Chair à canon (Carne de canon)

Note: 4/5
(4/5 pour 2 avis)

Publié en Espagne en 2020 à La Cúpula, Carne de cañón est le premier livre d’Aroha Travé. Elle a reçu pour cette bande dessinée le 1er prix ACDCómic de la meilleure autrice émergente et les prix révélation du Salón del Comic de Barcelone, du Salón del Cómic de Valencia et du Santa Cruz Cómic.


Auteurs espagnols Banlieue Barcelone La BD au féminin Trash

Yanira et son frère Kilian sont deux enfants débor­dant d’ima­gi­na­tion, qui dans leur appar­te­ment d’une banlieue de Barce­lone s’in­ventent des histoires de poli­ciers sumo, de bandits et de shériffs, et que la réalité vient rattra­per plus souvent qu’ils ne le voudraient. Entou­rés de person­nages pathé­tiques ou carré­ment agres­sifs, proté­gés par une maman aimante mais hargneuse, igno­rés par un père absent, les enfants vivent avec un natu­rel confon­dant des aven­tures à la fois terribles et drôles.

Scénario
Dessin
Traduction
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 17 Février 2023
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Chair à canon © Flblb 2023
Les notes
Note: 4/5
(4/5 pour 2 avis)
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31/03/2023 | grogro
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L'avatar du posteur Noirdésir

Un album étonnant, plein de grossièretés, qui montre un quartier délaissé, dans lequel vivent des déclassés, pas mal de « cas sociaux » et autres personnages éloignés des cadres de la société. Drogue, vulgarité (des situations et surtout du langage !), il y a un côté trash amusant (en particulier lorsque la mère célibataire abreuve ses mioches de mots orduriers, en fumant, et en les laissant seuls – ils sont très jeunes ! – au milieu de la mouise. Il n’y a pas réellement de message politique, de critique de la société – dont les spécimens exhibés ici sont franchement peu glorieux. Mais Aroha Travé ne nous montre que les bas-fonds de la société (y compris le curé pédocriminel). De l’humour bien crasseux, mais pas que. Tout le passage où la mère avec une copine cherche à graffer un message sur la bagnole de son ex pour lui faire payer des allocs, dans un esprit lose extrême, est assez jouissif. L’album se finit un peu en eau de boudin, sans réelle conclusion, comme si l’auteur voulait souligner qu’il ne nous montre que des tranches de vie, sans message. Mais j’aurais bien voulu qu’il termine son album par quelque chose de plus clair (avec noirceur bien sûr). C’est en tout cas une lecture plaisante, franchement irrévérencieuse, et quelque peu défouloir. Note réelle 3,5/5.

22/05/2024 (modifier)
Par grogro
Note: 4/5
L'avatar du posteur grogro

Qu'est-ce que j'ai rigolé ! Ha que c'est bon de rire ! Ça faisait d'ailleurs bien longtemps que je ne m'étais pas froissé une côte à la lecture d'une BD. Le style graphique d'Aroha Travé est tout à fait remarquable, tout en finesse, alors que par ailleurs, elle dépeint des situations trash à souhait. Parce que c'est trash, et par conséquent pas "que" drôle. Il y a forcément une dimension sociale puisque les personnages évoluent dans des cadres populaires. Dans cette banlieue de Barcelone, on a affaire à une mère dépassée, à des drogués, des zonards, issus de classes défavorisées... Mais tout cela est raconté sans patos, et avec une crudité éloquente. Et les visages sont très expressifs Globalement, on suit les enfants (un peu turbulents) d'une mère divorcée, un peu dépassée par les événements. Tout est donc raconté à hauteur d'enfant, mais avec un langage extrêmement fleuri. Les dialogues sont à ce titre vraiment savoureux, et écorcheront d'ailleurs les oreilles sensibles. Je me suis laissé dire que notre autrice s'appuyait sur des souvenirs d'enfance. Bref ! On n'a pas affaire à des modèles de vertu ! Il y a aussi quelques beaux passages, certes extrêmement brefs, comme ce dialogue de la petite Yanira avec le fantôme d'un enfant... (attention spoil) victime d'un curé pédophile ! Ben ouais ! C'est poétique, mais brièvement ! Faut savoir apprécier quand ça se présente parce que c'est aussi bref qu'une lueur d'intelligence dans les yeux de Darmaninin. Exemple mal choisi puisqu'il n'y a aucune lueur d'intelligence dans les yeux du sinistre de l'inférieur... Bref ! Ceci m'amène à évoquer le titre. J'y vois personnellement une allusion au fait que toute cette jeunesse sauvage, livrée à elle-même du fait de la dissolution de l'ensemble des liens sociaux, est la première victime de cette société de merde où l'inhumanité est le cadet des soucis de nos dirigeants néolibéraux pour qui seule compte la bonne marche de la sacrosainte économie. Je repense également à ce galopin de Philippe Meirieu qui souhaitait, je cite, "préparer les enfants à la guerre économique du XXIe siècle"... Nous y sommes ! Et la guerre, on le sait, à besoin de chair à canon. Mais que l'on ne s'y trompe pas : il n'y a pas de discours politique dans Chair à canon. Pas plus que de prétention sociologique. Juste une bonne tranche de fun, du fait des situations vraiment cocasses, un témoignage tragicomique qui n'a d'autre but que de déclencher l'hilarité (ou pas). Mais témoigner n'est-ce pas déjà ouvrir une porte sur la conscience ?... Pour conclure, je regrette juste qu'Aroha Travé n'ait pas trouvé une fin plus conclusive, c'est à dire une vraie chute à laquelle, je l'avoue, je m'attendais. Mais en y regardant de plus près, c'est pas si pire. On termine comme on a commencé : sur des jeux d'enfants. Es la vida que sigue, después de todo !

31/03/2023 (modifier)