Carletti - Un voyageur moderne

Note: 3.33/5
(3.33/5 pour 3 avis)

Une passionnante chronique historique.


1643 - 1788 : Au temps de Versailles et des Lumières Auteurs italiens Vieux gréements

Fin du XVIIème siècle. Le temps des grandes explorations, dominé par les Espagnols et les Portugais, bouleverse la carte du monde. Francesco Carletti, un jeune marchand italien fasciné par ces nouveaux horizons économiques, prend part à cette aventure. Il découvrira les splendeurs (nouvelles terres, peuples inconnus) et les misères (esclavage, destructions) qui posent les jalons d'une nouvelle ère, celle des Temps Modernes. Giorgio Albertini nous embarque dans une chronique passionnante, inspirée d’une histoire vraie, celle du premier marchand à effectuer le tour du monde.

Scénario
Dessin
Couleurs
Traduction
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 05 Avril 2023
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Carletti - Un voyageur moderne © Casterman 2023
Les notes
Note: 3.33/5
(3.33/5 pour 3 avis)
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03/04/2023 | Mac Arthur
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Par grogro
Note: 4/5
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Comme Canarde, c'est le dessin qui m'a attiré, celui de la couverture. Et puis quand j'ai vu qu'il s'agissait d'une adaptation du Voyage autour du Monde de Francesco Carletti que j'avais lu pendant le confinement, j'ai sauté à pieds joints. Oui, le dessin m'a beaucoup plu, ainsi que les couleurs qu'on pourra effectivement trouver ternes mais dont j'ai apprécié le charme suranné, contribuant à imprimer une ambiance prégnante. Les scènes de nuit sont particulièrement réussies. De manière générale, les paysages sont jolis ; on est presque dans la gravure. De plus, la reconstitution me parait réussie. Mac Arthur a raison : les costumes sont classes, mais également les constructions et les vaisseaux (caraques et autres indiamen). Tout y est parfaitement décrit graphiquement. Il faut dire que la base était solide. Carletti a en effet très bien documenté son voyage. Quelques années après son retour, et malgré la perte de l'intégralité de ses notes, il a rédigé ses "raisonnements" à l'aune de souvenirs encore vivaces. Le résultat, j'ai eu l'opportunité de le lire pendant le confinement. Les éditions Chandeigne ont en effet eu la bonne idée de rééditer ce récit de première main de ce qui fut très probablement la première circumnavigation commerciale autour du Globe effectuée par un particulier en utilisant les moyens de transports locaux. En outre, sa relation constitue l'un des premiers exemples de mondialisation de l'économie. C'est dire l'importance de ce voyage. J'ai pris un pied formidable à lire ce texte, et j'en garde un souvenir encore assez frais. La transposition d'Albertini en BD est très fidèle. On retrouve les multitudes de descriptions de Carletti, que ce soit les paysages, les lieux, les fruits, les animaux, les mœurs, et les femmes (ha ! Ces italiens !....). Collant au plus près du texte dont il site d'ailleurs de larges passages, Albertini passe allégrement sur les traversées maritimes que Carletti lui-même, n'étant pas marin de métier, ne prit pas la peine d'évoquer, trouvant ceux-ci d'un ennui profond, pour se consacrer exclusivement aux séjours terrestres. Tout semble y être si j'en juge d'après mes souvenirs, jusqu'au prix des diverses marchandises et des modalités d'échange. Comme le texte original, la BD retranscrit fidèlement une époque et des pratiques (y compris au niveau graphique), ce qui plonge totalement le lecteur dans l'ambiance. J'émettrais simplement quelques réserves au sujet de son point de vue sur l'esclavage. En effet, Albertini fait de Carletti un humaniste révulsé par cet abominable commerce, allant jusqu'à payer de ses deniers la liberté de certains d'entre eux. Certes, Carletti a bien quelques mots contre la traite, et le souvenir d'avoir donné dans cette triste économie semble peser sur sa conscience, mais cela ne l'empêche nullement de considérer la chose sous l'aspect pécunier le reste du temps. On peut du coup douter de la sincérité de ses sentiments car de son propre aveu, il abandonnera ce commerce pour des raisons essentiellement économiques, parce que ce dernier n'est pas rentable. Albertini cherche-t-il consciemment ou non, à adoucir la "responsabilité" de son compatriote ? Bon, je le reconnais, il y a là une question d'interprétation autant qu'un sujet de débat. Mais le doute est là, indécrottable... Sans ce détail qu'on pourrait presque voir comme une tentative de révisionnisme (et qui m'empêche de mettre 4/5), et à condition de passer sur le visage de Carletti lui-même, souvent montré avec ce regard ébahi et naïf qui finit par devenir agaçant (faut dire à la décharge d'Albertini que Carletti a 18 ans quand il entame son voyage), cette BD est fortement recommandable pour qui aime les récits historiques au long cours. Le texte est respecté quasiment à la lettre (sauf en ce qui concerne la manière dont Carletti considère la traite). Mais pour les autres également... Finalement, le seul regret valable reste peut-être un manque d'émerveillement. Tout cela, ce voyage, la découverte de nouveautés culinaires, végétales, animales, culturelles... nous est finalement rapporté de manière un peu clinique, avec ce Carletti au regard halluciné... Mais bon, après mure réflexion, je trouve un peu ingrat de ma part de jeter un jugement aussi rigide sur les intentions d'Albertini. D'une part, ça contredit le troisième accord toltèque (Ne fais pas de supposition), et d'autre part, tout est affaire d'interprétation, et faut reconnaitre que sur cette affaire, vieille de près de 500 ans, faut faire la part des choses. Du coup, je relève ma note.

02/05/2023 (modifier)
Par Canarde
Note: 3/5
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Au contraire de Mac Arthur, c'est le dessin qui m'a plu et m'a poussée à acheter cet album. Les costumes variés rencontrés dans un périple autour du monde au temps de Henri IV ont donné à la fois du fil à retordre et du plaisir au dessinateur/scénariste. Le visage du personnage principal est souvent dans un étonnement apeuré devant ce si grand monde et si divers, et son angoisse est communicative. La palette de couleurs est réduite mais nuancée dans des couleurs de terres et d'eaux. Pour l'histoire, c'est un récit de voyage, sensé être commercial au départ, autour du monde au début du XVIIeme siècle. Rien de très attirant pour moi dans la représentation de trois mâts sur l'océan. Mais le fait qu'il s'agisse d'une histoire vraie, rend ces péripéties d'autant plus effrayantes, et on ne peut que compatir devant tant de coups du sort. Ce qui m'a le plus troublé, c'est l'effroi du jeune Carletti devant le commerce des esclaves qu'il est tenu de pratiquer sous les ordres de son père, commerçant pragmatique. (la BD est tirée d'un témoignage écrit et ce dégoût pour la domination revient tout au long de l'histoire) C'est intéressant de constater qu'à toutes les époques, il existe des gens qui sont en marge de la pensée dominante, et que leurs sentiments puissent avoir été conservés, depuis quatre siècles, éclaire différemment la diversité actuelle des points de vue... L'injustice perpétrée par les pouvoirs politiques successifs a toujours pu être regardée avec effroi et désapprobation. Ce que l'Histoire retient est décidément très parcellaire et partial...

01/05/2023 (modifier)
L'avatar du posteur Mac Arthur

N’étant pas du tout un spécialiste de cette époque, je dois bien avouer que ce personnage m’était totalement inconnu. Pire encore, l’ensemble du récit a été pour moi source d’informations, depuis la route empruntée pour réaliser ce tour du monde jusqu’aux règles qui régissaient le commerce international. C’est là le plus grand mérite de cette biographie partielle : nous ouvrir les portes d’un monde inconnu de bien des lecteurs (enfin, j’ose espérer ne pas être le seul inculte dans la bande). Pour ce faire, Giorgio Albertini s’inspire directement des propres écrits de Francesco Carletti et adapte ceux-ci dans un style assez vieillot qui convient plutôt bien au thème. Le texte est souvent maniéré et à l’occasion un peu trop bavard à mon goût. Le dessin est assez raide. La colorisation est franchement terne. Clairement, on est à l’opposé d’une bande dessinée moderne mais dans le contexte particulier de ce récit historique, cette approche ne m’a pas déplu. Ceci, dit, je ne considère pas Albertini comme un fantastique dessinateur (ses Alix ne m’avaient pas du tout convaincu, et surtout sa couverture du tome 39 de cette même série) et, s’il s’en sort assez bien avec ses décors, certaines cases demeurent à mes yeux très moyennes dès l’instant où la priorité est donnée aux personnages. Par contre, et c’est un des gros points forts de l’album, les costumes dont il habille ses personnages m’ont énormément plu tant ils me semblent totalement conformes à la réalité historique. C’est le genre de détail qui m’aide à penser que l’auteur est grandement passionné par son sujet. Le voyage de Francesco Carletti permet de prendre conscience de certaines réalités de l’époque : commerce d’esclaves, monopole et privilège des Espagnols et des Portugais, longueur et inconfort des voyages, omniprésence des maladies. Ces nombreux aspects permettent de rendre très intéressant ce récit. A chaque chapitre sa révélation. Enfin, le découpage en courts chapitres est diantrement efficace. Non seulement ce découpage permet d’utiles ellipses mais de plus chaque chapitre est d’une longueur telle qu’on ne craint pas de se lancer dans leur lecture (il est même difficile de s’arrêter en cours de route). Franchement pas mal !

03/04/2023 (modifier)