Les interviews BD / Interview de René Hausman

Dessinateur et illustrateur au style unique, René Hausman promène ses pinceaux (et son imposante silhouette) dans le monde de la bande dessinée depuis plus d’un demi-siècle. De ses frasques dans le Trombone illustré à ses nouveaux projets en compagnie de Pierre Dubois, il a accepté de revisiter sa longue carrière.

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René Hausman René Hausman, bonjour, d’où vous est venue cette envie de dessiner ?
Tout petit, j’aimais beaucoup les chromos contenus dans les bâtons de chocolat de l’époque, et j’aurais voulu en dessiner à mon tour. II s’agissait de représentations d’animaux.

Comment êtes-vous tombé dans le chaudron de la bande dessinée ?
J’aimais aussi beaucoup les BD et les livres illustrés (parmi lesquels Benjamin Rabier et surtout Calvo), et puis j’aspirais à raconter des histoires !

Quelle importance la rencontre avec Raymond Macherot a-t-elle eue sur votre parcours ?
Quoique très différent de moi et de mes préférences, et de mes choix, Raymond m’a beaucoup appris et aidé. Bien sûr, ses options, ses optiques n’étaient pas les miennes. Mais sa rencontre a certes décidé de ma vie professionnelle.

Si vous ne deviez garder qu’un seul souvenir de l’époque du Trombone Illustré, quel serait-il ?
La rencontre avec des dessinateurs français géniaux : Alexis, Loup et surtout Gotlib. Sinon, une ambiance inoubliable avec ce cher Delporte.

Accéder à la BD Saki et Zunie Saki et Zunie sont vos premiers personnages de bande dessinée. On vous sait attaché à Zunie. Songez-vous à lui faire vivre de nouvelles aventures ?
Disons que Zunie est un peu « l’ancêtre » de Laïyna, et un archétype de femme qui me hante. Cela dit, il est bien peu probable que je la « ressuscite » !

Quel effet cela vous fait-il lorsqu’on vous dit que Zunie a aujourd’hui 53 ans ?
Elle ne les fait pas. Pour moi, ça ne me rajeunit pas…

Votre style est reconnaissable entre tous. Est-ce le résultat d’une démarche consciente ou le fruit de votre naturel spontané ?
C’est venu comme ça. Je pense qu’un style est une chose qu’on ne domine jamais vraiment.

On vous sait très attaché à votre région, à sa richesse faunistique et floristique (ainsi qu’au petit peuple qui y habite). Pouvez-vous nous décrire cet environnement si propice à développer l’imaginaire dans lequel vous baignez depuis tout petit ? Où allez-vous pour vous ressourcer ? Pourriez-vous vivre ailleurs ?
Tout d’abord, et je la cite volontiers, j’ai eu le bonheur de connaître une grand-mère raconteuse d’histoires. Et puis, je n’ai aucune envie de vivre ailleurs. C’est vrai que j’aime ma région sans réserve.

Vous avez alterné les œuvres en solo et les collaborations avec différents scénaristes. N'avez-vous jamais eu envie d'écrire de scénario pour d'autres ?
Non. Mais j’aurais aimé (si je n’avais pas dessiné) écrire, tout simplement.

Accéder à la BD Muddy Waters Si vous deviez définir vos différents collaborateurs en quelques mots, comment qualifieriez-vous Pierre Dubois, Yann et Michel Rodrigue ?
Pierre est un grand ami et un collaborateur génial mais parfois difficile. Yann, c’est un génie et la perfection, et puis un ami précieux. Michel est tout autant un ami et tout autant plein de choses à dire. Mais il est parfois un peu…bavard !

Comment s'est passé le projet BD Blues (Muddy Waters), BD qui change radicalement des autres œuvres que vous avez réalisées ?
A partir d’une proposition. J’avais le choix. Et comme j’avais vu Muddy Waters à Liège en 1964, et que j’adore, ben voilà…

Dans les années 70, vous aviez fait partie d’un groupe musical. Quel était votre instrument de prédilection et pour quel style de musique ? Quelle place occupe la musique aujourd’hui dans votre quotidien ?
Nous jouions de la musique traditionnelle, surtout de Wallonie. Et je jouais (et j’en joue encore) de la cornemuse et de la flûte.

On vous connait comme dessinateur de bd bien sûr, mais vous êtes également un illustrateur hors pair (notamment dans l’animalier) puis aussi peintre, sculpteur … Multiplier et diversifier les expériences créatives, est-ce un besoin vital ?
Pas du tout. Je préfèrerais (n’étaient les impératifs pratiques) uniquement faire de l’illustration.

Faut-il voir un clin d’œil à "La nuit du chasseur" dans Les Chasseurs de l'aube (ne fusse qu’au niveau du titre) ?
C’est vous qui m’y faites penser. Ben non…

Vous êtes un artiste reconnu. Pourtant, vous préférez le mot artisan à artiste. Pour quelle raison ?
Je ne sais pas où est la frontière. Mais il y a une part artisanale énorme dans mon travail.

Les éditions Luzabelle Quelques mots sur les éditions Luzabelle créées à l’initiative de votre épouse (Nathalie Troquette) ? Que peut-on y trouver ?
Jusqu’à présent, des posters (très soignés) à partir de dessins des Grands Bestiaires entre autres, des cartes postales inédites, et depuis peu, un joli livre pour enfants illustré par Yannick Thiel, qui sera suivi par un deuxième, les deux étant scénarisés par Katia Lanero Zamora.

Par quelle magie 25 ans plus tard, nous faites-vous lire vos nouvelles histoires avec toujours autant d'émerveillement, et nous faites-vous replonger avec bonheur dans les anciennes ? Quel élixir secret cachez-vous dans votre barbe ?
Je vous remercie pour l’appréciation. Vous n’exagérez pas un peu ?

Quel regard jetez-vous sur l’évolution du monde de la bande dessinée durant ce demi-siècle ? La saturation du marché, le passage de la table à dessin à la palette graphique, le besoin toujours accru de productivité… que vous inspirent ces multiples mutations ?
L’indifférence. Je ne crois pas personnellement être vraiment concerné. Je continue mon petit bonhomme de chemin, avec le sentiment, pourvu que ça dure, d’en apprendre encore chaque jour.

Travaillez-vous sur de nouveaux projets ?
Si on parlait d’autre chose ? Enfin, bon, un projet bien contrarié, en ce moment, d’illustrations avec Pierre Dubois…

Monsieur Hausman, merci de nous avoir consacré de votre temps. Au plaisir de vous revoir aux travers de vos œuvres futures.
Merci à vous ! Et si vous voulez en savoir plus, vous pourrez consulter la monographie conçue par mon épouse Nathalie et à paraître au Lombard aux fêtes de fin d’année 2012 !
Interview réalisée le 04/07/2011, par Mac Arthur.