Un visage familier (Familiar Face)

Note: 3/5
(3/5 pour 1 avis)

Angoulême 2022 : Prix de l'audace FIBD Marchant sur les traces d’un Georges Orwell ou d’un Aldous Huxley, Michael DeForge décrit dans Un Visage familier une dystopie inquiétante, un monde futuriste où règne une forme de dictature de la technologie.


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Dans ce monde, les routes, les villes, mais également leurs habitants, sont régulièrement «updatés»; d’un jour à l’autre les immeubles changent de forme et place, les chemins ne mènent plus aux mêmes destinations, et les êtres humains se réveillent avec des visages différents, des côtes en moins ou des jambes en plus. Le livre suit plus particulièrement une employée du gouvernement (et narratrice du livre), qui travaille au département des plaintes; son rôle se résume à les lire, n’y apportant ni réponse, ni solution, comme si le simple fait de fixer un écran signifiait que «quelqu’un s’en occupe». Le lendemain d’une optimisation, la compagne de l’employée disparaît sans laisser de trace – est-elle partie volontairement, ou a-t-elle été victime d’une optimisation? A la recherche d’un signe, dans une étrange ambiance de paranoïa, ce que découvre la narratrice, c’est que quelque part, il y a encore un peu de colère, d’indignation dans ce monde sans âme, et que la résistance s’organise… Michael DeForge excelle dans la description d’univers à la logique interne déroutante, et sa représentation d’une société outrageusement efficace, déshumanisée, fait froid dans le dos autant qu’elle stimule l’esprit, comme une mise en garde dénuée de moralisme. Le trait organique de DeForge, sa palette de couleurs acidulée et son étrange sens de l’humour viennent parfaire ce récit qui navigue entre pure science-fiction et pamphlet politique. La liberté avec laquelle l’auteur canadien aborde le dessin ne doit tromper personne : DeForge est un narrateur hors pair, et sans doute une des meilleures choses qui soient arrivées à la bande dessinée durant cette dernière décennie.

Scénario
Dessin
Traduction
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 05 Novembre 2021
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Un visage familier © Atrabile 2021
Les notes
Note: 3/5
(3/5 pour 1 avis)
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14/04/2023 | Noirdésir
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Une société vaguement totalitaire domine l’univers développé ici par le canadien Deforge. Un univers a priori froid et inquiétant par son absence d’empathie. Les habitations, les infrastructures, mais aussi les gens, tout peut être à tout moment réinitialisé, transformé, transporté, sans que soient consultés ou informés les personnes concernées par ces changements de lieu, d’environnement amical, professionnel, etc. On peut ainsi changer de colocataire (certains sont mêmes des robots, d’autres des acteurs jouant ce rôle !). Au milieu de cette ambiance qui se met en place peu à peu, un personnage féminin (qui sert de narratrice au récit), simple rouage de cette mécanique absurde et inquiétante, qui occupe un poste subalterne dans une sorte de ministère chargé des « plaintes » (de les enregistrer en tout cas, tant leur « traitement » reste finalement purement virtuel). Comme Winston Smith dans « 1984 » (il y a vraiment pas mal de points communs avec le chef d’œuvre orwellien), notre narratrice s’aperçoit que des choses « clochent », c’est le petit grain de sable habituel. Voilà pour l’intrigue (dans ses très grandes lignes bien sûr), qui semble suivre des chemin connus. Mais évidemment le traitement graphique de Deforge fait immédiatement sortir l’ensemble du déjà-vu. Ses couleurs acidulées semblent contredire l’aspect délétère et mortifère de la société décrite, alors que des formes plus ou moins bizarres sont chargées de donner vie aux êtres et aux objets. C’est très original. Très éloigné du trait franco-belge, voire même du comics classiques, mais malgré tout très lisible et agréable – il faut juste un temps d’adaptation si vous ne connaissez pas cet auteur, mais ça vaut le coup de faire l’effort de dépasser ses appréhensions à ce sujet. J’ajoute que, comme à l’habitude, Atrabile a fait un beau travail, avec une couverture cartonné épaisse, comme le papier, un petit format presque carré : c’est visuellement agréable, on a bien en main l’album, qui est aussi un bel objet. Note réelle 3,5/5.

14/04/2023 (modifier)