Femme rebelle - L'histoire de Margaret Sanger (Woman rebel: The Margaret Sanger Story)

Note: 3.75/5
(3.75/5 pour 4 avis)

L'histoire incroyable d'une militante féministe, pionnière du planning familial.


Biographies Documentaires Drawn & Quarterly Féminisme Les coups de coeur des internautes Les sociétés à finalité sociale Pionnières

Margaret Sanger était une infirmière, sage-femme et militante féministe libertaire américaine. C'est une pionnière du contrôle des naissances à l'aube du XXème siècle, une époque où le simple fait d'informer sur la contraception était illégal. Sanger a fondé l’association qui deviendra plus tard le planning familial américain et a amorcé la création de la pilule. Relativement méconnue sous nos latitudes, Femme rebelle propose de découvrir cette actrice incontournable de la libération de la femme.

Scénario
Dessin
Couleurs
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 24 Août 2017
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Femme rebelle - L'histoire de Margaret Sanger © NADA 2017
Les notes
Note: 3.75/5
(3.75/5 pour 4 avis)
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06/02/2019 | Spooky
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Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
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Rebelle pour une cause - Il s'agit d'un récit complet, indépendant de tout autre, publié sans sérialisation. Sa première édition date de 2013. Il est écrit, dessiné, encré et mis en couleurs par Peter Bagge (plus connu pour sa série sur Buddy Bradley, voir Buddy Bradley, Tome 1 : En route pour Seattle). Il commence par une introduction de 2 pages rédigée par Tom Spurgeon, un spécialiste des comics. Il se termine par un texte de 2 pages dans lequel Bagge explique ce qui l'a motivé à réaliser une bande dessinée sur Margaret Sanger. Suivent 18 pages de texte en petits caractères, dans lesquelles il précise le contexte des événements évoqués dans cette biographie, ainsi que l'identité des différentes célébrités apparaissant. Il termine avec une brève biographie, précisant les textes à parti desquels il a conçu son ouvrage. Cette histoire constitue une biographie de la vie de Margaret Sanger, en 72 pages de bandes dessinées. La première séquence se déroule dans les années 1880, alors que la jeune Margaret (née en 1879) va chercher son père en ville, en compagnie de ses frères, car un client le réclame à la maison, pour tailler une pierre tombale. Dans la séquence suivante, Margaret accompagne l'un de ses frères (d'une famille de 18 enfants) pour aller déterrer le cadavre d'un de leur frère mort jeune. Dans les pages suivantes, le lecteur suit ainsi la vie de Margaret Sanger, jusqu'en septembre 1966. Chaque séquence est assez courte (entre 1 et 3 pages) et revient sur une anecdote ou un événement dans la vie exceptionnelle de cette femme. Elle a consacré sa vie à la promotion des moyens contraceptifs aux États-Unis, allant du lobbying pour leur légalisation, à l'aide au développement de nouveaux moyens. Elle a croisé la route de personnages célèbres comme Herbert George Wells, John D. Rockefeller, Pearl Buck, et des hommes d'état éminents comme le Mahatma Mohandas Karamchand Gandhi. Lorsque que le lecteur découvre cet ouvrage, il s'interroge sur le bienfondé d'une biographie réalisée par Peter Bagge. Cet artiste réalise des dessins incluant une forte dimension caricaturale qui ne semble pas adaptée à une évocation historique. Dans la postface, il évoque ses difficultés à trouver des références photographiques pour que ses personnages soient ressemblants. le lecteur est en droit de s'interroger sur la nature de cette ressemblance. Bagge ne dessine pas du tout de manière photographique ou même réaliste. Bagge dessine les décors et les environnements de manière simplifiée, comme dans un dessin animé pour enfants. Il s'inscrit dans un registre qui tire les objets vers des épures, à l'opposé d'une forme descriptive souhaitant recréer l'objet en question. Il suffit de regarder comment il représente un lit ou un bat-flanc dans une cellule de prison : les traits sont droits et assurés, mais il délimite la forme de manière générique, sans se préoccuper des détails du modèle représenté. Il serait vain de tenter d'identifier une façade ou un détail architectural dans la représentation des immeubles d'un quartier défavorisé de New York en 1912 (page 13). Cela ne veut pas dire que ses dessins sont banals ou insipides. L'artiste les épure pour les rendre le plus facilement lisibles. Toutefois, le lecteur peut aussi constater que les tenues vestimentaires évoluent au fil des années qui passent, par exemple les robes laissant par la place aux pantalons pour les femmes, ou le port des chapeaux venant à disparaître. le lecteur peut donc regretter que les images ne transmettent pas plus d'informations visuelles sur l'époque et les lieux. La façon dont Peter Bagge dessine les personnages est beaucoup plus remarquable. Il exagère de manière prononcée les arrondis pour certaines parties du corps (surtout les bras) et pour les visages. Majoritairement Bagge représente les bras sous forme d'arc de cercle, sans marquer l'angle que fait le coude. Cela confère une apparence de bras en caoutchouc, une modélisation de l'anatomie qui fait penser à l'enfance, alors qu'il l'applique à tous les âges. Les visages présentent une apparence tout aussi remarquable, avec des formes de bouche très exagérées, des dents représentées comme des rectangles plats et blancs de taille uniforme. Les yeux ont souvent la forme de cercle, et régulièrement la forme d'amande. Contre toute attente les personnages arborent des expressions très parlantes, car ces représentations ont pour effet de les exagérer plutôt que de les affadir. L'artiste n'hésite à emprunter des codes visuels appartenant au registre de l'enfance, tel un adulte qui tire la langue quand il s'applique. Peter Bagge utilise donc son mode de représentation habituel, dans l'exagération comique, avec un effet étrange sur la narration de cette biographie. Ce registre graphique lui permet de représenter les événements les plus atroces, sans donner l'impression de voyeurisme ou de dramatisation sensationnaliste (même quand il s'agit d'une femme perdant son foetus au cours d'une manifestation où elle a été rouée de coups par les forces de l'ordre). Il a aussi pour effet de focaliser l'attention du lecteur plus sur le ressenti des personnages (exprimé par ses visages aux traits exagérés) que sur le fond de ce qui est en train de se jouer (la cause de la contraception). Le choix du découpage en courte séquence éloigne encore plus cette BD d'une biographie académique. de temps à autre, le lecteur éprouve l'impression que Bagge conçoit une séquence (de 1 à 3 pages) comme une forme de tranche de vie, avec une chute en fin de séquence. Cela insiste sur le caractère immédiat de la scène, en la détachant artificiellement de son contexte, c'est-à-dire la vie de Margaret Sanger. Le lecteur plonge donc dans une narration très personnelle au service d'une personnalité très controversée. Dans la postface, Peter Bagge explique qu'à ses yeux Margaret Sanger est la personne grâce à qui la contraception a été légalisée aux États-Unis, et qui a permis aux recherches sur la pilule d'aboutir. Il la voit donc comme la femme ayant permis le contrôle des naissances, ayant permis aux femmes de s'émanciper de leur rôle de reproductrice, et d'avoir un choix. En bon américain, il estime que ses actions ont eu un retentissement à l'échelle de la planète. Pourtant à lire cette biographie, le lecteur ne ressent pas ce parti pris de manière si affirmée. Bagge explique qu'il a dû choisir parmi les moments incroyables qui abondent dans la vie de cette dame exceptionnelle, qu'il a dû transiger sur la vérité historique à quelques reprises pour que cette BD conserve une taille raisonnable et qu'il s'est attaché à donner des éléments de contexte. Le lecteur peut effectivement suivre le parcours de vie de Margaret Sanger au travers d'épisodes sortant tous de l'ordinaire sans exception. Il se fait une idée approximative des difficultés auxquelles elles se heurtent (procès, exil loin de ses enfants, instrumentalisation, etc., un vrai roman). Il comprend dans les grandes lignes comment elle-même se révèle excellente manipulatrice des médias, et pour quelles raison elle acquiert une mauvaise réputation (même au-delà des ligues de vertus opposées à la contraception). Peter Bagge réussit à faire ressortir à la fois la raison pour laquelle Margaret Sanger prend des décisions équivoques, comment elle les justifie, et pour quelles raison elles apparaissent contre-productives. Ainsi il décrit une intervention de Sanger devant une assemblée féminine du Ku Klux Klan où elle a été invitée. Il souligne que déjà à l'époque (1926) cette organisation était plus que tendancieuse, pourquoi Sanger estime qu'elle doit faire son discours, et comment il est récupéré par la suite. Au final, le lecteur ressort très satisfait d'avoir découvert la vie (en accéléré) de cette militante pour la contraception, sous une forme divertissante (les dessins, les émotions) qui s'avère pédagogique sans être académique. Il attaque donc les 18 pages de la postface en souhaitant en apprendre plus. Il s'agit d'annotations explicatives de chaque séquence, un peu indigestes, oscillant entre justification de l'auteur et anecdotes pas toujours judicieuses.

21/04/2024 (modifier)
Par Yann135
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
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Avec les éditions Nada, vous aurez assurément une BD engagée. Les sujets sociaux sont au cœur de sa ligne éditoriale. Et franchement je vous l’assure, vous ne serez pas déçus ! Un peu de culture bon sang, cela n’a jamais fait de mal à personne. Avec cet album vous plongerez allégrement dans des moments de la vie trépidante et mouvementée de Margaret Sanger, une militante américaine qui lutta pour la contraception et la liberté d'expression, ce qui l'amena à fonder l'American Birth Control League (ligue pour le contrôle des naissances), qui devient le planning familial américain – rien que ça ! - sous le nom de Planned Parenthood. Initialement reçues avec beaucoup de résistances – nous sommes dans les années 1920/1930 - l’idée qu'une femme puisse décider de quand et comment elle serait enceinte, gagnèrent peu à peu de l'audience, tant dans le public qu'auprès des tribunaux. Margaret Sanger a été un élément fondateur dans l'accès à la contraception et au contrôle des naissances. Un CV impressionnant non ? Margaret Sanger a dû batailler pour se faire entendre. Elle était sur tous les fronts sans jamais se décourager, sans jamais être démoralisée, sans jamais courber l’échine devant l’adversité ou la justice des hommes. Les menaces reçues, sa santé vacillante l’ont rendue plus forte ! Sa détermination est à saluer par tous car le travail accompli est stupéfiant. Sa cause est au-dessus de tout, même de sa propre famille. Il faut l’avouer, son opiniâtreté sans faille à changer le cours de l’histoire de millions de femmes à travers le monde. L’accès légal à la contraception est sa plus grande victoire. Margaret Sanger, je le dis haut et fort devrait être prix Nobel ! C’est presque une sainte ! Pourtant aujourd’hui, alors que cela devrait être un acquis, la cour suprême des Etats- Unis a annulé en juin 2022 le droit à l’avortement dans tout le pays ! Chaque état pourra donc autoriser ou d’interdire l’IVG ! Mais dans quel monde vivons-nous ? Comment est ce possible encore aujourd'hui ? Nous ne sommes pas encore sortis le cul des ronces ! Peter Bagge a réussi son pari. Faire une biographie dessinée dynamique tout en mettant l’accent sur la force de cette femme incroyable. Les chapitres sont courts. Ce s’enchaine aisément. La lecture est fluide et subtile. Et pourtant ce n’est pas aisé comme exercice. Je suis donc particulièrement séduit par le rendu énergique. Cette bande dessinée engagée est magnifique. Je recommande vivement sa lecture surtout que les éditions Nada viennent de re imprimer cet album.

26/09/2022 (modifier)