Les derniers avis (105173 avis)

Par herve
Note: 4/5
Couverture de la série Les Aventures de Buck Danny (classic)
Les Aventures de Buck Danny (classic)

tome 1: Sabre sur la Corée Soixante-sept ans après sa création, Buck Danny revient en force avec cette histoire, publiée par Zéphyr édition. Il ne s'agit pas en effet d'une énième aventure de nos 3 héros (Buck, Sonny et Tumb) publiée par Dupuis (avec un scénario qui s'essouffle d'ailleurs au fil des albums) mais une aventure qui se situe juste après "Ciel de Corée" publié en 1954. C'est d'ailleurs ce qui fait l'intérêt de cet album : on y retrouve l'âge d'or de la série avec les Mig, la guerre froide, de belles scènes de combats aériens et un Sonny Tuckson, certes gaffeur, mais moins clown que dans la série mère. Zumbiehl, à qui l'on doit pourtant "Cobra Noir" (Buck Danny #53), que je n'ai pas acheté à cause d'un dessin approximatif à mon goût, nous livre ici une histoire bien menée avec de l'action, de l'humour sur fond d'espionnage entre les deux superpuissances sous le ciel de Corée. Le dessin, quant à lui, se situe dans la parfaite continuité du style de Victor Hubinon. L'album en outre est soigné : couverture, qualité du papier en font un bel objet éditorial. S'il faut ajouter un bémol, je regrette que cette histoire soit à suivre (et il n'est pas précisé en combien de volumes). Il faut noter que l'album est présenté sous deux couvertures différentes : une sur fond bleu (pour un lectorat plus jeune, sans doute), et une autre sur fond orange, qui fait beaucoup penser aux éditions originales de Buck Danny des années 50 et 60 et qui ravira sans nul doute les nostalgiques de la série, dont je suis. tome 3: "les fantômes du Soleil Levant Il faut tout d'abord saluer le travail des Éditions Zéphyr, en collaboration avec les Editions Dupuis d'avoir proposé aux lecteurs un fourreau comprenant ce "Buck Danny-classic-", accompagné d'un "Tanguy & Laverdure-classic-" ainsi qu'un livret collector inédit "la rencontre" de 16 pages en noir et blanc. J'avais été séduit par le premier diptyque de cette nouvelle collection de Buck Danny. Et le charme opère de nouveau avec ce nouvel album. Le dessin de Jean Michel Arroyo s'inscrit parfaitement dans le style de celui de Victor Hubinon. Le scénario, sans surprise, colle parfaitement à l'esprit des premiers albums de la série.Il faut souligner, cette fois ci, la présence de Marniquet (auteur que j'ai souvent défendu ici et ailleurs) au scénario, avec Zumbiehl. Cet opus est ,sans aucun doute ,à destination des vieux lecteurs comme moi, amateurs de la période faste des Buck Danny qui retrouveront ici les grosses ficelles scénaristiques chères à JM Charlier, mais aussi le côté un peu désuet mais très plaisant des planches d'Arroyo , rappelant celles de Victor Hubinon. Un album classique, sans surprise mais qui, de par son côté nostalgique, devrait ravir tout les amateurs du genre. En outre on croise dans cet opus Miss Lee, ainsi que Susan Holmes qui n'y fait qu'une simple apparition. Bref, J’achèterai le prochain volume sans hésiter. tome 5: Opération rideau de fer Grand amateur de Buck Danny, je me réjouis à chaque sortie d'un album de la série "classic" qui ravive en moi une certaine nostalgie des Buck Danny de la grande époque. Cette aventure se situe immédiatement après "les tigres volants contre pirates". Marniquet et Zumbiehl ont construit un scénario habile, mêlant espionnage et aventures militaires sur fond de guerre froide en Europe.Nos trois célèbres pilotes se retrouvent en effet affectés en RFA, pour défendre l'espace aérien alors qu'une sombre histoire de transfuge de savant soviétique vers les Etats Unis se trame.L'intrigue est bien menée, et l'histoire permet de renouer avec Lady X, qui occupera sans doute un plus grand rôle dans le prochain volume. Le dessin d'Arroyo, avec ce côté rétro, sied parfaitement à cette série. J'ai particulièrement apprécié les scènes se déroulant sous la neige, sans oublier les scènes de combats aériens, très réussies. Une lecture très agréable, que les amateurs des vieux Buck Danny ne peuvent qu'apprécier. Vraiment, la série "Classic" surpasse les albums de la série mère post Bergèse- Charlier. tome 6: Alerte rouge Contrairement à ce qu'annonce la couverture de cet album, l'intrigue s'apparente plus à un récit d'espionnage ,sur fond de guerre froide, qu'à un récit d'aviation.. Il faut en effet attendre le dernier tiers de l'album pour découvrir des scènes aériennes. Sinon, le scénario est classique , voire un peu trop prévisible avec malheureusement une lady X pas aussi présente que ne l'augurait le premier album de ce diptyque. Pendant que Sonny & Tum essaient de passer le mur de Berlin, nous suivons Buck Danny en Union Soviétique à la recherche d'un avion soviétique, à la manière d'un Clint Eastwood dans "Firefox,l'arme absolue". Peut-être que le fait de suivre trois aventures parallèles sur trois pays différents (RDA, URSS et Etats Unis) casse un peu le rythme de lecture et empêche d'avoir une intrigue plus fouillée. Le dessin de Jean Michel Arroyo est en parfaite adéquation avec le côté rétro des aventures de Buck Danny "classic" mais j'ai cru lire que le trio d'auteurs "Arroyo, Marniquet et Zumbiehl" n'étaient pas reconduits pour le prochain album. Dommage, car j'ai pris un grand plaisir à lire les six albums que composent cette série. tome 7: Sea Dart Changement de dessinateur pour ce "Buck Danny Classic", mais André Le Bras n'est pas un parfait inconnu sur la série, en effet, celui-ci avait déjà signé "les oiseaux noirs #2", avec toujours le même défaut, à mon goût (des visages un peu trop lisses). J'ai regretté quelques erreurs dans le scénario malgré la présence de deux auteurs (les scénaristes s’emmêlent dans les grades avec Tuckson qui passe de lieutenant page 10, au grade de capitaine page 14) pour cette histoire qui se déroule après les aventures coréennes. Malgré ceci et quelques fautes d’orthographes, les auteurs ont trouvé un équilibre parfait entre une histoire d'aviation et une intrigue d'espionnage intéressante. La dernière case de l'album laisse augurer une suite prometteuse. Mais la véritable révélation fut pour moi l’aéronef, le Sea Dart, véritable hydravion à réaction dont je ne connaissais pas l’existence à ce jour ! Bon album qui ne dépareille pas avec l’ensemble de la série mère, série que justement je relis en ce moment dans la version intégrale « Tout Buck Danny » Une intrigue accrocheuse, des scènes aériennes nombreuses, bref que demander de plus pour un album de Buck Danny ? Tome 8: le repaire de l'Aigle Cet album conclut un diptyque commencé avec "Sea Dart", paru en octobre 2020. Les auteurs tiennent donc la cadence pour nous offrir une suite dans des délais relativement rapides. Un petit coup de gueule contre les éditions Dupuis pour commencer. J'ai pour habitude d'acheter le coffret avec le second volume des aventures de " Buck Danny classic" mais là, vu le prix prohibitif dudit coffret, j'ai passé mon tour. Sinon, j'ai beaucoup aimé cet album, qui mêle adroitement l'Histoire avec un grand H, avec une histoire d'espionnage. Frédéric Marniquet et Frédéric Zumbiehl s'appuient en effet sur des faits avérés voire supposés pour étayer l'intrigue (la fuite de certains dignitaires nazis, et la préparation d'armes secrètes) Certes les ficelles sont parfois assez grosses mais cela se laisse lire avec plaisir. Les auteurs ont en outre réussi un équilibre entre les scènes d'aviation et les scènes d'aventures. Encore une fois, la collection "Buck Danny classic" arrive aussi bien sur la forme (une couverture digne des années 50) que sur le fond à contenter les nostalgiques de l'âge d'or de cette série. tome 9: le vol du rapier En s'inspirant d'un mystère les plus troublant de l'histoire de l'aviation (la disparition des passagers du vol C-124 Globemaster le 23 mars 1951), les scénaristes Marniquet et Zumbiehl nous offrent une aventure palpitante de Buck Danny. Décidément cette série dérivée finit par dépasser en qualité, la série mère. Le récit oscille sans cesse entre le récit d'espionnage, celui d'aventure , sans oublier des scènes d'aviation. J'ai trouvé le ton de ce volume plus dramatique qu'à l’accoutumée, même si les auteurs n'oublient pas de nous présenter un Sonny gaffeur, qui finit par s'embarquer dans une histoire d'amour qui le mènera assez loin..... Tome 10: Molottok-41 ne répond plus Évidement, le titre de cet album fait écho au fameux "NC 22654 ne répond plus" de. la série mère. Ce volume vient clore l'aventure débutée avec "le vol du rapier", que j'avais aimé. Nous nous retrouvons ici en pleine guerre froide, mais l'intrigue donne trop de place, à mon goût, à de trop nombreuses courses poursuite. Nos héros empruntent tour à tour, avions, d'antiques camions ZIS 5,, canots de sauvetage, camionnette de livraison pour échapper à leurs poursuivants...c'est un peu répétitif niveau scénario. Par contre, le dessin de Le Bras reste impeccable, et il faut souligner l'heureuse idée d'abandonner, pour un temps, LAdy X, au profit d'une Miss Lee qui semble prendre du galon dans cet album. Tome 11: l'ombre rouge Au fil des années, cette série dérivée frôle l'excellence, dépassant même les qualités de la série mère. En s'inscrivant dans la période de la guerre froide, qui a donné tant de romans et de films exceptionnels, les auteurs nous offrent , en tout cas pour le vieux lecteur que je suis, un bol de nostalgie. Etant en outre, grand fan du cinéma américain des années 30 à 50, je suis sous le charme de cette "ombre rouge" où l'on côtoie Ava Garner (dont le nom est à peine dissimulé ici), John Wayne (où j'apprends la tentative assassinat dont il a fait l'objet par les services secrets soviétiques), un ersatz de James Stewart, et un Howard Hugues plus vrai que nature. Car nos trois héros, Buck Danny, Tumbler et Sonny vont se lancer dans une histoire d'espionnage dans le monde du cinéma. Le scénario est assez réussi, même si on peut regretter le manque de scènes aériennes dans cet album. Néanmoins, le dessin d'André Le Bras, est de très grande qualité et son côté vintage sied parfaitement à ce spin-off. Amateurs d'espionnage, cet album vous comblera., en plus ce premier volume de ce diptyque s'achève sur un cliffhanger insoutenable. Scénario prenant, dessins et couleurs très réussis, bref un album à lire!

08/02/2014 (MAJ le 25/04/2024) (modifier)
Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Je ne t'ai jamais aimé
Je ne t'ai jamais aimé

Le sentiment amoureux n'est pas un droit. - Il s'agit d'une histoire autobiographique, complète en un tome. Chester Brown évoque le développement de son sentiment amoureux sur une période 8 ans, depuis l'âge de 9 ans, jusqu'à 17 ans. Alors que l'histoire commence, Chester vit dans un pavillon avec des espaces verts autour et il accompagne Connie, sa voisine, à l'école. Dès la troisième page, le lecteur découvre que Chester a un rapport difficile avec les gros mots du fait d'une mère très à cheval sur leur utilisation. Dans son quartier, il entretient des relations amicales quotidiennes avec 2 autres jeunes filles et un ou deux autres garçons. Au fur et à mesure qu'il grandit, Chester Brown insère des scènes courtes sur les relations affectives qui le lient à sa amère, sur des échanges brefs avec les jeunes filles qu'il croise ou qui gravitent dans sa sphère privée. Il y a en particulier Carrie qui est une voisine légèrement moins âgée que lui et qui a le béguin pour lui, Sky une camarade de classe que la nature a généreusement pourvue, et quelques autres. Il finit par dire à Sky qu'il l'aime. le livre se termine alors qu'il fait comprendre par son attitude à Sky qu'il n'y a rien entre eux. J'ai eu beau me creuser la tête, impossible d'imaginer un résumé qui puisse donner envie de lire cette histoire. Brown dépeint des scènes très courtes avec une économie de dialogue, presqu'aucune case de texte (autre que les phylactères), des actions prosaïques et factuelles, tout ça avec un style graphique simple, voire simpliste. Il n'y a pas d'action, pas de violence et pas de sexe. L'avantage, c'est que cette bande dessinée se lit très vite (moins d'une heure). L'inattendu, c'est qu'elle reste longtemps dans la tête, non pas de manière intrusive, plutôt comme un souvenir attachant et légèrement dérangeant. Chester Brown fait partie d'un trio d'auteurs indépendants (et underground à leur début) avec Joe Matt (Le pauvre type) et Seth (George Sprott : 1894-1975). le moins que l'on puisse dire, c'est que chacun d'entre eux s'est construit un point de vue très personnel sur la vie. Avec cette histoire, Chester Brown ne souhaite pas parler d'amourette platonique, mais de développement du sentiment amoureux comme quelque chose qui ne va pas de soi. Il parle de son vécu pour dire et montrer son expérience sur des phases de développement relationnel que chaque individu traverse avec sa propre sensibilité. Ce qui est captivant, c'est de contempler comment l'individu Chester Brown relate la construction de sa sensibilité. Brown compose avec cet ouvrage une œuvre littéraire. Il ne se limite pas à enfiler de courtes scènes qui lui semblent significatives dans le développement de son mode relationnel affectif avec la gente féminine. Il s'agit plutôt de l'aboutissement de sa réflexion personnelle sur les caractéristiques de ces relations, les fruits de son introspection livrés et formalisés de manière la plus simple possible. Comme souvent dans ce type d'ouvrage, cela signifie que le lecteur appréciera d'autant plus le propos de l'auteur qu'il a lui-même parcouru une partie de ce cheminement introspectif pour son cas particulier. J'avais eu l'occasion de lire quelques scènes de cette histoire il y a plus de 20 ans et je n'en avais retenu que leur fadeur et leur manque de substance. Prise une à une, chaque scène décrit de manière simpliste un bref échange de propos dans un quotidien banal. Ce n'est que la construction et la composition du récit qui donne un sens à chaque partie. À condition de percevoir cette structure et ce mode narratif sophistiqués, "I never liked you" prend une toute autre dimension. Tout d'un coup, Chester Brown évoque à la fois des particularités de sa vie qui ont modelé son sentiment amoureux et des expériences de vie que tous les hommes ont traversées, chacun à leur manière. Par exemple, Brown constate qu'il est attiré sexuellement par les formes généreuses de Sky. Il rattache cette préférence innée à sa lecture d'un numéro de Playboy (le poster central en l'occurrence). Pour mieux comprendre le sens de ce symbolisme, la lecture de le Playboy éclaire le lecteur sur l'importance de ce magazine dans la vie de Brown. Il relate également les propos anodins de sa mère sur la taille de sa poitrine. En reliant les points entre eux, le lecteur comprend que Brown évoque l'impact de la figure maternelle sur la formation des goûts sentimentaux et sexuels des enfants. Le vrai tour de force de Chester Brown réside dans la forme. Il ne parle jamais de théories psychologiques ou psychiatriques (sur lesquelles il a un avis ambigu). Il n'a jamais recours à des théories complexes ou des développements romantiques. En fait, sa retenue dans la manière de raconter permet au lecteur de placer ses propres expériences, l'oblige même à porter un jugement de valeur sur le comportement de Chester, par rapport à ses propres expériences, ses valeurs et son vécu sentimental. Chester Brown met donc en scène son développement affectif au travers de scènes simplifiées à l'extrême pour mieux impliquer le lecteur dans ce qu'il lit. Il faut également dire un mot sur l'aspect graphique de ce récit qui est lui aussi unique en son genre. Chester Brown dessine chaque case séparément sur de petites feuilles de papier et il colle ensuite chaque case sur la page finale pour véritablement composer l'agencement de chaque dessin par rapport aux autres. Il donne une grande importance aux marges blanches entre les cases et autour des cases. Chaque dessin est très dépouillé et le trait est imperceptiblement tremblé. Il a parfois recours à des codes graphiques issus des caricatures (les grands yeux ronds de Carrie), mais de manière très restreinte. Il n'intègre pas de nuances de gris, que des traits à l'encre, avec une épaisseur variable. Il ne cherche pas une forme d'esthétisme confortable, mais il cherche une lisibilité maximale. le résultat peu paraître parfois enfantin (faible densité d'information) ou amateur (l'aspect tremblé de certaines lignes). Je n'ai pas trouvé ce choix graphique dérangeant et il est en pleine cohérence avec le mode narratif terre à terre et simple, sans être minimaliste. Cette histoire simple du développement des relations de Chester avec la gente féminine de 9 à 17 ans recèle une analyse subtile et délicate de ce comportement qui comprend autant d'inné que d'acquis. Chester Brown est un auteur attentionné qui laisse toute la place nécessaire pour que le lecteur puisse s'exprimer et se placer par rapport à ce qu'il lit. Les œuvres de jeunesse de Chester Brown sont regroupées en 2 volumes Ed, the happy clown (des fictions dérangeantes, sanguinolentes, scatologiques, éprouvantes) et le petit homme (des histoires oscillants entre le surréalisme et l'autobiographie). Après ces 2 romans autobiographiques ("Je ne t'ai jamais aimé" et Le Playboy), Brown a réalisé une biographique d'un leader politique canadien Louis Riel. Et en 2011, il a publié 23 prostituées relatant ses expériences de client de prostituées.

25/04/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Le Petit Homme - Histoires courtes 1980-1995
Le Petit Homme - Histoires courtes 1980-1995

Un véritable auteur - Ce tome compile 27 histoires de jeunesse écrites et illustrées par Chester Brown. La longueur de ces histoires varie de 1 à 34 pages. Il se termine par 20 pages de notes de l'auteur contextualisant chaque histoire. Le sujet des récits couvre un spectre assez large. L'histoire d'ouverture (4 pages) imagine que les rouleaux de papier toilette se sont révoltés contre l'humanité qu'ils ont décidé d'exterminer. le récit de clôture (6 pages) démonte l'approche psychiatrique de la schizophrénie pour développer un point de vue antipsychiatrique. Entretemps le lecteur aura pu découvrir les déboires d'un restaurant qui n'est plus approvisionné en viande de phoque, d'un individu hypnotisé par son poste de télévision. Il aura également assisté à une invasion d'extraterrestres mangeurs de nez. Puis il se trouve face à une adaptation d'un récit gnostique sur le frère jumeau de Jésus. Arrivé à la page 47, les récits autobiographiques font leur apparition avec la relation entre Chester Brown et Helder, un autre locataire d'une maison d'hôtes. Pour la couverture, Chester Brown explique en fin de volume que réaliser une illustration pleine page ne l'intéressait et qu'il lui a préféré un format bande dessinée (avec l'accord de son éditeur). Sur la couverture il explique comment lui est venue l'idée de réaliser la première histoire sur le papier hygiénique, pourquoi elle ne fait que 4 pages. le lecteur peut même découvrir comment Brown travaille, c'est-à-dire avec une planche à dessin sur les genoux. Avec les notes en fin de volume, le premier tiers de l'ouvrage permet de se familiariser avec le style graphique de Chester Brown : simple, éloigné du photoréalisme, expressif, légèrement éthéré, très artisanal. En effet les bordures des cases ne sont jamais tracées à la règle, mais légèrement tremblée. le lettrage présente des irrégularités qui donnent un aspect amateur à l'ensemble. La réalité est que Chester Brown a démarré en dessinant des mini-comics (format réduit) vendus dans quelques magasins à Toronto, plus underground, ce n'est pas possible. Il s'est lié d'amitié avec 2 autres auteurs de comics Seth (par exemple George Sprott, 1894-1975) et Joe Matt (par exemple le pauvre type). À la toute fin des années 1980, il publie "Yummy Fur", un comics contenant ses histoires courtes et ses histoires au long cours (telles que Ed the happy clown, ou une adaptation de l'évangile selon Saint Marc). Marqué à jamais par la lecture de quelques numéros de Yummy Fur, j'ai souhaité redécouvrir cet auteur hors norme. Les premières histoires de ce volume oscillent entre la provocation surréaliste sans limite (ces fonctionnaires au pénis d'un mètre) et les expérimentations insondables (5 cases juxtaposées les unes à coté des autres, sans aucun lien discernable). La lecture de ces récits oscille entre le divertissement sans concession, et l'incompréhensible (pas désagréable, mais impossible de discerner l'intention de l'auteur). Les notes en fin de volume s'avèrent passionnantes car elle donne du sens à chaque histoire et elles mettent en évidence le cheminement mental de Brown alors qu'il découvre petit à petit ce qu'il souhaite vraiment raconter, qu'il apprend à se connaître. Arrivé à la première histoire autobiographique, le lecteur découvre une histoire sans conséquence, racontée avec tact, presqu'avec distance. Chester Brown présente les faits. Il se garde bien d'y donner une interprétation sur l'intention des uns et des autres. Par contre il met admirablement en évidence les hésitations, la complexité des contacts entre chaque individu et les mouvements de domination. du fait de sa volonté de proscrire tout sensationnalisme, l'histoire est à ranger dans les anecdotes de la vie quotidienne peu palpitantes. le seul intérêt du récit réside dans la manière dont il est raconté par Chester Brown. L'histoire d'après est également autobiographique : Brown raconte comment a évolué l'histoire précédente au fur et à mesure qu'il la montrait à son amie, ou à Seth, puis à Mark Askwith. le lecteur contemple comment Brown a construit ses souvenirs pour les transformer en histoire. Ce passage est fascinant car il explicite le travail d'auteur de Brown : il décortique comment il choisit chaque moment, comment il travaille les dialogues pour transcrire les émotions, comment les mots prononcés par un individu sont interprétés d'une manière différente par celui qui les écoute. Ce passage montre également comment Brown travaille : il dessine chaque case séparément, puis les colle sur une feuille de papier pour composer sa mise en page. La dernière histoire est tout aussi personnelle, même si elle est à classer dans un autre genre. Les notes de fin de volume indiquent que la mère de Brown souffrait de schizophrénie. À l'évidence, Brown a souhaité se faire sa propre opinion sur cette maladie afin de mieux comprendre l'impact que la condition de sa mère a pu avoir sur sa vie. Brown expose les théories de différents chercheurs et médecins sur le sujet pour exposer comment il s'est forgé sa propre conviction. Il explique que cette bande dessinée lui a valu une certaine notoriété puisqu'elle a été reprise par une association de patients atteints de maladie mentale. Au-delà des convictions de Brown sur le sujet (auxquelles le lecteur peut adhérer ou non), il est fascinant de voir comme lesdites convictions ont influencé sa façon de raconter ses tranches de vie, comment il a fait le choix de bannir toute interprétation psychanalytique de son œuvre. Alors que je ne m'attendais qu'à trouver des histoires faciles et superficielles d'un auteur en devenir, ce tome est l'occasion pour le lecteur de découvrir la construction d'un auteur à part entière. Ce cheminement est passionnant à découvrir, et le plaisir de lecture est encore augmenté par la personnalité de Chester Brown qui présente son point de vue personnel, sans jamais l'asséner ou le matraquer, en fournissant la distance nécessaire pour que le lecteur puisse éprouver ses sentiments et confronter ses propres convictions à la pensée de l'auteur. Les histoires qui relèvent plus de la fiction et du divertissement contiennent également de telles idiosyncrasies débarrassées de toute hypocrisie qu'elles offrent un dépaysement unique, à mille lieux de tout divertissement formaté.

25/04/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur du moment
Couverture de la série Ed the happy clown
Ed the happy clown

Sans tabou - Ce tome regroupe les épisodes consacrés au personnage d'Ed le Clown, parus dans la revue périodique "Yummy fur". Chester Brown (scénario et illustrations) a choisi de collecter les histoires parues dans Yummy Fur 1 à 12, de laisser de coté les autres (estimant qu'ils prolongeaient inutilement l'histoire) et de créer une nouvelle fin spécialement pour l'édition de 1992 qui est devenue la version définitive. Elle comprend également une introduction de Brown expliquant la genèse de cette édition, ainsi que 27 pages de notes en fin de volume. Une grande cité américaine est envahie par des rats toujours plus nombreux et féroces. le maire de la ville choisit de parachuter des pygmées mangeurs de rats sur la ville pour résoudre le problème. Quelque part dans la ville, une association de savants baptisée "Adventures in science" conduit des observations sur les pratiques masturbatoires des pieuvres géantes. Dans un appartement, une femme oblige son époux à vendre la vache pour obtenir de quoi s'acheter à manger. Ed le clown est arrêté par la police, accusé d'avoir sectionné la main gauche de Chester Doodley, homme de ménage dans un hôpital. Ailleurs un homme n'arrive pas à s'arrêter de déféquer. Un concours de circonstances peu ordinaires fait qu'il finit incarcéré dans la cellule voisine de celle d'Ed. Chester Doodley fait un cauchemar dans lequel il se souvient de l'histoire de Saint Justin que lui lisait sa mère, de la mort prématuré de sa sœur. Quelque temps après, il assassine Josie sa maîtresse. La tête de Ronald Reagan (président des États-Unis d'une autre dimension) se manifeste sur une partie inattendue de l'anatomie d'Ed. En début des commentaires, Chester Brown explique que l'écriture de la série "Ed the happy clown" était une forme de défi pour lui, qu'il souhaitait se prouver à lui-même qu'il était capable d'écrire et de dessiner un comics régulièrement. En termes de méthode, le déclic lui est venu à la lecture d'un ouvrage sur le surréalisme abordant l'importance de la spontanéité, et de l'écriture automatique comme outil permettant d'accéder à l'inconscient. Il prend bien soin de préciser qu'il a depuis rejeté toutes les théories freudiennes. "Ed the happy clown" a donc été écrit en partie sur la base de ce principe de libre association d'idées, d'idées attrapées au vol dans le flux de la rêverie, sans planification à long terme de la narration. Ce mode d'écriture au fil de l'inspiration explique pour partie l'aspect apparemment décousu de l'histoire. Toutefois la lecture permet de constater que chaque séquence s'imbrique parfaitement avec sa voisine pour former un récit au long cours, sous forme feuilletonesque, avec une progression logique, l'évolution des personnages et de leur situation, sans solution de continuité. La spontanéité de Chester Brown se révèle plus dans le choix des thèmes abordés, dans les situations délirantes dans lesquelles se retrouvent les personnages, dans l'absence totale de censure dans les éléments dessinés. Comme l'indique le résumé, Chester Brown n'hésite pas un instant à dessiner la matière fécale, le sang qui coule, les blessures à l'arme blanche, ou le sperme. Il y a plusieurs scènes de nudité frontale masculine comme féminine, et même une scène explicite de masturbation masculine. Cette approche sans limite réserve cet ouvrage à des lecteurs au cœur bien accroché (à tel point que l'imprimeur habituel de la série a fini par refuser de l'imprimer). D'un autre coté l'esthétique retenue par Brown fait qu'il est difficile de parler de voyeurisme. Tous les individus ont des morphologies normales (aucune musculature hypertrophiée, aucune anatomie féminine siliconée). Les dessins ressemblent plus à des illustrations d'amateur qu'à des planches bien propres sur elles. Il s'agit effectivement d'un comics publié par un éditeur indépendant (Vortex au départ, un indépendant canadien), en noir & blanc, avec une vision un peu naïve des décors. D'un autre coté, ces dessins montrent sans ambiguïté chaque action (aussi transgressive soit elle) et la mise en page est claire et facile à lire, ce qui est d'autant plus étonnant quand on sait que Brown dessiner chaque case séparément sur un petit carré de papier avant de la coller sur une plus grande feuilles, les unes à coté des autres. Le lecteur aventureux suit donc les péripéties d'Ed dans ce monde de plus en plus étrange et déroutant, dans lequel Ed subit avanie sur avanie, avec une résignation courageuse. D'un rebondissement improbable à l'autre, le lecteur peut effectivement voir émerger des éléments très personnels, très spécifiques à Chester Brown. Ce dernier estime en particulier que la santé mentale fragile de sa mère a fortement pesé sur son développement personnel. Il est facile de reconnaître sa mère dans celle lisant la vie de Saint Justin à ses enfants. Les éléments religieux intégrés à la narration (foi catholique) correspondent à son ressenti de l'époque, sa fascination pour cette foi, de même que son rejet. le thème de la matière fécale ne se ressent pas comme une régression infantile, mais plutôt comme un besoin de dépasser le tabou qui veut qu'on ne parle pas de ce genre de sujet dans un livre ou une BD. Dans les notes en fin de volume, Brown indique qu'il n'est pas très fier des relents de colonialisme engendrés par cette troupe de pygmées, et que son évocation de la gestion des égouts pointe du doigt sa méconnaissance du partage de responsabilité en matière de traitement des eaux usées, entre une municipalité et un département. Pour peu d'accepter de plonger dans un récit aussi personnel que dépourvu de tabou, le lecteur suit un individu qui subit maltraitances sur coups du sort, au fil de rebondissements extraordinaires (dans le sens où ils sortent de l'ordinaire) pour une confrontation avec des scènes absurdes, des tabous sociétaux, des expériences déformées par le subconscient, des horreurs impossibles, des personnages aussi excentriques que touchants, etc. Avec cette troisième relecture, je suis toujours aussi fasciné par ce monde délirant, devant beaucoup à l'inconscient de son auteur, capable d'aborder des sujets censurés par les bonnes mœurs, sans aucune volonté de culpabilisation, ou au contraire d'incitation à la débauche. Chester Brown nous invite à le suive dans son voyage intérieur à la fois onirique et horrifique (avec quelques touches d'humour noir), pour éprouver des sensations inédites ou interdites. Dans ces pages tout est possible, jusqu'à rencontrer 2 jumeaux nommés Quincy Harker (un hommage direct à Tomb of Dracula, une série Marvel).

25/04/2024 (modifier)
Par grogro
Note: 3/5
Couverture de la série Celestia
Celestia

Manuele Fior est tout de même un sacré dessinateur. Franchement, ses cases sont foutues comme des tableaux. Tout est bien composé. Il suffit de jeter un œil sur son ouvrage L'Heure des mirages, sorte de compilation de ses travaux hors BD, pour s'en convaincre. C'est d'ailleurs la seule et unique raison qui m'a poussé à acheter Celestia. Fior y développe un univers vraiment original, entre conte, récit post-apo, et poésie. L'ambiance est également très bonne. Et puis j'aime bien l'intérêt de l'auteur pour les collants. Ca apporte une touche grivoise très discrète. Tout ça fait que on pourrait caser Celestia, en se forçant un peu le truc, quelque part entre Les eaux de Mortelune et Les cités obscures. Maintenant, je trouve qu'il y a des scènes un peu inutiles, des dialogues insipides et des personnages peu travaillés ou dont le sens n'apparait pas forcément. Enfin, le rythme est étrange, avec des moments où l'histoire s'emballe d'un coup et où on perd un peu le fil, du coup. On ne sait pas trop où tout cela mène ! J'ai eu l'impression d'avoir affaire à une histoire à moitié. A moitié achevée, à moitié intéressante.

25/04/2024 (modifier)
Par grogro
Note: 2/5
Couverture de la série La mare
La mare

C'est ma première ballade en compagnie de Erik Kriek. Le dessin m'a charmé, ainsi que cette couverture qui rappelle un peu le dessin de Charles Burns. Il y avait a priori tout pour me plaire, et avant toutes choses le trait un peu pictural de l'auteur, un brin naïf, allié à une colorisation du plus bel effet, les blancs créant un effet dynamique assez saisissant. Et les premières pages (que l'on pourra déguster en cliquant sur l'image) m'ont vraiment mis dans les meilleures dispositions. Elles sont splendides, et on outrepassera sans doute pas la raison en y décelant un hommage au film Shining, plus précisément à son générique. Ce que confirmera le reste de l'histoire avec cette maison maudite... Très bon départ donc, tout schuss. Et puis rapidement, on trébuche sur des dialogues maladroits. Manifestement, il n'y a pas eu de relecture car les coquilles sont nombreuses : oubli de mots, erreurs orthographiques, expression bancale, lourdeur... auxquels s'ajoutent de probables soucis de traduction. On a vu pire, mais c'est quand même agaçant. Le plus gênant, c'est la teneur même des dialogues que l'on aurait aisément pu alléger du superflu. Un exemple avec cette scène où un policier, interrogeant l'héroïne sur une disparition, lui demande « quand avez-vous vu Emilio pour la dernière fois ». Celle-ci répond alors : « Le mois dernier. Mon mari avait fait un risotto… ». Mais qu’est-ce qu’on en a à braire du risotto franchement ? A la limite, on dirait une parodie d'OSS 117, c'est dire ! Ceci n’est qu'un exemple, mais cet esprit lourdaud gâte la sauce. Les personnages ne sont pas empathiques. Le mari, en particulier, est con comme un balais, au point qu'on a franchement envie de le voir décéder rapidement. Le fameux Emilio, ami du couple de protagonistes, est quant à lui affublé d'une tête über-flippante... Reste le scénario, cousu de fil plus blanc que blanc. D'abord le gamin qui revient d'outre tombe, où le lecteur inattentif ne verra pas du tout venir le coup de l'hallucination, et puis l'histoire de ce trou d'eau noire qui attire mystérieusement ses victimes... Bref ! Je me suis ennuyé au point de finir par trouver le dessin convenu et aussi maladroit que les dialogues. Heureusement, c'est assez vite lu. N'étant pas rancunier, j'ai réservé L'Exilé, du même auteur, aventure qui se déroule au Xe siècle chez les Vikings, histoire de lui laisser une seconde chance. Mais en attendant, La Mare est une lecture tout à fait dispensable, à moins toutefois de rechercher un dessin peu banal.

25/04/2024 (modifier)
Par gruizzli
Note: 3/5
Couverture de la série Rosangella
Rosangella

Je suis dans l'avis de la majorité, pour globalement les mêmes raisons. C'est mon 5è Corbeyran que je lis, mais je commence à voir quelques motifs récurrents dans ses œuvres. Notamment la place du social dans l’œuvre, le questionnement de gens du quotidien et la construction en polar. Ici encore, on a cet ensemble de sujets abordés autour d'une "banale" histoire de mari violent qui revient dans une famille pas forcément fonctionnelle. Le dessin d'Olivier Berlion est assez typé, avec une utilisation de la peinture qui marche plutôt bien visuellement, même si je trouve personnellement que certaines cases fonctionnent moins bien, les visages paraissant déformés. D'autre part, je vois assez peu l'âge réel de Rosangella, qui me semble plus proche d'une trentaine fringante que de la cinquantaine fatiguée. Cela mis à part, le coloris très clair et ensoleillé, les utilisations du rouge dans la violence et quelques plans soulignent que l'auteur ne cherche pas à faire un simple travail de commande. C'est investi visuellement, bien que codifié par les films polars je trouve (notamment question angles de vue). Pour l'histoire, c'est assez classique dans son déroulé et ça ne m'a pas spécialement surpris. J'étais assez peu investi par le début, trop verbeux (et pas forcément nécessaire), d'autant que pas mal de texte sert à mettre en places les relations entre personnages. Cependant, ces relations sont assez peu exploité. Tout revient simplement à Max, personnage central du récit et élément de dissonance qui amène sa violence comme dissolution des liens entre humains. A ce niveau, la BD est claire sur la représentation de la violence au sein du couple, de la famille et de manière générale sur la représentation du mâle réaganien qui aime que ça soit comme lui veut. Malheureusement la fin est assez rapide et surtout n'amène pas la BD à décoller au-delà de ce sujet. Finalement, Jo n'a qu'un impact limité sur l'histoire et je regrette que Corbeyran ne développe pas plus les conséquences de l'apparition de Max sur la famille en elle-même, le rapport entre les adelphes ou ce que Jo en tire ensuite. Bref, ça manque un peu de corps pour que je sois conquis. Reste une bonne lecture qui malheureusement rappelle bien trop de faits-divers récents ...

25/04/2024 (modifier)
Couverture de la série Les Guerres de Lucas
Les Guerres de Lucas

Deuxième pépite que je lis chez cet éditeur. J’ai adoré !! Je vais me ranger au concert de louanges, c’est vachement bien et vraiment super bien foutu. Je n’en reviens toujours pas d’une telle maîtrise. Évidemment je suis un grand amateur de la franchise, on apprend bien sûr mille et une anecdotes sur le scénario, la production, le tournage … qui sont toutes passionnantes et savoureuses. Mais l’album va bien plus loin et dépeint vraiment bien l’époque, l’industrie cinématographique et également cette nouvelle vague de réalisateurs, en s’attachant bien sûr au personnage de Lucas (mention également à Coppola qui m’a agréablement surpris), avec comme prouesse de nous le rendre très humain et attachant. Chaque planches apportent son lot d’infos sans que ça ne soit jamais rébarbatif. C’est d’une fluidité exemplaire et parfaitement mis en images, j’étais dégoûté d’arriver à la fin, tant j’aurais voulu que mon plaisir de lecture dure. J’avais bien aimé Un tournage en enfer - Apocalypse Now, mais le présent album rentre dans d’autres sphères, franchement un must dans le genre. Absorbant, captivant et fascinant dans sa mise en œuvre, j’ai ressenti des moments d’émotions, une franche réussite.

25/04/2024 (modifier)
Par grogro
Note: 3/5
Couverture de la série La Cuisine des ogres
La Cuisine des ogres

Voilà une lecture que j'ai appréciée pour son ambiance très forte. J'ai même été surpris par le ton cruel et l'aspect effrayant, croyant entamer une BD jeunesse. La cuisine des ogres a réveillé chez moi ce mélange de peur et d'attrait qu'avait exercé sur moi, enfant, le conte Barbe Bleue, avec ses images de corps sanglants suspendus à des crochets de bouchers. Déjà bien trash, non ? Je me souviens très bien avoir été très très impressionné, avec l'imagination qui prenait le relais... Bref ! A ce stade, on n'a toujours rien dit de la BD. Le dessin est chouette et sert très très bien ce conte noir pétrole. Les cases sont travaillées et pleines de détails. Tout est très bien amené, les premières pages sont très prometteuses. Le paysage est en outre original puisqu'on découvre, et c'est (presque) le titre, l'envers de la cuisine des ogres : l'arrière boutique en quelque sorte. Et cela donne lieu à des scènes savoureuses dans des lieux insolites. je pense en particulier à ce lac d'eau de vaisselle, hanté par une créature abominable. L'idée de faire intervenir le Croquemitaine, vu ici comme le fournisseur officiel des ogres en chair fraiche est une idée qui fait mouche, d'autant plus qu'il est représenté de manière tout à fait sinistre. J'ajouterai sans spoiler qu'on termine sur lui de manière surprenante, les auteurs révélant une face tout à fait inattendue du personnage, et ça c'est très beaucoup appréciable. Oui oui, plein de bonnes choses dans cette album copieux (entendu ici dans tous les sens du terme, hé hé) et bouillonnant. Toutefois, j'ai à plusieurs reprises été distrait de ma lecture par des passages que j'ai trouvé ou un peu digressifs, ou mal emboités, ou un peu forcés. Il y a un côté un peu mal peigné dans les finitions scénaristiques, ce qui me surprend de la part de Vehlmann. Tout cela aurait pu selon moi être plus ramassé. Il y aura apparemment une suite. Je serai de la foule des lecteurs malgré toutes mes retenues, parce que c'est quand même une bonne BD. Reste qu'en tant que professionnel, à l'heure où j'attends mes commandes récentes, je me pose encore la question de savoir où est-ce que je vais bien pouvoir ranger cette histoire. En jeunesse ? Chez les ados ? Chez les adultes ?... Mais ça, c'est une autre histoire, même si on peut se dire à l'aune de ce genre d'interrogations, que les auteurs viennent, mine de rien, de réaliser une œuvre transgénérationnelle. C'est déjà en soi très habile.

25/04/2024 (modifier)
Couverture de la série Le Jardin - Paris
Le Jardin - Paris

Alors que le sujet n’avait pas grand chose pour m’attirer, je dois dire que j’ai rapidement été charmé par ce tome. Je n’ai pas eu les freins de mes camarades, qu’importe si l’histoire peut paraître improbable (d’autant pour l’époque), ou l’âge de notre héros qui peut faire tiquer. Je me suis laissé bercer par ce récit plein de grâce, d’élégance et de finesse dans les émotions. Le fond et la forme sont au diapason, j’en suis sorti assez bluffé. Une narration impeccable alliée à un graphisme délicat et des couleurs harmonieuses. Je ne connaissais pas l’auteure mais j’ai beaucoup aimé. Son style convient parfaitement aux années folles. Niveau récit, c’est encore mieux, non pas que j’ai trouvé l’histoire indispensable, mais j’ai été ébahi par la justesse, le doute, la pudeur, la subtilité, la retenu … des relations entre personnages, c’est le tour de force de l’album. Je n’arrive pas à mette le doigt sur le terme exact, c’est tout simplement très beau, l’antithèse de la vulgarité. Une chouette lecture pour un album que j’ai trouvé lumineux.

25/04/2024 (modifier)