail de Delcourt qui nous a concocté un très bel ouvrage avec dos toilé.

10/06/2022 (modifier)
Par PAco
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur PAco

Et voilà que nous revient par la bande notre fumeuse Brigade Chimérique pour notre plus grand bonheur ! Les auteurs de cette saga qui avait su trouver le succès avec des Super Héros "à l'européenne" avait effectivement laissé un petit trou de serrure pour un retour possible de leurs héros quand ils avaient clôturé leur série. Gess au dessin n'étant plus disponible malgré un début de travail sur ce projet (Contes de la Pieuvre oblige), c'est Stéphane De Caneva qui a brillamment pris la suite au pied levé pour coucher sur le papier cette suite imaginée par Serge Lehman. Car autant ces Super Héros cadraient parfaitement avec l'imagerie et l'imaginaire du début XXe siècle, autant les faire ressurgir dans notre monde contemporain relevait du défi casse-gueule. Mais Serge Lehman en a sous la semelle, et son histoire fait plus que tenir la route en nous en mettant plein les yeux ! Il a parfaitement su trouver les angles pour jongler entre continuité et renouveau avec toujours au centre ses personnages. Et quels personnages ! Waouw ! Ses "méchants" sont juste géniaux ! J'adore ! J'ai dévoré ces 260 pages découpées en chapitres façon comics. L'esthétique est toujours de mise et les nombreux clins d'oeil qui parsèment les cases feront la joie des amateurs du genre pour retrouver toutes les références discrètes qui fourmillent à droite à gauche. Alors si vous avez été adepte de La Brigade Chimérique, foncez, vous ne pourrez qu'être ravis, pour les autres, foncez, vous ne pourrez qu'être conquis, cet album pouvant très bien se lire malgré tout sans avoir lu la série mère !

11/02/2022 (modifier)