Gaston en Normandie
Après Pauline à Paris, Benoit Vidal confronte les souvenirs de sa grand-mère et de son père aux sources historiques pour reconstituer son 6 juin 1944.
1939 - 1945 : La Seconde Guerre Mondiale Roman-photo Témoignages [Seconde Guerre mondiale] Europe de l'Ouest
Il devait être quatre ou cinq heures du matin, et moi j’étais réveillé. C’est curieux parce qu’à cette heure-là, les enfants étaient couchés normalement. Je ne sais pas pourquoi, mais je me vois dans la cuisine et ma mère arrive en me disant : « Mais qu’est-ce que tu fais là ? » Et puis on entendait des bruits, des bruits sourds, très loin. C’étaient les cuirassés qui bombardaient les blockhaus sur la côte. Gaston en Normandie a reçu le prix de la meilleure BD historique 2023 du site Cases d'Histoire.
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Date de parution | 19 Mai 2022 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
J’ai lu cet album dans la foulée de Pauline à Paris, et j’en ressors avec la même satisfaction. Il faut dire que « Gaston en Normandie » reprend les mêmes codes narratifs et iconographiques. Et qu’il est presque la suite de « Pauline à la plage ». En effet, il commence où le précédent album finissait, à savoir au moment du débarquement en Normandie de juin 1944. Benoit Vidal a pris conscience qu’il lui fallait compléter son enquête familiale en interrogeant Gaston (son père), pour croiser sa vision avec celle de Pauline (sa grand-mère donc). Comme pour le précédent album, j’ai bien aimé l’utilisation de photos (d’époque ou datée de l’interview de Pauline ou de Gaston) et de documents divers et variés, parfois réutilisés avec un cadrage différent. Ça ne fait jamais artificiel, et ça complète très bien le récit. Un récit familial certes. Mais ici plus que dans « Pauline à Paris », le récit familial s’estompe quelque peu derrière quelque chose de plus large : c’est la vision « ordinaire » d’un événement « extraordinaire », c’est aussi petite et grande histoire s’imbriquant, un pan de l’histoire nationale qui est éclairé. J’apprécie aussi encore une fois la façon de Vidal de se questionner sur ces témoignages, sur ce qu’ils recèlent de « reconstruction », en les confrontant quand c’est possible avec des archives. Au final ce travail de longue haleine (interviews et retranscription ; recherche d’archives et de documents iconographiques ; construction scénaristique et rédaction) permet au lecteur de toucher de près l’Histoire, et à Vidal de combler les trous, les non-dits, les flous de son histoire familiale. Une belle réussite. Note réelle 3,5/5
Étonnée et agréablement surprise par la lecture de Pauline à Paris de Benoît Vidal, j'avais découvert un roman-photo assez différent de ce que j'imaginais : malin, inattendu, il mêle - les ressources d'archives publiques, (journaux, revues pour enfant, catalogues, cartes, plans, affiches...) - le témoignage oral (avec une retranscription fidèle du souffle du récit grâce aux portraits photographiques qui se succèdent en attrapant les expressions, les phrases bien choisies, associées aux regards silencieux qui font apparaître toute la subtilité du message et la fragilité du personnage interviewé ; dans le précédent opus, il s'agissait surtout de Joséphine, la grand-mère de l'auteur.) - les archives photographiques familiales (les photos de mariage, de communion, de fratries...) - des images plus farfelues, jaillies de l'imagination de l'auteur au moment où il écoute, ou peut-être au moment où il assemble, en tout cas ces quelques incursions graphiques apportent un regard intrigant et personnel qui devient attachant au fil des pages... J'ai donc commandé aux éditions fblbl "Gaston en Normandie" et j'ai retrouvé toutes les qualités de ma première lecture. A la grand-mère se rajoute une seconde source, le père : Gaston. Les deux récits s'entremêlent pour nous présenter un récit du débarquement à Bayeux vu par celles et ceux qui ne combattent pas et qui semblent, dans la guerre des autres, comme des chiens dans un jeu de quilles. Ce récit très intéressant en lui-même, est émaillé de découvertes archivistiques, de photographies du grand-père qui apparait dans un coin, ou même parfois au premier plan. Ces victoires du chercheur lui donnent l'occasion de questionner son père, si effacé lorsque Benoit était petit, sur son propre père, Lucien , qui s'avère être le fils d'un alsacien implanté à Oran, Gustave. Ces destins enchâssés, dirigés par des décisions politiques qui les ont dépassés, contraints et dont ils ont transmis la frustration, la souffrance et même un peu de honte d'être ces fétus de paille dans le souffle de l'histoire. De la colonisation à la guerre d'Algérie en passant par les deux guerres mondiales, les familles françaises ont toutes laissé des plumes dans leurs relations familiales. Des pères traumatisés par des horreurs, absents, blessés voire morts, ont détricotés les rapports familiaux laissant des séquelles sur plusieurs générations; Cette histoire est très personnelle mais en réalité elle fait échos à toutes les familles, cherchez dans votre arbre généalogique et vous trouverez surement un arrière grand-père devenu alcoolique au retour de la guerre, un grand-oncle estropié qui ne s'est jamais marié, un autre qui a perdu un poumon à cause des gaz de combats... Dans tous les cas une douleur qui a rendu difficile la communication avec les enfants. Le plus touchant pour moi a été l'histoire de Lucien qui emmène son fils ado en train quelques années après la guerre, à la recherche du village natal de son père en Alsace et qui ne le trouve pas... Le village avait changé de nom... J'ai trouvé ça plus triste que tout ! Bref Cette BD est un voyage vers la compréhension du passé qui aide à la compréhension de nous-même : nous comprenons avec Benoît que nos sommes le réceptacle de tous ces destins tragiques, notre tristesse est légitime, mais j'ai ressenti ce récit comme une part de réparation envers ces générations sacrifiées... Restons vigilants parce que les politiques sont bien capables de nous remettre la tête sous l'eau guerrière...
Encore un album qu'il est difficile de vraiment classer en tant que BD même si l'éditeur n'hésite pas à le faire. En effet, c'est bien de l'art séquentiel et une mise en page à base de cases et de bulles de dialogues, mais je ne crois pas que l'auteur ait réalisé le moindre véritable dessin dans cette oeuvre, hormis un petit doute sur un dessin d'enfant à un moment donné. Le reste est en grande majorité du roman-photo au sein duquel sont insérées de nombreuses photos d'époque, des illustrations dessinées par d'autres, ainsi que plusieurs collages et photomontages quant eux véritablement réalisés par l'auteur. Dans tous les cas, ça se lit bien comme une vraie BD. Il s'agit du recueil par l'auteur du témoignage de sa grand-mère et de son propre père sur leurs souvenirs du Débarquement des Alliés le 6 Juin 1944. Ils vivaient en effet à proximité de Bayeux à l'époque et ont vu les Anglais arriver chez eux le jour même. Ils nous livrent également leurs souvenirs des innombrables anecdotes des jours qui ont précédé et qui ont suivi cet évènement historique. A travers eux, nous avons la vision de purs civils de ces faits stratégiques, avec certes de nombreux soldats et quelques tragédies, mais aucune compréhension véritablement militaire, juste ce qu'ils ont vu et ce qu'ils ont ressenti à l'époque. C'est très intéressant, d'autant plus que Benoit Vidal ajoute par dessus une double réflexion, d'une part sur sa propre relation avec sa famille et les difficultés à communiquer entre pères et fils dans celle-ci, et d'autre part sur la réalité historique de ces souvenirs qui souvent se mélangent et se confondent, comme il a pu le constater au cours de l'écriture de son oeuvre, constant parfos de vraies erreurs dans ce qui lui a été raconté et d'autres fois au contraire des informations que les historiens ou la presse de l'époque semblaient avoir oubliées. A noter également une part d'humour et d'émotion dans la manière dont les deux parents de l'auteur racontent les faits, avec un parler très vivant et retranscrit tel quel par Benoit Vidal, tant dans le texte que dans les photos qu'il a prises de ceux-ci au moment où ils les racontaient. Cela donne une légèreté et une modernité à la narration qui permet de ne pas sombrer dans le récit morne de simples faits historiques. C'est aussi dynamique qu'une vraie BD dessinée de manière cinématographique. Bref, même si je ne suis pas un grand fan de roman-photo, ce fut une lecture instructive et parfois touchante aussi.
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