Dieter Lumpen

Note: 3.2/5
(3.2/5 pour 10 avis)

Le tandem hispano-argentin Zentner et Pellejero nous livre une remarquable aventure esthétique autant que romanesque dont exotisme et sentimentalité constituent les cadres.


Auteurs argentins Auteurs espagnols Cimoc Corto Maltese magazine

C'est en 1985 que le personnnage de Dieter Lumpen voit le jour et parait dans la revue espagnole "Cairo". Ruben Pellejero et Jorge Zentner en sont les auteurs. Ruben Pellejero possède un trait riche, souple, et élégant qui donne aux planches de cette série une vitalité et et une énergie sans pareil. Jorge Zentner, lui, outre l'extraordinaire culture cinématographique dont il fait preuve tout au long de son oeuvre, enchaîne les mots avec une virtuosité déconcertante. Ses textes sont de toute beauté tant au niveau du fond que de la forme. Il connait les secrets de l'écriture et le prouve aisément. Quel autre mot que le mot "esthétique" pourrait mieux qualifier le talent de ces deux artistes ? Car il s'agit en fait de cela, de l'esthétisme, donc de l'art à l'état pur. Oui, ça on peut l'affirmer, c'est un personnage notre Dieter Lumpen ! Digne fils spirituel de Corto Maltese, il parcourt le monde d'un pas nonchalant en affichant une mine affable. Mais qu'on ne s'y trompe pas, Dieter Lumpen n'est pas un naïf et sait choisir son camps au gré des circonstances et pas toujours celui qu'on croit deviner à l'avance. Certaines situations demandent parfois des sacrifices. Ainsi dans l'épisode "Jeux de Hasard", Dieter n'hésite pas à vendre un cadeau reçu dans "Le Poignard d'Istanbul" et qui semblait avoir une grande valeur sentimentale. Dans "La Voix du Maître", alors que son ami Kutrz lui demande de l'accompagner dans un pélérinage, Dieter déclare de but en blanc : "Pas question ! Laisse-moi plutôt dans ta maison avec un domestique à ma botte. C'est ma vraie place dans ce monde.".Plus grave encore, dans "Jeux de Hasard", il choisit, à contrecoeur il est vrai, la passivité alors que celui-là même qui l'avait sauvé est sur le point de se tuer. Dans "Le Sale Type du Film", il réagit également à contrecourant. Il tue plusieurs personnes dont un agent d'Interpol et s'enfuit avec le magot. Tout cela n'est pas très réjouissant. Et pourtant, c'est ce qui contribue aussi à faire le charme de Dieter Lumpen. En fait, ce n'est pas réellement un mauvais bougre. Il apparaît même plutôt sympathique. D'ailleurs, il n'adopte pas toujours des attitudes aussi inattendues. En général, il faut bien le constater, Dieter tente toujours au maximum de conserver un air détaché face aux personnes et aux évènements qui l'entourent. Mais il lui arrive également de perdre quelque peu les pédales. Dans "Les Péchés de Cupidon" par exemple, il baisse rapidement pavillon en découvrant que la demeure qu'il vient d'acheter est en proie à des phénomènes qu'il est incapable d'expliquer et encore moins de maîtriser. Il s'enfuit dès lors sans demander son reste. Ce que l'on retiendra de tout cela, c'est que Dieter Lumpen est avant tout un fataliste qui laisse souvent les choses aller d'elles-mêmes sans se poser trop de questions. "On ne peut échapper à son destin" pourrait être sa devise.

Scénario
Dessin
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution Janvier 1986
Statut histoire Histoires courtes 3 tomes parus

Couverture de la série Dieter Lumpen © Mosquito 1986
Les notes
Note: 3.2/5
(3.2/5 pour 10 avis)
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09/05/2004 | Ro
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Par PAco
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
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Mosquito a le chic pour me faire découvrir des auteurs de BD pleins de talents qui me sont passés sous le nez dont je redécouvre le travail souvent par hasard... Cela avait déjà été le cas avec Sergio Toppi ; cette fois c'est le duo Ruben Pellejero au dessin et Jorge Zentner à la plume. Si l'on fait abstraction de cette couverture des plus ratée à mon goût (elle ne révèle rien de la richesse de cette série, voire donne l'effet inverse....), cette intégrale est un pur régal de lecture pour tout amateur d'Aventure. Car avec Dieter Lumpen, pas le temps d'investir dans la charentaise ! Si le sieur aime à se poser de temps en temps dans un petit coin de paradis pour reprendre son souffle ou simplement pour profiter de la vie, c'est l'Aventure qui vient lui mettre son pied au cul pour repartir de plus belle. La Légion, c'est des vacances à côté ! Vous vouliez voir du pays ? Vous allez être servi ! Car Jorge Zentner s'amuse à trimbaler son personnage à travers tous les endroits les plus majestueux et les plus évocateurs du globe. Turquie, Tunisie, France, Etats-Unis, Caraïbes... c'est à travers les années 40 et des personnages toujours plus ou moins recommandables que Dieter se retrouve embrigadé plus ou moins malgré lui, parfois juste pour tromper l'ennui, dans des tribulations épiques où le surnaturel pointe même parfois le bout de son nez. Ajoutez à cette odyssée sans réel but le dessin somptueux de Ruben Pellejero qui tant dans les cadrages que par sa maîtrise du noir nous propose des planches toutes plus magnifiques les unes que les autres, et vous obtenez une série dont on ne se lasse pas et qui n'appelle qu'une chose : la relecture... Amis de l'Aventure, ne ratez pas le coche, votre guide à travers le globe vous attend !

19/12/2014 (modifier)
L'avatar du posteur Mac Arthur

Voici un de mes personnages préférés et une de mes séries fétiches. Dieter Lumpen, glandeur à l’élégance désabusée, embarqué à son corps défendant dans les aventures les plus variées, et s’en sortant rarement avec tous les honneurs, est un parfait antihéros de série d’aventures. Et si sa morale est parfois discutable, le personnage est doté d’un grand cœur et d’une belle humanité. De plus, les aventures en question sont on ne peut plus variées. Souvent exotiques, courtes la plupart du temps (les deux premiers tomes sont des recueils de nouvelles, le troisième propose, lui, une histoire complète mais pas vraiment linéaire), parfois policières, parfois plus proches du drame intime, souvent prétexte à une critique sur la colonisation et, plus particulièrement, sur le regard supérieur posé par les européens sur les autres peuples de la terre, parfois teintées (et même plus) de fantastiques, elles garantissent un plaisir de lecture toujours renouvelé. Côté dessin, Pellejero fait montre d’une belle dextérité. Son encrage est plus fin que sur ses œuvres plus récentes. L’ensemble peut donc sembler moins personnel mais j’aime ce style réaliste soigné, dynamique et expressif. Seule la colorisation m’est apparue, au début, quelque peu étrange. Je m’y suis cependant vite fait, et cette colorisation fait finalement partie de ces petites étrangetés qui confèrent à la série son style unique. La narration est l’incontestable point fort de la série, qui recèle de quelques répliques de haut vol. Je tiens donc à souligner la qualité du travail des différents traducteurs qui se sont penché sur la série. Bravo à eux (et à elles). Et puis, il y a ce troisième tome, au merveilleux délire logique, où toute la personnalité du dandy peut s’exprimer en toutes libertés. Là, j’ai été embarqué dans un bazar, mes amis, un bazar étrange, déroutant, mais que j’ai adoré tant j’aime être surpris par un scénario inventif fait avec un grand sérieux mais qui ne se prend pas au sérieux. Déjà, les deux premiers tomes étaient franchement bien, mais ce troisième, c’est du grand art ! S’il n’y avait eu que lui, j’aurais attribué « culte » à la série mais le « franchement bien » me parait plus justifié pour l’ensemble. Attention, si vous désirez acquérir la série, il semblerait que le tome édité chez Magic Strip ne reprend qu’une nouvelle (en noir et blanc) déjà présente sur le deuxième tome édité chez Casterman. Il serait donc sans doute judicieux d’en oublier l’achat. Remerciez Miranda pour le tuyau. Pour le reste, n’hésitez pas !

16/03/2010 (modifier)